BGer 4A_186/2017
 
BGer 4A_186/2017 vom 04.12.2017
4A_186/2017
 
Arrêt du 4 décembre 2017
 
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes les Juges fédérales
Kiss, Présidente, Hohl et May Canellas.
Greffier : M. Piaget.
Participants à la procédure
A.X.________, représenté par Me Philippe Juvet,
recourant,
contre
SA N.________, représentée par Me Karin Grobet Thorens,
intimée.
Objet
places dans un parking souterrain, contrat de bail ou contrat de prêt à usage; interprétation de la volonté des parties (art. 253a CO);
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers, du 6 mars 2017 (C/11029/2014, ACJC/242/2017).
 
Faits :
 
A.
A.a. Par contrat de bail du 1er octobre 1984, la SA N.________ (ci-après: la société N.________) a loué à A.X.________ un appartement de 4,5 pièces au 2e étage de son immeuble, pour une durée initiale d'un an, renouvelable ensuite tacitement d'année en année, et pour un loyer annuel de 10'800 fr., charges non comprises.
Puis, par contrat de bail du 28 avril 1987, la société a également loué à A.X.________ un appartement de 5,5 pièces au 2e étage du même immeuble, pour une durée initiale de trois ans, renouvelable ensuite d'année en année, et pour un loyer annuel de 12'600 fr., charges non comprises.
A.b. Vers 1990, un parking souterrain (comportant sept sous-sols) a été construit sous l'immeuble et, depuis lors, A.X.________ dispose des places de parking (appelées box) nos 1 et 2 au 1er sous-sol, ainsi que d'une 3e place au 2e sous-sol. A.X.________ n'a pas payé de loyer séparé pour ces places et les loyers de ses appartements n'ont pas non plus été modifiés.
Selon A.X.________, tous les emplacements de parking ont été, à l'origine, loués à sa société M.________ SA, ce qu'a confirmé un administrateur de la société N.________. M.________ SA sous-louait ensuite les emplacements aux locataires d'appartements. Cette société est devenue par la suite O.________ SA. Une régie était chargée de la gestion. Ainsi, sur le relevé d'encaissement des loyers au 31 décembre 1992, la société M.________ SA, exploitée par A.X.________, apparaît comme locataire de 18 places au 1er sous-sol; sur le relevé au 31 décembre 2011, M.________ SA a été remplacée par O.________ SA, qui apparaît comme locataire des mêmes 18 places. Il ressort de ces documents que, pour certaines places, des loyers sont encaissés alors que, pour d'autres, le loyer est " inclus ".
En 2007, selon procès-verbal de la séance du conseil d'administration de la société N.________ du 22 juin 2007, A.X.________, qui était alors administrateur de la société, a demandé que la mention O.________ figurant sur l'état locatif pour les places occupées par les membres de la famille soit modifiée. Dans un relevé au 31 décembre 2013, la société N.________ apparaît comme locataire (sic) de huit places (occupées par la famille X.________), avec la mention " loyer inclus ".
B. 
B.a. Le 1er mai 2014, le conseil d'administration de la société N.________, par deux voix contre une - B.X.________ et Z.________ contre A.X.________ - a décidé de réattribuer les places nos 1 et 2, A.X.________ étant invité à les libérer sous quinzaine. Un mandat a été donné dans ce sens à la régie chargée de la gestion de l'immeuble.
Par avis de résiliation du 20 mai 2014, la société N.________ a, par l'intermédiaire de sa régie, résilié les baux des deux places pour le 30 juin 2014 " conformément à la décision du Conseil d'administration ".
B.b. Le Tribunal fédéral, qui a déjà été saisi et a jugé deux affaires opposant A.X.________ à la SI L.________, la SA N.________ et B.X.________ (arrêts 4A_516/2016 et 4A_689/2016 du 28 août 2017), il lui est connu que le présent litige portant sur deux places de parking s'inscrit dans le contexte plus large du conflit successoral qui oppose le frère et la soeur en relation avec les successions de leurs deux parents, C.X.________ et D.X.________, lesquels étaient propriétaires par moitié de ces deux sociétés et des immeubles dont elles sont propriétaires.
En bref, la SI L.________ est propriétaire de l'immeuble dans lequel A.X.________ exploite depuis de nombreuses années le café à l'enseigne "U.________ " et la SA N.________ est propriétaire de l'immeuble dans lequel chacun des frère et soeur dispose d'un domicile. Le père et les frère et soeur ont été administrateurs des sociétés dès 1993, puis en 2014, après le décès du père en 2012, seule la soeur est restée administratrice, le mandat du frère ayant été révoqué par les assemblées générales des deux sociétés.
Les deux héritiers ont été et sont encore opposés, directement ou indirectement, dans plusieurs procédures judiciaires: des actions successorales ont été intentées par le frère en relation avec les successions de chacun des parents; des actions en annulation des décisions des assemblées générales des sociétés propriétaires des immeubles ont aussi été intentées par le fils; des procédures de mesures superprovisionnelles et provisionnelles ont également été introduites (art. 105 al. 2 LTF).
C. A.X.________ a contesté en temps utile les congés relatifs à ses deux places de parking devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers du canton de Genève et, après l'échec de la conciliation, il a déposé ses deux demandes devant le Tribunal des baux et loyers le 17 avril 2015, concluant à leur nullité, subsidiairement à l'annulabilité et plus subsidiairement à la prolongation de ses baux jusqu'à droit jugé dans la procédure successorale. Les causes ont été jointes.
La société défenderesse a conclu à la constatation de l'inexistence de contrats de bail et à la condamnation de A.X.________ à lui restituer sans délai les deux places de parking; subsidiairement, elle a conclu à la validation des congés portant sur les places et à l'évacuation immédiate de A.X.________ de ces places.
A l'audience, la défenderesse a conclu à l'incompétence du Tribunal des baux et loyers et le demandeur à la compétence de celui-ci.
Le Tribunal des baux et loyers a déclaré la demande irrecevable et les conclusions reconventionnelles en restitution et évacuation de la société bailleresse également irrecevables, par jugement du 12 février 2016. Il a considéré que les parties ne sont liées que par un contrat de prêt à usage, et non de bail, puisqu'aucun loyer n'a jamais été payé pour ces places, et qu'il n'est dès lors pas compétent à raison de la matière.
Statuant le 6 mars 2017, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel du demandeur et confirmé le jugement attaqué. Examinant la volonté des parties au contrat, la cour cantonale a considéré, d'une part, que les places n'étaient pas des accessoires des appartements, parce qu'elles n'existaient pas lors de la conclusion des baux relatifs aux appartements et ne figuraient donc pas sur ceux-ci, que le demandeur n'apparaissait pas dans les relevés produits, même pas avec la mention d'un loyer inclus dans celui des appartements, qu'il a admis que la défenderesse n'avait pas voulu lier les baux des appartements et les places de parking et que tous les locataires des places n'étaient pas nécessairement locataires d'un appartement. D'autre part, puisque le demandeur ne verse aucun loyer pour ces places, on n'est pas en présence d'un contrat de bail, mais d'un prêt gratuit de la société propriétaire au demandeur, comme aux autres membres de la famille; le fait que la défenderesse ait utilisé une formule de résiliation de bail pour mettre fin à la mise à disposition de ces places ne conduit pas à lui seul à faire admettre l'existence d'un bail, car il serait alors gratuit.
D. Contre cet arrêt cantonal, le demandeur a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 7 avril 2017. En substance, il conclut, principalement, à son annulation pour violation de la composition de la cour, subsidiairement à son annulation et à la constatation de l'existence d'un contrat de bail portant sur les places nos 1 et 2 et au renvoi de la cause à la cour cantonale ou au Tribunal des baux et plus subsidiairement à son annulation et à la constatation que les résiliations du 21 mai 2014 sont nulles ou inefficaces, ou annulées. Il soutient que des faits complémentaires doivent être pris en considération. A titre principal, il se plaint de la composition irrégulière de la cour et de violation des art. 47 let. f CPC, 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH; à titre subsidiaire, il invoque la constatation arbitraire des faits et la violation des art. 253 al. 1 et 253a al. 1 CO, ainsi que de l'art. 1 OBLF.
Invitée à se déterminer sur le recours et tout spécialement sur la question de l'impartialité du juge assesseur, M. V.________, la Chambre des baux et loyers s'est référée aux considérations de son arrêt, sans se prononcer sur la question spéciale au sujet de laquelle elle était invitée à se déterminer.
L'intimée conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué.
Les parties ont encore déposé chacune de brèves observations.
 
Considérant en droit :
1. 
1.1. Le demandeur a ouvert action en contestation des résiliations relatives à ses places de parking devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, puis devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève, fondant ses prétentions sur l'existence de baux et sur la violation des art. 253 al. 1 et 253a al. 1 CO et de l'art. 1 OBLF. Dans la mesure où le demandeur et recourant soutient que son action est fondée sur le droit du bail, il y a lieu d'examiner le présent recours en tant que contestation du droit du bail, pour laquelle la valeur litigieuse est de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), à défaut de quoi le demandeur serait privé du droit de soumettre sa prétention qu'il déduit du droit du bail à l'autorité compétente en la matière.
Le loyer des places aux 1er et 2e sous-sols variant entre 2'400 fr. et 3'200 fr. par an, il y a lieu d'admettre que l'intérêt au recours du demandeur recourant, pour les deux places au 1er sous-sol et pour la durée de trois ans prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1), est supérieure à 15'000 fr. Il n'y a donc pas lieu d'examiner si, comme l'a retenu la cour cantonale et comme le soutient le recourant, il faudrait prendre en considération les loyers des appartements, dont les places ne seraient que des accessoires.
1.2. Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue sur recours par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF), le recours en matière civile est en principe recevable.
2. Le demandeur a ouvert action en contestation des résiliations devant les juridictions spéciales en matière de bail. Le Tribunal des baux et, à sa suite, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice - puisqu'elle a simplement confirmé le premier jugement d'irrecevabilité - ont, après avoir examiné à titre préalable la question de savoir si les parties étaient liées par un contrat de bail ou un contrat de prêt à usage et après avoir retenu l'existence d'un prêt à usage, considéré que le Tribunal des baux n'était pas compétent à raison de la matière et ont déclaré irrecevable la demande du demandeur.
Pourtant, l'existence d'un contrat de bail liant les parties, telle qu'alléguée par le demandeur, constitue un fait doublement pertinent, soit un fait qui est déterminant à la fois pour la compétence du tribunal et pour le bien-fondé de l'action. Conformément à la théorie de la double pertinence, la compétence de la juridiction des baux doit donc être admise sur la seule base des allégués, moyens et conclusions de la demande (sauf en cas d'abus de droit du demandeur; en matière internationale, cf. ATF 142 III 466 consid. 4.1; 141 III 294 consid. 5; pour la compétence matérielle de la juridiction des prud'hommes, cf. l'arrêt 4A_10/2017 du 19 juillet 2017 consid. 1; pour la compétence locale interne et la compétence de la juridiction des prud'hommes, cf. l'arrêt 4A_73/2015 du 26 juin 2015 consid. 4 et, plus particulièrement consid. 4.3.4). D'ailleurs, le fait que l'autorité nie sa compétence et rende un prononcé formel d'irrecevabilité prive le demandeur de toute voie de droit pour obtenir un jugement au fond sur l'existence ou non d'un contrat de bail pour ses deux places; on ne voit en effet pas à quelle autre juridiction genevoise il pourrait s'adresser pour que cette question soit tranchée avec autorité de la chose jugée.
Il y a donc lieu d'admettre que, sous couvert d'irrecevabilité pour défaut de compétence, la Chambre des baux et loyers a en réalité admis définitivement l'inexistence d'un contrat de bail et a rejeté la demande en contestation des résiliations.
3. Le litige s'inscrit dans le contexte plus large du conflit successoral opposant les frère et soeur à propos des successions de leurs deux parents. A ce propos, le Tribunal fédéral a déjà précisé ce qui suit:
Le litige successoral est de la compétence exclusive du juge saisi des actions successorales. Les droits successoraux du demandeur ont été sauvegardés provisoirement par l'arrêt sur mesures provisionnelles de la Cour de justice du 20 février 2015, le recours en matière civile de la soeur interjeté contre cet arrêt ayant été déclaré irrecevable par le Tribunal fédéral. On relèvera qu'il avait ainsi obtenu, tout d'abord en mesures superprovisionnelles, la suspension des droits d'actionnaire de sa soeur, avant que cette suspension ne soit remplacée, en mesures provisionnelles, par l'interdiction de vendre les actions en indivision, le blocage de la moitié des revenus des immeubles, sous réserve des paiements nécessaires à leur gestion courante, et la limitation des droits de la soeur aux seuls actes de gestion et de disposition ne touchant pas son frère (arrêt 4A_516/2016 déjà cité consid. 5.1).
Les procédures fondées sur le droit des sociétés et les procédures de bail, dont la présente procédure, ne peuvent servir à résoudre un litige qui relève avant tout du droit successoral.
Ainsi, dans le cadre du présent litige, fondé sur le droit du bail, seules doivent être examinées les questions de droit du bail. Il n'y a donc pas lieu d'examiner ici les griefs relatifs à l'actionnariat de la société défenderesse, aux décisions de l'assemble générale de dite société et à un paiement du loyer par compensation indirecte avec le montant du dividende reçu par les actionnaires sous forme d'avantages en nature.
4. Le litige porte donc sur la question de savoir si les deux places de parking litigieuses ont été louées au demandeur comme accessoires des appartements qu'il loue dans le même immeuble ou s'ils lui ont été prêtés gratuitement par la défenderesse.
4.1. Les dispositions concernant les baux d'habitations et de locaux commerciaux s'appliquent aux choses dont l'usage est cédé avec ces habitations ou locaux commerciaux (art. 253a CO al. 1).
Sont des choses dont le bailleur cède l'usage au locataire avec les habitations ou locaux commerciaux, notamment les garages et les places de stationnement extérieures ou souterraines (art. 1 OBLF). Il existe un lien entre ces choses (accessoires) et la chose principale lorsqu'elles lui servent fonctionnellement (1ère condition) et que l'usage en est cédé, respectivement obtenu, en raison du bail portant sur la chose principale (2e condition) (ATF 125 III 231 consid. 2a). En ce qui concerne cette 2e condition, la volonté des parties est déterminante (art. 18 al. 1 CO). Si deux contrats ont été passés, il est nécessaire que les parties soient les mêmes; en revanche, la date de la conclusion des contrats ou le nombre de ceux-ci importe peu (ATF 125 III 231 consid. 2a).
4.2. Savoir si les parties sont convenues d'un contrat de bail pour l'ensemble (appartement et place de parking), comme le soutient le demandeur et recourant, ou d'un prêt à usage gratuit portant sur les seules places de parking sans lien avec les appartements, comme le soutient la défenderesse, est affaire d'interprétation de leurs manifestations de volonté.
4.2.1. En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 123 III 35 consid. 2b p. 39).
Ainsi, lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante (échange de manifestations de volonté concordantes; übereinstimmende Willenserklärungen), qu'elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait (  tatsächliches Konsens); si au contraire, alors qu'elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s'entendre, ce dont elles étaient d'emblée conscientes, il y a un désaccord patent (  offener Dissens) et le contrat n'est pas conclu.
Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante, mais que l'une ou les deux n'ont pas compris la volonté interne de l'autre, ce dont elles n'étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent ( versteckter Dissens) et le contrat est conclu dans le sens objectif que l'on peut donner à leurs déclarations de volonté selon le principe de la confiance; en pareil cas, l'accord est de droit (ou normatif) (cf. ATF 123 III 35 précité consid. 2b p. 39; GAUCH/SCHLUEP/SCHMID, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, T. I, Zurich 2014, n. 308 ss).
4.2.2. En procédure, le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective; accord de fait), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (ATF 132 III 268 consid. 2.3.2, 626 consid. 3.1 p. 632; 131 III 606 consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes.
L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait (arrêts 4A_508/2016 du 16 juin 2017 consid. 6.2; 4A_98/2016 du 22 août 2016 consid. 5.1). Si sa recherche aboutit à un résultat positif, le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises. Cette constatation lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elle ne soit manifestement inexacte (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst.
4.2.3. Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective; accord de droit), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (application du principe de la confiance; arrêts 4A_508/2016 du 16 juin 2017 consid. 6.2). Selon le principe de la confiance, la volonté interne de s'engager du déclarant n'est pas seule déterminante; une obligation à sa charge peut découler de son comportement, dont l'autre partie pouvait, de bonne foi, déduire une volonté de s'engager. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 424 et les arrêts cités).
La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait. Les circonstances déterminantes à cet égard sont uniquement celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 p. 67 et les arrêts cités).
4.3. Examinant la volonté réelle des parties au contrat, la cour cantonale a nié l'existence d'un bail sur les places au sous-sol en retenant sept motifs - que les parties traitent sous let. a à g de leurs recours et réponse respectifs: (1) les places n'étaient pas des accessoires des appartements, parce qu'elles n'existaient pas lors de la conclusion des baux relatifs aux appartements et ne figuraient donc pas sur ceux-ci; (2) le demandeur n'apparaissait pas dans les relevés produits comme locataire de places de parking, fût-ce avec la mention de l'inclusion du loyer dans celui des appartements; (3) le demandeur a admis le souhait de la bailleresse de ne pas lier les baux des appartements et les places de parking; (4) il a allégué que tous les locataires n'étaient pas nécessairement locataires d'un appartement; (5) les locataires des places en sous-sol, à l'exclusion de la bailleresse (sic), paient un loyer distinct de celui des logements; (6) le fait que la bailleresse ait utilisé une formule officielle de résiliation pour mettre fin à la cession de l'usage de ces places, ne saurait conduire à lui seul à admettre l'existence d'un contrat de bail, qui plus est gratuit; (7) le demandeur n'a pas versé de loyer pour les places. La cour en a déduit que les places ont été prêtées gratuitement par la société propriétaire au demandeur, comme aux autres membres de la famille X.________.
4.4. Force est de constater que, parmi ces sept motifs, six d'entre eux ne permettent ni de confirmer la décision prise par la cour cantonale (contrat de prêt) ni d'admettre l'existence d'un contrat de bail portant sur l'ensemble (place de parking et appartement) comme le voudrait le demandeur: en ce qui concerne le premier motif (1), qui ne relève en réalité pas des constatations de fait mais du raisonnement juridique, il n'exclut pas que les parties aient décidé au moment de la construction, ou par la suite, de lier le sort des places à celui des appartements; s'agissant du troisième motif (3), on ne peut rien tirer du point de fait admis par le demandeur (qui ne correspond d'ailleurs qu'au " souhait de la bailleresse " de ne pas lier les deux types de baux), puisque le demandeur n'affirme pas explicitement que, selon ce souhait, il s'agirait également de séparer la question de l'appartement de celle de la place de parking dans la situation d'un locataire disposant des deux objets; dans ses écritures, il semble plutôt indiquer que la séparation doit être comprise en ce sens que le locataire d'une place de parking n'était pas nécessairement locataire d'un appartement; de même, le quatrième motif (4) n'apporte aucun élément déterminant pour régler le cas d'un locataire faisant usage d'un appartement
En réalité, c'est en se fondant sur le deuxième motif (déterminant) que la cour cantonale a établi la volonté réelle des parties. Or, c'est à raison que le recourant se plaint d'arbitraire en ce qui concerne ce motif (2) relatif aux relevés produits (état d'encaissement des loyers de fin décembre 2013 et états locatifs de fin décembre 2014 et de fin mai 2015). Il ressort en effet de ces deux dernières pièces - ce que l'intimée ne conteste pas - que le nom du demandeur figure à côté des deux places litigieuses au 1er sous-sol. Il en résulte également que le loyer de ces places était " inclus ".
Cela étant, la cour cantonale, qui ne disposait d'aucun autre élément plaidant clairement en faveur du contrat de prêt (gratuit), s'est fondée sur une constatation arbitraire pour établir la volonté réelle des parties. Il s'ensuit qu'il était arbitraire de retenir, sur la base de cette argumentation, que les parties avaient eu la volonté commune de conclure un prêt gratuit, ce que la cour cantonale traduit par " les places de parking ne sont pas des accessoires ", mais " ont été prêtées gratuitement par la société propriétaire " au demandeur.
5. Aucun élément supplémentaire n'étant invoqué par les parties en faveur d'une volonté réelle commune, force est de constater qu'une telle volonté ne peut être établie. La Cour de céans peut se dispenser de renvoyer la cause à la cour cantonale et déterminer directement elle-même, et librement, la volonté objective des parties par application du principe de la confiance.
Le demandeur ne conteste pas qu'à l'origine, la société M.________, puis la société O.________, puis la société N.________ (sic) ont été indiquées comme locataires des places de parking de la famille X.________, dont les siennes. Il invoque toutefois que cette situation a été modifiée par la société et acceptée par lui et qu'il est devenu locataire de ses deux places de parking, loyer inclus dans celui de ses appartements, ce que la défenderesse conteste.
Il ressort des pièces 58 (au 31 décembre 2014) et 59 (au 31 mai 2015) que le nom du demandeur est indiqué en rapport avec les deux places de parking litigieuses (box), qu'il y est mentionné que le loyer est inclus et que, sur la pièce 58, figure encore un numéro de compte. La défenderesse admet que ces pièces mentionnent le nom du demandeur. Les parties divergent quant à l'interprétation de la mention que le loyer est " inclus ": pour le demandeur, cela signifie que le loyer de chaque place est inclus dans celui de l'un de ses appartements; la défenderesse lui reproche de faire preuve de mauvaise foi lorsqu'il prétend que cela signifie que le loyer des places était inclus dans celui de ses appartements, faisant valoir que le compte indiqué est le sien.
Or, la défenderesse ne conteste pas que la situation a été modifiée par rapport à la relation initiale. Le fait que la propriétaire bailleresse prenne à sa charge les frais afférents aux places de parking se conçoit aisément dans un système de loyer inclus dans celui de l'appartement du locataire. D'ailleurs, aucun compte n'est indiqué dans la pièce 59.
Quoi qu'il en soit, ce qui est décisif, c'est que la situation a été modifiée, que le nom du demandeur a été indiqué dans les états locatifs, que celui-ci avait un intérêt à ce que les places de parking soient liées juridiquement à ses appartements et que, partant, il pouvait de bonne foi déduire du comportement de la bailleresse, qui a modifié les états locatifs, que les places de parking lui étaient désormais louées, loyers inclus dans ceux de ses appartements. Le principe de la confiance permet en effet d'imputer à une partie son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime. La défenderesse intimée n'a pas démontré en quoi le demandeur serait de mauvaise foi.
Il s'ensuit que les résiliations des baux des places de parking signifiées indépendamment de toute résiliation des baux des appartements auxquels celles-ci sont liées doivent être annulées.
6. Le recours étant admis pour le motif qui précède, il est superflu d'examiner le grief du recourant tiré de la composition de la cour cantonale.
7. Le recours étant admis, les frais et les dépens de la procédure doivent être mis à la charge de l'intimée (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu de renvoyer la cause à la cour cantonale pour nouvelle fixation des frais et dépens des instances cantonales, le droit genevois dispensant les parties de l'obligation de payer des frais judiciaires et de verser des dépens (art. 22 al. 1 LaCC; ATF 139 III 182 consid. 2.6).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est admis et l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que les demandes de A.X.________ du 17 avril 2015 sont admises et que les résiliations de bail concernant ses places de parking nos 1 et 2 au 1er sous-sol sont annulées.
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée.
3. L'intimée versera au recourant une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des baux et loyers.
Lausanne, le 4 décembre 2017
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Kiss
Le Greffier : Piaget