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Informationen zum Dokument  BGer 1A.149/2003  Materielle Begründung
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BGer 1A.149/2003 vom 27.10.2003
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1A.149/2003 /col
 
Arrêt du 27 octobre 2003
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Nay, Vice-président
 
du Tribunal fédéral, Reeb, Féraud et Catenazzi.
 
Greffier: M. Kurz.
 
Parties
 
V.________,
 
recourant, représenté par Me Michel A. Halpérin, avocat, avenue Léon-Gaud 5, 1206 Genève,
 
contre
 
Ministère public de la Confédération,
 
Taubenstrasse 16, 3003 Berne.
 
Objet
 
entraide judiciaire internationale en matière pénale à la Belgique,
 
recours de droit administratif contre l'ordonnance du Ministère public de la Confédération du 6 juin 2003.
 
Faits:
 
A.
 
Le 27 septembre 2002, un Juge d'instruction de Bruxelles a adressé au Ministère public de la Confédération (MPC) une demande d'entraide judiciaire formée pour les besoins d'une enquête dirigée notamment contre K.________, ressortissante du Burundi domiciliée en Belgique, pour blanchiment de capitaux. Complétée les 21 et 25 octobre 2002, la demande expose que K.________ aurait été autorisée par un groupe de rebelles congolais, contre financement, à exploiter illégalement des gisements de coltan. Les mines étaient exploitées par la société M.________ (détenue par K.________), et le minerai commercialisé par la société belge C.________, gérée par V.________, citoyen belge. Les fonds provenant de l'exploitation étaient acheminés en Suisse sur des comptes détenus par K.________ ou des sociétés détenues par ses propres enfants, soit la société S.________ et la société G.________. Lors d'une perquisition au siège de C.________, des indices d'achats, de location et de transport de matériel militaire auraient été découverts. L'autorité requérante demande notamment d'identifier les avoirs détenus en banque par K.________ et les différentes personnes physiques ou morales soupçonnées.
 
B.
 
Le 14 novembre 2002, le MPC est entré en matière. Le 6 novembre 2002, la banque X.________ fit savoir que deux comptes mentionnés dans la demande étaient détenus respectivement par V.________ et J.________. Des précisions sur cette dernière ont été fournies le 14 novembre 2002 par la même banque. Le 20 novembre 2002, la banque Y.________ fit état de versements en faveur de S.________ et M.________. Les 26 novembre et 3 décembre 2002, la banque Z.________ a bloqué deux comptes détenus par K.________ et M.________ et apporté des précisions sur des comptes détenus par ces personnes. Le 20 février 2003, la banque W.________ a fait savoir, par son avocat, qu'elle avait bloqué les avoirs de S.________.
 
V.________ s'est adressé au MPC à plusieurs reprises au cours de la procédure. Il fit notamment état, le 14 novembre 2002, de contacts téléphoniques "quasi-quotidiens" entre le Procureur suisse et le Juge d'instruction de Bruxelles. Le Procureur lui répondit, le 20 novembre 2002, qu'il n'y avait eu qu'un entretien portant sur l'opportunité de révéler le contenu de la demande d'entraide, et deux contacts téléphoniques avec son assistant, concernant les précisions à apporter dans la demande ainsi que l'existence de relations bancaires en Suisse.
 
Le 2 décembre 2002, V.________ indiqua que lors de son interrogatoire le 27 novembre 2002 par les inspecteurs de police belges, ces derniers avaient fait état d'un compte détenu en suisse, et de son contenu; en outre, le Procureur suisse s'était rendu à Bruxelles le 25 novembre précédent et avait remis des informations. V.________ réclamait un inventaire des pièces et informations transmises aux autorités belges.
 
Le 3 décembre 2002, le Procureur suisse produisit un inventaire des informations remises spontanément en application des art. 10 CBl et 67a EIMP. Il s'agit d'un tableau synoptique daté du 22 novembre 2002 et portant le sceau du MPC, mentionnant les différents comptes découverts en Suisse, précisant leurs références, leurs détenteurs et ayants droit, les procurations, les dates d'ouverture et de clôture, la monnaie et le solde disponible. Il en ressort notamment que V.________ est titulaire d'un compte auprès de la banque X.________, clôturé le 5 novembre 2001, d'un compte ouvert du 10 janvier au 9 octobre 2002 auprès de la banque Y.________, d'un compte ouvert le 10 janvier 2002 et présentant un solde de 7,4 millions d'US$, ainsi que d'un coffre auprès de la même banque, dont le contenu n'est pas révélé. Il était précisé qu'aucun autre document n'avait été remis aux autorités belges.
 
Par lettre du 9 décembre 2002, V.________ s'est plaint de la transmission de ce qui, à ses yeux, ne constituait pas seulement une information, mais un véritable moyen de preuve, alors qu'une demande d'entraide avait déjà été présentée. La restitution de ce document était requise. Le même jour, l'Office fédéral de la justice (OFJ) rappela au MPC les conditions d'une transmission spontanée, en se demandant "si il n'y aurait pas lieu de «légaliser» cette transmission spontanée d'informations selon les formes arrêtées par le Tribunal fédéral (cf. ATF 125 II 238, spéc. consid. 6c et d), ne serait-ce que pour éviter que les autorités belges n'utilisent dans leur procédure des informations obtenues de manière contraire au droit suisse, ce qui serait susceptible, à terme, de leur porter préjudice".
 
Le 11 décembre 2002, le Procureur refusa de rendre une décision formelle sur ce point. Le 13 décembre suivant, il s'adressa néanmoins au Juge d'instruction de Bruxelles pour lui rappeler que les moyens de preuve touchant au domaine secret devaient servir à la présentation d'une demande d'entraide, joignant à son envoi une copie de l'art. 67a EIMP.
 
Dans de nouveaux courriers des 11 et 21 février 2003, V.________ relevait notamment que le juge d'instruction belge n'avait pas pu établir le caractère illicite du commerce de coltan, compte tenu notamment d'un rapport d'un groupe d'experts de l'ONU mettant K.________ hors de cause. Le juge aurait alors orienté son enquête sur les questions d'évasion fiscale. Selon les autorités belges, la réserve émise le 13 décembre 2002 n'avait pour but que de "couvrir" les autorités suisses, et ne changeait rien à l'utilisation des documents en Belgique.
 
C.
 
Le 6 juin 2003, après avoir tenté en vain d'obtenir l'accord des parties concernées à une exécution simplifiée, le MPC a prononcé la clôture de la procédure, et la transmission à l'autorité requérante - sous la réserve de la spécialité - des documents suivants:
 
- la lettre du 6 novembre 2002 de la banque X.________;
 
- la lettre du 14 novembre 2002 de la banque X.________ et ses 5 annexes;
 
- la lettre du 20 novembre 2002 de la banque Y.________;
 
- la lettre du 26 novembre 2002 de la banque Z.________;
 
- la lettre du 3 décembre 2002 de la banque Z.________;
 
- la lettre du 20 février 2003 de l'avocat de W.________.
 
D.
 
V.________ forme un recours de droit administratif contre cette dernière décision, ainsi que contre la transmission spontanée intervenue le 25 novembre 2002. Il conclut à l'irrecevabilité de la demande d'entraide et de ses compléments, à l'annulation des décisions d'entrée en matière et de clôture, ainsi qu'au refus de toute transmission d'information ou document; il demande en outre que le MPC obtienne la restitution des pièces remises le 25 novembre 2002. Subsidiairement, il demande la suspension de la procédure d'entraide jusqu'à ce que l'Etat requérant ait donné des garanties que les documents remis ne seront pas utilisés à des fins fiscales.
 
Le MPC se réfère à sa décision de clôture et s'en remet à justice. L'OFJ conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Interjeté dans le délai et les formes utiles contre une décision de clôture rendue par l'autorité fédérale d'exécution, le recours de droit administratif est recevable (art. 80g al. 1 de la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide internationale en matière pénale [EIMP; RS 351.1]).
 
1.1 La décision du MPC porte sur différents documents remis par des établissements bancaires.
 
Dans sa lettre du 6 novembre 2002, la banque X.________ indique notamment que le recourant est titulaire et bénéficiaire d'un compte dont elle indique les références, ainsi que les dates d'ouverture et de clôture. Les relevés ne sont pas joints à cet envoi. La lettre du 14 novembre 2002 de la même banque, avec annexes, concerne le compte de J.________. Dans sa lettre du 20 novembre 2002, la banque Y.________ indique qu'il n'existe pas en ses livres de compte n° xxx; il est fait état d'un autre compte dont les documents auraient été remis précédemment, mais la transmission ne porte pas sur ces documents. Dans ses lettres des 26 novembre et 3 décembre 2002, la banque Z.________ mentionne plusieurs comptes dont le recourant n'est ni titulaire, ni bénéficiaire. Enfin, la lettre de la banque W.________ du 20 février 2003 concerne un compte de S.________. Sur l'ensemble de ces documents, le recourant n'est directement concerné que par l'indication figurant dans la lettre du 6 novembre 2002. Faute de toute indication précise sur l'utilisation de ce compte (en l'absence de documentation bancaire comme les relevés et justificatifs), on peut s'interroger sur l'utilité de ce renseignement pour l'autorité requérante. Le recourant n'en est pas moins légitimé à recourir, en vertu des art. 80h let. b EIMP et 9a let. a OEIMP.
 
1.2 Le recours est également dirigé contre la transmission, qualifiée de "spontanée", effectuée le 25 novembre 2002. En réalité, comme cela est relevé ci-dessous, il faut voir dans cet acte une exécution, partielle et anticipée, de l'entraide requise, soumis à recours au même titre qu'une ordonnance de clôture. Même s'il s'agissait réellement d'une transmission spontanée au sens de l'art. 67a EIMP, le recours de droit administratif serait ouvert (ATF 125 II 356 consid. 3a p. 361). Le document remis à cette occasion consiste en un tableau où figurent les différents titulaires des comptes ouverts dans les banques précitées, avec indications du numéro, de l'ayant droit, des procurations, des dates d'ouverture et de clôture, ainsi que du solde. Le recourant y figure comme détenteur de deux comptes, l'un ouvert du 10 janvier au 9 octobre 2002, et l'autre présentant un solde de 7'428'878 US$ auprès de la banque Y.________, d'un coffre auprès du même établissement (dont le contenu n'est pas révélé), ainsi que du compte auprès de la banque X.________. Ce document, qui porte le sceau du MPC, peut avoir une certaine valeur probante, même s'il ne permet pas déterminer l'utilisation et la provenance des avoirs mentionnés. Le recourant a dès lors aussi qualité pour recourir sur ce point, dans la mesure où ces renseignements le concernent.
 
1.3 Saisi d'un recours de droit administratif dirigé contre une mesure d'entraide judiciaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les conclusions des parties (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts cités). Il examine librement dans quelle mesure la coopération internationale doit être accordée, et statue avec une cognition pleine sur les griefs soulevés sans être cependant tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137).
 
2.
 
L'entraide judiciaire entre la Belgique et la Suisse est régie par la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (CEEJ; RS 0.351.1). Compte tenu des délits pour lesquels l'entraide est requise, les règles sur la coopération internationale de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, conclue à Strasbourg le 8 novembre 1990 et entrée en vigueur le 11 septembre 1993 pour la Suisse et le 1er mai 1998 pour la Belgique (CBl; RS 0.311.53), sont également applicables. Les dispositions de ces instruments internationaux l'emportent sur le droit autonome qui régit la matière. Celui-ci reste toutefois applicable aux questions non réglées, explicitement ou implicitement, par le droit conventionnel, et lorsqu'il se révèle plus favorable à l'entraide (ATF 123 II 134 consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142; 120 Ib 120 consid. 1a p. 122/123, 189 consid. 2a p. 191/192; 118 Ib 269 consid. 1a p. 271, et les arrêts cités).
 
3.
 
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 67a EIMP. Selon lui, les renseignements figurant dans le tableau remis par le MPC constitueraient des moyens de preuve, puisque les références exactes des comptes y sont mentionnées. Les autorités belges les avaient d'ailleurs utilisés lors de différents interrogatoires de police, ainsi qu'à l'occasion de la prolongation de la détention du recourant. Cette irrégularité ne pourrait pas être réparée après coup par l'octroi de l'entraide judiciaire, compte tenu du caractère essentiellement fiscal de l'enquête en Belgique, de la violation du principe de la spécialité et du fait que ces renseignements ne sont pas mentionnés dans l'ordonnance de clôture. Il y aurait donc lieu d'obtenir la restitution de ce document, ainsi que l'assurance qu'aucune copie n'est conservée et qu'il n'en sera pas fait usage dans l'Etat requérant.
 
3.1 Selon l'art. 67a EIMP, la transmission spontanée de renseignements à un Etat étranger est admissible lorsque cela peut permettre l'ouverture d'une poursuite pénale ou faciliter le déroulement d'une enquête en cours. Lorsqu'il s'agit d'informations touchant au domaine secret, une telle transmission n'est autorisée que si elle permet la présentation d'une demande d'entraide à la Suisse (al. 4 et 5). Le MPC s'est effectivement fondé sur cette disposition pour justifier la remise immédiate au Juge d'instruction de Bruxelles du tableau établi le 22 novembre 2002. Un procès-verbal de cette transmission a été dressé, conformément à l'art. 67a al. 6 EIMP.
 
3.2 La transmission spontanée est possible comme forme complémentaire ou anticipée de coopération internationale. Dans le premier cas, l'Etat, déjà saisi d'une demande d'entraide judiciaire, livre spontanément des informations propres à favoriser la procédure dans l'Etat requérant, mais qui n'ont pas été requises. Dans le second cas, les renseignements sont transmis indépendamment de toute procédure d'entraide, et sont propres à motiver une demande d'entraide (ATF 125 II 356 consid. 12b p. 366). Le but d'une telle transmission est d'éviter que des renseignements utiles à une procédure pénale demeurent inexploités faute d'information adéquate à l'autorité étrangère (idem).
 
Lorsqu'elle est saisie d'une demande d'entraide, l'autorité d'exécution ne peut procéder par transmission spontanée pour remettre tout ou partie des documents ou renseignements requis, car les règles ordinaires sur la procédure d'exécution, en particulier l'obligation de rendre une décision de clôture sujette à recours (art. 80d et 80g EIMP), s'en trouveraient contournées.
 
3.3 En l'occurrence, la demande d'entraide du 27 septembre tend au blocage des comptes de S.________. Le complément du 21 octobre 2001 tend à l'identification et au blocage des comptes détenus par ou pour les personnes physiques et morales mentionnées dans l'exposé des faits, notamment K.________ et la société G.________. Des précisions comme les dates d'ouverture et de clôture, les pouvoirs de signature et de gestion et les soldes actuels sont requises. Quatre comptes bancaires sont expressément mentionnés, dont un auprès de la banque X.________ censément détenu par la société G.________. V.________ ne figure pas dans la mission proprement dite, mais est mentionné comme gérant de C.________. Lors de l'exécution de la requête, il est apparu que le compte précité auprès de la banque X.________ était détenu par V.________. En outre, celui-ci détenait des comptes auprès de la banque Y.________, notamment deux comptes dont l'un avait servi à des versements en faveur de S.________ et M.________. Il apparaît par conséquent que les informations concernant le compte auprès de la banque X.________ répondent précisément à la demande d'entraide judiciaire; celles qui concernent les autres avoirs auprès de banque Y.________ pourraient aussi entrer, moyennant une légère extension de l'entraide requise, compatible avec le principe de la proportionnalité, dans le cadre de la mission définie par le Juge d'instruction de Bruxelles. Ce dernier ne demande pas formellement la remise de l'ensemble des documents bancaires, y compris les extraits et justificatifs, mais paraît se contenter d'informations livrées par l'autorité requise sur la base d'un examen des documents bancaires que cette dernière aurait elle-même effectué. Dans ces conditions, la remise du tableau récapitulatif apparaît comme un acte d'exécution, et ne peut être qualifiée de remise spontanée. Le MPC ne pouvait par conséquent se contenter d'une remise informelle, mais devait procéder par la voie d'une ordonnance de clôture.
 
3.4 La remise opérée par le juge d'instruction apparaît problématique à un second titre. La transmission spontanée, lorsqu'elle est admissible, doit se limiter à de pures informations; la remise de moyens de preuve est exclue par ce biais (art. 67a al. 4 EIMP; sur la notion de moyens de preuve, ATF 125 II 356 consid. 12c p. 367 et les auteurs cités par Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, Berne 1999, n° 237 et note 890). En l'occurrence, un document officiel de l'autorité suisse mentionnant les références des comptes, leurs dates d'ouverture et de clôture, l'identité des personnes habilitées à les faire fonctionner, ainsi que le montant des sommes qui s'y trouvent, est susceptible de confirmer les soupçons, voire même de permettre, moyennant des recoupements avec les autres renseignements disponibles, de fonder une condamnation, même si les mouvements des comptes ne sont pas indiqués dans le détail. La demande d'entraide ne tend d'ailleurs pas expressément à la production des documents bancaires, l'autorité requérante paraissant se contenter de simples informations délivrées par l'autorité d'exécution. On peut en déduire que de telles informations pourraient avoir, dans l'Etat requérant, une valeur probante suffisante.
 
La question peut demeurer indécise: qu'il s'agisse d'un véritable moyen de preuve ou d'une simple information, le tableau remis au Juge d'instruction de Bruxelles constitue un acte d'exécution de la demande d'entraide formée par celui-ci et devait, à ce titre, être soumis à la procédure ordinaire et faire l'objet d'une décision de clôture.
 
3.5 Le MPC s'est aussi fondé sur l'art. 10 CBl pour opérer sa transmission spontanée. Cette disposition a la teneur suivante :
 
Sans préjudice de ses propres investigations ou procédures, une Partie peut, sans demande préalable, transmettre à une autre partie des informations sur les instruments et les produits lorsqu'elle estime que la communication de ces informations pourrait aider la Partie destinataire à engager ou à mener à bien des investigations ou des procédures, ou lorsque ces informations pourraient aboutir à une demande formulée par cette Partie en vertu du présent chapitre.
 
Cette disposition ne saurait, elle non plus, justifier une remise spontanée à n'importe quelles conditions, indépendamment des règles relatives à la procédure d'entraide judiciaire ordinaire, découlant de la CEEJ ou du droit interne. Il s'agit en effet d'une disposition potestative, qui n'impose nullement une remise spontanée d'informations: chaque Etat partie a la possibilité de prévoir une telle remise, et peut par conséquent en fixer les conditions, plus ou moins restrictivement. Ainsi, dans son message concernant la ratification de la CBl, le Conseil fédéral a estimé, avec raison, que l'art. 10 CBl n'imposait aucune obligation aux Etats parties et que, par ailleurs, une transmission spontanée pouvait être soumise à une condition de confidentialité (art. 33 al. 3 CBl; FF 1992 VI 8 ss, p. 23). Le système prévu par la Convention n'est d'ailleurs pas différent de celui institué par l'EIMP. L'art. 10 CBl prévoit que les informations transmises spontanément peuvent notamment aboutir à une demande formelle au sens de l'art. 8 CBl. Il n'est donc pas possible de recourir systématiquement à la transmission spontanée, sans quoi les règles spécifiques de la Convention relatives aux demandes formelles d'entraide judiciaire (notamment les art. 27 ss CBl) ne seraient plus d'aucune utilité. Cela implique aussi que l'on puisse faire une distinction entre, d'une part, les simples informations visées par l'art. 10 CBl et, d'autre part, les moyens ou "éléments" de preuve proprement dits, visés spécifiquement aux art. 8, 32 et 33 CBl. Par conséquent, l'application de la CBl ne saurait justifier une transmission spontanée à des conditions plus larges que celles prévues par le droit fédéral.
 
3.6 Selon la jurisprudence, lorsque des renseignements ou moyens de preuve font l'objet d'une transmission prématurée, il n'y a pas forcément lieu d'en demander la restitution. Le vice peut en effet encore être réparé par la suite lorsqu'il apparaît, après avoir permis aux parties intéressées de faire valoir leurs objections, que les conditions d'octroi de l'entraide judiciaire sont réalisées et que les documents litigieux doivent de toute façon aboutir en mains de l'autorité requérante (ATF 125 II 238 consid. 6a p. 246; arrêt 1A.168/1996 du 7 novembre 1996, consid. 3d/cc).
 
Une telle réparation n'est toutefois pas possible en l'occurrence, dès lors que la décision de clôture du 6 juin 2003 porte sur différentes lettres remises par les banques, et que ces dernières ne contiennent pas tous les renseignements qui, s'agissant du recourant, figurent dans le tableau récapitulatif du 22 novembre 2002. Le recourant n'est donc pas à même, au travers de la décision de clôture, de faire valoir ses objections contre la transmission irrégulière qui l'a précédée. Il appartiendra par conséquent au MPC de rendre une décision formelle, susceptible de recours, contre la transmission au Juge d'instruction de Bruxelles des renseignements concernant le recourant, tels qu'ils figurent dans le tableau du 22 novembre 2002. Compte tenu de la possibilité d'une régularisation de cette transmission, il n'y a pas lieu, en l'état, d'exiger une restitution de cette pièce ou des assurances de l'Etat requérant quant à son utilisation.
 
4.
 
Invoquant l'art. 3 EIMP et le principe de la spécialité, le recourant estime que l'enquête menée en Belgique prendrait une orientation exclusivement fiscale. Les renseignements transmis en novembre 2002 auraient déjà été utilisés par les enquêteurs belges, en particulier lors de l'interrogatoire du 17 février 2003. A cette occasion, le recourant avait été interrogé sur l'absence de mention de ses comptes en Suisse dans son dossier fiscal, les enquêteurs ayant ajouté que les revenus déclarés par le recourant ne lui permettaient pas d'avoir autant d'argent en Suisse. La Chambre des mises en accusation aurait elle aussi tenu compte des renseignements figurant dans le tableau remis par le MPC pour fixer le montant de la caution imposée au recourant. Selon les propos de l'Avocat Général (relatés par les avocats du recourant en Belgique), la réserve émise par le MPC le 13 décembre 2002 ne servirait qu'à "couvrir" les autorités suisses, et était sans incidence sur la procédure en Belgique.
 
4.1 Selon l'art. 3 al. 3 EIMP, applicable en vertu de l'art. 2 let. a CEEJ, la demande d'entraide est irrecevable si la procédure étrangère vise un acte qui paraît tendre à diminuer les recettes fiscales; l'entraide peut en revanche être accordée pour la répression d'une escroquerie fiscale.
 
Selon l'art. 67 EIMP (dont l'application est réservée par la Suisse à propos de l'art. 2 CEEJ), les renseignements et documents obtenus par voie d'entraide ne peuvent, dans l'Etat requérant, ni être utilisés aux fins d'investigation ni être produits comme moyens de preuve dans une procédure pénale visant une infraction pour laquelle l'entraide est exclue. Ces infractions sont celles qui figurent à l'art. 3 EIMP (ATF 124 II 184 consid. 4b p. 187); il s'agit en particulier des délits fiscaux. Il appartient toutefois à l'Etat requis d'indiquer clairement les conditions auxquelles l'art. 5 CEEJ permet de subordonner l'octroi de sa collaboration. A défaut, il ne saurait être question d'une violation du principe de la spécialité.
 
4.2 La demande d'entraide est exclusivement formée pour les besoins d'une procédure pénale, les infractions poursuivies (blanchiment d'argent) donnant manifestement lieu à l'entraide. Le recourant évoque certains éléments à décharge, notamment un rapport du Conseil de sécurité de l'ONU qui mettrait K.________ hors de cause. Ce genre d'arguments n'a pas sa place dans le cadre d'une requête d'entraide judiciaire: c'est aux autorités de l'Etat requérant qu'il appartiendra de décider du sort de la poursuite. Quand bien même il existerait certains éléments susceptibles de mettre hors de cause les personnes poursuivies dans l'Etat requérant, seul le retrait de la demande pourrait, en dehors des cas prévus aux art. 5 EIMP, mettre fin à la procédure d'entraide ouverte en Suisse.
 
De son côté, en tant que partie à la CEEJ, la Belgique bénéficie d'une présomption de respect des conditions posées par la Suisse en matière d'entraide judiciaire. Une telle présomption ne saurait être renversée que sur la base d'éléments de preuve incontestables. En effet, il va de soi que les Etats liés par la CEEJ se conforment à leurs engagements internationaux, tel le respect de la règle de la spécialité, sans qu'il soit nécessaire de le leur faire préciser dans une déclaration expresse (ATF 129 II 384, consid. 4 non publié; ATF 115 Ib 373 consid. 8 p. 377; 107 Ib 64 consid. 4b p. 272, et les arrêts cités). Sauf circonstances particulières, l'Etat requérant est réputé observer fidèlement et scrupuleusement les obligations que le traité met à sa charge (ATF 118 Ib 547 consid. 6b p. 561; 110 Ib 392 consid. 5b p. 394/395; 107 Ib 264 consid. 4b p. 272; 104 Ia 49 consid. 5b p. 56-60).
 
4.3 Dans le cas d'espèce, si les enquêteurs ont eu accès au dossier fiscal du recourant, cela ne signifie pas encore que la réciproque soit vraie et que les autorités fiscales aient accès au dossier pénal, voire que des informations leur soient directement transmises. En l'état, les renseignements remis par le MPC ont été utilisés, certes prématurément, mais uniquement par les autorités de poursuite pénale (police, chambre d'accusation). L'allusion aux déclarations fiscales du recourant tend manifestement à faire avouer par ce dernier l'origine des fonds qui ont abouti sur son compte en Suisse. Le recourant ne prétend pas qu'il ferait l'objet d'une quelconque mesure de la part des autorités fiscales. L'affirmation d'un magistrat belge selon laquelle la réserve formulée par le MPC serait sans portée, ne paraît pas non plus avoir été faite en vue d'autoriser une utilisation des renseignements transmis à des fins fiscales. On ne saurait d'ailleurs perdre de vue que, jusqu'à présent, aucune réserve formelle et claire n'a été émise à propos de la spécialité. La transmission spontanée n'a fait l'objet d'aucune réserve, et l'intervention après coup du MPC, par lettre du 13 décembre 2002, se borne à préciser que les renseignements touchant au domaine secret ne peuvent être obtenus que par la voie ordinaire de l'entraide judiciaire, sans restreindre de manière claire l'utilisation des renseignements déjà transmis. Pour l'instant, la Suisse n'a donc pas fait usage de la faculté réservée à l'art. 5 CEEJ, de sorte que l'autorité requérante ne saurait se voir adresser aucun reproche.
 
Il en ira différemment lorsque l'ordonnance de clôture lui sera communiquée, avec les réserves habituelles relatives au principe de la spécialité. L'Etat requérant se trouvera alors lié par les conditions posées par la Suisse, et il n'y a actuellement aucune raison de penser qu'il se soustraira à ses obligations. Si, malgré cela, le recourant peut démontrer par la suite que le principe de la spécialité a été violé, il lui incombera de faire valoir cet argument devant le juge du fond, voire de saisir l'OFJ d'une dénonciation au sens de l'art. 71 PA ou d'une demande d'intervention auprès des autorités belges afin de leur rappeler la portée du principe de la spécialité. En l'état, on ne se trouve pas dans une situation d'abus répétés qui commanderait au Tribunal fédéral d'intervenir déjà au stade de l'entraide (cf. Zimmermann, op. cit. n° 484; cf. également ATF 125 II 384 consid. 4.2 non publié; arrêt 1A.161/2000 du 15 juin 2000, consid. 4).
 
5.
 
Pour le surplus, le recourant ne soutient pas que les autres conditions d'octroi de l'entraide judiciaire ne seraient pas réunies, s'agissant des pièces faisant l'objet de la décision de clôture. En particulier, compte tenu des renseignements très limités qui figurent dans les courriers bancaires, le principe de la proportionnalité paraît manifestement respecté.
 
6.
 
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être admis en tant qu'il est dirigé contre la transmission du 25 novembre 2002, le MPC étant invité à rendre une décision de clôture formelle à cet égard, portant sur les renseignements qui concernent le recourant. Le recours doit en revanche être rejeté en tant qu'il est dirigé contre l'ordonnance de clôture du 6 juin 2003. Le recourant n'obtient que très partiellement gain de cause, sur une question formelle, l'essentiel de ses conclusions principales et subsidiaires étant pour le surplus rejeté. Il convient de mettre à sa charge un émolument judiciaire réduit, et de lui allouer des dépens, également réduits, à la charge du MPC.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours de droit administratif est admis au sens des considérants. Le MPC est invité à rendre une décision formelle de clôture concernant la remise à l'autorité requérante des renseignements concernant le recourant et figurant dans le tableau récapitulatif daté du 25 novembre 2002. Le recours est rejeté pour le surplus, et la décision de clôture du 6 juin 2003 est confirmée.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Une indemnité de dépens de 1'000 fr. est allouée au recourant, à la charge du Ministère public de la Confédération.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et au Ministère public de la Confédération ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice (B 135 875 BOT).
 
Lausanne, le 27 octobre 2003
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
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