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Informationen zum Dokument  BGer 6B_335/2007  Materielle Begründung
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BGer 6B_335/2007 vom 05.10.2007
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6B_335/2007 /rod
 
Arrêt du 5 octobre 2007
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
MM. les Juges Schneider, Président,
 
Wiprächtiger et Favre.
 
Greffière: Mme Angéloz.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Sébastien Fanti, avocat,
 
contre
 
Ministère public du canton du Valais,
 
Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2.
 
Objet
 
Refus de suivre (soustraction de données, etc.),
 
recours en matière pénale contre la décision du Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale,
 
du 29 mai 2007.
 
Faits :
 
A.
 
En mai 2005, diverses sociétés informatiques américaines ont déposé, auprès du juge d'instruction valaisan, une plainte/dénonciation pénale, avec constitution de partie civile, contre X.________, pour violation des art. 67 et 69 de la loi fédérale sur le droit d'auteur et les droits voisins (LDA: RS 231.1) et pornographie (art. 197 CP). En substance, elles reprochaient au dénoncé d'avoir, en sa qualité d'administrateur du serveur "Razorback2", favorisé le piratage de leurs oeuvres cinématographiques protégées par copyright ainsi que l'échange de fichiers à contenu pornographique.
 
Dans le cadre de cette procédure, Me Y.________, au nom des sociétés précitées, a adressé, le 6 mars 2006, au juge d'instruction valaisan une liste statistique de films produits par ses mandantes et téléchargés grâce au serveur "Razorback2" au cours des 5 mois précédents. Le 1er mai 2006, elle a encore produit un mail de Z.________, employée de la société B.________, daté du 26 avril 2006, ainsi que sa pièce jointe, intitulée "Valais_IPs.xls", soit une liste de 30 adresses IP correspondant, selon les explications données, à des internautes de Sion et Martigny qui se seraient connectés au serveur "Razorback2" entre le 1er août 2005 et le 20 février 2006, afin d'échanger des films protégés par le droit d'auteur.
 
B.
 
Le 2 juin 2006, X.________ a déposé à son tour, auprès du juge d'instruction valaisan, une plainte/dénonciation pénale, avec constitution de partie civile, dirigée contre inconnu(s), pour soustraction de données (art. 143 CP), accès indu à un système informatique (art. 143bis CP), actes exécutés sans droit pour un Etat étranger (art. 271 CP) et violation de l'art. 34 de la loi fédérale sur la protection des données (LPD; RS 235.1). Il chiffrait provisoirement ses prétentions civiles à 100.000 fr., sans toutefois alléguer que sa propre adresse IP figurait dans la liste produite le 1er mai 2006 par Me Y.________.
 
Le 4 août 2006, le juge d'instruction a invité Me Y.________ à lui remettre, sur supports papier et informatique, le fichier Excel intitulé "Valais_IPs.xls", joint au mail de Z.________ du 26 avril 2006, ainsi que celui auquel il était fait référence comme "the large spreadsheets that I sent to you préviously". Simultanément, il lui a fait interdiction de modifier lesdits fichiers, tant sur leurs supports papier qu'informatique. Il a par ailleurs recueilli certaines informations auprès de l'Energie de Sion-Région SA et du Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence.
 
Par décision du 29 décembre 2006, le juge d'instruction a refusé de suivre à la plainte/dénonciation de X.________ et levé l'interdiction de modification des fichiers. En bref, il a considéré que les éléments constitutifs des infractions dénoncées par X.________ n'apparaissaient pas réalisés.
 
C.
 
X.________ a contesté le refus de suivre par une plainte auprès de la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan.
 
Par ordonnance du 19 janvier 2007, le Président de la Chambre pénale a suspendu, jusqu'à droit connu sur le sort de la plainte, la levée de l'interdiction de modifier les fichiers faite le 4 août 2006 à Me Y.________.
 
Par décision du 29 mai 2007, la Chambre pénale a déclaré la plainte irrecevable et levé la mesure présidentielle ordonnée le 19 janvier 2007. Elle a estimé que, s'agissant des infractions dénoncées, X.________ ne remplissait pas les conditions auxquelles un lésé peut porter plainte contre un refus de suivre.
 
D.
 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il invoque une violation des art. 46 ch. 4, 48 ch. 1 al. 2 et 4 et 168 du code de procédure pénale valaisan (CPP/VS), des art. 30, 143 al. 1, 143bis et 271 ch. 1 CP, des art. 11 et 34 al. 2 let. a LPD et de l'art. 8 CEDH. Il se plaint en outre d'une violation de l'art. 111 al. 1 LTF ainsi que d'arbitraire dans l'appréciation des preuves. Il conclut à l'annulation de la décision attaquée.
 
Parallèlement, X.________ a sollicité l'effet suspensif, en ce sens que l'exécution de la décision attaquée soit suspendue dans la mesure où elle lève la mesure ordonnée le 19 janvier 2007 par le Président de la Chambre pénale. Il a été fait droit à cette requête par ordonnance du 7 août 2007 de la Cour de droit pénal, dont une copie a été communiquée à Me Y.________.
 
Des déterminations sur le recours n'ont pas été requises.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
La décision attaquée, qui est finale (art. 90 LTF), a été rendue en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF), par une autorité cantonale de dernière instance (art. 80 al. 1 LTF). Elle peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 ss LTF).
 
Le recours peut notamment être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris les droits constitutionnels. Il doit être motivé (art. 42 al. 1 LTF) et sa motivation doit exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Les griefs mentionnés à l'art. 106 al. 2 LTF, soit ceux pris d'une violation des droits constitutionnels, du droit cantonal et du droit intercantonal, sont toutefois soumis à des exigences de motivation accrues, correspondant à celles qui résultaient de l'art. 90 al. 1 let. b OJ pour le recours de droit public (cf. arrêt 6B_178/2007, du 23 juillet 2007, consid. 1.4, destiné à la publication, et les références citées). Ils ne peuvent donc être examinés que si le recourant démontre de manière substantiée en quoi les dispositions qu'il invoque auraient été violées; à ce défaut, ils sont irrecevables (cf. ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261/262; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120, 185 consid. 1.6 p. 189).
 
2.
 
L'art. 81 al. 1 LTF confère la qualité pour former un recours en matière pénale à quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.
 
2.1 La lettre b de cette disposition dresse une liste de personnes auxquelles cette qualité est expressément reconnue, à savoir l'accusé (ch. 1), le représentant légal de l'accusé (ch. 2), l'accusateur public (ch. 3), l'accusateur privé, si, conformément au droit cantonal, il a soutenu l'accusation sans l'intervention de l'accusateur public (ch. 4), la victime, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (ch. 5) et le plaignant, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte (ch. 6). Cette liste, comme cela résulte déjà des termes "en particulier", n'est toutefois pas exhaustive. Une personne ne saurait donc se voir dénier la qualité pour recourir du seul fait qu'elle n'est pas expressément mentionnée dans cette liste. Il y a au contraire lieu de rechercher, dans chaque cas concret, si elle dispose d'un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.
 
2.2 Il est manifeste que le recourant n'est pas un accusateur privé au sens de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 4 LTF, ni, au vu des infractions qu'il a dénoncées, une victime au sens de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF, par quoi on entend une victime telle qu'elle est définie à l'art. 2 LAVI.
 
Le recourant ne peut non plus fonder sa qualité pour recourir sur l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF. Il ne pourrait se voir reconnaître la qualité de plaignant que pour deux des infractions dénoncées, à savoir celles qui sont réprimées par l'art. 143bis CP et par l'art. 34 LPD, dès lors que les deux autres, soit celles sanctionnées par l'art. 143 CP (sous réserve de son alinéa 2, qui n'entre pas en considération en l'espèce) et l'art. 271 CP, se poursuivent d'office (cf. ATF 128 IV 37 consid. 3 p. 38; 127 IV 185 consid. 2 p. 189). Toutefois, même pour les deux premières de ces infractions, il n'est pas légitimé à recourir sur la base de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF, dès lors que la contestation ne porte pas sur son droit de porter plainte. Le recourant ne s'est en effet pas vu dénier la qualité pour déposer plainte pénale, parce que les conditions des art. 30 ss CP ne seraient pas réunies, mais la qualité pour recourir en instance cantonale contre le refus de suivre, au motif qu'il ne remplirait pas les conditions auxquelles, selon le droit cantonal de procédure, un lésé peut contester un tel refus par un recours.
 
Il découle de ce qui précède que le recourant doit être considéré comme un simple lésé.
 
2.3 Le Tribunal fédéral a été amené à examiner la qualité du simple lésé pour former un recours en matière pénale dans deux arrêts récents, soit l'arrêt 6B_12/2007, du 5 juillet 2007, destiné à la publication, et l'arrêt 6B_10/2007, du 23 juillet 2007. Sur la base d'une analyse du texte légal, des travaux préparatoires et de la doctrine, il est parvenu à la conclusion que celui qui revêt la qualité de simple lésé n'est pas habilité à former un recours en matière pénale pour se plaindre, sur le fond, d'une décision relative à la conduite de l'action pénale, telle qu'un classement, un refus de suivre, un non-lieu ou un acquittement.
 
Cette jurisprudence, repose, en substance, sur les considérations suivantes. Sous le nouveau droit, comme sous l'ancien, la qualité pour recourir implique un intérêt juridique; l'intérêt général ou un intérêt de fait ne suffit pas. Or, l'action pénale, soit le droit de poursuivre et de punir les infractions, appartient exclusivement à l'Etat. Elle ne profite qu'indirectement au simple lésé, qui n'a en principe qu'un intérêt de fait à sa mise en oeuvre. Celui-ci n'a d'intérêt juridique à obtenir l'annulation d'une décision relative à la conduite de l'action pénale que si cette décision porte atteinte aux droits procéduraux, dont la violation équivaut à un déni de justice formel, qui lui sont reconnus par le droit cantonal ou qui découlent directement du droit constitutionnel. Il n'est donc habilité à recourir que pour se plaindre de la violation de tels droits, notamment de n'avoir pas été entendu ou de s'être vu refuser la qualité de partie à la procédure. Il ne peut remettre en cause, même de façon indirecte, la décision sur le fond, par exemple contester l'application de la loi matérielle ou se plaindre d'arbitraire dans l'appréciation des preuves (cf. arrêts 6B_12/2007 consid. 2 et 6B_10/2007 consid. 1 ainsi que les références citées).
 
2.4 Au vu de ce qui précède, seul est en l'espèce recevable, au regard de l'art. 81 al. 1 LTF, le grief fait à l'autorité cantonale d'avoir dénié au recourant la qualité pour recourir en violation du droit cantonal de procédure. Les moyens pris d'une violation de la loi pénale matérielle, d'une appréciation arbitraire des preuves ou encore d'une violation des art. 111 LTF et 8 CEDH sont irrecevables; pour la plupart, ils le sont au demeurant de toute manière faute d'être motivés, du moins par une argumentation spécifique.
 
3.
 
Le recourant invoque une application arbitraire de l'art. 168 CPP/VS en relation avec les art. 46 ch. 4 et 48 ch. 1 al. 2 et 4 CPP/VS. En bref, il fait valoir qu'il a rendu vraisemblable l'existence d'un lien causal direct entre les infractions qu'il a dénoncées et le préjudice qu'il dit avoir subi, de sorte que la qualité pour recourir contre le refus de suivre devait lui être reconnue.
 
3.1 L'art. 166 CPP/VS ouvre la voie de la plainte contre les décisions et mesures prises, notamment, par le juge d'instruction, dans les cas expressément prévus par le code de procédure pénal ainsi que pour déni de justice formel ou matériel. Selon l'art. 168 CPP/VS, ont qualité pour porter plainte les parties ainsi que toute personne à qui une mesure ou une décision porte un préjudice injustifié ou qui a sujet de se plaindre d'un retard injustifié ou d'un déni de justice. L'art. 46 ch. 4 CPP/VS précise que le ministère public et le lésé peuvent porter plainte contre la décision par laquelle le juge d'instruction refuse de donner suite à la dénonciation ou à la plainte qu'ils ont déposée. L'art. 48 ch. 1 al. 1 CPP/VS prévoit par ailleurs que le plaignant est de plein droit partie civile. Quant à l'art. 48 ch. 1 al. 4 CPP/VS, il dispose que, lorsque, à raison d'une infraction poursuivie d'office, la collectivité publique ou un tiers encourt une responsabilité primaire exclusive, celui qui se prétend lésé par une telle infraction peut se porter partie civile dans le procès pénal, qu'il prend alors la position d'un intervenant accessoire et qu'il ne peut conclure qu'à la réserve de ses droits civils.
 
3.2 Selon la décision attaquée, le dénonciateur d'une infraction poursuivie d'office revêt la qualité de lésé à condition d'alléguer des faits susceptibles de lui causer un dommage ou un tort moral, au sens du droit civil, en relation avec l'infraction et de fournir des indices objectifs de ce que ces faits ont une certaine probabilité. Seules des prétentions fondées sur le droit civil peuvent faire l'objet d'une action par voie d'adhésion devant le juge pénal. Sous réserve de la faculté ouverte par l'art. 48 ch. 1 al. 4 CPP/VS, celles qui sont fondées sur le droit public ne permettent donc pas la constitution de partie civile ni ne confèrent la qualité de lésé et n'ouvrent donc pas la voie de la plainte à la chambre pénale.
 
Toujours selon la décision attaquée, ne peut être lésé que la personne à laquelle un dommage (matériel ou immatériel) a été directement causé par l'infraction ou pour lequel un tel dommage menace de se produire du fait de celle-ci. En règle général, il s'agit du détenteur du bien juridique que la disposition pénale tend à protéger. En cas d'infractions garantissant en premier lieu des intérêts collectifs, le particulier n'est en principe pas considéré comme lésé, sauf si ses intérêts privés sont directement atteints par l'acte délictueux.
 
En se référant à la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l'art. 28 al. 1 aCP, dont le texte a été repris à l'art. 30 al. 1 CP, la décision attaquée relève encore que le lésé est celui dont le bien juridique est directement atteint par l'infraction et que seule l'infraction en cause permet de déterminer quel est le titulaire du bien juridique protégé.
 
3.3 Le recourant ne remet pas en cause ce raisonnement juridique, dont il ne démontre en tout cas pas qu'il procéderait d'une interprétation arbitraire du droit cantonal. En particulier, il ne conteste pas que le statut de lésé et, partant, la qualité de ce dernier pour recourir contre un refus de suivre implique qu'il puisse se prévaloir d'un préjudice, au sens du droit civil, en lien de causalité direct avec l'infraction dénoncée. Ce qu'il reproche à l'autorité cantonale, c'est d'avoir exigé de lui qu'il apporte la preuve d'un tel lien, alors qu'il suffisait qu'il le rende vraisemblable, ainsi qu'il l'aurait fait. Il n'établit toutefois aucunement, conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, le bien-fondé de cette affirmation. Contrairement à ce qu'il semble penser, il ne suffisait pas qu'il se borne pratiquement à alléguer avoir été victime des infractions dénoncées et qu'elles lui auraient causé un préjudice. Encore fallait-il qu'il fournisse des indices objectifs d'une certaine probabilité de ce qu'elles aient pu être commises et du dommage direct qui en aurait résulté pour lui. Or, il ne démontre pas l'avoir fait et que l'autorité cantonale l'aurait nié arbitrairement, c'est-à-dire de manière manifestement insoutenable (cf. ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182, 273 consid. 2.1 p. 275). Il n'est dès lors pas établi qu'il aurait été retenu arbitrairement que le recourant ne remplissait pas les conditions auxquelles, selon le droit cantonal, un lésé est habilité à recourir contre un refus de suivre, ni, par conséquent, que cette qualité lui aurait été déniée en violation arbitraire du droit cantonal. Il s'ensuit l'irrecevabilité du grief, faute de motivation suffisante au regard des exigences de l'art. 106 al. 2 LTF.
 
4.
 
Le recours doit ainsi être déclaré irrecevable et le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est déclaré irrecevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 4000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton du Valais et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale.
 
Lausanne, le 5 octobre 2007
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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