BGer 4A_450/2017
 
BGer 4A_450/2017 vom 12.03.2018
 
4A_450/2017
 
Arrêt du 12 mars 2018
 
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges Kiss, présidente, Klett et May Canellas.
Greffier: M. Carruzzo.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________,
toutes deux représentées par Me Pascal Dévaud,
recourantes,
contre
Z.________, représentée par Mes Bernd Ehle et Pierre-Olivier Allaz,
intimée.
Objet
arbitrage international,
recours en matière civile contre la sentence finale
rendue le 9 août 2017 par l'arbitre unique
(cause CCI n° 20794 / ZF/AYZ).
 
Faits:
A. Le 25 janvier 2015, A.________ et B.________ (ci-après: les demanderesses), deux sociétés apparentées ayant leur siège à Doha (Qatar), se fondant sur la clause compromissoire insérée dans le contrat d'agence (ci-après: le contrat) que la première d'entre elles avait conclu le 1er octobre 1978 avec la société Z.________ (ci-après: la défenderesse),..., en vue de la distribution exclusive au Qatar des ascenseurs et escaliers roulants de la marque U.________, ont introduit une requête d'arbitrage contre cette société auprès de la Chambre de Commerce Internationale (CCI). Un arbitre unique (ci-après: l'arbitre) a été désigné en la personne d'un avocat d'une étude genevoise, le siège de l'arbitrage a été fixé à Genève et l'anglais a été désigné comme langue de la procédure.
Le différend soumis à l'arbitrage portait essentiellement sur l'interprétation d'une clause du contrat relative à la fin de ce dernier. Selon les demanderesses, comme le contrat était de durée indéterminée, il ne pouvait pas être résilié unilatéralement par l'une des cocontractantes, étant donné qu'une disposition spécifique et impérative du droit qatari accorde à l'autorité compétente pour trancher les litiges issus du contrat (un juge ou un arbitre) le pouvoir de se prononcer sur la validité de toute résiliation. Pour la défenderesse, en revanche, le contrat était de durée déterminée, si bien qu'il pouvait y être mis fin, une fois sa durée initiale de deux ans échue, moyennant un simple préavis de 120 jours.
L'arbitre a rendu sa sentence finale le 9 août 2017. Il s'est rangé à l'avis de la défenderesse sur le point litigieux, a admis que le contrat avait pris fin le 23 janvier 2015 et, partant, a tiré les conclusions qui en découlaient relativement aux prétentions respectives que les parties avaient élevées devant lui.
B. Le 8 septembre 2017, les demanderesses (ci-après: les recourantes) ont formé un recours en matière civile, assorti d'une requête d'effet suspensif, aux fins d'obtenir l'annulation de divers chefs du dispositif de la sentence attaquée. Elles y dénoncent une violation de leur droit d'être entendues et de l'égalité des parties (art. 190 al. 2 let. d LDIP) et soutiennent que la sentence est incompatible avec l'ordre public (art. 190 al. 2 let. e LDIP).
Dans sa réponse, la défenderesse (ci-après: l'intimée) conclut au rejet du recours, tandis que l'arbitre ne s'est pas déterminé sur celui-ci.
La demande d'effet suspensif a été rejetée par ordonnance présidentielle du 29 novembre 2017.
Les recourantes, dans leur réplique du 6 novembre 2017, et l'intimée, dans sa duplique du 23 novembre 2017, ont maintenu leurs conclusions initiales. Les premières ont, en outre, soulevé un incident de procédure, dans ladite écriture, quant à une situation de conflit d'intérêts dans laquelle se serait trouvé l'un des avocats de l'intimée, mais elles l'ont retiré, par lettre du 5 janvier 2018, après que le Bureau de la Commission du barreau du canton de Genève eut constaté l'inexistence d'un tel conflit.
 
Considérant en droit:
1. D'après l'art. 54 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), le Tribunal fédéral utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant le Tribunal arbitral, celles-ci se sont servies de l'anglais, tandis que, dans les mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé le français, respectant ainsi l'art. 42 al. 1 LTF en liaison avec l'art. 70 al. 1 Cst. (ATF 142 III 521 consid.1). Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral rendra, par conséquent, son arrêt en français.
2. 
2.1. Le recours en matière civile est recevable contre les sentences touchant l'arbitrage international aux conditions fixées par les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 let. a LTF). Qu'il s'agisse de l'objet du recours, de la qualité pour recourir, du délai de recours ou encore des griefs soulevés dans le mémoire de recours, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce. Rien ne s'oppose donc à l'entrée en matière. Demeure réservé l'examen de la recevabilité des différents griefs, que l'intimée met en doute eu égard à la manière dont les recourantes y présentent leur argumentation.
2.2. Un mémoire de recours visant une sentence arbitrale doit satisfaire à l'exigence de motivation telle qu'elle découle de l'art. 77 al. 3 LTF en liaison avec l'art. 42 al. 2 LTF et la jurisprudence relative à cette dernière disposition (ATF 140 III 86 consid. 2 et les références). Cela suppose que le recourant discute les motifs de la sentence entreprise et indique précisément en quoi il estime que l'auteur de celle-ci a méconnu le droit (arrêt 4A_522/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.1). Il ne pourra le faire, cela va sans dire, que dans les limites des moyens admissibles contre ladite sentence, à savoir au regard des seuls griefs énumérés à l'art. 190 al. 2 LDIP lorsque l'arbitrage revêt un caractère international. Au demeurant, comme cette motivation doit être contenue dans l'acte de recours, le recourant ne saurait user du procédé consistant à prier le Tribunal fédéral de bien vouloir se référer aux allégués, preuves et offres de preuve contenus dans les écritures versées au dossier de l'arbitrage. De même se servirait-il en vain de la réplique pour invoquer des moyens, de fait ou de droit, qu'il n'avait pas présentés en temps utile, c'est-à-dire avant l'expiration du délai de recours non prolongeable (art. 100 al. 1 LTF en liaison avec l'art. 47 al. 1 LTF) ou pour compléter, hors délai, une motivation insuffisante (arrêt 4A_157/2017 du 14 décembre 2017 consid. 2.2).
3. Les recourantes reprochent, tout d'abord, à l'arbitre de n'avoir pas respecté l'égalité des parties.
3.1. L'égalité des parties, garantie par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d LDIP, implique que la procédure soit réglée et conduite de manière à ce que chaque partie ait les mêmes possibilités de faire valoir ses moyens (ATF 142 III 360 consid. 4.1.1 p. 361).
C'est le lieu de rappeler que la partie qui s'estime victime d'un vice de procédure doit l'invoquer d'emblée dans la procédure arbitrale, sous peine de forclusion. En effet, il est contraire à la bonne foi de n'invoquer un vice de procédure que dans le cadre du recours dirigé contre une sentence arbitrale, alors que le vice aurait pu être signalé en cours de procédure (arrêt 4A_70/2015 du 29 avril 2015 consid. 3.2.1).
3.2. Les recourantes se plaignent à un double titre de n'avoir pas été traitées sur un pied d'égalité avec l'intimée.
3.2.1. En premier lieu, elles affirment avoir déjà dénoncé, via une demande de récusation, la "pingrerie" (sic) de l'arbitre dans l'octroi des prolongations de délai requises par elles en comparaison avec la générosité avec laquelle le même arbitre aurait fait droit aux requêtes similaires de l'intimée, celle-ci ayant notamment bénéficié, à une occasion, de deux mois pour déposer une écriture alors qu'elles-mêmes n'avaient obtenu que deux semaines pour ce faire.
Tel qu'il est présenté, le grief n'est pas suffisamment motivé pour être recevable. S'agissant des circonstances pertinentes à cet égard, les recourantes se contentent d'indiquer ce qui suit: "Comme exposé ci-dessus dans la partie en fait", sans indiquer le passage de l'état de fait auquel elles se réfèrent. Il n'appartient pas au Tribunal fédéral de rechercher lui-même le  sedes materiae. De toute façon, on voit mal comment la simple circonstance alléguée par les recourantes, abstraction faite de la manière inutilement blessante avec laquelle elle est présentée, puisse être de nature à justifier à elle seule l'annulation de la sentence attaquée dès lors que les recourantes ne démontrent pas, ni même ne prétendent, avoir subi un quelconque préjudice du fait qu'elles n'ont pas bénéficié de l'intégralité de la prolongation de délai requise par elles.
En tout état de cause, l'octroi de délais différents aux parties ne constitue pas forcément une inégalité de traitement (arrêt 4A_538/2008 du 19 février 2009 consid. 4.2.1 et l'auteur cité).
3.2.2. En second lieu, les recourantes s'en prennent à l'arbitre, en ce qui concerne les coûts de l'arbitrage, parce qu'il n'a octroyé des dépens qu'à la seule intimée, alors que, de son propre aveu, il n'y a pas eu de partie clairement victorieuse en l'espèce.
Selon la jurisprudence, le tribunal arbitral doit traiter les parties de manière semblable à toutes les étapes de la procédure. Encore faut-il préciser la notion de procédure. Les auteurs qui se sont penchés sur la question donnent à ce terme un sens restrictif puisqu'ils limitent le champ d'application  ratione temporis de la garantie en cause à la phase de l'instruction, débats inclus le cas échéant, à l'exclusion de celle de la délibération du tribunal arbitral. Aussi bien, vouloir assimiler à une violation de l'égalité entre les parties le fait pour un tribunal arbitral de ne pas tenir compte, par inadvertance ou pour toute autre raison, d'une règle de droit pertinente invoquée par une partie ou d'un fait déterminant allégué par elle, reviendrait à introduire, par la voie prétorienne et sous couvert du moyen pris de la violation de l'art. 190 al. 2 let. d LDIP, le grief d'arbitraire (sur cette notion, cf. ATF 136 III 552 consid. 4.2 p. 560), alors que, précisément, le législateur fédéral n'a pas voulu qu'une sentence en matière d'arbitrage international puisse être annulée pour ce motif. Il faut donc admettre que le principe d'égalité n'est pas touché par l'appréciation des preuves et l'application du droit effectuées dans une telle sentence, fussent-elles insoutenables (arrêt 4A_360/2011 du 31 janvier 2012 consid. 4.1 et les références).
Au regard de cette jurisprudence, la remise en cause, par les recourantes, sous l'angle de l'égalité de traitement, de la manière dont l'arbitre a réparti les dépens en fonction des règles et des principes applicables n'est pas admissible. Il n'importe, comme le soutiennent les intéressées dans leur réplique, en jouant du reste quelque peu sur les mots, que "la répartition des dépens ne relève pas du fond, mais des règles de procédure".
4. Les recourantes dénoncent ensuite une double violation de leur droit d'être entendues.
4.1. La jurisprudence a notamment déduit du droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d LDIP, un devoir minimum pour le tribunal arbitral d'examiner et de traiter les problèmes pertinents. Ce devoir est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le tribunal arbitral ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves et offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour la sentence à rendre (ATF 142 III 360 consid. 4.1.1 p. 361).
Faisant fond sur cette jurisprudence, les recourantes exposent, en premier lieu, qu'elles ont requis de l'arbitre, entre autres conclusions, d'ordonner à l'intimée de poursuivre l'exécution du contrat au-delà du 23 janvier 2015 au motif que cette partie, en continuant à honorer les commandes passées après ladite date par elles, en particulier pour des pièces de rechange, avait "tacitement admis que le contrat li[ait] toujours les parties". Or, selon les recourantes, l'arbitre aurait totalement ignoré l'argumentation basée sur la prolongation tacite du contrat après sa résiliation.
Le moyen confine à la témérité tant il est évident que les intéressées n'ont jamais soumis à l'arbitre un argument de ce genre, de près ou de loin, comme l'intimée le démontre clairement dans le passage topique de sa réponse. En particulier, l'existence de pareil argument ne saurait être déduite, contrairement aux affirmations des recourantes, de leur conclusion tendant à la poursuite de l'exécution du contrat, d'autant moins qu'en date du 15 février 2015 déjà, l'intimée avait conclu un nouveau contrat d'agence avec un tiers pour la distribution de ses produits au Qatar.
4.2. En second lieu, les recourantes reprochent à l'arbitre d'avoir refusé d'ordonner une expertise qui leur aurait permis de prouver le dommage de 20'841'022,28 rials qataris (5'323'940 fr.) réclamé par elles à l'intimée dans une nouvelle conclusion prise dans leur réplique, expertise qu'elles avaient sollicitée lors de l'audience des 12 et 13 décembre 2016 consacrée au fond du litige. A les en croire, l'arbitre aurait considéré à tort que leur requête ad hoc était tardive, puisqu'il n'a finalement rendu sa sentence que le 9 août 2017, et il se serait contredit en admettant que le problème à résoudre ne revêtait pas un caractère technique nécessitant la mise en oeuvre d'une expertise.
En matière d'arbitrage international, en particulier dans l'arbitrage CCI, le Tribunal fédéral a reconnu, déjà bien avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur le droit international privé, le 1er janvier 1989, le droit de faire procéder à une expertise à certaines conditions. Il a confirmé à plusieurs reprises, sous l'empire de cette loi, l'existence d'une telle garantie, rattachée au droit à la preuve et, plus généralement, au droit d'être entendu au sens de l'art. 182 al. 3 LDIP. Le droit de faire procéder à une expertise est cependant soumis à certaines conditions. Tout d'abord, la partie qui entend se prévaloir de ce droit doit avoir requis expressément l'administration d'une expertise. Il faut ensuite que la requête ad hoc ait été présentée dans les formes convenues et en temps utile, et que la partie ait accepté d'en avancer les frais. Enfin, l'expertise doit porter sur des faits pertinents, c'est-à-dire susceptibles d'influer sur la sentence, être propre à prouver ces faits et apparaître nécessaire. Tel ne sera le cas que si, d'une part, il s'agit de faits à caractère technique ou faisant, de toute autre manière, appel à des connaissances spéciales, de telle sorte qu'ils ne peuvent être prouvés d'une autre manière, et si, d'autre part, les arbitres ne disposent pas eux-mêmes de ces connaissances (arrêt 4A_277/2017 du 28 août 2017 consid. 3.1 et les références).
In casu, l'arbitre a exposé par le menu, sous n. 454 de sa sentence, les raisons pour lesquelles il n'estimait pas nécessaire d'ordonner une expertise. Il va de soi que les deux simples allégations contenues sur ce point dans le recours ne constituent pas une critique suffisamment motivée de ces raisons-là, ce que l'intimée démontre d'ailleurs de manière convaincante dans sa réponse au recours. Il est tout aussi évident que la tentative des recourantes de remédier à cet état de choses dans leur réplique était d'emblée vouée à l'échec.
D'où il suit que le moyen considéré ne saurait prospérer.
5. En dernier lieu, les recourantes soutiennent que la sentence attaquée est incompatible avec l'ordre public matériel au sens de l'art. 190 al. 2 let. e LDIP et de la jurisprudence y relative, plus précisément avec le principe de la fidélité contractuelle.
5.1. Une sentence est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle viole des principes fondamentaux du droit de fond au point de ne plus être conciliable avec l'ordre juridique et le système de valeurs déterminants; au nombre de ces principes figurent, notamment, la fidélité contractuelle, le respect des règles de la bonne foi, l'interdiction de l'abus de droit, la prohibition des mesures discriminatoires ou spoliatrices, ainsi que la protection des personnes civilement incapables (ATF 132 III 389 consid. 2.2.1).
Le principe de la fidélité contractuelle, rendu par l'adage  pacta sunt servanda, au sens restrictif que lui donne la jurisprudence relative à l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, n'est violé que si le tribunal arbitral refuse d'appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu'elle lie les parties ou, à l'inverse, s'il leur impose le respect d'une clause dont il considère qu'elle ne les lie pas. En d'autres termes, le tribunal arbitral doit avoir appliqué ou refusé d'appliquer une disposition contractuelle en se mettant en contradiction avec le résultat de son interprétation à propos de l'existence ou du contenu de l'acte juridique litigieux. En revanche, le processus d'interprétation lui-même et les conséquences juridiques qui en sont logiquement tirées ne sont pas régis par le principe de la fidélité contractuelle, de sorte qu'ils ne sauraient prêter le flanc au grief de violation de l'ordre public. Le Tribunal fédéral a souligné à maintes reprises que la quasi-totalité du contentieux dérivé de la violation du contrat est exclue du champ de protection du principe  pacta sunt servanda (arrêt 4A_56/2017 du 11 janvier 2018 consid. 4.1).
5.2. A l'appui du grief en question, les recourantes s'en prennent tout d'abord à la manière dont l'arbitre a interprété la clause du contrat relative à la fin des rapports contractuels. Elles soulignent ensuite le caractère contradictoire du raisonnement proposé sur ce point par l'intimée et entériné par l'arbitre, relèvent en passant une contradiction inhérente à la manière dont le chef du dispositif se rapportant à la fin du contrat a été rédigé, invoquent par ailleurs les dispositions du droit suisse relatives à la qualification du contrat de travail en fonction de sa durée, tout en concédant que ces dispositions ne sont pas applicables en l'espèce, et soulignent enfin que la qualification juridique retenue par l'arbitre contredirait une décision prise à ce sujet par l'office compétent du gouvernement qatari et méconnaîtrait, de surcroît, une disposition impérative de ce droit.
Il n'y a pas là de quoi fonder ne fût-ce qu'un début de démonstration de l'incompatibilité de la sentence déférée avec l'ordre public matériel et, singulièrement, au regard du principe de la fidélité contractuelle.
Cela étant, le présent recours ne peut qu'être rejeté dans la faible mesure de sa recevabilité.
6. Les recourantes, qui succombent, seront condamnées solidairement à payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 et 5 LTF) et à verser à l'intimée une indemnité pour ses dépens (art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 30'000 fr., sont mis à la charge des recourantes, solidairement entre elles.
3. Les recourantes sont condamnées solidairement à verser à l'intimée une indemnité de 35'000 fr. à titre de dépens.
4. Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à l'arbitre unique.
Lausanne, le 12 mars 2018
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Kiss
Le Greffier: Carruzzo