VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer I 1093/2006  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer I 1093/2006 vom 03.12.2007
 
Tribunale federale
 
{T 7}
 
I 1093/06
 
Arrêt du 3 décembre 2007
 
IIe Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges U. Meyer, Président,
 
Kernen et Boinay, Juge suppléant.
 
Greffier: M. Piguet.
 
Parties
 
Office cantonal AI Genève, 97, rue de Lyon, 1203 Genève,
 
recourant,
 
contre
 
B.________,
 
intimée, représentée par Me Eric Maugué, avocat,
 
rue Marignac 14, 1206 Genève.
 
Objet
 
Assurance-invalidité,
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et Canton de Genève du 13 novembre 2006.
 
Faits:
 
A.
 
B.________, née en 1957, travaillait à temps complet en qualité d'aide-hospitalière à la Clinique X.________. A partir du mois de mai 2002, elle a réduit pour des raisons médicales son temps de travail à 60 % pour ne plus que travailler deux nuits par semaine comme veilleuse de nuit.
 
Le 18 juillet 2003, l'intéressée a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente. L'Office de l'assurance-invalidité de la République et canton de Genève (ci-après : l'office AI) a recueilli les renseignements utiles à l'instruction de l'affaire auprès des différents médecins traitants de l'assurée. Il en est ressorti que celle-ci souffrait notamment d'une fibromyalgie, de constipation chronique, d'un rétrocèle, d'un état dépressif et d'ostéoporose. Après avoir soumis le cas pour appréciation à son service médical régional (SMR), l'office AI a, par décision du 15 février 2005, dénié le droit de l'assurée à des prestations de l'assurance-invalidité, motif pris que les atteintes à la santé présentées n'étaient pas susceptibles de diminuer sa capacité de travail. A la suite à l'opposition formée par l'assurée contre cette décision, l'office AI a confié la réalisation d'un examen psychiatrique au docteur C.________, psychiatre officiant pour le compte du SMR, lequel a conclu à l'absence de limitations fonctionnelles psychiatriques invalidantes (rapport du 13 avril 2006). Par décision du 18 mai 2006, l'office AI a rejeté l'opposition formée par l'assurée.
 
B.
 
B.________ a déféré cette décision au Tribunal des assurances sociales de la République et canton de Genève et produit en cours de procédure une expertise psychiatrique privée établie par le docteur O.________ (rapport du 22 août 2006). Par jugement du 13 novembre 2006, le Tribunal a admis le recours et alloué à l'assurée un quart de rente d'invalidité à compter du 7 mai 2003.
 
C.
 
L'office AI a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement dont il a demandé l'annulation.
 
B.________ a conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales en a proposé l'admission.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
 
2.
 
2.1 Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance- invalidité, de sorte que le Tribunal fédéral examine uniquement si l'autorité cantonale de recours a violé le droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Il revoit d'office l'application du droit fédéral sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). Lorsque le recours est dirigé contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision attaquée, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure. Au surplus, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 132 al. 2 OJ [dans sa teneur selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI, en vigueur depuis le 1er juillet 2006], en relation avec les art. 104 et 105 al. 2 OJ).
 
2.2 Dans un arrêt récent (ATF 132 V 393), le Tribunal fédéral a posé les principes relatifs à son pouvoir d'examen en matière d'évaluation de l'invalidité, à la suite de l'entrée en vigueur de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI. Conformément à ces principes, les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent de questions de fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint. Dans la mesure cependant où il en va de l'évaluation de l'exigibilité d'une activité professionnelle au regard de l'expérience générale de la vie, il s'agit en revanche d'une question de droit qui peut être examinée librement en instance fédérale; il en va ainsi des conclusions tirées de l'expérience médicale, comme par exemple, la présomption que les troubles somatoformes douloureux ou un autre syndrome semblable dont l'étiologie est incertaine et leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65 consid. 4.2.1 p. 70 et les arrêts cités, 393 consid. 3.2 p. 398 et les arrêts cités).
 
3.
 
3.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 102 V 165; arrêt I 138/98 du 31 janvier 2000, consid. 2b et les références, publié in: VSI 2001 p. 223; cf. aussi ATF 127 V 294 consid. 4c in fine p. 298).
 
3.2 La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique, soit aussi de troubles somatoformes douloureux persistants, suppose d'abord la présence d'un diagnostic émanant d'un expert (psychiatre) et s'appuyant lege artis sur les critères d'un système de classification reconnu (ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6 p. 398). Comme pour toutes les autres atteintes à la santé psychique, le diagnostic de troubles somatoformes douloureux persistants ne constitue pas encore une base suffisante pour conclure à une invalidité. Au contraire, il existe une présomption que les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible. Le caractère non exigible de la réintégration dans le processus de travail peut résulter de facteurs déterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendent la personne incapable de fournir cet effort de volonté. Dans un tel cas, en effet, l'assuré ne dispose pas des ressources nécessaires pour vaincre ses douleurs. La question de savoir si ces circonstances exceptionnelles sont réunies doit être tranchée de cas en cas à la lumière de différents critères. Au premier plan figure la présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée. Peut constituer une telle comorbidité un état dépressif majeur (ATF 130 V 352 consid. 3.3.1 in fine p. 358; voir aussi arrêt I 805/04 du 20 avril 2006, consid. 5.2.1 et les références). D'autres critères peuvent être déterminants. Ce sera le cas des affections corporelles chroniques, d'un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémission durable (symptomatologie inchangée ou progressive), d'une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, d'un état psychique cristallisé, sans évolution possible au plan thérapeutique, résultant d'un processus défectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagement du point de vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie), de l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art (même avec différents types de traitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée (ATF 130 V 352). Plus ces critères se manifestent et imprègnent les constatations médicales, moins on admettra l'exigibilité d'un effort de volonté (Meyer-Blaser, Der Rechtsbegriff der Arbeitsunfähigkeit und seine Bedeutung in der Sozialversicherung, in: Schmerz und Arbeitsunfähigkeit, St. Gall 2003, p. 77).
 
Si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (voir Kopp/Willi/Klipstein, Im Graubereich zwischen Körper, Psyche und sozialen Schwierigkeiten, in: Schweizerische Medizinische Wochenschrift 1997, p. 1434, avec référence à une étude approfondie de Winckler et Foerster; voir sur l'ensemble du sujet ATF 131 V 49).
 
3.3 Dans un arrêt récent (ATF 132 V 65), le Tribunal fédéral a considéré que la fibromyalgie présentait de nombreux points communs avec les troubles somatoformes douloureux, de sorte qu'il se justifiait, sous l'angle juridique, et en l'état actuel des connaissances, d'appliquer par analogie les principes développés par la jurisprudence en matière de troubles somatoformes douloureux, lorsqu'il s'agissait d'apprécier le caractère invalidant d'une fibromyalgie.
 
4.
 
En l'espèce, il n'est pas contesté que l'assurée souffre d'un syndrome douloureux, nommé tantôt syndrome douloureux somatoforme persistant, tantôt fibromyalgie, et qu'elle ne présente pas une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée. Le litige porte sur le point de savoir si, à la lumière des critères dégagés par la jurisprudence, l'assurée est en mesure de fournir l'effort de volonté raisonnablement exigible en vue de surmonter les effets de sa symptomatologie douloureuse. Il s'agit-là d'une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement.
 
5.
 
5.1 Les premiers juges ont estimé qu'à l'exception du critère relatif à la perte d'intégration sociale, les autres critères se manifestaient à un degré suffisant pour que l'on ne puisse exiger de l'assurée qu'elle exerce une activité lucrative allant au-delà de son temps de travail actuel.
 
5.2 En l'occurrence, il convient d'admettre l'existence d'affections corporelles chroniques (cervico-dorsalgies et symptomatologie digestive) qui, sans avoir pour elle-mêmes un caractère invalidant, perturbent depuis de nombreuses années le fonctionnement personnel et professionnel de l'assurée. De même convient-il de suivre la juridiction cantonale lorsque celle-ci estime que l'assurée ne subit pas de perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de sa vie. Malgré un retrait social marqué, l'assurée bénéficie d'une vie familiale conservée et est en mesure d'exercer, certes à temps partiel, une activité professionnelle qui nécessite des compétences relationnelles importantes.
 
Pour le reste, l'argumentation des premiers juges ne convainc pas. Lorsqu'ils considèrent, à la la lumière d'éléments biographiques difficiles (attouchements sexuels durant l'enfance, harcèlement moral sur le lieu de travail ayant entraîné un état dépressif réactionnel avec tentative de suicide médicamenteuse, violences conjugales), que l'assurée présente un état psychique cristallisé, ils émettent des considérations qui ressortissent au domaine médical et qui ne sont corroborées par aucune pièce médicale versée au dossier. Ni le docteur C.________ (rapport du 13 avril 2006) ni le docteur O.________ (rapport du 22 août 2006) ne mettent en évidence d'éléments plaidant pour l'existence actuelle chez l'assurée d'un conflit intra-psychique permettant d'expliquer la persistance du syndrome douloureux. De même, les explications de la doctoresse U.________ restent trop sommaires pour que l'on puisse admettre la réalisation de ce critère (rapport du 18 octobre 2005). On ne saurait par ailleurs considérer que la symptomatologie présentée actuellement par l'assurée ne serait plus susceptible d'évolution sur le plan thérapeutique, comme le soutiennent pourtant les docteurs U.________ et O.________ (rapports des 18 octobre 2005 et 22 août 2006). Certes l'assurée bénéficie, sans effets apparents, d'une psychothérapie de soutien à raison d'une séance toutes les trois semaines auprès de la doctoresse U.________ depuis le mois de janvier 2004. Il ressort cependant des constatations de fait de la Cour cantonale que l'assurée n'a guère suivi le traitement médicamenteux antidépresseur qui lui a été régulièrement prescrit, par crainte d'effets secondaires importants malgré les bénéfices qu'il pouvait apporter (rapports de la doctoresse U.________ du 29 septembre 2003 et du professeur G.________ du 4 octobre 2005). De même, les suggestions thérapeutiques faites par les docteurs U.________ (thérapie cognitivo-comportementale) et G.________ (approche multidisciplinaire) n'ont pas été mises en oeuvre.
 
5.3 Sur le vu de ce qui précède, il apparaît que le trouble somatoforme ne se manifeste pas avec une sévérité telle que, d'un point de vue objectif, la mise en valeur complète de la capacité de travail de l'assurée ne peut plus être raisonnablement exigée de sa part. L'appréciation du tribunal cantonal des assurances se révèle par conséquent contraire au droit fédéral (consid. 2.2). Bien fondé, le recours de l'office AI doit être admis.
 
6.
 
L'office AI obtient gain de cause. La procédure étant onéreuse (art. 134 OJ dans sa teneur en vigueur dès le 1er juillet 2006), les frais judiciaires sont à la charge de l'intimée, qui succombe (art. 156 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis et le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 13 novembre 2006 est annulé.
 
2.
 
Les frais de justice d'un montant de 500 fr. sont mis à la charge de l'intimée.
 
3.
 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 3 décembre 2007
 
Au nom de la IIe Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Le Greffier:
 
Meyer Piguet
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).