VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 1P.410/2003  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 1P.410/2003 vom 25.11.2003
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1P.410/2003/sch
 
Arrêt du 25 novembre 2003
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Catenazzi et Fonjallaz.
 
Greffier: M. Parmelin.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Lucien Lazzarotto, avocat, quai des Bergues 23, 1201 Genève,
 
contre
 
A.________,
 
intimée, représentée par Me Marie-Flore Dessimoz, avocate, chemin du Grand-Puits 42, 1217 Meyrin,
 
Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du canton de Genève,
 
rue David-Dufour 5, case postale 22, 1211 Genève 8,
 
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956, 1211 Genève 1.
 
Objet
 
autorisation de construire en zone à bâtir,
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 20 mai 2003.
 
Faits:
 
A.
 
A.________ est propriétaire des parcelles nos 4662 et 5047 du registre foncier de la commune de Veyrier, en quatrième zone B protégée au sens des art. 12 al. 5 et 19 al. 2 de la loi genevoise d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LaLAT). La parcelle n° 5047 est occupée par une ancienne bâtisse désaffectée de 64 mètres carrés, séparée de la parcelle n° 4653 par une bande de terrain de 19 mètres carrés, correspondant à l'assiette d'un ancien chemin vicinal; cette surface a été rattachée à la parcelle n° 5047 en vertu d'un acte notarié passé le 6 octobre 1988 entre A.________ et l'ancien propriétaire de la parcelle n° 4653, B.________. Cette dernière parcelle, dont X.________ a fait l'acquisition le 28 juin 1996, supporte deux bâtiments d'habitation contigus entièrement rénovés, sis le long de la rue R.________, et une dépendance désaffectée de 35 mètres carrés, cadastrée sous n° 44, dont les façades nord et ouest sont implantées en limite de propriété avec les parcelles nos 4662 et 5047.
 
Le 1er décembre 2000, A.________ a requis l'autorisation de transformer l'ancienne bâtisse érigée sur la parcelle n° 5047 en maison familiale et de l'agrandir par l'adjonction d'une annexe d'un seul niveau, qui prendrait place sur l'assiette de l'ancien chemin vicinal et dans le prolongement de la façade ouest du bâtiment n° 44, sur la parcelle n° 4662. La Commune de Veyrier et la Commission des monuments, de la nature et des sites ayant tous deux émis un préavis défavorable, elle a présenté un projet modifié le 1er octobre 2001.
 
Le 15 novembre 2001, la Commune de Veyrier a délivré un préavis défavorable au motif que l'annexe projetée ne s'intégrait pas dans l'environnement bâti de la quatrième zone B protégée, relevant au surplus que la pose de capteurs solaires sur la toiture n'était pas judicieuse. La Commission des monuments, de la nature et des sites a en revanche donné un préavis favorable, sous diverses réserves liées au traitement des planchers, ainsi qu'au choix des matériaux et des teintes. Elle déclarait en outre ne pas être opposée aux dérogations éventuelles nécessaires selon l'art. 106 de la loi genevoise sur les constructions et les installations diverses (LCI).
 
Par décision du 10 décembre 2001, le Département cantonal de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après: le Département) a délivré l'autorisation de construire sollicitée, compte tenu du préavis favorable de la Commission des monuments, de la nature et des sites, qui permettait l'octroi de la dérogation prévue par l'art. 106 LCI pour l'implantation de l'agrandissement en limite de propriété. La Commission cantonale de recours en matière de constructions a rejeté le recours formé par X.________ contre cette décision, au terme d'une décision prise le 27 août 2002 et notifiée le 16 septembre 2002.
 
Le 16 octobre 2002, X.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif ou la cour cantonale) en se plaignant notamment du fait que l'annexe projetée viendrait obturer l'une des ouvertures en façade ouest du bâtiment n° 44 donnant sur l'ancien chemin vicinal. Le 14 mars 2003, il a déposé une demande d'autorisation de construire visant à rendre habitable le bâtiment n° 44, moyennant l'octroi d'une dérogation pour des vues droites fondée sur l'art. 106 LCI. Il a sollicité la suspension de la procédure de recours pendante jusqu'à l'issue de l'instruction de cette requête.
 
Par arrêt du 20 mai 2003, le Tribunal administratif a rejeté le recours de X.________, après avoir écarté la demande de suspension. Il a considéré en substance que le Département était fondé à suivre le préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites, émis en toute connaissance de cause, plutôt que celui de la Commune de Veyrier. Il a estimé que le projet litigieux permettrait de respecter le principe de la contiguïté, qui doit prévaloir dans la quatrième zone B protégée, selon les art. 33 et 45 LCI, et qu'il s'inscrivait parfaitement dans le site villageois, conformément à l'art. 106 LCI, en tant qu'il autorise la création d'un logement familial fonctionnel, la Commission des monuments, de la nature et des sites ayant donné son accord à une éventuelle dérogation aux distances aux limites.
 
B.
 
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, de refuser l'autorisation de construire sollicitée par A.________ et, le cas échéant, de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour instruction complémentaire dans le sens des considérants. Il se plaint à divers titres d'arbitraire dans la constatation des faits et dans l'application du droit cantonal. Il dénonce une atteinte à son droit de propriété garanti à l'art. 26 Cst.
 
Le Tribunal administratif se réfère à son arrêt. Le Département cantonal de l'aménagement, de l'équipement et du logement et A.________ concluent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.
 
C.
 
Par ordonnance du 29 août 2003, le Juge présidant la Ire Cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif présentée par X.________.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
En vertu de l'art. 34 al. 1 et 3 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700), seule la voie du recours de droit public est ouverte contre l'octroi d'un permis de construire en zone à bâtir dans la mesure où le recourant fait essentiellement valoir des griefs tirés d'une application arbitraire des normes cantonales de procédure et de police des constructions et de la violation de son droit de propriété garanti par le droit constitutionnel fédéral (cf. ATF 123 II 88 consid. 1a/ cc p. 92 et les arrêts cités).
 
X.________ est personnellement et directement touché par l'extension projetée de l'immeuble de l'intimée en limite avec le bâtiment n° 44 dont il est propriétaire; il a qualité pour agir selon l'art. 88 OJ (cf. ATF 127 I 44 consid. 2d p. 47 et les arrêts cités). Les conclusions qui vont au-delà de la simple annulation de l'arrêt attaqué sont irrecevables, dès lors qu'aucune des exceptions à la nature cassatoire du recours de droit public ne sont réunies (ATF 129 I 129 consid. 1.2.1 p. 131/ 132, 173 consid. 1.5 p. 176); il en va de même des pièces annexées au recours, postérieures à l'arrêt attaqué (ATF 125 I 71 consid. 1d/aa p. 77 et les arrêts cités); sous ces réserves, il y a lieu d'entrer en matière sur le recours qui répond aux conditions des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.
 
2.
 
Le recourant se plaint à divers titres d'une constatation arbitraire et incomplète des faits pertinents.
 
2.1 La jurisprudence reconnaît au juge un important pouvoir d'appréciation dans la constatation des faits et leur appréciation. Le Tribunal fédéral n'intervient que si celui-ci a outrepassé son pouvoir d'appréciation et établi les faits de manière arbitraire. Une constatation de fait n'est pas arbitraire pour la seule raison que la version retenue par le juge ne coïncide pas avec celle de l'une ou l'autre des parties; encore faut-il que l'appréciation des preuves soit manifestement insoutenable, en contradiction flagrante avec la situation effective, constitue la violation d'une règle de droit ou d'un principe juridique clair et indiscuté ou encore qu'elle heurte de façon grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 129 I 173 consid. 3.1 p. 178 et les arrêts cités). De plus, comme l'annulation de la décision attaquée ne se justifie que si elle est arbitraire non seulement dans sa motivation, mais également dans son résultat, le grief d'arbitraire dans la constatation des faits ne peut avoir de chance de succès que s'il porte sur des faits pertinents et décisifs, ce qu'il appartient au recourant d'établir.
 
2.2 Le recourant conteste avoir déposé son projet de rénovation du bâtiment n° 44 dans un but manifestement dilatoire; il en veut pour preuve les différentes variantes, sous forme de plans et d'esquisses, qu'il aurait soumises à ses voisins entre 1997 et 2000. Ce point est cependant dénué de toute pertinence, s'agissant d'apprécier la conformité du projet de l'intimée avec les prescriptions de police des constructions et, en particulier, avec l'art. 106 LCI qui s'applique aux villages protégés.
 
Le recourant s'en prend également au qualificatif d'"ancienne grange délabrée" attribué au bâtiment n° 44, alors que celui-ci a toujours été cadastré comme "habitation et dépendance". La nature de l'immeuble au cadastre est sans incidence sur le point de savoir si la construction projetée peut s'implanter en limite de propriété suivant les normes de droit public régissant la zone concernée; seule son affectation réelle est déterminante à cet égard; or, le recourant ne conteste pas que ce bâtiment est désaffecté depuis des années et n'a jamais été voué à l'habitation. Il l'a d'ailleurs qualifié lui-même de rural dans le projet de rénovation qu'il a soumis au Département le 14 mars 2003.
 
Le recourant prétend également que l'ancien chemin vicinal séparant les parcelles nos 5047 et 4653 ne serait pas couvert, comme l'a retenu la cour cantonale, à tout le moins dans la partie sur laquelle donnent les fenêtres du bâtiment n° 44. Il ressort toutefois des photographies versées au dossier que ce chemin était protégé sur la totalité de son tronçon par des tôles ondulées, posées à titre provisoire et amovibles, dont certaines sont tombées avec les intempéries, ce qui exclut a priori
 
une constatation arbitraire des faits sur ce point. Au demeurant, le recourant n'explique pas en quoi ce fait serait pertinent pour l'issue du litige.
 
L'arrêt attaqué retient en revanche à tort que le recourant a acquis la parcelle n° 4653 par voie d'enchères publiques, alors qu'il l'a achetée à l'ancien propriétaire au terme d'une vente passée de gré à gré le 28 juin 1996. Le Tribunal administratif en a déduit que le recourant devait connaître le rapport d'expertise établi le 27 décembre 1995 par l'architecte C.________ à la demande de l'Office cantonal des poursuites et des faillites, qui n'attribuait aucune valeur vénale au bâtiment n° 44 en raison de l'impossibilité d'obtenir des droits de vue et de le vouer à l'habitation. Même si le recourant n'avait peut-être pas connaissance du rapport d'expertise, il ne pouvait ignorer l'état de délabrement du bâtiment n° 44, lorsqu'il l'a acquis, et l'impossibilité de le rendre habitable sans créer de nouvelles ouvertures. Dans ces conditions, l'erreur dans la constatation des faits ne porte pas à conséquence et ne postule nullement l'annulation de l'arrêt attaqué.
 
Le recourant reproche enfin au Tribunal administratif d'avoir admis à tort, dans son exposé des faits, que les jours du bâtiment n° 44 donnant sur l'ancien chemin vicinal avaient été obstrués et qu'il devrait nécessairement négocier des droits de jours avec ses voisins s'il entendait réaliser son projet de rénovation. Il ressort des pièces versées au dossier que l'ancien propriétaire de la parcelle n° 4653 s'était engagé, au terme d'un échange de correspondance annexée à l'acte notarié du 6 octobre 1988, à condamner les deux ouvertures de cave en façade ouest du bâtiment n° 44 et à rendre le mur mitoyen. Selon les photographies versées au dossier par l'intimée, l'une des ouvertures a été murée, alors que l'autre a simplement été obturée par un plastique opaque. La cour cantonale n'a donc pas relaté les faits de manière arbitraire en relevant que les parties à l'acte notarié du 6 octobre 1988 avaient supprimé les ouvertures de cave et que les jours avaient été obstrués. Il est vrai que lors de l'inspection locale, la seconde ouverture avait été dégagée des matériaux qui la bouchaient, comme cela ressort du procès-verbal repris dans l'exposé des faits de l'arrêt attaqué. La cour cantonale n'a donc pas constaté les faits de manière arbitraire. Pour le surplus, en indiquant qu'il serait nécessaire de négocier les droits de jour avec les propriétaires voisins, le Tribunal administratif s'est borné à reprendre les propos de l'expert mandaté par l'Office cantonal des poursuites et des faillites. La question de savoir s'il pouvait faire sienne cette opinion ne ressort pas de la constatation des faits, mais de leur appréciation.
 
La qualification de véranda pour une annexe de quelque septante mètres carrés est certes inadéquate; toutefois, le recourant ne prétend pas que la cour cantonale en aurait tiré des conséquences arbitraires sur le plan juridique.
 
Les griefs relatifs aux constatations de fait de l'arrêt attaqué sont donc soit infondés, soit dénués de pertinence.
 
3.
 
Le recourant tient pour arbitraire le refus du Tribunal administratif de suspendre la cause jusqu'à droit connu sur sa demande d'autorisation de construire. Selon lui, la possibilité de rénover le bâtiment n° 44 à des fins d'habitation était un élément déterminant pour statuer en pleine connaissance de cause sur le projet litigieux et, en particulier, sur la possibilité pour l'intimée d'agrandir le bâtiment érigé sur la parcelle n° 5047 jusqu'en limite de propriété.
 
Le Tribunal administratif a refusé de faire droit à cette requête sous prétexte qu'aucun des motifs de suspension de la procédure évoqués à l'art. 78 de la loi genevoise sur la procédure administrative (LPA gen.) n'étaient réalisés. Le recourant ne conteste pas cette motivation, mais il prétend que sa demande aurait dû être examinée au regard de l'art. 14 LPA gen., qui permet de suspendre la procédure administrative lorsque son sort dépend de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité.
 
Il ne ressort nullement de la systématique de la loi que cette disposition ne s'appliquerait pas aux autorités de recours; l'art. 78 LPA gen. indique les motifs pour lesquels la suspension de la procédure doit intervenir d'office, alors que l'art. 14 LPA gen. définit les cas dans lesquels une telle mesure peut être ordonnée. Le Tribunal administratif ne pouvait ainsi se borner à examiner la demande de suspension au regard de l'art. 78 LPA gen., mais elle devait également le faire sous l'angle de l'art. 14 LPA gen. Cela ne signifie pas encore qu'une suspension de la procédure s'imposait en vertu de cette disposition et que l'arrêt serait arbitraire.
 
Une décision s'expose à un tel grief lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182; 273 consid. 2.1 p. 275 et les arrêts cités).
 
En l'occurrence, le Tribunal administratif devait examiner si le Département avait admis à tort que le projet litigieux répondait aux exigences de l'art. 106 LCI et pouvait être autorisé moyennant l'octroi d'une dérogation fondée sur cette disposition. A supposer que la possibilité de rénover le bâtiment n° 44 aux fins d'habitation présente une quelconque pertinence pour résoudre cette question, la cour cantonale était en mesure de la trancher sur la base des documents versés au dossier et des constatations faites lors de l'inspection locale; il n'était en particulier pas nécessaire de connaître le sort réservé à la demande de sanction définitive déposée par le recourant quant à son projet de rénovation du bâtiment n° 44. Dans ces conditions, le refus de suspendre l'instruction de la procédure de recours jusqu'à droit connu sur cette requête n'était nullement arbitraire dans son résultat.
 
4.
 
Le recourant conteste que l'extension projetée matérialise le principe de contiguïté censé prévaloir dans la quatrième zone B protégée selon les art. 33 et 45 LCI. Il dénonce également la prépondérance accordée au préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites, s'agissant de l'application de l'art. 106 LCI; selon lui, la cour cantonale aurait dû l'examiner d'un regard critique, compte tenu des propos de la représentante de cette commission suivant lesquels elle aurait apprécié le projet litigieux pour lui-même, sans égard à son impact sur le bâtiment n° 44 et, en particulier, aux possibilités de rénovation de celui-ci. En se fondant sur un préavis favorable qui n'avait ni le poids ni le contenu intrinsèque qu'il lui a prêté, le Tribunal administratif aurait appliqué arbitrairement l'art. 106 LCI.
 
4.1 A teneur de l'art. 19 al. 2 let. b LaLAT, la quatrième zone B, dans laquelle s'inscrit le projet litigieux, est destinée principalement aux maisons d'habitation comportant en principe plusieurs logements. Suivant l'art. 12 al. 5 LaLAT, lorsque la zone est en outre protégée, l'aménagement et le caractère architectural des quartiers et localités considérés peuvent être préservés. L'art. 106 al. 1 LCI prévoit que dans les villages protégés, le département, sur préavis de la commune et de la commission des monuments, de la nature et des sites, fixe dans chaque cas particulier l'implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de manière à sauvegarder le caractère architectural et l'échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Le département peut en conséquence, à titre exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues droites. L'art. 107 LCI précise que dans la mesure où il n'y est pas dérogé par l'article précédent, les dispositions applicables à la quatrième zone rurale sont applicables aux constructions édifiées dans la zone des villages protégés.
 
L'art. 30 al. 1 LCI, qui règle l'ordre des constructions en quatrième zone, prévoit que les constructions sont, en règle générale, édifiées en ordre contigu. A teneur de l'art. 33 al. 1 let. a LCI, les constructions ne peuvent être édifiées au-dessus du sol, à la limite de propriétés privées, que sur une profondeur de 20 mètres mesurée de l'alignement de construction fixé le long des voies publiques ou privées. Selon l'art. 33 al. 2 LCI, le département peut cependant autoriser des constructions à la limite de propriétés privées, au-delà des 20 mètres spécifiés ci-dessus, lorsque deux propriétaires se sont mis d'accord pour édifier simultanément des constructions contiguës et de même hauteur, ou lorsqu'un propriétaire veut adosser une nouvelle construction à un mur d'attente. En vertu des art. 34 al. 1 et 2 LCI, lorsque la construction n'est pas édifiée à la limite de propriétés privées, une distance égale à la hauteur du gabarit, mais de six mètres au minimum, doit être respectée. L'art 45 LCI, applicable aux quatre premières zones, dispose que les distances entre deux constructions ne peuvent être inférieures à la somme des distances qui seraient exigibles entre chacune de ces constructions et une limite de propriété passant par elle (al. 1). Toutefois, cette disposition n'est pas applicable lorsqu'il existe, sur la propriété voisine, une construction autorisée avant le 1er mai 1940 et qui ne bénéficie pas d'une servitude sur le fonds où s'élève la nouvelle construction (al. 2). Les dispositions des art. 33 et 43 sont réservées (al. 3).
 
4.2 En l'espèce, le projet litigieux permettrait de vouer à l'habitation un volume vide, en conformité avec la destination de la quatrième zone (cf. art. 19 al. 2 let. b LaLAT). Le Tribunal administratif n'a pas clairement tranché la question de savoir si la construction envisagée par l'intimée respectait les normes régissant la quatrième zone et, en particulier, celles de l'art. 33 al. 1 LCI, mais il s'est borné à constater que le projet litigieux permettait de respecter le principe de la contiguïté, selon les art. 33 et 45 LCI. Cette question peut rester ouverte, car les dispositions de la quatrième zone ne doivent être appliquées, en vertu de l'art. 107 LCI, que dans la mesure où le Département ne fait pas usage de la possibilité d'y déroger offerte à l'art. 106 LCI. Le Tribunal administratif devait ainsi examiner si par son implantation, son gabarit, son volume et son style, la construction projetée n'était pas de nature à porter préjudice au caractère architectural du village protégé et au site environnant, dont fait partie le bâtiment n° 44 du recourant, compte tenu des préavis de la Commune et de la Commission des monuments, de la nature et des sites.
 
4.3 Cette dernière a émis un préavis favorable sur la base des constatations faites sur place par l'une de ses déléguées. Il n'est nullement établi que celle-ci aurait ignoré la présence de jours existants ou obturés sur la façade du bâtiment n° 44 donnant sur l'ancien chemin vicinal. Peu importe en définitive. Dans le cadre du préavis qu'elle était appelée à donner en vertu de l'art. 106 LCI, la Commission des monuments, de la nature et des sites devait se borner à examiner si la construction projetée était compatible avec le caractère architectural du village et le site environnant; il ne lui appartenait en revanche pas d'examiner si ce projet était de nature à empêcher toute rénovation du bâtiment voisin à des fins d'habitation, voire si la présence d'anciennes ouvertures en sur la façade du bâtiment voisin était de nature à entraver le projet. Dans ces conditions, supposé établi, le fait que la déléguée aurait ignoré la présence des deux ouvertures donnant sur l'ancien chemin vicinal n'est pas de nature à remettre en cause la pertinence de son préavis au regard de l'art. 106 LCI. Ni le Département, ni le Tribunal administratif n'avaient donc de raison de mettre en doute la validité du préavis favorable émis par la Commission des monuments, de la nature et des sites.
 
Pour le surplus, cette dernière a soigneusement examiné l'impact des travaux envisagés par l'intimée sur le tissu bâti existant, puisqu'elle a exigé une amélioration du projet initial, avant de délivrer son préavis favorable; elle devait également être consciente du fait que le projet s'inscrivait en limite de propriété avec le bâtiment voisin, dès lors qu'elle s'est prononcée en faveur de l'octroi d'une dérogation aux règles sur les distances aux limites, si nécessaire. L'extension aurait certes pour effet de cacher les façades nord et ouest du bâtiment n° 44 au niveau du rez-de-chaussée; le recourant ne prétend pas que cette ancienne dépendance présenterait une qualité architecturale qui s'opposerait à une implantation de l'immeuble voisin jusqu'en limite de propriété. Le préavis négatif de la Commune de Veyrier avait trait essentiellement à l'intégration dans le site du nouveau bâtiment et n'était nullement lié à la préservation du bâtiment n° 44 dans sa configuration actuelle. Le Tribunal administratif, qui s'est également rendu sur les lieux, n'a donc pas fait preuve d'arbitraire en considérant que le projet litigieux ne portait pas atteinte au site villageois, selon l'art. 106 LCI, et qu'il pouvait bénéficier d'une dérogation aux règles sur les distances aux limites.
 
Certes, l'extension prévue aurait pour effet de masquer le jour existant au rez-de-chaussée du bâtiment n° 44. La question de savoir si le recourant peut se prévaloir de ce jour pour s'opposer à l'implantation de la construction en limite de propriété, au regard notamment de la convention passée le 6 octobre 1988, dont il paraît avoir eu connaissance, relève du droit privé, dans la mesure où la dérogation accordée en vertu de l'art. 106 LCI est en accord avec le principe de contiguïté qui est de mise en zone protégée. A cet égard, il ne serait certainement pas admissible de délivrer un permis de construire pour un projet à la réalisation duquel le voisin aurait de sérieuses chances de s'opposer avec succès sur le plan civil. Cette question est pour le moins délicate en l'occurrence dans la mesure où la parcelle n° 4653 ne bénéficie d'aucune servitude de vue ou de jour grevant les parcelles voisines nos 4662 et 5047, qui lui permettrait d'utiliser le jour existant comme vue droite ou qui l'autoriserait à rétablir les anciennes ouvertures, voire à en créer de nouvelles. Dans ces conditions, le recourant ne saurait se prévaloir de la présence d'une ouverture en façade ouest du bâtiment n° 44 pour s'opposer au projet de l'intimée sous l'angle du droit public. L'octroi du permis de construire étant conforme aux prescriptions de police des constructions, une atteinte au droit de propriété du recourant n'entre pas en considération. Le grief tiré d'une violation de l'art. 26 al. 1 Cst. est mal fondé.
 
5.
 
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Ce dernier versera des dépens à l'intimée qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un mandataire professionnel (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Une indemnité de 2'000 fr. est allouée à l'intimée à titre de dépens, à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, ainsi qu'au Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement et au Tribunal administratif du canton de Genève.
 
Lausanne, le 25 novembre 2003
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).