BGer 6B_789/2017 |
BGer 6B_789/2017 vom 25.09.2017 |
6B_789/2017
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Arrêt du 25 septembre 2017 |
Cour de droit pénal |
Composition
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M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti.
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Greffier : M. Dyens.
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Participants à la procédure
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X.________,
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représenté par Me Claudio Fedele, avocat,
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recourant,
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contre
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Ministère public de la République et canton de Genève,
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intimé.
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Objet
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Ordonnance de classement, qualité pour recourir (enlèvement de mineur),
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recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 6 juin 2017.
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Faits : |
A. Le 29 janvier 2015, X.________ a déposé plainte pénale contre son épouse, A.________, lui reprochant d'avoir enlevé leur fils, B.________, âgé alors de 3 ans, pour s'installer aux États-Unis.
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B. Par ordonnance du 28 mars 2017, le Ministère public de la République et canton de Genève a ordonné le classement de la procédure pénale ouverte contre A.________ pour enlèvement de mineur (art. 220 CP) à la suite du dépôt de cette plainte.
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C. Par arrêt du 6 juin 2017, la Chambre pénale de recours de la Cour de Justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours formé par X.________ contre l'ordonnance de classement du 28 mars 2017.
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En substance, la Chambre pénale de recours a retenu que A.________, qui avait quitté la Suisse le 28 janvier 2015 avec l'enfant du couple, sans en informer X.________, pour se rendre aux Etats-Unis, n'avait pas eu l'intention de déplacer le lieu de résidence de l'enfant. Le déplacement s'inscrivait dans un conflit conjugal aigu. Elle était rentrée le 26 février 2015, après avoir trouvé un nouveau logement. Les époux étaient restés en contact durant cette période.
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D. X.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 6 juin 2017, concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause directement au Ministère public de la République et canton de Genève pour qu'il poursuive A.________ du chef d'enlèvement de mineur.
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Considérant en droit : |
1. Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 142 IV 196 consid. 1 p. 197).
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1.1. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. On entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (art. 118 al. 1 CPP). On entend par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction (art. 115 al. 1 CPP) et par victime le lésé qui, du fait d'une infraction, a subi une atteinte directe à son intégrité physique, psychique ou sexuelle (art. 116 CPP). Selon la jurisprudence, est atteint directement dans ses droits le titulaire du bien juridique protégé par la norme en cause (ATF 140 IV 155 consid. 3.2 p. 157 s.; ATF 139 IV 78 consid. 3.3. p. 81 s.).
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Les prétentions civiles envisagées sous l'angle de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF sont celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4).
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En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe au recourant d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4 et les références citées).
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L'allocation d'une indemnité pour tort moral fondée sur l'art. 49 al. 1 CO suppose que l'atteinte présente une certaine gravité objective et qu'elle ait été ressentie par la victime, subjectivement, comme une souffrance morale suffisamment forte pour qu'il apparaisse légitime qu'une personne dans ces circonstances s'adresse au juge pour obtenir réparation (arrêt 6B_185/2013 du 22 janvier 2014 consid. 2.2 et la jurisprudence citée).
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1.2. Le bien juridique protégé par l'art. 220 CP est le droit de déterminer le lieu de résidence en tant que composante de l'autorité parentale. La compétence de déterminer le lieu de résidence de l'enfant ainsi que son mode d'encadrement relève de l'autorité parentale (ATF 141 IV 205 consid. 5.3.1 p. 210; arrêt 6B_797/2016 du 15 août 2017 consid. 2.1; cf. désormais art. 301a al. 1 CC). Cette disposition protège ainsi - également dans sa nouvelle formulation - la personne qui a le droit de décider du lieu de résidence de l'enfant. Le titulaire de ce droit se détermine selon le droit civil (ATF 141 IV 205 consid. 5.3.1 p. 210; arrêt 6B_797/2016 du 15 août 2017 consid. 2.1 et les références citées; cf. désormais art. 296 al. 2 et art. 301a al. 1 CC). Un enlèvement peut être commis par l'un des deux parents, s'il n'exerce pas ou pas seul l'autorité parentale, respectivement la garde (arrêt 6B_123/2014 du 2 décembre 2014 consid. 3.3 non publié in ATF 141 IV 10). Dans le cadre de poursuites exercées de ce chef, le père ou la mère qui a l'autorité parentale, exclusive ou non, sur l'enfant enlevé revêt la qualité de lésé s'il ou si elle rend vraisemblable que l'enlèvement a causé une atteinte à son intégrité psychique; une telle atteinte ne peut être admise que si le délit a causé une angoisse forte et durable au parent lésé (6B_51/2010 du 16 mars 2010 consid. 1). Au vu de ce qui précède, le recourant pourrait être habilité à élever des prétentions civiles tirées directement de l'infraction dénoncée. Reste à déterminer si le recourant a rendu vraisemblable la nature et l'étendue de telles prétentions dans le cas concret.
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1.3. En l'espèce, le recourant n'articule aucune prétention civile. On comprend de sa motivation, lorsqu'il soutient avoir souffert d'une atteinte à son intégrité psychique à la découverte du départ de son épouse avec l'enfant pour les Etats-Unis, qu'il estime pouvoir prétendre à l'allocation d'un tort moral. Il se limite toutefois à alléguer et décrire son angoisse sans en rendre vraisemblable ni son intensité ni sa durée. Comme il le relève, il n'a jamais sollicité l'aide d'un psychologue ou d'un psychiatre en relation avec cette angoisse. S'il est compréhensible que le recourant ait été angoissé lorsqu'il a constaté, à son retour du travail, que ni sa femme ni son fils n'étaient à la maison, il a néanmoins très rapidement été informé par un courriel de son épouse daté du jour du départ, que, comme les derniers jours avaient été particulièrement difficiles entre eux, elle emmenait leur fils quelques jours, le temps pour elle de consulter un avocat. En outre, il est établi (art. 105 al. 1 LTF) que le recourant a eu des contacts réguliers par courriel et par Skype avec elle dans les jours qui ont suivi son départ et a eu la possibilité de parler avec son fils. Il en ressortait également que sa femme exprimait n'avoir pas l'intention de déménager aux Etats-Unis, mais souhaitait continuer à vivre à Genève; elle demandait au recourant de déménager afin de pouvoir se réinstaller avec son fils au domicile conjugal. Enfin, le 27 février 2015, sa femme l'a informé de son retour en Suisse avec leur fils et de leur installation dans un nouvel appartement. Ces circonstances sont propres à relativiser fortement l'intensité et la durée de la souffrance du recourant. Partant, il y a lieu de considérer que la prétention en tort moral du recourant ne revêt pas la gravité requise par la jurisprudence pour obtenir réparation, ni objectivement ni subjectivement. En conséquence, le recourant ne dispose pas de la qualité pour recourir sur le fond de la cause, faute de satisfaire aux conditions posées par l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF.
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1.4. L'hypothèse visée à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF n'entre pas en considération, la contestation ne portant pas sur le droit de porter plainte du recourant.
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1.5. Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie plaignante est habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5). Tel n'est pas le cas en l'occurrence.
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2. Le recours se révèle irrecevable. Le recourant, qui succombe, devra supporter les frais judiciaires (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce : |
1. Le recours est irrecevable.
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2. Les frais de justice, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
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3. Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. Une copie est adressée à l'épouse du recourant, pour information.
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Lausanne, le 25 septembre 2017
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Au nom de la Cour de droit pénal
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du Tribunal fédéral suisse
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Le Président : Denys
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Le Greffier : Dyens
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