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Informationen zum Dokument  BGer 6B_22/2011  Materielle Begründung
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BGer 6B_22/2011 vom 23.05.2011
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6B_22/2011
 
Arrêt du 23 mai 2011
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Mathys, Président,
 
Schneider et Jacquemoud-Rossari.
 
Greffier: M. Rieben.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________, représenté par Me Xavier-Marcel Copt, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
1. Procureur général du canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
 
2. Hospice général, cours de Rive 12, 1204 Genève,
 
intimés.
 
Objet
 
Escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP),
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale, du 22 novembre 2010.
 
Faits:
 
A.
 
Par jugement du 12 octobre 2009, le Tribunal de police de la République et Canton de Genève a reconnu X.________ coupable d'escroquerie par métier et l'a condamné à une peine privative de liberté de 15 mois, sous déduction de la détention subie avant jugement, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans. Il a en outre ordonné la saisie d'un compte bancaire et a alloué le solde des avoirs déposés à l'Hospice général, partie civile, dont il a réservé, pour le surplus, les droits.
 
B.
 
Sur appel du condamné, la Chambre pénale de la Cour de justice a confirmé ce jugement par arrêt du 22 novembre 2010, se fondant sur les principaux éléments de fait suivants.
 
B.a Le 16 juillet 2001, X.________, né en 1946, a sollicité de l'Hospice général le bénéfice du revenu minimum cantonal d'aide sociale (RMCAS) pour chômeurs en fin de droit. A l'appui de sa demande, il a produit une lettre de l'Office cantonal de l'emploi et un décompte d'indemnités chômage dont il résultait que le délai-cadre applicable à la période d'indemnisation arrivait à échéance le 19 septembre 2001. L'Hospice général lui a servi des prestations mensuelles dès le mois d'octobre 2001.
 
B.b N'ayant pas reçu les justificatifs requis relatifs à un montant de 93'060 francs, versé par une fondation de libre-passage, figurant à titre de fortune dans l'avis de taxation 2006 de X.________, l'Hospice général a diligenté une enquête le 1er octobre 2007. Celle-ci a révélé que l'intéressé avait exercé un emploi salarié depuis le 1er janvier 2001, lequel lui avait rapporté des revenus réguliers, soit jusqu'à 103'231 francs en 2003. Il possédait en outre un dépôt-titres et trois véhicules étaient immatriculés à son nom auprès du Service cantonal des automobiles et de la navigation.
 
C.
 
X.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il invoque une violation de l'art. 146 CP et conclut, principalement, à sa condamnation à une amende n'excédant pas 20'000 francs en vertu de l'art. 55 de la loi du 22 mars 2007 sur l'aide sociale individuelle (LASI; RS/GE J 4 04) et, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite en outre l'octroi de l'assistance judiciaire.
 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le recourant, qui a réclamé son acquittement du chef d'infraction à l'art. 146 CP devant la Chambre pénale, conclut en instance fédérale à sa condamnation en vertu de l'art. 55 LASI. Cette conclusion est irrecevable puisque nouvelle (art. 99 al. 2 LTF). Le recourant a toutefois également conclu, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision, soit, implicitement, à la réforme de l'arrêt attaqué dans le sens de son acquittement, ainsi que cela ressort de son argumentation.
 
2.
 
Le recourant admet avoir trompé l'Hospice général quant à sa situation financière en ne déclarant pas disposer d'un emploi lui procurant des revenus réguliers ainsi que d'une fortune. Il fait cependant valoir à l'appui de son recours que l'Hospice général n'a pas procédé aux vérifications élémentaires qui lui incombaient, conformément à ce que prévoit la loi cantonale sur l'aide sociale individuelle. Il n'avait produit aucun faux document, ni recouru à une mise en scène telle que sa tromperie puisse être qualifiée d'astucieuse au sens de l'art. 146 CP.
 
2.1 Aux termes de l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, a astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'a astucieusement confortée dans son erreur et a de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. L'escroquerie consiste à tromper la dupe. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit cependant pas; il faut qu'elle soit astucieuse.
 
2.1.1 Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 CP, lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 133 IV 256 consid. 4.4.3 p. 264; 128 IV 18 consid. 3a p. 20). L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait preuve de la plus grande diligence ou qu'elle ait recouru à toutes les mesures possibles pour éviter d'être trompée. L'astuce n'est exclue que si elle n'a pas procédé aux vérifications élémentaires que l'on pouvait attendre d'elle au vu des circonstances. Une co-responsabilité de la dupe n'exclut toutefois l'astuce que dans des cas exceptionnels (ATF 135 IV 76 consid. 5.2 p. 81).
 
2.1.2 Ces principes sont également applicables en matière d'aide sociale. L'autorité agit de manière légère lorsqu'elle n'examine pas les pièces produites ou néglige de demander à celui qui requiert des prestations les documents nécessaires afin d'établir ses revenus et sa fortune, comme par exemple sa déclaration fiscale, une décision de taxation ou des extraits de ses comptes bancaires. En revanche, compte tenu du nombre de demandes d'aide sociale, une négligence ne peut être reprochée à l'autorité lorsque les pièces ne contiennent pas d'indice quant à des revenus ou à des éléments de fortune non déclarés ou qu'il est prévisible qu'elles n'en contiennent pas (arrêts 6B_576/2010 du 25 janvier 2011 consid. 4.1.2; 6B_689/2010 et 6B_690/2010 du 25 octobre 2010 consid. 4.3.4; cf. également arrêts 6B_409/2007 du 9 octobre 2007 consid. 2.2 et 6B_558/2009 du 26 octobre 2009 consid. 1.2).
 
2.2 Le recourant a fourni à l'appui de sa demande d'aide sociale des documents émanant d'autorités administratives attestant du fait qu'il ne percevrait plus d'indemnités de l'assurance chômage dès le 19 septembre 2001. Compte tenu de leur nature, de tels documents jouissaient d'une force probante suffisante pour permettre à l'Hospice général de retenir, sans qu'il doive procéder à des vérifications supplémentaires, que le recourant était sans emploi et que les prestations qu'il percevait ne lui seraient plus servies après la date indiquée.
 
Le recourant a, par la suite, régulièrement fourni la liste de ses recherches d'emploi et a renouvelé chaque année sa demande de prestations, comportant son engagement à fournir tous les renseignements utiles concernant sa situation personnelle et financière ainsi que toute modification de celle-ci. Cet engagement n'est pas simplement moral, mais concrétise une obligation légale (cf. art. 11 al. 1 de la loi du 18 novembre 1994 sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit [LRMCAS; RS/GE J 2 25]). A nouveau, l'autorité n'avait pas de motif de douter de la véracité des indications qui lui étaient fournies par le recourant. Elle n'avait en particulier pas à s'étonner spécialement du fait que celui-ci reste sans emploi dans la mesure où une telle situation n'est pas exceptionnelle, et pouvait s'expliquer en l'espèce notamment par l'âge de l'intéressé qui ne rend pas aisée sa réinsertion. En l'absence d'indice lui permettant de suspecter une modification du droit du recourant à bénéficier des prestations servies, elle n'avait dès lors pas à procéder à des vérifications particulières. L'Hospice général a en revanche requis des explications lorsqu'il a constaté, à la lecture de l'avis de taxation 2006 du recourant, la mention d'un montant de 93'060 francs à titre de fortune. Sa réaction démontre qu'il examinait les pièces qui lui étaient remises avec une attention suffisante.
 
Il ressort en outre des constatations cantonales que les pièces produites, ou celles sur lesquelles une vérification simple aurait pu porter, ne reflétaient pas la véritable situation financière du recourant et que leur examen n'aurait pas permis de déjouer la tromperie. Celle-ci n'a en effet pu être découverte qu'au terme d'une enquête ayant nécessité d'interroger l'employeur du recourant, connu au travers de l'étude de son compte AVS, divers établissements bancaires - alors que le recourant avait uniquement déclaré être titulaire d'un compte postal - et le service des automobiles et de la navigation. Il s'agit toutefois là de moyens qui vont au-delà de ce qui peut être exigé de l'autorité lors du traitement d'une demande ordinaire.
 
Enfin, l'art. 32 LASI, invoqué par le recourant, dispose que le demandeur doit autoriser l'Hospice général à prendre des informations à son sujet qui sont nécessaires pour déterminer son droit à des prestations (al. 2) et se soumettre à une enquête de l'Hospice général lorsque celui-ci le demande (al. 3). Il est par ailleurs prévu que les autorités administratives et judiciaires, les employeurs et les organismes s'occupant du bénéficiaire et des membres du groupe familial fournissent gratuitement à l'Hospice général, sur demande écrite et motivée, les renseignements qui lui sont nécessaires pour fixer des prestations et prévenir des versements indus (art. 49 al. 1 let. a et c LASI). Des dispositions similaires figurent dans la loi sur les prestations cantonales accordées aux chômeurs en fin de droit (cf. art. 34 al. 1 LRMCAS). Elles ne font toutefois que prévoir, en faveur de l'autorité, des moyens afin de lui permettre, si nécessaire, de déterminer le droit aux prestations d'un demandeur, mais elles n'imposent à celle-ci aucune obligation à sa charge quant à la manière dont elle doit traiter les demandes qui lui sont soumises. Il ne peut ainsi nullement en être déduit que l'Hospice général aurait fait preuve de négligence du seul fait qu'il n'a pas procédé, compte tenu des éléments en sa possession, à une enquête auprès du recourant ou d'autres autorités.
 
En définitive, aucun élément dans la situation du recourant ne devait amener l'Hospice général à penser que celui-ci lui cachait des indications pertinentes pour décider de l'octroi de prestations financières et il pouvait dès lors s'abstenir de procéder à des investigations supplémentaires. Le recourant ne pouvait ignorer l'impossibilité pour l'autorité de procéder à des vérifications pour chaque demande qui lui est soumise, et il n'est ainsi pas déterminant qu'il n'ait pas recouru à un édifice de mensonges. L'Hospice général n'ayant pas fait preuve de légèreté, c'est sans violer le droit fédéral que l'autorité cantonale a admis l'existence d'une astuce.
 
La cour cantonale a par ailleurs admis, à juste titre, que les autres conditions de réalisation de l'infraction à l'art. 146 al. 1 et 2 CP sont réalisées, ce que le recourant ne conteste pas. La décision attaquée ne viole donc pas le droit fédéral.
 
3.
 
Comme ses conclusions étaient manifestement dénuées de chance de succès, le recourant doit être débouté de sa demande d'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF a contrario). Le recourant supportera les frais de justice, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 et art. 66 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 francs, sont mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale.
 
Lausanne, le 23 mai 2011
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Le Greffier:
 
Mathys Rieben
 
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