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Informationen zum Dokument  BGer 1B_634/2011  Materielle Begründung
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BGer 1B_634/2011 vom 13.01.2012
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1B_634/2011
 
Arrêt du 13 janvier 2012
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Fonjallaz, Président, Aemisegger et Merkli.
 
Greffier: M. Kurz.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________, représentée par Me Angelo Ruggiero, avocat,
 
recourante,
 
contre
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens.
 
Objet
 
procédure pénale, qualité de partie plaignante, assistance judiciaire,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 4 octobre 2011.
 
Faits:
 
A.
 
Le 12 mai 2009, A.________ a déposé plainte pénale pour contrainte sexuelle contre B.________. Le 10 juin 2009, devant la police, elle a déclaré retirer sa plainte, expliquant n'avoir pas la force de continuer la procédure. Ce retrait a été confirmé le 17 août 2010 devant le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne.
 
Le 15 décembre 2010, le prévenu a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne. Par prononcé du 14 avril 2011, le Président de ce tribunal a refusé de désigner un conseil d'office à la victime, considérant que la cause était simple et que l'indigence n'était pas démontrée. Le recours formé contre cette décision a été déclaré irrecevable par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois, le 17 mai 2011. Le 1er juillet 2011, le Président a désigné à la victime un conseil d'office, en application de la loi vaudoise d'application de la LAVI (LVLAVI).
 
La cause a été ensuite transmise au Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne. Par décision du 16 septembre 2011, la Présidente de ce tribunal a constaté que A.________ avait retiré sa plainte sans se constituer partie civile, et avait par conséquent perdu sa qualité de partie à la procédure. Elle n'avait dès lors plus droit à l'assistance judiciaire, la LVLAVI ayant été abrogée à l'entrée en vigueur du CPP, et son défenseur d'office a été relevé de sa mission.
 
B.
 
Par arrêt du 4 octobre 2011, la Chambre des recours pénale a rejeté, tout en mettant en doute sa recevabilité, le recours formé contre cette décision. En dépit de sa qualité de victime LAVI, l'intéressée ne s'était pas constituée partie plaignante comme l'exige l'art. 118 CPP. Ne pouvant participer à la procédure, elle n'avait pas non plus droit à un conseil d'office.
 
C.
 
Par acte du 7 novembre 2011, A.________ forme un recours en matière pénale par lequel elle demande l'annulation de l'arrêt cantonal et reprend les conclusions de son recours cantonal tendant à l'annulation de la décision du 16 septembre 2011, à la reconnaissance de sa qualité de partie dans la procédure pénale et au maintien de l'assistance judiciaire qui lui a été accordée le 1er juillet 2011.
 
La cour cantonale se réfère à son arrêt.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La décision attaquée confirme le refus de reconnaître à la recourante la qualité de partie à la procédure. Il s'agit d'une décision en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF.
 
1.1 Pour la partie concernée, définitivement écartée de la procédure, la décision attaquée a un caractère final et émane de l'autorité cantonale de dernière instance (art. 80 LTF). La recourante a agi en temps utile (art. 100 al. 1 LTF).
 
1.2 Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, le recourant doit alléguer les faits propres à fonder sa qualité pour recourir (cf. ATF 133 II 353 consid. 1 p. 356, 249 consid. 1.1 p. 251).
 
En l'occurrence, la recourante ne se prononce pas sur les prétentions civiles qu'elle entend élever. Toutefois, il apparaît que le recours porte exclusivement sur des questions formelles (recevabilité du recours cantonal, qualité de partie à la procédure, octroi de l'assistance judiciaire), soit sur des violations de droits de partie à la procédure équivalant à un déni de justice formel (ATF 136 IV 41 consid. 1.4 p. 44, 29 consid. 1.9 p. 40; 133 IV 228 consid. 2.3.2 p. 232 s. et les références citées). Il y a donc lieu d'entrer en matière, indépendamment de la qualité pour agir de la recourante sur le fond.
 
2.
 
Dans un premier grief, la recourante estime que la recevabilité de son recours cantonal ne pouvait être mise en doute par la Chambre des recours. Même si l'art. 393 al. 1 let. b CPP exclut les recours contre les décisions rendues par la direction de la procédure de première instance, il y avait lieu d'entrer en matière sur la question de l'exclusion d'une partie à la procédure, puisque cette dernière ne pourrait plus contester ultérieurement ce prononcé comme le prévoit l'art. 65 CPP.
 
Comme le relève la recourante, une décision telle que le refus de la qualité de partie plaignante, doit pouvoir être contestée immédiatement puisque les effets d'une telle décision ne sont pas susceptibles d'être réparés par la suite (Basler Kommentar BGG, 2011, n° 23 ad art. 79; Basler Kommentar StPO, n° 13 ad art. 393). La question de savoir si cela doit se faire par le biais de la contestation prévue à l'art. 65 al. 2 CPP ou en saisissant directement l'autorité de recours peut demeurer indécise, puisque la cour cantonale a examiné le recours sur le fond.
 
3.
 
La recourante rappelle que la procédure d'instruction s'est achevée le 15 décembre 2010 sous l'empire de l'ancien droit - cantonal - de procédure pénale. La qualité de partie de la recourante devrait s'examiner selon l'ancien droit, et notamment la LAVI. On ne saurait lui reprocher de n'avoir pas fait, à ce moment, la déclaration exigée par l'art. 118 CPP.
 
3.1 Selon l'art. 118 CPP, on entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure comme demandeur au pénal ou au civil (al. 1). Une plainte pénale équivaut à une telle déclaration (al. 2). La déclaration doit être faite devant une autorité de poursuite pénale avant la clôture de l'instruction préliminaire (al. 3). Si le lésé n'a pas fait spontanément de déclaration, le ministère public attire son attention dès l'ouverture de la procédure préliminaire sur le droit d'en faire une (al. 4).
 
Selon le CPP, la notion de partie plaignante se distingue de celle de simple lésé (art. 115 CPP) et de celle de victime (art. 116 et 117 CPP). Elle suppose une volonté de participer à la procédure, manifestée auprès de l'autorité de poursuite afin de demander la condamnation pénale de l'auteur ou de faire valoir des conclusions civiles (art. 119 al. 2 CPP). La simple qualité de victime au sens de la LAVI n'est pas suffisante. La manifestation de volonté peut résulter du dépôt de la plainte pénale, mais peut aussi se faire par écrit ou oralement (art. 119 al. 1 CPP).
 
3.2 En l'occurrence, la recourante s'est vu reconnaître la qualité de partie à la procédure, malgré le retrait de sa plainte pénale, en application des art. 8 et 37 aLAVI, qui permettaient alors à la victime au sens de cette loi d'intervenir dans la procédure. L'instruction a été close en 2010, et le renvoi en jugement du prévenu a été prononcé le 15 décembre 2010. La recourante, dont la qualité de partie n'était alors pas contestée, n'avait aucune raison de déclarer vouloir participer à la procédure pénale, au sens de l'art. 118 CPP, et l'on ne saurait lui reprocher l'absence d'une telle déclaration. L'art. 118 al. 4 CPP prévoit d'ailleurs que le lésé doit être préalablement interpelé par l'autorité de poursuite à ce sujet, ce qui n'a évidemment pas été le cas en l'occurrence.
 
3.3 Selon la disposition transitoire de l'art. 448 CPP, les procédures pendantes au moment de l'entrée en vigueur du CPP se poursuivent normalement selon le nouveau droit (al. 1). Toutefois, les actes de procédure ordonnés ou accomplis avant l'entrée en vigueur du CPP conservent leur validité (al. 2). Il doit en aller de même de la constitution de partie à la procédure, qui peut être assimilée à un acte de procédure dont les effets sont destinés à durer. Si l'autorité désirait mettre en doute la qualité de partie de la recourante, sur le vu du retrait de plainte et du changement de réglementation intervenu entretemps, il lui appartenait à tout le moins de l'interpeller préalablement à ce sujet et de lui laisser l'occasion de faire sa déclaration, comme l'exige l'art. 118 al. 4 CPP à l'égard du ministère public. Compte tenu de l'attitude procédurale de la recourante, sa volonté de participer à la procédure ne fait actuellement aucun doute.
 
3.4 Sur le vu de ce qui précède, la qualité de partie à la procédure pénale a été déniée à tort à la recourante. Il en résulte que le retrait de l'assistance judiciaire, fondé selon l'arrêt cantonal sur la seule perte de la qualité de partie, apparaît lui aussi injustifié.
 
4.
 
Le recours doit par conséquent être admis. L'arrêt attaqué est annulé, de même que le prononcé du 16 septembre 2011. La recourante conserve ainsi, avec un fondement juridique certes différent, sa qualité de partie, ainsi que le bénéfice de l'assistance judiciaire qui lui a été accordée le 1er juillet 2011. La recourante obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat. Elle a droit à des dépens, qui sont mis à la charge du canton de Vaud. Ceux-ci comprendront également l'indemnité à laquelle la recourante a droit pour la procédure cantonale (art. 68 al. 5 LTF). La demande d'assistance judiciaire est ainsi sans objet. Conformément à l'art. 66 al. 4 LTF., il n'est pas perçu de frais judiciaires.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis; l'arrêt attaqué est annulé, de même que le prononcé du 16 septembre 2011.
 
2.
 
Une indemnité de dépens de 2'500 fr. est allouée à la recourante pour les procédures devant le Tribunal fédéral et devant la Chambre des recours pénale, à la charge du canton de Vaud. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. La demande d'assistance judiciaire est sans objet.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Ministère public central et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
 
Lausanne, le 13 janvier 2012
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Fonjallaz
 
Le Greffier: Kurz
 
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