VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 5P.377/2006  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 5P.377/2006 vom 09.01.2007
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
5P.377/2006 /frs
 
Arrêt du 9 janvier 2007
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Escher et Hohl.
 
Greffière: Mme Borgeat.
 
Parties
 
X.________,
 
recourante, représentée par Me Blaise Péquignot, avocat,
 
contre
 
1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3.
 
Objet
 
art. 9 Cst. (exécution d'une décision concernant la reddition de comptes),
 
recours de droit public contre l'arrêt de la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève du 10 août 2006.
 
Faits :
 
A.
 
A.a Par ordonnance du 11 novembre 2004, le Tribunal de première instance de Genève a condamné la banque Z.________ à remettre à X.________, veuve de Y.________, l'ensemble des documents et informations en sa possession concernant les comptes dont Y.________ était titulaire ou ayant droit économique au jour de son décès, ainsi que les pièces relatives aux mouvements enregistrés sur ces comptes, avec l'identité des bénéficiaires, pour les dix ans précédant le décès et jusqu'à la clôture des comptes.
 
Statuant sur appel de Z.________ le 27 janvier 2005, la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé cette ordonnance.
 
A.b Le 7 février 2005, Z.________ a fourni un certain nombre de documents à X.________. Cette dernière les a soumis à un expert qui a considéré qu'ils n'étaient pas exhaustifs.
 
Par courrier du 2 mars 2005, X.________ a requis de Z.________ divers renseignements complémentaires.
 
N'ayant reçu aucune réponse, X.________ a, le 25 avril 2005, sommé Z.________, par acte d'huissier, de satisfaire au dispositif de l'ordonnance du 11 novembre 2004 du Tribunal de première instance en fournissant l'ensemble des informations requises. Z.________ n'a jamais fourni les compléments demandés.
 
B.
 
B.a Le 26 avril 2005, X.________ a adressé au Procureur général de la République et canton de Genève (ci-après: le Procureur général) une demande tendant à l'exécution forcée de l'ordonnance du Tribunal de première instance du 11 novembre 2004, confirmée par la Cour de justice le 27 janvier 2005. Le Procureur général n'a pas donné suite à cette requête.
 
B.b Par arrêt du 26 janvier 2006, la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours de droit public interjeté par X.________ et ses enfants pour déni de justice formel du Procureur général. Elle a considéré que le grief d'inaction dans la procédure relative à l'exécution forcée n'était pas suffisamment clair et explicite (art. 90 al. 1 let. b OJ) et, qu'en outre, le recours n'exposait pas les raisons pour lesquelles la contestation sur l'exécution forcée n'avait pas été soumise au Tribunal de première instance de Genève, qui paraissait être compétent à ce sujet (art. 477 LPC/GE). Comme il n'était pas certain que les instances cantonales aient été épuisées, le recours de droit public paraissait également irrecevable sur ce point (art. 86 al. 1 OJ).
 
C.
 
C.a Le 27 février 2006, X.________ a adressé au Tribunal de première instance de Genève une contestation en matière d'exécution forcée d'un jugement, au sens de l'art. 477 LPC/GE, concluant à ce qu'il soit constaté qu'aucun obstacle ne s'oppose à l'exécution forcée de l'ordonnance du Tribunal de première instance du 11 novembre 2004, confirmée par la Cour de justice le 27 janvier 2005, à ce qu'il soit constaté que le Procureur général a commis un déni de justice formel et à ce qu'il lui soit donc enjoint d'ordonner sans délai l'exécution forcée requise.
 
C.b Par jugement du 25 mai 2006, le Tribunal de première instance a rejeté la requête aux motifs qu'elle ne comportait aucune partie citée, qu'elle aurait dû être dirigée contre Z.________, que le Procureur général ne saurait être partie citée dans le cadre d'une telle requête et, au surplus, que le Tribunal de première instance n'était fonctionnellement pas compétent pour statuer sur le prétendu déni de justice du Procureur général.
 
C.c Statuant sur l'appel de X.________ le 10 août 2006, la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève l'a rejeté, aux motifs que la requérante, qui considérait que l'exécution volontaire de Z.________ était insuffisante, voire incomplète, ne l'avait pas interpellée par sommation en vue d'exécution complémentaire, comme le prévoit la procédure cantonale, se bornant à solliciter l'intervention du Procureur général, et que celui-ci n'était pas partie au procès en cas de contestation à propos de l'exécution forcée (art. 477 LPC/GE), mais seulement détenteur de la force publique.
 
D.
 
Contre cet arrêt, X.________ interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral, concluant à l'annulation de la décision de la Cour de justice du 10 août 2006. Elle invoque la violation des art. 9 et 29 al. 2 Cst., ainsi que de l'art. 6 § 1 CEDH.
 
Invitée à déposer une réponse, l'autorité cantonale a déclaré se référer aux considérants de son arrêt.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
1.1 L'arrêt attaqué ayant été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) est applicable à la présente cause (art. 132 al. 1 LTF).
 
1.2
 
Formé en temps utile (art. 89 al. 1 OJ) contre une décision finale rendue en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ) par la Cour de justice du canton de Genève, en matière d'exécution forcée au sens des art. 473 ss LPC/GE, le recours, qui ne peut pas être soumis au Tribunal fédéral par un autre moyen de droit (art. 84 al. 2 OJ; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, 1992, p. 70 s. ch. 50 et les références citées), est recevable.
 
2.
 
Dans le canton de Genève, un jugement ne peut être mis à exécution qu'après que le débiteur a été sommé, par acte d'huissier, de satisfaire à son contenu (art. 473 LPC/GE). Si la partie condamnée n'exécute pas les obligations qui lui sont imposées, le jugement est exécuté sur ordre du Procureur général (art. 474 LPC/GE). En revanche, si des contestations s'élèvent au sujet des conditions de l'exécution forcée, entre les parties elles-mêmes ou de la part de tiers intervenants ou opposants, le Tribunal de première instance est compétent (art. 477 LPC/GE; Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, vol. III, n. 2 ad art. 477 LPC/GE).
 
3.
 
La recourante reproche tout d'abord à la Cour de justice d'avoir retenu, pour refuser d'entrer en matière sur la procédure de contestation de l'art. 477 LPC/GE, qu'elle n'a pas interpellé la banque par sommation, se bornant à solliciter l'intervention du Procureur général. Ayant allégué et prouvé le contraire, la recourante invoque la violation des art. 9 Cst. et 6 § 1 CEDH.
 
3.1 De jurisprudence constante, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275 et les arrêts cités); il ne suffit pas qu'une solution différente apparaisse concevable, voire préférable (ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440); pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat. Lorsque la partie recourante s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).
 
Tel qu'il est invoqué, l'art. 6 § 1 CEDH n'a pas de portée propre par rapport au grief d'arbitraire.
 
3.2 Il résulte effectivement de la requête du 27 février 2006 adressée par la recourante au Tribunal de première instance (page de garde et allégué n° 2), et de la pièce 4 produite à l'appui de celle-ci, qu'une sommation a été signifiée à sa demande à Z.________, par Me N.________, huissier judiciaire près les tribunaux de Genève, le 25 avril 2005, visant à ce que Z.________ satisfasse au dispositif de l'ordonnance du 11 novembre 2004. La recourante en a également fait mention dans la partie "faits" de son mémoire d'appel du 12 juin 2006 dirigé contre la décision de première instance (p. 2, let. A ch. 2).
 
3.3 Le Tribunal de première instance ne retient pas, dans son jugement du 25 mai 2006, que la recourante n'aurait pas respecté la procédure de sommation prescrite. La Cour de justice, pour sa part, se fonde sur ce motif pour rejeter l'appel de la recourante et refuser d'examiner si les conditions de l'exécution forcée sont remplies. En omettant un fait régulièrement allégué et prouvé, la cour cantonale a versé dans l'arbitraire. Dès lors que la recourante se voit ainsi privée de la possibilité de faire exécuter l'ordonnance du 11 novembre 2004, la décision attaquée est également arbitraire dans son résultat et doit donc être annulée.
 
4.
 
La Cour de justice n'a pas repris la motivation du Tribunal de première instance, selon laquelle la recourante devait assigner comme partie adverse Z.________ et que, faute d'avoir cité celle-ci, sa requête était irrecevable. Elle paraît avoir voulu exclure ce motif, à l'encontre duquel la recourante invoquait un formalisme excessif. Lorsque la cour cantonale a retenu qu'en cas de contestation relative à l'exécution forcée, le Procureur général n'est pas partie au procès, mais seulement détenteur de la force publique, elle n'a pas non plus adopté un motif subsidiaire sur ce point, mais a, de manière peu claire, confirmé la décision du Tribunal de première instance qui a constaté qu'il n'était pas fonctionnellement compétent pour connaître des chefs de conclusions tendant à ce qu'un déni de justice formel soit constaté et à ce qu'injonction d'agir soit adressée au Procureur général. Dans ces conditions, le Tribunal fédéral n'est pas en mesure de statuer par substitution de motifs.
 
5.
 
Le recours doit par conséquent être admis et la décision attaquée annulée. Le présent arrêt est rendu sans frais (art. 156 al. 2 OJ). Le canton de Genève versera en revanche des dépens à la recourante, qui a procédé avec l'assistance d'un avocat (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est admis et la décision attaquée est annulée.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
3.
 
Le canton de Genève versera à la recourante une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante et à la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 9 janvier 2007
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).