BGE 101 II 130
 
26. Arrêt de la IIe Cour civile du 21 juin 1975 dans la cause Société du Téléphérique du Glacier des Diablerets S.A.
 
Regeste
Art. 1185 OR findet keine Anwendung auf Seilbahnunternehmen, welche für die Einberufung einer Versammlung der Anleihensgläubiger das gewöhnliche Verfahren von Art. 1165 ff. OR befolgen müssen.
 
Sachverhalt


BGE 101 II 130 (130):

La société du Téléphérique du Glacier des Diablerets S.A., dont le siège est aux Diablerets (commune d'Ormont-Dessus),

BGE 101 II 130 (131):

exploite le téléphérique Col du Pillon-Glacier des Diablerets (dont le réseau se compose de trois sections, savoir: une télécabine du Col du Pillon à Pierres-Pointes, un téléphérique de Pierres-Pointes à la Tête-au-chamois et un téléphérique de la Tête-au-chamois au Scex-Rouge), ainsi que quelques autres entreprises accessoires (téléski, restaurant). Le capital social de 4'200'000.-- fr. est divisé en 7'600 actions de 500 fr. nominal et 1'600 actions de 250 fr. nominal, toutes au porteur et entièrement libérées. En outre, lors de la création de la société, le 22 février 1961, ont été émises 278 parts de fondateur, qui jouissent statutairement d'un droit préférentiel de souscription en cas d'augmentation du capital, d'une part au bénéfice net et à la liquidation. En 1968, la société a émis un emprunt public de 1'500'000.-- fr., au taux d'intérêt de 6%, remboursable le 30 septembre 1983. Cet emprunt a été intégralement souscrit.
Dès le début de son activité, la société s'est heurtée à des difficultés financières. Le bilan arrêté au 31 décembre 1974 atteste un solde passif de 4'292'455 fr. 52, savoir la perte reportée de pertes et profits, par 3'352'025 fr. 52, et l'insuffisance des amortissements réglementaires des exercices 1965 à 1968, par 940'430.-- fr. Dans un rapport du 27 mai 1975, le conseil d'administration de la société propose des mesures d'assainissement, soit notamment la réduction à 10% du capital-actions, la suppression des parts de fondateur, la conversion de la moitié des obligations en actions et l'institution d'un intérêt variable pour l'autre moitié.
Par lettre du 4 juin 1975, le notaire Roger Rognon, à Aigle, agissant au nom de la société, a adressé une requête, datée du 29 mai 1975, par laquelle le conseil d'administration prie le Tribunal fédéral de convoquer une assemblée des porteurs d'obligations et une assemblée des porteurs des parts de fondateurs. Le notaire Rognon et le conseil d'administration estiment que la concession accordée à la société par le Département fédéral des transports et communications et de l'énergie donne au Tribunal fédéral la compétence définie à l'art. 1185 CO.
 
Considérant en droit:
Selon l'art. 1185 al. 2 CO, le Tribunal fédéral est compétent pour convoquer l'assemblée des créanciers d'un emprunt par

BGE 101 II 130 (132):

obligations contracté par une entreprise de chemin de fer ou de navigation, ainsi que pour approuver ses décisions. Cette disposition spéciale, introduite par la loi fédérale modifiant les dispositions du Code des obligations sur la communauté des créanciers dans les emprunts par obligations du 1er avril 1949, tire son origine de la loi fédérale concernant la constitution de gages sur les entreprises de chemin de fer et de navigation et la liquidation forcée de ces entreprises du 25 septembre 1917.
La notion de chemin de fer de l'art. 1185 CO découle donc de la définition donnée dans la loi fédérale sur les chemins de fer du 20 décembre 1957. Les chemins de fer au sens de cette loi sont des entreprises qui, par destination, sont à la disposition de chacun pour le transport des personnes et des marchandises et dont les véhicules circulent sur ou sous des rails (art. 1 al. 2; cf. le Message du Conseil fédéral du 3 février 1956, FF 1956 vol. 1 p. 230). Tel n'est pas le cas en l'occurrence. Un téléphérique est un chemin de fer funiculaire aérien, au sens de l'art. 1er de l'ordonnance concernant l'octroi des concessions et le contrôle des entreprises d'automobiles, ascenseurs et chemins de fer funiculaires aériens (du 18 septembre 1906). La loi fédérale sur les chemins de fer distingue d'ailleurs implicitement les téléphériques des chemins de fer quand elle prévoit que certaines de ses dispositions, limitativement énumérées, leur sont applicables par analogie (art. 95 al. 4; cf. le Message du Conseil fédéral, du 3 février 1956, FF 1956 vol. 1 p. 287/288).
La disposition de l'art. 1185 CO ne trouve donc pas application en l'espèce (ZIEGLER, note 2 ad art. 1185 CO). Le fait qu'une concession fédérale est nécessaire pour l'établissement de téléphériques n'y change rien. Cette exigence ne découle pas de l'art. 26 Cst., relatif à la législation sur la construction et l'exploitation des chemins de fer: la concession est accordée à teneur de l'art. 3 al. 1 de la loi fédérale sur le service des postes du 2 octobre 1924, soit sur la base de l'art. 36 Cst. (DESBIOLLES, Die rechtliche Stellung der Seilbahnen in der Schweiz, in Internationale Berg- und Seilbahn-Rundschau, Sonderheft 1er juin 1960 pp. 17 ss, spéc. p. 19).
Le Tribunal fédéral n'est donc pas compétent pour s'occuper de la requête; c'est la procédure ordinaire des art. 1165 ss CO qui est applicable.
La requête est dès lors irrecevable.


BGE 101 II 130 (133):

Comme en cas d'irrecevabilité de l'action dans un procès direct au sens de l'art. 42 OJ (cf. RO 92 II 214 consid. 5; 96 II 351 consid. 7), la cour, étant unanime, peut appliquer en l'espèce l'art. 60 al. 1 OJ par analogie.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Dit que la requête est irrecevable.