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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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4A_256/2018
Arrêt du 10 septembre 2018
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Kiss, présidente,
May Canellas et Abrecht, juge suppléant.
Greffière: Mme Monti.
Participants à la procédure
1. D1.________,
2. D2.________,
3. E1.________,
4. E2.________,
5. C1.________,
6. C2.________,
tous représentés par Me Nicolas Wyss,
demandeurs et recourants,
contre
Z.________ SA,
représentée par Me Benoît Carron,
défenderesse et intimée.
Objet
contrat d'entreprise,
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 6 mars 2018 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/22909/2014; ACJC/279/2018).
Faits :
A.
A.a. En été 2004, l'entreprise générale de construction X.________ SA (ci-après: l'entreprise générale) a élaboré un projet immobilier portant sur la construction de cinq villas contiguës (A-B-C-D-E) dans la commune de... (GE).
Le 4 août 2004, elle a conclu un contrat d'entreprise générale avec les époux C.________, par lequel elle s'engageait à construire une villa «C» au prix forfaitaire de 602'540 fr. (TVA incluse). Le contrat renvoyait au Code des obligations et à la Norme SIA 118.
Deux contrats similaires ont été conclus respectivement le 19 août 2004 avec les époux D.________ pour la construction d'une villa « D» au prix forfaitaire de 609'320 fr. et le 6 septembre 2004 avec les époux E.________ pour la construction d'une villa «E» au prix forfaitaire de 608'580 fr.
La villa C des époux C.________ a été réceptionnée le 20 décembre 2005, la villa D des époux D.________ le 19 janvier 2006 et la villa E des époux E.________ le 1er mars 2006.
A.b. Le 22 juin 2008, une importante inondation s'est produite dans le sous-sol de la villa des époux E.________, impliquant l'intervention en urgence d'une société de dépannage sanitaire qui a pompé les eaux pendant cinq heures.
Par courrier électronique du 24 août 2008, les époux D.________ ont signalé à l'entreprise générale l'existence de plusieurs défauts affectant leur villa, notamment des traces d'humidité au sous-sol. Dans sa réponse du 25 août 2008, l'entreprise générale a proposé d'effectuer un constat sur place, après avoir précisé que la villa avait été livrée depuis plus de deux ans.
Le 28 novembre 2008, les époux E.________ ont adressé à l'entreprise générale un courrier électronique dans lequel ils se plaignaient notamment de l'évacuation difficile des eaux de leur villa depuis plusieurs mois, ce qui avait provoqué des dégâts d'eau et l'émanation d'odeurs nauséabondes. Ils requéraient la résolution du problème dans les plus brefs délais et le remboursement des frais d'entretien engendrés par ce problème.
Le 8 avril 2009, les propriétaires des cinq villas ont conclu des contrats d'entretien annuel des canalisations.
A.c. Par courrier du 12 juillet 2009, les propriétaires des villas B, C, D et E ont adressé à l'entreprise générale un avis commun et général de tous les défauts présents dans leurs villas respectives. Concernant les canalisations, ils ont notamment indiqué avoir subi deux inondations, la dernière [recte: première] fois en juin 2008. Depuis lors, deux nouvelles inondations moins importantes s'étaient produites au niveau de la buanderie; les éviers étaient bouchés ou émettaient des bruits de refoulement imminent. Une infiltration d'eau dans la cave de la villa des époux E.________ était à déplorer depuis janvier 2009.
Dans sa réponse du 16 juillet 2009, l'entreprise générale a rappelé aux propriétaires concernés qu'il était nécessaire de mettre en place un contrat d'entretien annuel ou bisannuel des canalisations afin de réduire le risque d'encombrement. Elle a en outre indiqué avoir constaté l'existence d'une contrepente entre la cuisine et la canalisation principale de la villa E des époux E.________; ce problème avait été signalé à l'entreprise concernée « qui fer[ait] le nécessaire pour y remédier». Elle a également précisé qu'elle relançait les entreprises concernées pour s'occuper des travaux liés aux infiltrations d'eau dans la cave des époux E.________. Concernant les légères traces de moisissures dans les angles des murs des villas des époux D.________ et E.________, il s'agissait d'un probable manque d'aération.
A.d. Par courrier du 1er juillet 2011, les époux E.________ ont mis l'entreprise générale en demeure d'entreprendre les travaux nécessaires de réfection des canalisations dans un délai de 20 jours, faute de quoi ils feraient appel à un avocat.
Dans sa réponse du 2 septembre 2011, l'entreprise générale a indiqué qu'elle effectuerait les travaux de réfection de la canalisation située dans le radier du sous-sol, affirmant avoir tenté toutes les alternatives possibles (passage d'une caméra dans la canalisation, curage, pose d'une ventilation supplémentaire, remplacement de la descente des eaux usées depuis la dalle du rez jusqu'au radier) avant d'entamer de tels travaux de réfection. Elle a encore précisé qu'elle reprendrait contact avec les propriétaires dès le retour de vacances du responsable de l'entreprise de maçonnerie afin d'élaborer un « planning réaliste» des travaux à effectuer.
Une nouvelle inondation est survenue le 10 mars 2012 dans la villa des époux E.________.
A.e. Le 25 mai 2012, les propriétaires des villas C, D et E ont imparti à l'entreprise générale un ultime délai au 5 juin 2012 pour effectuer les travaux de réfection nécessaires qui n'avaient toujours pas été accomplis, nonobstant l'engagement pris en ce sens.
L'entreprise générale a indiqué le 5 juillet 2012 qu'elle ferait passer une caméra dans les canalisations le 10 juillet 2012. Cet examen a révélé la défectuosité d'un joint entraînant des bouchons et limitant l'évacuation des eaux usées.
L'entreprise générale a communiqué ce résultat aux propriétaires le 17 août 2012, en précisant qu'un rendez-vous serait fixé en septembre avec les entreprises concernées pour rechercher une solution adéquate et pallier les problèmes d'évacuation. Elle ajoutait que « le défaut constaté ayant été annoncé dans les délais de garantie, [elle prendrait] les mesures nécessaires pour une remise en état de fonctionnement selon la Norme SIA 118». Elle relevait toutefois que les problèmes d'écoulement depuis la cuisine de la villa des époux E.________ provenaient de la présence de boules de graisse alimentaire dans les canalisations et que toute nouvelle intervention sur lesdites canalisations pour les mêmes causes serait directement facturée aux précités.
A.f. Le 19 décembre 2012, les propriétaires ont mis l'entreprise générale en demeure de transmettre pour le 10 janvier 2013 un planning précis des interventions prévues pour remédier au problème d'évacuation des eaux, à défaut de quoi ils agiraient par toutes voies de droit utiles.
L'entreprise générale a indiqué le 4 février 2013 qu'elle refusait d'intervenir sur les canalisations et de prendre en charge les frais y relatifs, au motif que la prescription quinquennale prévue par la Norme SIA 118 en matière de défauts était acquise depuis décembre 2010, respectivement janvier 2011, soit cinq ans après la réception des villas concernées.
A une date indéterminée, l'entreprise générale a signé une déclaration de renonciation à se prévaloir de l'exception de prescription à l'égard des propriétaires jusqu'au 31 décembre 2014, pour autant qu'elle ne soit pas acquise au 15 mars 2013.
A.g. Par acte du 24 avril 2013, les propriétaires des cinq villas ont saisi le Tribunal de première instance du canton de Genève d'une requête de preuve à futur visant à mettre en oeuvre une expertise judiciaire. Le Tribunal a fait droit à cette requête.
Dans son rapport du 28 février 2014, l'expert a constaté que le plan du sous-sol et des canalisations dressé pour l'exécution des travaux des villas C, D et E n'était pas conforme aux règles de l'art: il prévoyait en effet une pente insuffisante de 1,5% pour l'écoulement des eaux usées, alors que les normes en la matière imposaient une pente minimale de 2%, idéale de 3% et maximale de 5%. Le réseau de canalisations n'était pas non plus conforme aux règles de l'art, la pente moyenne de 1,13% mesurée étant insuffisante pour un écoulement d'eaux usées. Il existait en outre une contrepente, ce qui n'était pas admissible au vu des normes en la matière; il en résultait des stagnations d'eaux usées en quatre endroits, sans que celles-ci s'expliquent par un dépôt de matière; une pente minimale de 2% aurait été nécessaire.
L'expert a proposé trois variantes pour remédier aux défauts. La variante B consistait dans la création d'une cheminée de visite pour les eaux usées et le pompage de celles-ci depuis le sous-sol de chaque villa vers une nouvelle canalisation à enterrer devant les villas. Cette solution, dont l'expert estimait le coût à 200'000 fr., présentait l'avantage de limiter l'étendue de la réfection des lieux, sans présenter un risque d'affaiblissement de l'étanchéité du dallage comme la variante A et sans entraîner une dévaluation de la valeur des villas comme la variante C.
Les frais d'expertise se sont élevés à 10'800 fr.
A.h. Le 4 juillet 2014, l'entreprise générale a indiqué aux propriétaires qu'elle ne partageait pas entièrement les conclusions de l'expert, de sorte qu'elle n'entrerait pas en matière sur leurs prétentions, qui étaient selon elle périmées, voire prescrites.
B.
B.a. Par requête de conciliation du 6 novembre 2014, les propriétaires des villas C, D et E (ci-après: les demandeurs) ont assigné l'entreprise générale devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. A l'appui de leur demande du 27 février 2015, ils ont conclu au paiement de 200'000 fr. pour l'exécution des travaux de réfection, ainsi qu'au remboursement des divers frais générés par les problèmes d'inondation et de canalisations, dont 10'800 fr. pour l'expertise avant procès.
X.________ SA a invoqué la péremption, respectivement la prescription des droits de garantie.
Elle a par la suite annoncé que ses actifs et passifs avaient été repris par la société Z.________ SA, selon contrat de fusion du 25 juin 2015.
B.b. Par jugement du 2 mai 2017, le Tribunal de première instance a condamné Z.________ SA (ci-après: la défenderesse) à payer aux demandeurs, conjointement et solidairement, le montant de 200'000 fr. plus intérêts, à titre d'avance de frais sur les travaux de réfection préconisés par l'expert judiciaire dans la variante B de son rapport (ch. 1 du dispositif de jugement). Le Tribunal a précisé que cette somme devrait être exclusivement affectée au financement de ces travaux (ch. 2), que les demandeurs devraient adresser à la défenderesse le décompte du coût desdits travaux à l'issue de ceux-ci et lui rembourser la part éventuellement excédentaire de l'avance versée (ch. 3); à défaut d'avoir fait exécuter les travaux dans un délai de deux ans à compter de l'entrée en force du jugement, l'avance versée devrait être restituée (ch. 4). Le Tribunal a par ailleurs condamné la défenderesse à rembourser divers montants (et les intérêts y afférents) correspondant à des frais d'intervention de diverses entreprises et aux frais d'expertise, soit 2'743 fr. 80 (ch. 6), 360 fr. (ch. 7), 404 fr. 77 (ch. 8), 2'412 fr. 92 (ch. 9; recte: 412 fr. 92, cf. consid. 3.5 infra), 1'701 fr. 33 (ch. 10), 603 fr. 80 (ch. 11), 10'800 fr. (ch. 12) et 1'241 fr. (ch. 13).
Le Tribunal a laissé indécise la question de savoir si les demandeurs avaient signalé les défauts en temps utile, considérant que la défenderesse avait en tout état renoncé, à tout le moins tacitement, à se prévaloir d'une éventuelle tardiveté dans l'avis des défauts.
B.c. Statuant par arrêt du 6 mars 2018 sur appel de la défenderesse, la Cour de justice genevoise a réformé ce jugement en ce sens qu'elle a débouté les demandeurs des fins de leur demande en paiement.
C.
Les demandeurs ont interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral, en concluant à ce que la défenderesse soit condamnée à leur payer les montants de 200'000 fr., 2'743 fr. 80, 360 fr., 404 fr. 77, 412 fr. 92, 1'701 fr. 33, 603 fr. 80, 10'800 fr. et 1'241 fr.
La défenderesse a conclu au rejet du recours dans la mesure où il était recevable.
L'autorité précédente s'est référée à son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par les demandeurs qui ont succombé dans leurs conclusions en paiement (art. 76 al. 1 LTF) et dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu sur recours par le tribunal supérieur du canton (art. 75 LTF) dans une contestation civile pécuniaire dont la valeur litigieuse excède 30'000 fr. (art. 72 al. 1 et 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions.
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). «Manifestement inexactes» signifie ici «arbitraires» (ATF 140 III 115 consid. 2 p. 117; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'invocation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18 et les références). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 90). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 p. 18).
2.2. En l'espèce, les demandeurs déclarent se référer à l'état de fait retenu par la cour cantonale, qui devrait toutefois être complété par deux éléments prétendument «régulièrement allégués, prouvés et essentiels à la solution du litige», et qui auraient été «occultés sans raison dans les considérants de l'arrêt attaqué».
Force est toutefois de constater que si les demandeurs se réfèrent à deux pièces qu'ils avaient produites en première instance - soit un courriel du 28 novembre 2008 émanant des époux E.________, produit sous P. 16 (cf. lettre A.b supra), et un courrier du 12 juillet 2009 rédigé par les propriétaires des villas B, C, D et E, produit sous P. 18 (cf. lettre A.c supra) -, ils ne démontrent nullement avoir allégué les faits découlant de ces pièces, qu'ils reprochent à la cour cantonale de ne pas avoir retenus. En conséquence, le Tribunal fédéral statuera sur la base des faits constatés par l'autorité précédente, conformément à l'art. 105 al. 1 LTF, et la présentation des faits contenue dans le recours ne sera pas prise en considération dans la mesure où elle s'écarte de l'état de fait de l'arrêt attaqué sans satisfaire aux conditions rappelées ci-dessus.
3.
3.1. Il est constant que les parties sont liées par des contrats d'entreprise portant sur la construction de trois villas contiguës, contrats qui intègrent l'édition 1977/1991 de la Norme SIA 118 («Conditions générales pour l'exécution des travaux de construction»). Il est également acquis que les canalisations communes des villas des demandeurs sont, depuis l'origine, entachées d'un défaut caché apparu plus de deux ans après la réception des ouvrages. Cela étant, est au premier chef litigieuse la question de savoir si la défenderesse a renoncé à se prévaloir d'une éventuelle tardiveté dans l'avis de ce défaut, comme l'avait retenu le Tribunal de première instance et comme le font valoir les demandeurs à l'appui de leur recours, ou si elle est en droit d'invoquer cette tardiveté, comme l'a retenu la Cour de justice.
3.2.
3.2.1. En dérogation au régime légal de droit dispositif (art. 367 al. 1 et art. 370 al. 3 CO), la Norme SIA 118 (ci-après: SIA-118) instaure un délai de garantie - ou «délai de dénonciation des défauts» - de deux ans, durant lequel le maître peut faire valoir en tout temps les défauts de quelque nature qu'ils soient; il ne doit donc pas nécessairement les signaler aussitôt après leur découverte (art. 172 et 173 SIA-118; PETER GAUCH, Der Werkvertrag, 5e éd. 2011, n° 2683).
A l'expiration de ce délai, le maître perd le droit d'invoquer les défauts qu'il a découverts (art. 178 al. 1 SIA-118). Subsiste toutefois une responsabilité de l'entrepreneur pour les défauts cachés, soit les défauts que le maître ne découvre qu'après l'expiration du délai de garantie de deux ans (art. 179 al. 1 SIA-118). Encore faut-il que le maître signale le défaut aussitôt après sa découverte (art 179 al. 2 SIA-118). Ce régime rejoint alors celui de l'art. 370 al. 3 CO. Si le maître omet de signaler le défaut en temps utile, il perd ses droits à la garantie, qui sont frappés de péremption (arrêt 4A_231/2016 du 12 juillet 2016 consid. 2.2, rés. in SJ 2017 I 56; arrêt 4C.421/2006 du 4 avril 2007 consid. 5.2; GAUCH, op. cit., n° 2718; cf. aussi Gau CH/STÖCKLI, in Kommentar zur SIA-Norm 118, 2e éd. 2017, nos 10.1 et 10.2 ad art. 179 SIA-118; SPIESS/HUSER, Norm SIA 118, 2014, n° 2 ad art. 179 SIA-118).
3.2.2. Cela étant, l'entrepreneur peut renoncer à se prévaloir de la tardiveté de l'avis des défauts (TERCIER ET ALII, Les contrats spéciaux, 5e éd. 2016, n° 3804). Cette renonciation peut être expresse ou tacite, par exemple lorsque l'entrepreneur, en connaissance de l'avis tardif, entreprend sans réserve la réfection de l'ouvrage ou reconnaît l'obligation d'éliminer le défaut (cf. arrêt 4A_275/2009 du 12 août 2009 consid. 3). Les circonstances concrètes doivent permettre d'inférer clairement une renonciation tacite. Le fait que l'entrepreneur prenne connaissance de l'avis des défauts sans faire d'objections sur le retard ne signifie pas, à lui seul, qu'il renonce à se prévaloir du retard. Le fardeau de la preuve d'une renonciation incombe au maître qui s'en prévaut (GAUCH, op. cit., n° 2163; FRANÇOIS CHAIX, in Commentaire romand, 2e éd. 2012, nos 22 et 24 ad art. 370 CO).
Une renonciation tacite a été retenue dans le cas d'un entrepreneur qui avait exécuté tous les travaux de réfection préconisés par un expert privé (arrêt 4C.149/2001 du 19 décembre 2001 consid. 5), respectivement qui avait effectué des travaux de réparation consistant à éliminer pendant quatre ans d'affilée des cloques qui réapparaissaient sur les parois intérieures d'une cuve (arrêt 4C.347/2005 du 13 février 2006 consid. 2).
3.3.
3.3.1. En l'espèce, les juges cantonaux ont concédé que la défenderesse avait manifesté son intention d'éliminer les défauts affectant les canalisations des villas dans différents courriers, soit dans ceux du 16 juillet 2009 (cf. lettre A.c supra), du 2 septembre 2011 (cf. lettre A.d supra), ou encore du 17 août 2012 (cf. lettre A.e supra). Il n'en demeurait pas moins que les déclarations et le comportement de la défenderesse ne pouvaient pas être compris de bonne foi comme une promesse inconditionnelle de remédier aux défauts, y compris dans l'hypothèse particulière où les droits de garantie seraient périmés. Non seulement la défenderesse n'avait jamais fait allusion à la péremption des droits des demandeurs dans ses différents courriers, mais elle avait au contraire indiqué dans son courrier du 17 août 2012 que le défaut avait été annoncé dans les délais de garantie. Or une renonciation tacite à se prévaloir de l'avis tardif des défauts ne pouvait intervenir que si l'entrepreneur avait conscience de ce à quoi il renonçait. Au surplus, la défenderesse n'avait pas commencé les travaux de réfection, mais s'était limitée à relayer les problèmes annoncés aux sous-traitants, qui n'avaient eux-mêmes pris aucune mesure concrète en vue de les éliminer. A défaut de renonciation valable de la défenderesse à soulever l'objection de tardiveté, le premier juge aurait dû examiner si toutes les conditions étaient réunies pour que l'entrepreneur soit tenu à garantie.
3.3.2. Cette appréciation de la cour cantonale ne saurait être suivie. En effet, comme le font valoir à raison les demandeurs, la défenderesse leur a indiqué le 16 juillet 2009 qu'elle avait constaté l'existence d'un défaut sous la forme d'une contrepente entre la cuisine et la canalisation principale de la villa E des époux E.________, qu'elle avait signalé ce problème à l'entreprise concernée «qui fer[ait] le nécessaire pour y remédier» et qu'elle relançait également les entreprises concernées pour s'occuper des travaux liés aux infiltrations d'eau dans la cave de cette même villa (cf. lettre A.c supra). Ensuite, la défenderesse a indiqué le 2 septembre 2011 aux demandeurs qu'elle effectuerait les travaux de réfection de la canalisation située dans le radier du sous-sol, précisant qu'elle reprendrait contact avec les propriétaires dès le retour de vacances du responsable de l'entreprise de maçonnerie afin d'élaborer un planning réaliste des travaux à effectuer (cf. lettre A.d supra). Enfin, le 17 août 2012 - après que les demandeurs s'étaient plaints le 25 mai 2012 que la défenderesse n'avait toujours pas entrepris les travaux de réfection nécessaires nonobstant son engagement en ce sens, et après que la défenderesse avait fait effectuer à ses frais un examen des canalisations par passage de caméra sous le radier de l'ensemble des villas -, la défenderesse a écrit aux demandeurs que «[l]e défaut constaté ayant été annoncé dans les délais de garantie, [elle prendrait] les mesures nécessaires pour une remise en état de fonctionnement selon la Norme SIA 118» (cf. lettre A.e supra).
Ainsi, la défenderesse a de manière réitérée reconnu expressément l'existence du défaut et s'est engagée sans réserve à le supprimer ou à le faire supprimer, sans jamais tenir ses engagements. Au surplus, dans son courrier du 17 août 2012, la défenderesse a expressément indiqué qu'elle considérait que le défaut constaté avait été annoncé en temps utile, déclaration qui ne pouvait de bonne foi être comprise que comme une renonciation à se prévaloir d'une éventuelle tardiveté de l'avis des défauts, au demeurant jamais invoquée jusque-là en trois ans de tergiversations. Ce n'est d'ailleurs que le 4 juillet 2014, après avoir pris connaissance des conclusions de l'expert dans la procédure de preuve à futur initiée par les demandeurs, que la défenderesse a pour la première fois invoqué la péremption des prétentions des demandeurs (cf. lettre A.h supra). Or elle disposait en juillet 2009 déjà de tous les éléments qui lui auraient permis de se prévaloir de la tardiveté de l'avis des défauts, à savoir que les propriétaires de la villa E dénonçaient dans leur courriel du 28 novembre 2008 l'évacuation défectueuse des eaux usées alors qu'ils avaient déjà constaté ces désagréments «plusieurs mois» auparavant, et que les propriétaires des villas C et D n'avaient avisé la défenderesse des problèmes de canalisation affectant leur maison que le 12 juillet 2009.
3.3.3. Au regard de ce qui précède, force est de constater que la défenderesse a clairement renoncé à se prévaloir d'un retard dans l'avis des défauts, comme l'avait retenu à bon droit le Tribunal de première instance. Est ainsi privée d'objet la question de savoir si l'avis des défauts est tardif ou non.
En revanche, il convient de se pencher sur la question de la prescription des droits des demandeurs, qui n'a pas été examinée par la Cour de justice dès lors qu'elle a considéré à tort que les droits de garantie des demandeurs étaient périmés.
3.4.
3.4.1. Selon l'art. 180 al. 1 SIA-118, les droits du maître en cas de défauts se prescrivent par cinq ans à partir de la réception de l'ouvrage. Cette disposition ne règle pas l'interruption de la prescription, qui relève de l'art. 135 CO (arrêt 4A_109/2014 du 21 mai 2014 consid. 4.1; cf. ATF 114 II 261 p. 262; GAUCH, op. cit., no 2732).
3.4.2. D'après l'art. 135 ch. 1 CO, la prescription est interrompue lorsque le débiteur reconnaît la dette. Vaut acte de reconnaissance de dette au sens de cette disposition tout comportement du débiteur que le créancier peut de bonne foi comprendre comme une confirmation de ce que le débiteur est obligé juridiquement; il suffit que le débiteur reconnaisse la dette sur le principe (ATF 134 III 591 consid. 5.2.1; 119 II 368 consid. 7b p. 378 s.). Savoir si une dette a été reconnue se détermine d'après les circonstances concrètes du cas d'espèce. Constitue un comportement concluant notamment le fait pour l'entrepreneur de procéder à la réfection requise de l'ouvrage (ATF 121 III 270 consid. 3c; arrêt précité 4A_109/2014 consid. 4.1; arrêt 4C.258/2001 du 5 septembre 2002 consid. 4.1.2; cf. aussi GAUCH, op. cit., n° 2266 s.; GAUCH/STÖCKLI, op. cit., nos 5.5 et 5.6 ad art. 180 SIA-118).
3.4.3. En l'espèce, selon les constatations de fait de l'arrêt attaqué (cf. lettre A.a supra), la villa des époux C.________ (C) a été réceptionnée le 20 décembre 2005, celle des époux D.________ (D) le 19 janvier 2006 et celle des époux E.________ (E) le 1 er mars 2006. Le délai de prescription de cinq ans de l'art. 180 al. 1 SIA-118 arrivait ainsi à échéance le 20 décembre 2010 pour les époux C.________, le 19 janvier 2011 pour les époux D.________ et le 1 er mars 2011 pour les époux E.________. Or par courrier du 16 juillet 2009, la défenderesse a reconnu l'existence du défaut affectant les canalisations et a annoncé qu'elle allait faire le nécessaire pour y remédier (cf. lettre A.c supra). Ce courrier devait être compris de bonne foi comme une reconnaissance de dette et a ainsi interrompu la prescription, de sorte qu'un nouveau délai de cinq ans a commencé à courir dès l'interruption, conformément à l'art. 137 al. 1 CO, pour arriver à échéance le 16 juillet 2014. La défenderesse a signé une déclaration de renonciation à se prévaloir de l'exception de prescription à l'égard des propriétaires jusqu'au 31 décembre 2014, pour autant qu'elle ne soit pas acquise au 15 mars 2013 (cf. lettre A.f supra) - ce qui n'est pas le cas; force est ainsi de constater que les prétentions des demandeurs découlant des défauts de l'ouvrage n'étaient pas prescrites au moment où ils ont ouvert action le 6 novembre 2014.
3.5. La quotité des prétentions émises par les demandeurs en relation avec les défauts litigieux n'était déjà pas contestée devant le Tribunal de première instance par la défenderesse, qui invoquait la péremption du droit à la garantie en raison de la tardiveté de l'avis des défauts, respectivement la prescription de l'action en garantie.
Dès lors qu'il doit être retenu que la défenderesse a renoncé à se prévaloir d'un retard dans l'avis des défauts (cf. consid. 3.3.3 supra) et que les prétentions des demandeurs découlant des défauts ne sont pas prescrites (cf. consid. 3.4.3 supra), le recours en matière civile des demandeurs doit être admis et l'arrêt entrepris réformé dans le sens de la confirmation intégrale du jugement de première instance. Il convient toutefois de rectifier d'office une erreur de plume du Tribunal de première instance, qui a retenu par erreur au chiffre 9 de son dispositif de jugement un montant de 2'412 fr. 92, en lieu et place du montant de 412 fr. 92 correspondant aux travaux accomplis le 27 juin 2011 par l'entreprise P.________ SA (arrêt attaqué, p. 4 let. i), montant qui fait l'objet de la conclusion 6 de la demande en paiement du 26 février 2015.
4.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être admis et l'arrêt attaqué réformé en ce sens que l'appel de la défenderesse est rejeté, le jugement de première instance étant confirmé, sous réserve de la rectification du chiffre 9 de son dispositif (cf. consid. 3.5 supra). La cause sera renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle statue à nouveau sur les frais et dépens de deuxième instance (art. 67 et 68 al. 5 LTF).
Vu l'issue du recours, les frais de la présente procédure seront mis à la charge de la défenderesse (art. 66 al. 1 LTF), qui versera en outre aux demandeurs, créanciers solidaires, une indemnité de 7'000 fr. à titre de dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis.
2.
L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que l'appel de la défenderesse est rejeté, le jugement de première instance étant confirmé sous réserve de la rectification du chiffre 9 de son dispositif où le montant de 2'412 fr. 92 doit être remplacé par le montant de 412 fr. 92.
3.
La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle statue à nouveau sur les frais et dépens de deuxième instance.
4.
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la défenderesse.
5.
La défenderesse versera aux demandeurs, créanciers solidaires, une indemnité de 7'000 fr. à titre de dépens.
6.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 10 septembre 2018
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente: Kiss
La greffière: Monti