BGer 2C_720/2017
 
BGer 2C_720/2017 vom 14.11.2017
2C_720/2017
 
Arrêt du 14 novembre 2017
 
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Seiler, Président,
Donzallaz et Haag.
Greffier: M. Tissot-Daguette.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Christian De Preux, avocat,
recourant,
contre
Office cantonal de la population et des migrations
de la République et canton de Genève.
Objet
Refus d'octroi d'une autorisation de séjour et renvoi de Suisse; effet suspensif,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 2 août 2017 (ATA/1149/2017).
 
Faits :
A. X.________, ressortissant camerounais né en 1979, est arrivé en Suisse à une date indéterminée. Il était au bénéfice d'un permis pour étudiants valable jusqu'en 2002 et a annoncé son départ pour le 18 juillet 2003. En 2005, il a été condamné en Suisse pour des infractions contre l'intégrité corporelle et expulsé de ce pays pour cinq ans. En 2007, il a à nouveau été condamné par la justice helvétique pour différentes infractions, notamment contre l'intégrité corporelle. Le 18 septembre 2007, il a fait l'objet d'une mesure d'interdiction d'entrée en Suisse durant dix ans. Il est demeuré dans ce pays où il a vécu avec une première compagne, avec qui il a eu deux filles, nées en 2007 et 2011. En 2014, il a épousé une seconde compagne, mère de son troisième enfant, né cette même année. En juin 2015, il a une nouvelle fois été condamné pour des infractions contre l'intégrité corporelle et pour la violation d'une obligation d'entretien. Une condamnation supplémentaire est intervenue en avril 2016 pour violation d'une obligation d'entretien envers ses deux premiers enfants. Les époux se sont séparés en juillet 2016, à la suite de violences conjugales. Il a été condamné en janvier 2017, notamment pour ces faits.
B. Le 6 décembre 2016, X.________ a demandé à l'Office cantonal de la population et des migrations de la République et canton de Genève (ci-après: l'Office cantonal) de lui délivrer une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. Le 10 mai 2017, l'Office cantonal a refusé d'octroyer une autorisation de séjour à X.________, lui a imparti un délai pour quitter la Suisse et a retiré l'effet suspensif à un éventuel recours. Le 2 juin 2017, l'intéressé a contesté ce prononcé auprès du Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif de première instance) et a demandé à être autorisé à demeurer en Suisse durant la procédure de recours. Par décision du 23 juin 2017, le Tribunal administratif de première instance a rejeté la demande de restitution de l'effet suspensif. X.________ a interjeté recours contre cette décision le 6 juillet 2017 auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice). Celle-ci, par arrêt du 2 août 2017, a rejeté le recours.
C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais, outre l'assistance judiciaire et l'effet suspensif, d'annuler l'arrêt de la Cour de justice du 2 août 2017 et de restituer l'effet suspensif à la décision de l'Office cantonal du 10 mai 2017; subsidiairement d'annuler l'arrêt précité et de renvoyer la cause à l'autorité précédente pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. En plus d'établissement inexact des faits, il se plaint d'arbitraire dans l'application de la procédure cantonale.
Par ordonnance du 25 septembre 2017, le juge instructeur a rejeté la requête d'effet suspensif.
La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt et l'Office cantonal conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'Etat aux migrations ne s'est pas déterminé. Dans des observations finales X.________ a prié le Tribunal fédéral de prendre en compte des faits nouveaux, soit l'hospitalisation de son ex-épouse.
 
Considérant en droit :
 
Erwägung 1
1.1. Les décisions rendues dans des causes de droit public peuvent en principe être attaquées par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 let. a LTF). Toutefois, un tel recours est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit (art. 83 let. c ch. 2 LTF). En l'espèce, l'arrêt attaqué confirme un prononcé rendu dans le cadre d'une procédure d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial, par lequel l'Office cantonal, en retirant l'effet suspensif, a décidé que le recourant devait attendre l'issue de ladite procédure à l'étranger. Le recourant invoque la protection de sa vie familiale (art. 8 CEDH) et les liens qu'il entretient avec ses enfants pour prétendre avoir le droit de demeurer en Suisse. Or, l'arrêt entrepris, qui devrait pourtant contenir les motifs déterminants de fait (cf. art. 112 al. 1 let. b LTF), ne contient aucune information quant au statut des enfants du recourant en Suisse. Toutefois, au vu des considérants qui suivent et du fait qu'en matière de décision portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels (cf. art. 98 LTF; ATF 134 II 349 consid. 3 p. 351; arrêt 2C_483/2009 du 18 septembre 2009 consid. 2.5 et la référence citée), le point de savoir si le recours en matière de droit public est ouvert peut demeurer indécis, la même violation des droits constitutionnels pouvant être invoquée dans le cadre du recours constitutionnel subsidiaire (cf. art. 116 LTF).
1.2. L'arrêt attaqué ne se prononce pas sur le bien-fondé de l'autorisation de séjour sollicitée par le recourant, mais uniquement sur l'obligation qui lui est imposée de se rendre à l'étranger et d'y rester jusqu'à l'issue de la procédure. La décision entreprise est donc une décision incidente rendue dans le cadre d'une procédure d'autorisation de séjour. Elle ne peut dès lors faire l'objet d'un recours que si elle satisfait aux exigences de l'art. 93 al. 1 LTF (en relation avec l'art. 117 LTF en cas de recours constitutionnel subsidiaire). Selon cette disposition, les décisions incidentes notifiées séparément qui ne concernent ni la compétence ni les demandes de récusation peuvent faire l'objet d'un recours notamment si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a), lequel doit être de nature juridique (ATF 142 III 798 consid. 2.2 p. 801). Il faut admettre que la confirmation de l'obligation pour le recourant de quitter la Suisse et d'attendre à l'étranger le résultat de la procédure de regroupement familial qu'il a entamée peut lui causer un préjudice irréparable de nature juridique (cf. arrêt 2C_483/2009 du 18 septembre 2009 consid. 2.2 et les références citées). Celui-ci découle du fait qu'il se trouverait empêché de rester en Suisse avec ses enfants. La décision incidente attaquée est donc sujette à recours au Tribunal fédéral.
1.3. Au surplus, l'arrêt attaqué est une décision rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, art. 113 LTF). Il a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, en relation avec l'art. 117 LTF), et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par le destinataire de l'arrêt entrepris qui a qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, art. 115 LTF).
2. Le recourant invoque en premier lieu un établissement inexact des faits.
2.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, art. 118 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (pour le recours constitutionnel subsidiaire, art. 118 al. 2 LTF). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (cf. art. 116 LTF quant au recours constitutionnel subsidiaire; ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 314), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 137 III 226 consid. 4.2 p. 234). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF (pour le recours constitutionnel subsidiaire, par renvoi de l'art. 117 LTF), le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, par renvoi de l'art. 117 LTF).
2.2. Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir retenu qu'il paraissait " s'occuper régulièrement de son dernier fils " et ne pas avoir considéré qu'il s'occupait également de ses deux premiers enfants, le lien affectif particulièrement fort étant selon lui attesté par des témoignages écrits des mères respectives.
Pour sa part, la Cour de justice a effectivement expliqué que " l'intérêt public à assurer qu'une personne sous interdiction d'entrée en Suisse, plusieurs fois condamnée en rapport avec son comportement violent vis-à-vis de ses proches attende à l'extérieur de la Suisse le résultat de la procédure de recours, prévaut sans conteste sur l'intérêt privé du recourant à rester en Suisse jusqu'à droit jugé, alors qu'il est séparé de son épouse et sans moyens financiers pour entretenir ses enfants, même s'il paraît s'occuper régulièrement de son dernier fils ".
Certes, l'autorité précédente a relevé le fait que le recourant semble s'occuper de son dernier enfant. Elle a toutefois fait référence à l'entretien de "ses" enfants juste avant, ce qui signifie qu'elle les prend également en compte dans son appréciation. En tout état de cause, elle explique à satisfaction pourquoi elle n'examine pas plus avant les rapports existants entre le recourant et ses enfants, ceux-ci devant faire l'objet de la décision sur le fond que le Tribunal administratif de première instance devra rendre.
2.3. Sur le vu de ce qui précède, la Cour de justice n'a nullement procédé à un établissement manifestement inexact des faits. Ce grief doit par conséquent être écarté.
2.4. En outre, la demande tendant à prendre en compte l'hospitalisation de la mère des premiers enfants du recourant doit être rejetée, dès lors qu'aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté devant le Tribunal fédéral, à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (cf. consid. 2.1 ci-dessus), ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
3. Le recourant se plaint d'une application arbitraire (art. 9 Cst.) des art. 21 et 66 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA/GE; RSG E 5 10).
3.1. Lorsqu'un recourant fait valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 135 III 513 consid. 4.3 p. 521 s.; 133 III 462 consid. 2.3 p. 466), il lui appartient d'invoquer ce grief et de le motiver d'une manière suffisante (art. 106 al. 2 LTF; pour le recours constitutionnel subsidiaire, par renvoi de l'art. 117 LTF; cf. ATF 134 I 263 consid. 3.1 p. 265 s. et les références citées).
3.2. L'art. 21 al. 1 LPA/GE prévoit que l'autorité peut d'office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés. Pour sa part, l'art. 66 LPA/GE dispose que, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1). En cas de recours contre une loi constitutionnelle, une loi ou un règlement du Conseil d'Etat, le recours n'a pas effet suspensif (al. 2). Toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3).
3.3. Le recourant estime que son intérêt privé, c'est-à-dire sa présence en Suisse depuis près de seize ans et les liens qu'il entretient avec ses enfants, doit l'emporter sur l'intérêt public. Il reproche à l'autorité précédente de s'être uniquement fondée sur ses antécédents pénaux pour admettre qu'il constituait une menace. Il estime qu'un renvoi à brève échéance reviendrait à le sanctionner une seconde fois, après ses condamnations pénales. Ses enfants devraient ainsi se construire sans la présence de leur père. Le recourant fait encore référence à une jurisprudence, dans laquelle l'analyse des intérêts en présence avait conduit le Tribunal fédéral à restituer l'effet suspensif (arrêt 2C_669/2009 du 4 février 2010).
3.4. La Cour de justice a tout d'abord expliqué que la décision de refus d'octroi d'une autorisation de séjour était une décision de type négatif et que le retrait de l'effet suspensif ne pouvait pas s'y appliquer, mais qu'il s'appliquait en revanche à la décision de renvoi. Ces considérations ne sont nullement arbitraires et le recourant ne semble pas les contester.
3.5. Pour le surplus, la Cour de justice a jugé qu'il était justifié de retirer l'effet suspensif à la décision de renvoi, dès lors que l'intérêt public à assurer " qu'une personne sous interdiction d'entrée en Suisse, plusieurs fois condamnée en rapport avec son comportement violent vis-à-vis de ses proches attende à l'extérieur de la Suisse le résultat de la procédure de recours, (prévalait) sans conteste sur l'intérêt privé du recourant à rester en Suisse jusqu'à droit jugé, alors qu'il est séparé de son épouse et sans moyens financiers pour entretenir ses enfants ". Cette argumentation ne relève aucunement de l'arbitraire. Certes, comme il le mentionne, le recourant se trouve en Suisse depuis près de seize ans. Toutefois, il ne bénéficie plus d'aucun titre de séjour depuis 2003. Il a en outre fait l'objet de plusieurs interdictions d'entrée en Suisse, à la suite de son comportement délictueux. Dans ces conditions, il est pleinement soutenable d'exiger de lui qu'il attende l'issue de la procédure d'octroi d'autorisation de séjour à l'étranger. Si l'on ne peut nier qu'il entretient des liens avec ses enfants, force est de constater qu'il n'est pas arbitraire de juger que ces liens ne sauraient l'emporter sur l'intérêt public. Quant au fait que ses enfants devraient se construire sans la présence du recourant, on relèvera que cet argument n'est que peu convaincant au vu de l'exemple que celui-ci leur donne. L'autorité précédente a en effet retenu que, le 27 janvier 2017, le recourant avait notamment été condamné pour avoir mis en danger le développement physique ou psychique de son fils en frappant sa mère en sa présence. Finalement, la jurisprudence citée par le recourant ne lui est d'aucun secours, puisque dans l'arrêt en cause, il s'agissait d'un cas de refus de 
4. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Le recours étant d'emblée dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire est rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas octroyé de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté.
2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Office cantonal de la population et des migrations et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2 ème section, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.
Lausanne, le 14 novembre 2017
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Seiler
Le Greffier : Tissot-Daguette