VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 1C_257/2007  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 1C_257/2007 vom 20.11.2007
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1C_257/2007
 
Arrêt 20 novembre 2007
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Féraud, Président,
 
Reeb et Eusebio.
 
Greffière: Mme Truttmann.
 
Parties
 
A.________,
 
recourante,
 
agissant par son curateur B.________,
 
contre
 
Cour de justice de la République et canton de Genève, Assistance juridique, case postale 3108,
 
1211 Genève 3.
 
Objet
 
assistance juridique,
 
recours contre la décision de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 2 août 2007.
 
Faits:
 
A.
 
Par ordonnance du 23 novembre 2006, le Tribunal tutélaire de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal tutélaire) a prononcé une mesure de curatelle volontaire en faveur de A.________ et désigné B.________ en tant que curateur de l'intéressée.
 
B.
 
A la fin du séjour de A.________ au département de psychiatrie de l'Hôpital cantonal, la Dresse C.________, cheffe de clinique, a déclaré cette dernière inapte à la conduite de tout véhicule à moteur et a transmis cette information au Service des automobiles et de la navigation de la République et canton de Genève (ci-après: le SAN).
 
Par décision du 30 mars 2007, le SAN a retiré à A.________ son permis de conduire pour une durée indéterminée, nonobstant recours, en application de l'art. 16d de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR). Il était précisé que la levée de la mesure ne pouvait être envisagée que sur présentation d'un certificat médical favorable émanant de la Dresse C.________.
 
C.
 
Le 5 avril 2007, A.________ a sollicité une assistance juridique pour recourir auprès du Tribunal administratif de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) contre la décision du SAN. Par prononcé du 25 avril 2007, le Vice-président du Tribunal de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal de première instance) a rejeté cette requête au motif que les démarches que A.________ entendait effectuer étaient dénuées de chances de succès.
 
Le 25 mai 2007, A.________ a simultanément recouru contre cette dernière décision auprès du Vice-président de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) et auprès du Tribunal administratif contre la décision du SAN du 30 mars 2007. Dans les deux cas, elle faisait valoir que la décision de retrait de permis avait été prise en violation de son droit d'être entendue.
 
Par décision du 2 août 2007, la Cour de justice a rejeté le recours de A.________, confirmant que les chances de cette dernière d'obtenir gain de cause auprès du Tribunal administratif étaient, à ce stade, pour le moins ténues.
 
D.
 
Agissant par la voie du recours constitutionnel, A.________, par l'intermédiaire de son curateur, demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Cour de justice du 2 août 2007. Elle se plaint d'arbitraire dans la constatation des faits ainsi que d'une violation de l'art. 29 al. 3 Cst. Elle requiert en outre l'assistance judiciaire.
 
La Cour de justice se réfère aux considérants de sa décision.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le présent recours est soumis aux règles de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), la décision attaquée ayant été rendue après le 1er janvier 2007 (art. 132 al. 1 LTF).
 
2.
 
Sous réserve d'hypothèses non pertinentes pour le cas (cf. art. 82 let. b et c LTF), le recours en matière de droit public n'est ouvert qu'à l'encontre des décisions rendues dans "des causes de droit public" (cf. art. 82 let. a LTF). Le facteur de rattachement déterminant par rapport à cette condition est le droit qui régit l'affaire au fond, à l'exception du droit de procédure (cf. message du 28 février 2001 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale in FF 2001 4000, p. 4117; arrêt 2C_18/2007 du 2 juillet 2007 consid. 2). Une décision est donc rendue dans une cause de droit public lorsque le droit (matériel) qui lui est applicable au fond appartient au droit public, même si, comme en l'espèce, la décision attaquée, de nature incidente, repose exclusivement sur le droit de procédure.
 
3.
 
La jurisprudence rendue à propos de l'art. 87 al. 2 OJ conserve en principe toute sa pertinence pour décider si une décision de nature incidente, comme dans le cas particulier, est de nature à causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (FF 2001 4000, p. 4131). En tant qu'elle confirme le refus d'assistance judiciaire opposé à la recourante, la décision attaquée remplit dès lors cette condition (cf. ATF 129 I 281 consid. 1.1 p. 283 s.; 129 I 129 consid. 1.1 p. 131; 126 I 207 consid. 2a p. 210 s.).
 
4.
 
Il s'ensuit que le présent recours, formé en temps utile et dans les formes prescrites (cf. art. 100 al. 1 et 106 al. 2 LTF), est recevable comme recours en matière de droit public pour violation du droit (constitutionnel) fédéral (art. 95 let. a LTF). Le recours constitutionnel, subsidiaire, est donc irrecevable (art. 113 LTF). A lui seul, l'intitulé erroné du mémoire ne nuit cependant pas à la recourante (ATF 126 II 506 consid. 1b p. 509 et les arrêts cités).
 
5.
 
Selon la recourante, la décision litigieuse serait arbitraire, car elle retiendrait des faits erronés. Il serait inexact qu'elle ne posséderait aucun véhicule car son père lui mettrait gracieusement à disposition sa propre voiture. Le SAN n'aurait par ailleurs jamais consulté la Dresse C.________, qui ne serait au demeurant pas son médecin-conseil.
 
5.1 Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Cette disposition lui donne la faculté de rectifier ou compléter d'office l'état de fait de l'arrêt attaqué dans la mesure où des lacunes ou erreurs dans l'établissement de celui-ci lui apparaîtraient d'emblée comme manifestes. Quant au recourant, il ne peut critiquer la constatation de faits importants pour le jugement de la cause que si ceux-ci ont été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire arbitraire (cf. Message, FF 2001 p. 4135). L'existence de faits constatés de manière inexacte n'est pas une condition suffisante pour conduire à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée. Il faut encore qu'elle soit susceptible d'avoir une influence déterminante sur l'issue de la procédure (art. 97 al. 1 in fine LTF). Le recourant doit donc rendre vraisemblable que la décision finale aurait été différente si les faits avaient été établis de manière conforme au droit (cf. Message, FF 2001 p. 4136).
 
5.2 La Cour de justice a effectivement retenu dans sa partie en fait que la recourante ne possédait aucun véhicule automobile. Outre le fait que cette constatation est en soi correcte, elle n'a cependant joué aucun rôle quant à l'issue de la contestation, de sorte que même une imprécision à cet égard demeurerait sans conséquence.
 
L'autorité cantonale a certes également retenu que le SAN avait consulté son médecin-conseil avant de prendre la mesure incriminée. Elle n'a cependant pas laissé entendre qu'il se fût agi de la Dresse C.________. Au demeurant, on discerne mal quel intérêt la recourante pourrait tirer d'un éventuel éclaircissement à ce sujet. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré d'une constatation arbitraire des faits doit être rejeté.
 
6.
 
Sur le fond, la recourante fait valoir qu'une carence psychologique n'emporterait pas ipso facto une inaptitude à conduire. La question de l'aptitude à la conduite automobile n'aurait d'ailleurs jamais été abordée lors de la procédure tutélaire, puisque elle y serait totalement étrangère. Son attention n'aurait pas davantage été attirée sur ce point lors de son hospitalisation dans le service de la Dresse C.________. Au surplus, la Cour de justice s'érigerait en juge du fond en requérant la démonstration matérielle de l'inexactitude de la décision du SAN.
 
6.1 Le droit à l'assistance judiciaire est régi au premier chef par le droit cantonal, dont le Tribunal fédéral ne contrôle l'application que sous l'angle de l'arbitraire, dans le cadre de l'art. 9 Cst. Pour le surplus, l'art. 29 al. 3 Cst. offre une garantie minimale en la matière, en ce sens qu'un plaideur dans le besoin est en droit d'obtenir l'assistance judiciaire s'il est engagé dans un procès non dénué de chances de succès; ce droit le dispense d'avancer ou de garantir les frais de la procédure, et il lui assure l'assistance d'un avocat si cela apparaît nécessaire à la défense de ses intérêts.
 
Pour prétendre à l'assistance judiciaire en vertu de l'art. 29 al. 3 Cst., le plaideur doit être indigent, c'est-à-dire ne pas pouvoir assumer les frais liés à la défense de ses intérêts sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille. Un procès est dénué de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre et qu'elles ne peuvent être considérées comme sérieuses, en sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais auxquels elle s'exposerait. Il ne l'est en revanche pas lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou que les perspectives de succès ne sont que légèrement inférieures (ATF 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135 s. et les références citées). Le Tribunal fédéral vérifie librement si les critères utilisés pour évaluer l'indigence du requérant, ou les chances de succès du procès, ont été correctement choisis; il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire les constatations de fait de l'autorité cantonale (ATF 129 I 129 consid. 2.1 p. 133; 127 I 202 consid. 3a p. 205; cf. aussi, ad art. 4 aCst., ATF 124 I 1 consid. 2 p. 2; 122 I 8 consid. 2 p. 9; 121 I 60 consid. 2a p. 61).
 
La recourante ne se réfère à aucune disposition de droit cantonal, de sorte que ses griefs doivent être examinés uniquement au regard l'art. 29 al. 3 Cst.
 
6.2 En l'espèce, la Cour de justice a estimé que la recourante ne pouvait pas affirmer que son droit d'être entendue n'avait pas été respecté, dès lors que l'instauration de sa curatelle volontaire - laquelle impliquait inévitablement toute une série de décisions de nature administrative, dont le retrait de son permis de conduire - avait été ordonnée après son audition par l'autorité compétente. Au demeurant, la recourante ne prétendrait pas être en possession d'un certificat médical susceptible d'infirmer le point de vue du professionnel ayant constaté son inaptitude à conduire.
 
6.3 Contrairement à l'opinion de la recourante, on ne saurait contester que la procédure de retrait de permis est liée aux motifs qui ont conduit au prononcé d'une mesure de curatelle volontaire. Le raisonnement adopté par la Cour cantonale pour nier l'existence de chances de succès de la recourante ne peut en revanche être suivi. En effet, comme le relève à juste titre cette dernière, l'instauration d'une curatelle volontaire n'entraîne pas nécessairement l'interdiction de conduire un véhicule. En requérant volontairement sa mise sous curatelle, la recourante n'a donc pas renoncé à ses droits dans le cadre d'une procédure administrative relative à un retrait de permis.
 
En l'espèce, il semble bien que la recourante n'ait absolument pas été entendue avant le prononcé de la décision litigieuse, ni par le SAN, ni par la Dresse C.________ qui a spontanément reporté le cas à l'autorité administrative. Son hospitalisation pendant environ un mois n'avait d'ailleurs pas été décidée pour évaluer son aptitude à la conduite d'un véhicule. Il apparaît donc que les chances de succès de la recourante devant le Tribunal administratif ne paraissent pas inexistantes sur ce point, même si on ne peut exclure que ce grief puisse être réparé par l'autorité de recours.
 
La recourante ne fait certes pas valoir qu'elle serait en possession d'un certificat médical prouvant son aptitude à la conduite automobile. Or, comme elle l'a déjà souligné dans ses précédentes écritures, son médecin traitant est la Dresse D.________. Son séjour au sein de l'établissement psychiatrique n'a duré que quelques semaines. Dans ces circonstances, on voit mal comment la recourante pourrait obtenir un nouveau certificat médical de la cheffe de clinique du département de psychiatrie de l'Hôpital cantonal. La décision de retrait de permis conditionne pourtant la levée de la mesure à la présentation d'un certificat émanant de ce seul médecin.
 
Dans ces conditions, il n'est pas exclu, qu'après avoir entendu la recourante, le Tribunal administratif ordonne au SAN de modifier sa décision. Il apparaît dès lors que la condition des chances de succès ne peut pas, en l'espèce, faire échec à l'octroi de l'assistance judiciaire.
 
7.
 
Il s'ensuit que le recours doit être admis et la cause renvoyée au Vice-président de la Cour de justice pour nouvelle décision. Cette dernière autorité veillera à vérifier que les autres conditions d'octroi de l'assistance juridique sont remplies. Il est statué sans frais et sans dépens. Dans ces conditions, la requête d'assistance judiciaire devient sans objet.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis et la décision attaquée annulée. L'affaire est renvoyée pour nouvelle décision dans le sens des considérants au Vice-président de la Cour de justice.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué au curateur de la recourante et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Assistance juridique.
 
Lausanne, le 20 novembre 2007
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: La Greffière:
 
Féraud Truttmann
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).