BGE 136 V 225
 
27. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit social dans la cause L. contre M. (recours en matière de droit public)
 
9C_388/2009 du 10 mai 2010
 
Regeste
Art. 122, 124 und 142 Abs. 2 ZGB; Art. 25a Abs. 1 FZG; Unmöglichkeit einer Teilung der Austrittsleistung bei Scheidung.
Dieser ist gehalten, das Instruktionsverfahren hinsichtlich der Frage der beruflichen Vorsorge wiederaufzunehmen und, nach Anhörung der Parteien, in diesem Punkt einen neuen Entscheid zu fällen (E. 5.5).
 
Sachverhalt
A. L. et M. se sont mariés en 1986. Par jugement du 6 novembre 2008, devenu définitif et exécutoire le 16 décembre 2008, la 2e Chambre du Tribunal de première instance de la République et canton de Genève a prononcé le divorce des époux. Sous chiffre 5 du dispositif, elle a pris acte que les ex-conjoints avaient convenu de partager par moitié la totalité de leurs avoirs de prévoyance professionnelle accumulée pendant le mariage, et transmis le dossier au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève afin d'établir le montant respectif des avoirs de prévoyance et d'exécuter le partage de la différence entre les deux créances.
B. Constatant que M. était bénéficiaire depuis le mois de janvier 2008 de prestations provisoires de la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (ci-après: la CIA), le Tribunal cantonal des assurances sociales a, par jugement du 12 mars 2009, considéré que le partage des avoirs de prévoyance professionnelle ordonné par le juge du divorce était impossible, invité les ex-époux à saisir le juge du divorce d'une demande d'indemnité équitable et rayé la cause du rôle.
C. L. a interjeté un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle a demandé l'annulation. Elle a conclu à la condamnation de la CIA au versement sur son compte de libre passage de la somme de 55'936 fr. 75.
M. a conclu au rejet du recours. De son côté, l'Office fédéral des assurances sociales a proposé l'admission du recours et le renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle exécute le partage.
D. Le 23 avril 2010, la IIe Cour de droit civil et la IIe Cour de droit social du Tribunal fédéral ont tenu une séance commune conformément à l'art. 23 al. 2 et 3 LTF.
Le Tribunal fédéral a, sur le fond, rejeté le recours.
(résumé)
 
Extrait des considérants:
5.1 La jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la procédure à suivre dans ces circonstances n'est pas uniforme. Des arrêts indiquent qu'il convient de renvoyer l'affaire au juge du divorce comme objet de sa compétence, sans toutefois donner plus de détails sur la procédure à suivre (arrêt B 107/06 du 7 mai 2007 consid. 4.2.2, in SVR 2007 BVG n° 42 p. 151; voir également arrêt B 104/05 du 21 mars 2007 et ATF 129 V 444 consid. 5.4 in fine p. 449; en outre RJB 143/2007 p. 644 ss). D'autres arrêts, plus récents, précisent que le jugement de divorce doit faire en principe l'objet d'une demande de révision (arrêts 9C_691/2009 du 24 novembre 2009 consid. 2, non publié in ATF 135 V 436; et 9C_899/2007 du 28 mars 2008 consid. 5.2, in FamPra.ch 2008 p. 654; voir également ATF 134 V 384 consid. 4.1 in initio p. 388 et ATF 132 III 401 consid. 2.1 p. 402). Cependant, dans une jurisprudence plus ancienne, le Tribunal fédéral a également évoqué la possibilité de demander le complètement du jugement de divorce (ATF 129 III 481 consid. 3.6.3 p. 492).
5.2 La doctrine n'est pas non plus totalement unanime à ce propos. Si la majorité des auteurs considère que l'impossibilité d'exécuter le partage des prestations de sortie constitue un motif de révision du jugement de divorce (HERMANN WALSER, in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, tome I, 3e éd. 2006, n° 7 ad art. 124 CC; BAUMANN/LAUTERBURG, in Scheidung, FamKomm, 2005, n° 5 ad art. 142 CC; HANS-ULRICH STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2005, p. 452 n. 1209; THOMAS GEISER, Zur Frage des massgeblichen Zeitpunkts beim Vorsorgeausgleich, FamPra.ch 2004 p. 312; UELI KIESER, Ehescheidung und Eintritt des Vorsorgefalles der beruflichen Vorsorge - Hinweise für die Praxis, PJA 2001 p. 158; GRÜTTER/SUMMERMATTER, Erstinstanzliche Erfahrungen mit dem Vorsorgeausgleich bei Scheidung, FamPra.ch 2002 p. 649; SUTTER/FREIBURGHAUS, Kommentar zum neuen Scheidungsrecht, 1999, n° 10 ad art. 124 CC; SCHNEIDER/BRUCHEZ, La prévoyance professionnelle et le divorce, in Le nouveau droit du divorce, 1999, p. 260 n. 4.6.5.3.2), il se trouve un auteur qui y voit plutôt un moyen de demander le complètement du jugement de divorce (SUZETTE SANDOZ, Prévoyance professionnelle et divorce, in Le droit du divorce: Questions actuelles et besoin de réforme, 2008, p. 44).
5.3.1 La garantie d'une prévoyance vieillesse, survivants et invalidité appropriée est d'intérêt public. Il appartient donc, en principe, au juge du divorce de statuer d'office sur les aspects liés à la prévoyance professionnelle, conformément aux règles des art. 122 à 124 CC. Contrairement aux autres effets accessoires du divorce, la question des aspects liés à la prévoyance professionnelle n'est pas toujours réglée de façon définitive dans le jugement de divorce. Selon les circonstances, le juge du divorce peut être tenu de transférer le dossier au juge des assurances sociales compétent en vertu de la LFLP (RS 831.42) pour que celui-ci exécute le partage ordonné par le premier (art. 142 al. 2 CC; voir également l'art. 281 al. 3 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 [CPC; RO 20101739], en vigueur à compter du 1er janvier 2011). Autrement dit, la procédure de divorce comporte une phase ultérieure, prévue par le droit matériel, qui stipule l'intervention d'une autre autorité judiciaire chargée de fixer le montant à transférer. Dans cette situation, l'examen matériel du litige ne se termine pas par le jugement de divorce, mais se poursuit au-delà de celui-ci. L'intervention du juge des assurances sociales est destinée à parfaire le jugement de divorce.
5.3.2 Le système bicéphale voulu et adopté par le législateur peut cependant engendrer deux décisions contradictoires, lorsque le juge des assurances sociales constate que le partage des prestations de sortie ordonné par le juge du divorce est impossible. En s'opposant à l'exécution du jugement de divorce, le juge des assurances sociales met en même temps en évidence l'existence d'une imperfection dans ledit jugement, puisque celui-ci ne permet pas de régler une question, à savoir le sort de la prévoyance professionnelle constituée pendant la durée du mariage, qui doit l'être nécessairement en vertu du droit fédéral (cf. ATF 104 II 289; SPÜHLER/FREI-MAURER, in Berner Kommentar, tome II, Das Familienrecht, 1991, nos 87 ss des remarques préliminaires aux anciens art. 149-157 CC). Or, le jugement de divorce n'est complet que s'il est entièrement exécutable, ce qui n'est pas le cas lorsque la question des aspects liés à la prévoyance professionnelle demeure indécise. Le juge des assurances sociales n'ayant pas la faculté de statuer sur l'octroi d'une indemnité équitable au sens de l'art. 124 CC (ATF 129 V 444 consid. 5.4 p. 449; cf. infra consid. 5.4), il revient au juge du divorce de compléter le jugement de divorce.
5.3.3 La procédure prévue à l'art. 142 al. 2 CC et dans la LFLP cantonne les conjoints divorcés dans un rôle passif, puisqu'ils n'ont aucune prise sur la transmission du dossier au juge des assurances sociales ou sur la décision de celui-ci de ne pas exécuter le partage. Dans ce contexte, exiger de leur part un acte matériel, tel que le dépôt d'un acte introductif d'instance, ne semble guère rationnel. D'ailleurs, la correction du jugement de divorce par le biais des actions prévues par le droit civil (révision, complètement ou modification du jugement de divorce) n'apparaît pas souhaitable, puisque cela permettrait aux parties de décider si elles entendent agir ou non. Or, en cas d'inaction des parties, le risque existe qu'une question que le législateur exige de régler impérativement dans le contexte d'un divorce, à savoir le sort de la prévoyance professionnelle constituée pendant la durée du mariage, demeure sans réponse. Pareille situation ne serait alors pas conforme à la volonté du législateur fédéral. Dans ces conditions, en tant que l'art. 142 al. 2 CC impose la transmission d'office du jugement de divorce au juge des assurances sociales pour qu'il exécute le partage des prestations de sortie, il convient d'admettre que cette disposition contient également l'obligation implicite pour le juge des assurances sociales de renvoyer d'office la cause à la juridiction civile, comme objet de sa compétence, lorsqu'il constate l'impossibilité d'exécuter le mandat qui lui a été confié par le juge du divorce. Le renvoi d'office au juge du divorce est la conséquence logique et nécessaire du système particulier mis en place par le législateur à l'art. 142 al. 2 CC.
5.4 Dans la cause ayant donné lieu à l'arrêt publié aux ATF 134 V 384, le Tribunal fédéral a considéré que rien ne s'opposait à ce que le juge des assurances sociales exécute un jugement de divorce prescrivant le partage (par moitié) de la prestation de sortie fondé à tort sur l'art. 122 CC, lorsque les conditions pour imputer une partie de la prestation de sortie sur l'indemnité équitable au sens de l'art. 22b LFLP étaient réalisées. Dans ce précédent, le fait que l'institution de prévoyance avait attesté à plusieurs reprises et en pleine connaissance de cause le caractère réalisable du partage constituait une circonstance exceptionnelle qui permettait - dans le cas particulier - au juge des assurances sociales d'exécuter le partage. En l'absence notamment d'une confirmation de l'institution de prévoyance du caractère réalisable du partage - comme c'est le cas en l'espèce (courrier de la CIA du 18 février 2009 au Tribunal cantonal des assurances sociales) -, il convient de se montrer restrictif et de dénier le droit au juge des assurances sociales de prescrire qu'une partie de la prestation de sortie peut être imputée sur l'indemnité équitable. De façon générale, il n'appartient pas au juge des assurances sociales de se substituer au juge du divorce et d'examiner lui-même la question de l'indemnité équitable selon l'art. 124 CC (voir également le texte de l'art. 22b LFLP). Seul le juge du divorce dispose d'une vision d'ensemble de la situation économique concrète des parties et de leurs besoins de prévoyance respectifs. Pour fixer le montant de l'indemnité équitable, la jurisprudence exige en effet de tenir compte de façon adéquate de la situation patrimoniale après la liquidation du régime matrimonial ainsi que des autres éléments de la situation économique des parties après le divorce (ATF 131 III 1 consid. 4.2 p. 4 et la référence). Les besoins personnels ou la capacité contributive du débiteur, ou encore les besoins de prévoyance du bénéficiaire constituent des critères qu'il convient spécialement d'examiner (ATF 133 III 401 consid. 3.2 p. 404). Dans un cas de prévoyance lié à l'invalidité, il faut également tenir compte de l'éventualité d'une augmentation ultérieure du taux d'invalidité du débiteur et du besoin de prévoyance consécutif de ce dernier (ATF 129 III 481 consid. 3.2.3 p. 485).