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Informationen zum Dokument  BGer U 319/2000  Materielle Begründung
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BGer U 319/2000 vom 08.05.2003
 
Eidgenössisches Versicherungsgericht
 
Tribunale federale delle assicurazioni
 
Tribunal federal d'assicuranzas
 
Cour des assurances sociales
 
du Tribunal fédéral
 
Cause
 
{T 7}
 
U 319/00
 
Arrêt du 8 mai 2003
 
IVe Chambre
 
Composition
 
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari. Greffière : Mme von Zwehl
 
Parties
 
L.________, recourant,
 
contre
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Service juridique, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,
 
Instance précédente
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
 
(Jugement du 17 juin 1999)
 
Faits :
 
A.
 
L.________ a travaillé au service de l'entreprise X.________ SA de 1959 à 1992, date de son licenciement pour des motifs économiques. A ce titre, il était assuré auprès de la Caisse nationale suisse en cas d'accidents (CNA) contre le risque d'accidents professionnels et non professionnels, ainsi que de maladie professionnelle.
 
Le 1er mars 1996, le docteur A.________, médecin traitant, a adressé une lettre à la CNA, en indiquant que L.________ souffrait d'un asthme bronchique et d'une cardiopathie ischémique ayant nécessité une intervention chirurgicale au mois de janvier 1996, et que la symptomatologie de ces affections avait probablement été aggravée par l'exposition du prénommé à des vapeurs d'huile soufrée, de benzine et d'acétone lors de son activité auprès de X.________ SA. Ce praticien sollicitait par conséquent l'ouverture d'une instruction pour déterminer dans quelle mesure l'état de santé de son patient était imputable à une maladie professionnelle, tout en soulignant que cinq autres employés ayant travaillé au même endroit avaient également présenté des bronchites chroniques. A l'appui de cette demande, il a en outre produit plusieurs rapports médicaux de divers spécialistes consultés par L.________ depuis 1980.
 
La CNA a alors chargé le docteur B.________, de sa division de médecine du travail, de procéder à une inspection locale du poste de travail de l'assuré. Au terme de son examen, ce médecin a conclu que les opérations (de rodage, de rectifiage et de honage) effectuées dans l'atelier en cause ne produisaient pas des quantités d'aérosols ou de vapeurs suffisamment importantes pour entraîner une irritation des voies respiratoires (rapport du 15 mars 1996). Après avoir pris connaissance de ce rapport, l'assuré en a contesté les conclusions, faisant valoir qu'il contenait de nombreuses inexactitudes quant à ses conditions de travail, en particulier la manière dont l'atelier était aménagé à l'époque où il y travaillait, et les quantités de substances nocives qui en émanaient. Le docteur B.________ s'est déterminé sur ces critiques dans un rapport complémentaire du 13 mars 1997 en maintenant ses conclusions précédents; selon lui, même si l'on devait se baser sur les données décrites par l'assuré, rien ne permettait d'affirmer que celui-ci aurait été confronté à des concentrations de substances toxiques dépassant les valeurs limites d'exposition.
 
Se fondant sur l'avis de son médecin-conseil, la CNA a refusé de répondre du cas, considérant que les troubles présentés par l'assuré ne pouvaient pas, avec certitude ou grande probabilité, être mis sur le compte de son activité professionnelle (décision du 24 mars 1997). Sur opposition de l'assuré elle a confirmé sa prise de position dans une nouvelle décision du 18 juin 1997.
 
B.
 
L'assuré a déféré cette décision au Tribunal des assurances du canton de Vaud, en concluant, sous suite de dépens, principalement, à l'octroi des prestations de l'assurance-accidents en cas de maladie professionnelle et, subsidiairement, à la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise. Il a également requis l'audition de plusieurs témoins, dont des anciens employés de X.________ SA.
 
Le tribunal a fait droit à cette requête. Par jugement du 17 juin 1999, il a débouté l'assuré de toutes ses conclusions, retenant que les éléments contenus au dossier permettaient seulement de conclure à une relation de causalité possible entre sa maladie et son exposition aux substances incriminées.
 
C.
 
L.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation, en reprenant ses conclusions formulées en première instance.
 
La CNA conclut au rejet du recours, tandis que la SWICA Organisation de santé, invitée à se déterminer en tant que de co-intéressée, propose son admission. De son côté, l'Office fédéral des assurances sociales n'a pas présenté de détermination.
 
Considérant en droit :
 
1.
 
Le recourant se plaint tout d'abord d'une violation de son droit d'être entendu du fait qu'il n'a pas été présent lors de l'inspection locale à son ancien lieu de travail par le docteur B.________.
 
2.
 
2.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 127 V 437 consid. 3d/aa, 126 V 132 consid. 2b et les arrêts cités). Exceptionnellement, la violation du droit d'être entendu - pour autant qu'elle ne soit pas d'une gravité particulière - peut être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen (ATF 126 I 72, 126 V 132 consid. 2b et les références; voir également Moor, Droit administratif, vol. II, p. 190).
 
2.2 Dans un arrêt publié aux ATF 121 V 150, le Tribunal fédéral a jugé que si la CNA procède à une inspection locale avant de rendre une décision, elle doit, au plus tard au cours de la procédure d'opposition, donner l'occasion à l'assuré de s'exprimer à ce sujet sous une forme satisfaisant aux critères de droit, et l'informer de la possibilité de requérir une nouvelle inspection locale. En l'occurrence, on peut considérer que le recourant a eu la faculté de faire valoir ses arguments devant la CNA. Il a en effet pu se déterminer en détail sur le rapport du docteur B.________ (du 15 mars 1996) dont il a eu connaissance fin janvier 1997 par l'intermédiaire de son avocat, et soulever un certain nombre d'objections relativement à ses conditions de travail auxquelles le médecin prénommé a au demeurant répondu point par point dans une nouvelle appréciation médicale (du 13 mars 1997). Rien au dossier ne permet cependant de retenir que l'intimée aurait également rendu attentif le recourant au fait qu'il pouvait solliciter une nouvelle inspection locale au stade de la procédure d'opposition. En ce sens, il y a lieu de reconnaître l'existence d'une violation de son droit d'être entendu. La gravité de cette violation doit toutefois être relativisée dans le cas particulier. Tout d'abord, l'intimée s'est fondée sur un ensemble de preuves et non pas uniquement sur le rapport d'inspection locale du docteur B.________ pour rendre sa décision. Ensuite, le tribunal cantonal a encore complété l'instruction de la cause par l'audition de plusieurs témoins et du médecin-conseil de la CNA. Enfin, à elle seule, cette mesure d'instruction ne revêt pas, comme on le verra ci-après, une importance décisive pour la solution du litige. Dès lors que le recourant a tout de même eu, au long de la procédure, l'occasion d'exposer son point de vue, il convient d'admettre que le vice a été réparé.
 
3.
 
Les premiers juges ont correctement exposé la réglementation légale sur les maladies professionnelles - laquelle se fonde sur un système combiné d'une liste (art. 9 al. 1 LAA; Annexe I de l'OLAA) et d'une clause générale (art. 9 al. 2 LAA) -, ainsi que les principes jurisprudentiels développés à propos de chacune des dispositions précitées. Il suffit par conséquent d'y renvoyer.
 
4.
 
En l'occurrence, il est constant que le recourant a été exposé, dans son activité professionnelle, à des émanations d'acétone, de benzine et d'huile soufrée, soit des produits énumérés dans la liste des substances nocives dressée par le Conseil fédéral (Annexe I de l'OLAA), et qu'il souffre d'asthme, diagnostic posé pour la première fois en 1979 par son médecin traitant de l'époque, le docteur C.________ (cf. dossier médical).
 
Le présent cas relève donc de l'art. 9 al. 1 LAA, comme l'a jugé à raison la juridiction cantonale. Pour qu'on puisse admettre l'existence d'une maladie professionnelle, il faut dès lors que l'affection présentée par L.________ ait été provoquée (ou le cas échéant aggravée) pour plus de 50 % par l'action des substances nocives en cause (cf. ATF 119 V 200 consid. 2a et la référence).
 
5.
 
5.1 Pour l'essentiel, le recourant reproche aux juges cantonaux d'avoir écarté sa demande de mise en oeuvre d'une expertise et de s'être fondé, pour trancher le litige, sur une constatation inexacte des faits. Réitérant les critiques qu'il avait adressées en cours de procédure aux rapports du docteur B.________, il invoque la nécessité d'une instruction complémentaire qui tienne compte des conditions de travail qui avaient été les siennes de 1979 à 1992. A ses yeux, l'appréciation du médecin conseil de la CNA n'a aucune valeur scientifique et repose sur des observations qui ne correspondent pas à la réalité de ce qu'il a vécu au long de son activité auprès de X.________ SA. Par exemple, le docteur B.________ avait à tort considéré que dès 1981, l'atelier où il travaillait était conforme aux prescriptions de la CNA en matière de prévention des accidents et des maladies professionnelles.
 
5.2 En ce qui concerne la valeur probante d'un rapport médical, ce qui est déterminant c'est que les points litigieux aient fait l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu'il ait été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient dûment motivées. Au demeurant, l'élément déterminant pour la valeur probante n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).
 
Le juge peut accorder une valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins de la CNA aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard d'un assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérées comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'objectivité de l'expert (ATF 125 V 353 consid. 3b/ee).
 
5.3 On peut certes admettre que la configuration de l'atelier à la date de l'inspection du docteur B.________ n'était pas identique à celle que l'assuré a connu de 1979 à 1992; ce médecin en a cependant tenu compte comme cela ressort des remarques qu'il a consignées dans son rapport du 15 mars 1996. Par ailleurs, il a pu examiner chaque type de machines que L.________ avait été amené à utiliser durant son travail, ainsi que leurs modes de fonctionnement respectifs. On ne saurait donc suivre le recourant lorsqu'il affirme que les conclusions du médecin-conseil de la CNA sont dénuée de toute valeur, ce d'autant que ce dernier s'est prononcé point par point sur ses objections (cf. rapport du 13 mars 1997). A cet égard, si le docteur B.________ est parti de l'idée que X.________ SA avait procédé aux modifications suggérées en 1981 par la CNA - ce qui n'est effectivement pas démontré -, il n'en a pas moins également réévalué le cas à la lumière des précisions apportées par l'assuré. Surtout, il a étayé son opinion sur les rapports des médecins traitants produits à l'appui de la demande de prestations. Or, aucun de ces médecins n'a fait état d'une relation certaine ou hautement probable entre l'activité professionnelle de leur patient et l'asthme dont celui-ci est atteint, ce qui pourrait d'ailleurs expliquer qu'aucun d'entre eux n'a jamais préconisé un changement de profession. Le docteur C.________, qui avait connaissance des conditions de travail du recourant, a, il est vrai, évoqué à maintes reprises la possibilité d'une origine professionnelle de l'affection asthmatique; cette hypothèse n'a toutefois pas trouvé confirmation auprès des médecins spécialistes auxquels le docteur C.________ a adressé son patient (voir les rapports des docteurs D.________ et E.________, respectivement des 27 décembre 1980 et 6 juin 1985). Ces derniers n'ont en effet diagnostiqué aucune allergie aux substances utilisées par X.________ SA; en tout cas, il ne ressort pas de leurs appréciations qu'ils ont établi un rapport de cause à effet entre l'exposition de l'assuré aux produits incriminés et son asthme. Même les docteurs F.________ et A.________, qui l'ont examiné après 1992, n'ont pas pu mettre en évidence, à raison de plus de 50%, un tel lien de causalité (cf. rapports 29 décembre 1995 et 7 juin 1996). On ne peut rien conclure non plus des divers témoignages recueillis en cours de procédure qui sont plutôt contradictoires.
 
Il n'existe donc pas, en l'occurrence, de circonstances propres à ébranler la crédibilité des constatations et conclusions du docteur B.________ dont le rapport remplit au demeurant toutes les exigences posées par la jurisprudence pour qu'on puisse lui accorder pleine valeur probante. A lui seul, le fait - incontesté - que le recourant a été exposé à des substances nocives ne saurait justifier ici la mise en oeuvre d'une contre-expertise.
 
Aussi, la CNA était-elle fondée, par sa décision sur opposition du 18 juin 1997, à nier tout droit à prestations. Le recours se révèle mal fondé.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
3.
 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à SWICA Organisation de santé, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 8 mai 2003
 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
 
La Présidente de la IVe Chambre: La Greffière:
 
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