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Informationen zum Dokument  BGer 2C_143/2011  Materielle Begründung
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BGer 2C_143/2011 vom 27.09.2011
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
2C_143/2011
 
{T 0/2}
 
Arrêt du 27 septembre 2011
 
IIe Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Zünd, Président,
 
Karlen et Donzallaz.
 
Greffier: M. Dubey.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________ SA,
 
représentée par Me Paul Marville, avocat,
 
recourante,
 
contre
 
Service de l'emploi, rue Caroline 11, 1014 Lausanne.
 
Objet
 
Autorisation de pratiquer la location de services,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 10 janvier 2011.
 
Faits:
 
A.
 
X.________ SA (ci-après: l'intéressée) est une société anonyme dont le but est la gestion d'une agence de placement privé de personnel temporaire et fixe. Le 15 janvier 2004, le Service de l'emploi du canton de Vaud (ci-après: le Service de l'emploi) a délivré à l'intéressée une autorisation de pratiquer la location de services, établie au nom de A.________.
 
A l'occasion d'une visite de chantier le 30 octobre 2006, le Contrôle des chantiers de la construction dans le Canton de Vaud (ci-après: le Contrôle des chantiers) a constaté que B.________, ressortissant de Serbie-et-Monténégro, était employé par l'intéressée depuis le 6 juin 2006 alors qu'un délai échéant au mois de janvier 2006 avait été imparti à ce dernier pour quitter la Suisse et qu'aucune autorisation de séjour avec activité lucrative n'avait été délivrée dans l'intervalle. Le 13 décembre 2006, le Service de l'emploi a reçu une demande d'admission de travailleurs étrangers pour C.________, ressortissant de Serbie-et-Monténégro, qui travaillait pour le compte de l'intéressée depuis le 19 juillet 2006 déjà. Le 23 janvier 2007, le Service de l'emploi a reçu une même demande en faveur de D.________, de nationalité bolivienne, qui avait commencé à travailler pour le compte de l'intéressée le 19 avril 2006.
 
Le 28 mars 2007, se fondant sur les constatations qui précèdent, le Service de l'emploi a adressé à X.________ SA une sommation au sens de l'art. 55 al. 2 de l'ordonnance fédérale du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RO 1986 1791), l'avertissant qu'elle prendrait des sanctions en cas de commission d'une nouvelle infraction à la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 1 113). Celle-ci n'a pas contesté cette sommation.
 
A l'occasion d'une visite effectuée sur un chantier le 19 avril 2007, le Contrôle des chantiers a constaté que l'intéressée employait E.________, ressortissant du Kosovo, sans titre de séjour valable en Suisse. Invitée à fournir des explications, l'intéressée a transmis une copie d'une attestation d'établissement au nom de E.________ délivrée par le canton de Vaud qui comportait le numéro de référence "NE ******".
 
En mai 2007, le Service de l'emploi a reçu une demande d'admission de travailleurs étrangers en faveur de F.________, de nationalité chilienne, qui travaillait pour le compte de l'intéressée depuis le 8 janvier 2007 déjà.
 
Le 30 août 2007, le Service de l'emploi a décidé, au vu de ces nouveaux faits, de ne plus entrer en matière sur les demandes d'admission de travailleurs étrangers que X.________ SA pourrait être appelée à formuler pour une durée de deux mois. Cette décision n'a pas été contestée. Le Service de l'emploi a également dénoncé les faits auprès de la Préfecture du district de Lausanne.
 
A l'occasion d'une visite effectuée sur un chantier le 24 janvier 2008, le Contrôle des chantiers a constaté que G.________ et H.________, ressortissants de Serbie-et-Monténégro, travaillaient pour le compte de l'intéressée alors qu'ils n'étaient au bénéfice d'aucun titre de séjour valable en Suisse. Ces deux employés, qui avaient été prêtés à l'intéressée par I.________ SA, dont le directeur est J.________, et qu'elle avait placés en mission auprès de K.________ SA et L.________ SA, n'étaient ni immatriculés à l'AVS ni inscrits à la caisse de compensation de l'employeur. Dans le rapport, il est relevé que le directeur de l'intéressée confirme avoir loué les services de G.________ depuis le 7 juillet 2007 et ceux de H.________ depuis le 8 janvier 2008.
 
Par décision du 12 février 2008, le Service de l'emploi a facturé à l'intéressée les frais relatifs au contrôle des conditions de travail effectué le 24 janvier 2008. L'intéressée a recouru contre la décision du 12 février 2008 auprès du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Elle a conclu à son annulation. Elle a en outre requis la suspension de la cause administrative jusqu'à droit connu sur le plan pénal.
 
Le 28 avril 2008, le Service de l'emploi a décidé à compter de cette date de rejeter toute demande d'admission de travailleurs étrangers formulée par l'intéressée pour une durée de trois mois et dénoncé le directeur de celle-ci auprès de la Préfecture du district de Lausanne. L'intéressée a déposé deux recours contre les décisions des 12 février et 28 avril 2008 auprès du Tribunal cantonal du canton de Vaud, qui les a rejetés par arrêt du 27 avril 2009. Par arrêt du 16 novembre 2009, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par l'intéressée contre l'arrêt rendu le 27 avril 2009.
 
Par jugement du 8 juin 2010, le Tribunal de police a constaté que A.________ s'était rendu coupable d'une part de contravention à l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers et à la loi fédérale du 6 octobre 1989 sur le service de l'emploi et la location de services (LSE; RS 823.11) en engageant entre les mois de février 2007 et d'août 2008 M.________, ressortissant serbe sans titre de séjour valable en Suisse et qui faisait l'objet d'une interdiction d'entrée et de séjour, d'autre part de conduite en état d'ébriété qualifiée, et l'a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, le jour-amende étant fixé à 200 fr., avec sursis pendant trois ans ainsi qu'à une amende de 4'000 fr., la peine de substitution à défaut de paiement étant de 20 jours de peine privative de liberté. Pour le surplus, le Tribunal de police a constaté que les contraventions concernant l'engagement de D.________, B.________, C.________, E.________ et F.________ étaient atteintes par la prescription.
 
B.
 
Par décision du 13 juillet 2010, le Service de l'emploi a retiré l'autorisation de pratiquer la location de services délivrée à l'intéressée le 15 janvier 2004, lui a imposé à cette société un délai d'attente de deux ans avant de déposer une nouvelle demande d'autorisation et fait interdiction à A.________ d'exercer pour son compte de quelconques activités en relation avec la LSE ou de déposer, dans un délai d'attente de deux ans, une demande d'autorisation en relation avec la LSE.
 
Le 14 juillet 2010, l'intéressée a recouru contre la décision du 13 juillet 2010. Par décision du 22 juillet 2010, le juge instructeur a restitué l'effet suspensif au recours. A.________ n'a pas recouru contre la décision du 13 juillet 2010.
 
C.
 
Par arrêt du 10 janvier 2011, le Tribunal cantonal a partiellement admis le recours. Il a réformé la décision du 13 juillet 2010 en ce sens que X.________ SA n'avait le droit de déposer une nouvelle demande d'autorisation qu'après échéance d'un délai d'attente d'une année, de façon à respecter le principe de proportionnalité.
 
D.
 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________ SA demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt rendu le 10 janvier 2011 dans le sens qu'aucune sanction ni aucun délai ne lui est adressé et que son autorisation est maintenue. Elle se plaint de la violation de son droit d'être entendue, du principe ne bis in idem et du principe de proportionnalité.
 
Le Tribunal cantonal et le Service de l'emploi ont renoncé à déposé des observations.
 
E.
 
Par ordonnance du 28 mars 2011, le Président de la IIe Cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif déposée par l'intéressée.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), le recours en matière de droit public est en principe recevable.
 
2.
 
Invoquant l'art. 29 al. 2 Cst., la recourante reproche au Service de l'emploi d'avoir violé son droit d'être entendue (mémoire de recours, ch. 10 let. a).
 
Ce grief est irrecevable. Seul peut faire l'objet de la présente procédure l'arrêt rendu le 10 janvier 2011 par le Tribunal cantonal, qui a, par ailleurs, exposé en quoi le droit d'être entendue de la recourante n'avait pas été violé respectivement avait été guéri en procédure de recours devant lui (arrêt attaqué, consid. 1b).
 
3.
 
La recourante soutient en substance que les faits à l'origine des arrêts rendus le 27 avril 2009 par le Tribunal cantonal et le 16 novembre 2009 par le Tribunal fédéral, c'est-à-dire l'engagement de travailleurs au noir à des dates antérieures au 16 novembre 2009, ne peuvent fonder ni la décision rendue le 13 juillet 2010 par le Service de l'emploi ni l'arrêt attaqué sans violer le principe ne bis in idem.
 
Selon la jurisprudence, le principe ne bis in idem, qui est un corollaire de l'autorité de chose jugée, interdit qu'une personne soit pénalement poursuivie deux fois pour les mêmes faits. L'autorité de chose jugée et le principe "ne bis in idem" supposent qu'il y ait identité de l'objet de la procédure, de la personne visée et des faits retenus (ATF 123 II 464 consid. 2b p. 466; 120 IV 10 consid. 2b p. 12 s.; 118 IV 269 consid. 2 p. 271).
 
En l'espèce, la recourante ne démontre pas en quoi la révocation d'une autorisation administrative pour une durée d'une année en application des art. 16 LSE et 44 al. 1 de l'ordonnance fédérale sur le service de l'emploi et la location de services (ordonnance sur le service de l'emploi, OSE; RS 823.111), objet de la présente procédure, ni en quoi la condamnation au paiement des frais relatifs au contrôle des conditions de travail effectué le 24 janvier 2008 ainsi que le refus de toute demande d'admission de travailleurs étrangers formulée par l'intéressée pour une durée de trois mois, objets des décisions des 12 février et 28 avril 2008, constitueraient des sanctions pénales. Son grief est par conséquent irrecevable.
 
4.
 
Enfin, réitérant un grief qu'elle a déjà formulé devant le Tribunal cantonal, la recourante est d'avis, au vu de son comportement irréprochable depuis deux ans, qu'une révocation même réduite à une année reste disproportionnée.
 
4.1 Le principe de la proportionnalité figurant à l'art. 5 al. 2 Cst. n'est pas un droit fondamental, mais simplement un principe constitutionnel. Comme le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit fédéral en général (art. 95 let. a LTF), il est possible d'invoquer le principe de la proportionnalité directement et indépendamment d'un droit fondamental (ATF 134 I 153 consid. 4.1 p. 156 s. et les références).
 
4.2 En l'espèce, le Tribunal cantonal a retenu que la recourante n'avait plus fait l'objet de nouvelles procédures administratives ou pénales depuis 2008 et jugé qu'un retrait de l'autorisation de pratiquer la location de services de deux ans, soit la durée maximale prévue par la loi était disproportionnée au vu de l'ensemble des circonstances. Une réduction à une année paraissait appropriée.
 
Le grief de la recourante doit être écarté. En effet, sous couvert de la violation du principe de proportionnalité, cette dernière tente en vain de faire oublier que, depuis qu'elle pratique la location de services, elle a enfreint à de multiples reprises et de manière avérée les prescriptions en matière d'engagement de ressortissants étrangers en employant régulièrement des étrangers qui ne disposaient pas des autorisations de travail requises. C'est par conséquent à bon droit que l'instance précédente a fait application de l'art. 16 al. 1 let. b LSE qui prévoit que l'autorisation est retirée lorsque le bailleur de services enfreint de manière répétée ou grave des dispositions impératives ressortissant à la protection des travailleurs, la LSE ou ses dispositions d'application, en particulier les dispositions fédérales ou cantonales relatives à l'admission des étrangers et prononcé une sanction d'une année, dont la durée, au vu des faits reprochés à la recourante, est conforme au principe de proportionnalité.
 
5.
 
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en matière de droit public dans la mesure où il est recevable. Succombant, la recourante doit supporter un émolument judiciaire (art. 65 et 66 LTF). Elle n'a pas droit à des dépens (art. 68 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service de l'emploi et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public.
 
Lausanne, le 27 septembre 2011
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Zünd
 
Le Greffier: Dubey
 
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