VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 2A.429/2003  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 2A.429/2003 vom 26.11.2003
 
Tribunale federale
 
2A.429/2003/DAC/elo
 
{T 0/2}
 
Arrêt du 26 novembre 2003
 
IIe Cour de droit public
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Wurzburger, Président,
 
Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli
 
Greffière: Mme Dupraz.
 
Parties
 
X.________, recourant,
 
représenté par Me Christian Hänni.
 
contre
 
Département fédéral de justice et police, 3003 Berne.
 
Objet
 
Exception aux mesures de limitation,
 
recours de droit administratif contre la décision du Dé- partement fédéral de justice et police du 17 juillet 2003.
 
Faits:
 
A.
 
X.________ est un ressortissant turc né le 4 mai 1964. Marié, il est père de cinq enfants nés entre 1989 et 1996 et vivant en Turquie. X.________ a rejoint le Collectif des sans-papiers du canton de Neuchâtel et a été entendu le 19 septembre 2001 par le Service des étrangers du canton de Neuchâtel (ci-après: le Service cantonal). Il ressort des déclarations que X.________ a alors faites qu'il aurait effectué différents séjours en Suisse et y aurait travaillé sans autorisation de séjour ni de travail. Il y serait arrivé pour la première fois en 1980 et y aurait vécu jusqu'en 1983. Il y serait revenu en 1984 pour y travailler pendant dix mois. Puis, il y aurait séjourné et travaillé de 1991 à 1993 et à partir de 1998. L'intéressé a indiqué qu'il versait environ 1'500 fr. par mois à sa femme, mais qu'il n'envisageait pas de faire venir sa famille en Suisse s'il obtenait une autorisation de séjour. Au demeurant, un de ses oncles avait vécu à Zurich, mais il avait quitté la Suisse en 2001.
 
B.
 
Le 15 juin 1981, l'Office fédéral des étrangers, actuellement l'Office fédéral de l'immigration, de l'intégration et de l'émigration, (ci-après: l'Office fédéral) a prononcé à l'encontre de X.________ une interdiction d'entrée en Suisse valable du 16 juin 1981 au 16 juin 1983. Par décision du 29 juin 1982, il a prononcé à l'encontre de l'intéressé une nouvelle interdiction d'entrée en Suisse ayant pour effet de prolonger la première jusqu'au 16 juin 1986. Le 5 avril 1993, l'Office fédéral a de nouveau prononcé à l'encontre de X.________ une interdiction d'entrée en Suisse valable du 5 avril 1993 au 4 avril 1995. Ces trois décisions étaient motivées par des infractions aux prescriptions de police des étrangers commises par l'intéressé (en particulier, séjour et travail sans autorisation).
 
En outre, par ordonnance du 30 juin 1982, le Juge informateur de l'arrondissement d'Yverdon a condamné X.________ à huit jours d'emprisonnement pour infraction à la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20). L'intéressé était revenu en Suisse alors qu'il faisait l'objet d'une interdiction d'entrée dans ce pays.
 
C.
 
Le 4 juillet 2002, le Service cantonal a soumis le dossier de X.________ à l'Office fédéral afin qu'il se prononce sur l'exemption de l'intéressé des mesures de limitation du nombre des étrangers selon l'art. 13 lettre f de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21).
 
Le 27 novembre 2002, l'Office fédéral a refusé d'excepter X.________ des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE. Il a notamment relevé que la durée des séjours en Suisse de l'intéressé n'était pas pertinente dans la mesure où ces séjours avaient été interrompus par des voyages en Turquie. De plus, le comportement de X.________ n'était pas irréprochable puisqu'il avait fait l'objet de trois mesures d'interdiction d'entrée en Suisse pour "infractions graves aux prescriptions de police des étrangers". L'intéressé ne pouvait pas invoquer des motifs d'ordre personnel ou familial pertinents. Quant aux arguments d'ordre professionnel et économique, ils ne pouvaient pas être pris en considération dans une procédure de ce genre. Par ailleurs, l'intégration socio-professionnelle de X.________ en Suisse n'était pas exceptionnelle. Enfin, la Turquie était le pays avec lequel X.________ avait conservé ses attaches culturelles, sociales et familiales les plus importantes.
 
D.
 
Le 17 juillet 2003, le Département fédéral de justice et police (ci-après: le Département fédéral) a rejeté le recours de X.________ contre la décision de l'Office fédéral du 27 novembre 2002 et confirmé l'assujettissement de l'intéressé aux mesures de limitation. Il a repris, en la développant, l'argumentation de l'Office fédéral. Comme X.________ alléguait avoir séjourné quelque dix ans en Suisse, le Département fédéral a rappelé que les séjours illégaux en Suisse n'étaient pas pris en compte dans l'examen d'un cas de rigueur.
 
E.
 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la décision du Département fédéral du 17 juillet 2003 et de l'exempter des mesures de limitation du nombre des étrangers. Le recourant demande aussi des dépens pour la procédure devant le Département fédéral. Il se plaint de violation du droit fédéral, y compris d'excès et d'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que de constatation inexacte et incomplète des faits pertinents. Il demande que le Tribunal fédéral prenne en compte, dans l'application de l'art. 13 lettre f OLE, différents éléments de fait pouvant être groupés en deux critères: "la réalité et les enjeux du marché parallèle du travail en Suisse" et "les conséquences de ce marché sur la vie des travailleurs clandestins". Le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir surestimé la gravité des infractions qu'il a commises et qu'il considère comme inhérentes au "statut" de travailleur clandestin. Il fait valoir qu'il serait contraire au but de l'art. 13 lettre f OLE d'empêcher un étranger de bénéficier d'une exemption des mesures de limitation en raison d'infractions liées à un séjour illégal en Suisse. Il conteste l'importance accordée par le Département fédéral aux années qu'il a passées durant sa jeunesse dans sa patrie par rapport à celles pendant lesquelles il a vécu en Suisse. Le recourant invoque sa bonne intégration professionnelle et sociale en Suisse, compte tenu de sa condition de clandestin. Il reproche au Département fédéral d'avoir fait preuve d'arbitraire et d'avoir constaté les faits de manière inexacte en considérant qu'il conservait des attaches importantes avec sa patrie.
 
Le Département fédéral conclut au rejet du recours.
 
F.
 
Le 28 octobre 2003, le Service cantonal a produit son dossier.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
La voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions relatives à l'assujettissement aux mesures de limitation prévues par l'ordonnance limitant le nombre des étrangers (ATF 122 II 403 consid. 1 p. 404/405; 119 lb 33 consid. 1a p. 35). Le seul fait qu'un étranger séjourne illégalement en Suisse n'empêche pas l'intéressé de recourir à l'autorité de céans contre une décision de refus du Département fédéral en matière d'exemption des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE. Par conséquent, déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi, le présent recours est en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ.
 
2.
 
Saisi d'un recours de droit administratif dirigé contre une décision qui n'émane pas d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral revoit, le cas échéant d'office, les constatations de fait (art. 104 lettre b et 105 al. 1 OJ). Sur le plan juridique, il vérifie d'office l'application du droit fédéral qui englobe en particulier les droits constitutionnels des citoyens (ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188) - en examinant notamment s'il y a eu excès ou abus du pouvoir d'appréciation (art. 104 lettre a OJ) -, sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche, il ne peut pas revoir l'opportunité de la décision attaquée, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen dans ce domaine (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).
 
En matière de police des étrangers, lorsque la décision entreprise n'émane pas d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral fonde en principe ses jugements, formellement et matériellement, sur l'état de fait et de droit existant au moment de sa propre décision (ATF 124 II 361 consid. 2a p. 365; 122 II 1 consid. 1b p. 4).
 
Le recourant se plaint que la décision attaquée soit empreinte d'arbitraire à différents égards. Il convient dès lors de préciser que le grief d'arbitraire soulevé dans un recours de droit administratif se confond avec celui de violation du droit fédéral.
 
3.
 
Les mesures de limitation visent, en premier lieu, à assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population suisse et celui de la population étrangère résidante, ainsi qu'à améliorer la structure du marché du travail et à assurer un équilibre optimal en matière d'emploi (art. 1er lettres a et c OLE). L'art. 13 lettre f OLE soustrait aux mesures de limitation "les étrangers qui obtiennent une autorisation de séjour dans un cas personnel d'extrême gravité ou en raison de considérations de politique générale". Cette disposition a pour but de faciliter la présence en Suisse d'étrangers qui, en principe, seraient comptés dans les nombres maximums fixés par le Conseil fédéral, mais pour lesquels cet assujettissement paraîtrait trop rigoureux par rapport aux circonstances particulières de leur cas ou pas souhaitable du point de vue politique.
 
II découle de la formulation de l'art. 13 lettre f OLE que cette disposition dérogatoire présente un caractère exceptionnel et que les conditions auxquelles la reconnaissance d'un cas de rigueur est soumise doivent être appréciées restrictivement. II est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé aux restrictions des nombres maximums comporte pour lui de graves conséquences. Lors de l'appréciation d'un cas personnel d'extrême gravité, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré, socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas personnel d'extrême gravité; il faut encore que la relation du requérant avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse pas exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que le requérant a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exemption des mesures de limitation du nombre des étrangers (ATF 128 II 200 consid. 4 p. 207/208 et la jurisprudence citée).
 
Le Tribunal fédéral a précisé que les séjours illégaux en Suisse n'étaient pas pris en compte dans l'examen d'un cas de rigueur (arrêt 2A.166/2001 du 21 juin 2001, consid. 2b/bb). La longue durée d'un séjour en Suisse n'est pas, à elle seule, un élément constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité dans la mesure où ce séjour est illégal. Sinon, l'obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte récompensée. Dès lors, il appartient à l'autorité compétente d'examiner si l'intéressé se trouve pour d'autres raisons dans un état de détresse justifiant de l'excepter des mesures de limitation du nombre des étrangers. Pour cela, il y a lieu de se fonder sur les relations familiales de l'intéressé en Suisse et dans sa patrie, sur son état de santé, sur sa situation professionnelle, sur son intégration sociale, etc. Il convient aussi de prendre en compte le retard des autorités à décider du sort de la demande d'asile du requérant (ATF 124 II 110 consid. 3 p. 113) ou leur laxisme lorsqu'elles ont négligé d'exécuter une décision prononçant le renvoi de Suisse de l'intéressé.
 
4.
 
Le recourant est arrivé en Suisse pour la première fois en 1980 et n'a pas tardé à exercer une activité lucrative, sans toutefois disposer d'autorisations de séjour ni de travail. Dès lors, selon ses dires, il aurait vécu une dizaine d'années en Suisse. Ce n'est qu'en 2001 que l'intéressé a entrepris des démarches afin de régulariser sa situation. Depuis lors, il jouit d'une simple tolérance, ce qu'on ne saurait assimiler à un séjour régulier. Compte tenu de la jurisprudence rappelée ci-dessus (consid. 3), la durée du séjour en Suisse du recourant ne peut être considérée comme déterminante, dans l'application de l'art. 13 lettre f OLE. En outre, l'intéressé n'a pas seulement violé la législation concernant le statut des étrangers, comme tous les travailleurs clandestins, en entrant, séjournant et travaillant en Suisse sans autorisation. Il est également entré en Suisse alors qu'il tombait sous le coup d'une interdiction d'entrée dans ce pays. C'est du reste pour cela qu'il a été condamné à huit jours d'emprisonnement le 30 juin 1982. Par ailleurs, l'intéressé ne peut pas se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle remarquable, même s'il a pratiquement toujours travaillé dans le même secteur d'activité (la restauration). De plus, le fait que le recourant maîtrise le français au bout d'une dizaine d'années passées en Suisse romande n'est pas exceptionnel et ne saurait être considéré comme la preuve d'une intégration particulièrement poussée. En outre, même s'il a noué des liens avec la population locale - ce qui paraît normal en une dizaine d'années - , sa relation avec la Suisse, où il s'est découvert quinze cousins depuis son audition du 19 septembre 2001, n'apparaît pas spécialement étroite. En revanche, l'intéressé a gardé des attaches importantes avec sa patrie où vivent notamment sa femme - dont rien au dossier ne prouve qu'il aurait divorcé - ainsi que ses cinq enfants et où il est du reste retourné à plusieurs reprises. Force est de considérer qu'il pourrait se réintégrer sans trop de difficultés en Turquie, d'autant plus qu'il y a vécu jusqu'à son départ pour la Suisse. On ne saurait conclure de ce qui précède que la situation de l'intéressé constitue un cas personnel d'extrême gravité.
 
5.
 
5.1 Le recourant fait valoir que la condition de clandestin dans laquelle il a passé une partie importante de sa vie depuis 1980 est un élément constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité. Il demande, en conséquence, que le Tribunal fédéral utilise désormais deux nouveaux critères lorsqu'il examine si les conditions d'exemption des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE sont remplies: "la réalité et les enjeux du marché parallèle du travail en Suisse" et "les conséquences de ce marché sur la vie des travailleurs clandestins".
 
Le Tribunal fédéral sait qu'il existe en Suisse un marché illégal du travail et que cette illégalité peut être la cause de nombreux abus. Selon la législation en vigueur en Suisse, l'étranger qui veut exercer une activité lucrative dans ce pays doit en principe obtenir une autorisation de séjour et de travail. La réglementation édictée à ce sujet ne doit pas être perçue comme un ensemble de tracasseries administratives. Elle a pour but en particulier d'assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population suisse et celui de la population étrangère résidante, de créer des conditions favorables à l'intégration des travailleurs et résidents étrangers ainsi que d'améliorer la structure du marché du travail et d'assurer un équilibre optimal en matière d'emploi (art. 1er OLE; cf. le consid. 3, ci-dessus). Elle tend à protéger les travailleurs en leur donnant des garanties notamment en matière de salaire et de protection sociale (art. 9 OLE). L'étranger qui élude les prescriptions de police des étrangers et travaille clandestinement ne bénéficie évidemment pas de ces garanties. Délibérément ou non, il s'est lui-même mis dans une situation dépourvue de protection sociale, même s'il n'a pas d'emblée réalisé les conséquences de son comportement illicite. Au demeurant, il n'est pas rare que l'employeur remplisse ses obligations sociales et fiscales à l'égard du travailleur même s'il l'embauche illégalement. Dès lors, l'autorité de céans ne saurait suivre le recourant quand il propose de tenir compte des critères susmentionnés pour reconnaître un cas de rigueur. Le marché illégal du travail, que l'intéressé compare à une "forme d'esclavage moderne", existe et subsiste uniquement parce qu'il permet la rencontre d'une certaine offre et d'une certaine demande, souvent du reste au détriment de la rationalisation souhaitée de certains secteurs économiques. Or, l'attitude que LE RECOURANT a adoptée pour pouvoir travailler en Suisse contribue à ce marché condamnable. D'ailleurs, l'employeur qui engage un travailleur clandestin est en principe lui-même sanctionné, pour autant que les autorités COMPÉTENTES en aient connaissance. Ainsi, l'étranger qui, comme le recourant, vient travailler illicitement en Suisse ne saurait se prévaloir de ses conditions de vie pour demander d'être exempté des mesures de limitation au sens de l'art. 13 lettre f OLE. Au surplus, admettre pour cette raison un cas personnel d'extrême gravité irait à l'encontre du but poursuivi par le législateur. En effet, cela inciterait les étrangers à éluder la législation en vigueur dans l'intention d'obtenir ultérieurement la régularisation de leur situation.
 
5.2 Le recourant part apparemment du principe que l'art. 13 lettre f OLE doit permettre de donner un statut légal à un étranger vivant illégalement en Suisse. Il est dès lors paradoxal, à son avis, de reprocher à un étranger qui demande que son cas soit examiné au regard de cette disposition d'être entré illégalement en Suisse et d'y avoir séjourné illégalement. L'intéressé se plaint en particulier de l'importance que le Département fédéral a attachée aux sanctions qui ont été prononcées à son encontre.
 
Contrairement à ce que croit le recourant, l'art. 13 lettre f OLE n'est pas destiné au premier chef à régulariser la situation d'étrangers vivant clandestinement en Suisse, mais à permettre à tout étranger entré ou vivant déjà en Suisse d'obtenir un statut légal pour y poursuivre son séjour au cas où son départ de ce pays pourrait créer un cas personnel d'extrême gravité (cf. l'ATF 128 II 200). Dès lors, il n'est pas contradictoire d'examiner la situation d'un étranger sous l'angle de l'art. 13 lettre f OLE et de tenir compte à cette occasion d'infractions aux prescriptions de police des étrangers. Il est vrai cependant qu'il ne faut pas exagérer l'importance des infractions inhérentes à la condition de travailleur clandestin, à savoir entrée, séjour et travail en Suisse sans autorisation. Toutefois, le recourant a adopté un comportement plus grave dans la mesure où il est entré dans ce pays alors qu'il faisait l'objet d'une interdiction d'y entrer. Le Département fédéral a simplement relevé que l'intéressé n'avait pas eu un comportement irréprochable en Suisse. On ne saurait dès lors faire grief à l'autorité intimée d'avoir attaché une importance disproportionnée aux infractions que le recourant a commises.
 
5.3 L'intéressé reproche au Département fédéral d'être tombé dans l'arbitraire, en relativisant la durée de son séjour en Suisse par rapport au temps qu'il a passé en Turquie et en considérant qu'il avait conservé des attaches importantes avec sa patrie. Sur ce dernier point, il se plaint aussi d'une constatation inexacte des faits.
 
Bien que le recourant reproche à l'autorité intimée d'avoir constaté certains faits de manière inexacte, il semble plutôt s'en prendre à la façon dont elle a apprécié ces faits.
 
Comme on l'a rappelé ci-dessus (consid. 3), la durée d'un séjour en Suisse n'est pas déterminante dans l'examen d'un cas de rigueur au sens de l'art. 13 lettre f OLE, lorsque ledit séjour est illégal. En revanche, l'autorité compétente doit vérifier dans quelle situation se trouverait l'intéressé s'il devait retourner dans son pays d'origine. Or, les facultés de réintégration d'un étranger dans sa patrie dépendent en particulier de ce qu'il y a vécu antérieurement ainsi que des contacts qu'il y a gardés. Sur ce dernier point, on relèvera que le dossier ne contient aucun document prouvant que le recourant et sa femme auraient divorcé. De plus, le fait que l'intéressé entretienne ses enfants restés en Turquie démontre qu'il a gardé des relations avec des membres de sa proche famille dans son pays d'origine. En considérant que l'intéressé avait conservé des liens étroits avec la Turquie en raison notamment des années qu'il y avait passées et des enfants qu'il y entretient, le Département fédéral n'a pas violé le droit fédéral; en particulier, il n'a pas excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation.
 
5.4 Le recourant demande que le critère de l'intégration sociale soit nuancé pour tenir compte de sa condition de clandestin.
 
Comme déjà dit (consid. 5.2), l'art. 13 lettre f OLE n'est pas d'abord destiné à régulariser la situation des travailleurs clandestins. Il convient d'appliquer à cette catégorie d'étrangers les mêmes critères qu'aux autres étrangers. Le fait que certains étrangers aient opté pour l'illégalité peut les desservir au regard des conditions d'une exemption des mesures de limitation du nombre des étrangers. Ainsi, la durée du séjour illégal qu'ils ont effectué en Suisse n'est pas prise en compte (cf. le consid. 3, ci-dessus). De même, il n'y a pas lieu de définir à leur intention un critère particulier d'intégration sociale, pour tenir compte de leur clandestinité, et de leur accorder sous cet angle un traitement de faveur dans l'application de l'art. 13 lettre f OLE, par rapport aux étrangers qui ont toujours séjourné légalement en Suisse.
 
6.
 
En conclusion, le Département fédéral n'a pas constaté les faits de manière inexacte ou incomplète ni violé le droit fédéral en confirmant que la situation du recourant n'est pas constitutive d'un cas personnel d'extrême gravité au sens de l'art. 13 lettre f OLE.
 
7.
 
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté.
 
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 1'500 fr est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Département fédéral de justice et police et au Service des étrangers du canton de Neuchâtel.
 
Lausanne, le 26 novembre 2003
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).