BGer 1C_323/2018
 
BGer 1C_323/2018 vom 04.07.2018
 
1C_323/2018
 
Arrêt du 4 juillet 2018
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Fonjallaz et Eusebio.
Greffier: M. Kurz.
Participants à la procédure
recourant,
contre
Office fédéral de la justice, Unité Extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne.
Objet
Extradition au Portugal,
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 19 juin 2018 (RR.2018.171).
 
Faits :
A. Le 14 janvier 2018, A.________, ressortissant portugais né en 1984, a été arrêté et placé en détention extraditionnelle à la demande des autorités portugaises. Les 12 et 15 février 2018, le Parquet général du Portugal a présenté une demande formelle d'extradition pour l'exécution d'une peine privative de liberté de trois ans et six mois prononcée par le Tribunal du district d'Aveiro, confirmée le 7 avril 2016 par la Cour d'appel de Porto, pour des faits de violence domestique.
Par décision du 20 avril 2018, l'Office fédéral de la justice a accordé l'extradition.
B. Par arrêt du 19 juin 2018, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours formé par A.________; rien ne permettait de mettre en doute la validité de la citation à comparaître, de sorte que le prononcé par défaut de première instance ne violait pas l'art. 6 CEDH; le recourant avait fait appel du jugement et ne prétendait pas que le droit au relief lui aurait été indument refusé. Le recourant avait sa compagne et son fils en Suisse mais cela ne justifiait pas un refus de l'extradition fondé sur l'art. 8 CEDH. Les dispositions sur le meilleur reclassement social en Suisse (art. 37 al. 1 EIMP) ne s'appliquaient pas à l'égard d'un Etat partie à la CEExtr. qui avait requis l'extradition. L'assistance judiciaire a été refusée au recourant et 500 fr. de frais ont été mis à sa charge.
C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt attaqué et de refuser l'extradition, subsidiairement de renvoyer la cause à l'instance précédente, plus subsidiairement de dire que l'exécution de la peine se déroulera en Suisse.
Il n'a pas été demandé de réponse.
 
Considérant en droit :
1. Selon l'art. 84 LTF, le recours en matière de droit public est recevable à l'encontre d'un arrêt du Tribunal pénal fédéral, notamment lorsque celui-ci a pour objet une extradition. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (al. 1). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut aussi être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 133 IV 215 consid. 1.2 p. 218).
Dans le domaine de l'extradition également, l'existence d'un cas particulièrement important n'est admise qu'exceptionnellement (ATF 134 IV 156 consid. 1.3.4 p. 161). En vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il incombe au recourant de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l'art. 84 LTF sont réunies (ATF 133 IV 131 consid. 3).
1.1. Le recourant relève qu'il a été jugé par défaut dans des circonstances qui violeraient les garanties de procédure découlant de l'art. 6 CEDH. Il estime n'avoir pas été valablement cité à comparaître alors qu'il était domicilié en France. Il relève aussi s'être trouvé au Brésil lors de l'audience de jugement.
Une violation du droit d'être jugé en sa présence ou du droit à un nouveau jugement garanti par l'art. 6 CEDH peut certes constituer un défaut grave de la procédure étrangère susceptible de justifier l'intervention d'une seconde instance de recours au sens de l'art. 84 LTF. En l'occurrence toutefois, il n'y a pas lieu d'admettre pour ce motif l'existence d'un cas particulièrement important. La Cour des plaintes a en effet rappelé les principes découlant sur ce point de l'art. 6 CEDH et le recourant ne prétend pas que l'instance précédente se serait écartée de la jurisprudence constante dans ce domaine. Il se contente d'évoquer un domicile à l'étranger, sans toutefois démontrer que celui-ci aurait été ou aurait dû être connu de l'instance de jugement, comme par exemple s'il avait signalé son départ aux autorités pénales ou s'il avait indiqué une nouvelle adresse à laquelle il pouvait être atteint (cf. arrêt 1C_194/2015 du 1er mai 2015 consid. 1.4.1). Il ne prétend pas non plus qu'il n'aurait aucun droit au relief du défaut aux conditions posées par l'art. 6 CEDH et par la jurisprudence (ATF 129 II 56 consid. 6.2). Il ne se pose donc aucune question de principe à ce propos.
1.2. Il n'y en a pas non plus en ce qui concerne le grief tiré de l'art. 8 CEDH. Cette disposition peut certes faire obstacle à l'extradition lorsque cette dernière apparaît comme une ingérence disproportionnée dans la vie familiale de l'intéressé (consid. 3e et 4 non publiés de l'ATF 122 II 485). Le Tribunal fédéral a toutefois précisé à plusieurs reprises qu'un tel refus (admis dans un unique cas concernant un père de deux filles mineures en Suisse, dont l'incarcération avait mis sa compagne, invalide à 100 % et enceinte d'un troisième enfant, dans un état anxio-dépressif avec des idées suicidaires) était tout-à-fait exceptionnel (ATF 129 II 100 consid. 3.5 p. 105; arrêt 1C_173/2015 du 27 avril 2015). En l'occurrence, l'extradition du recourant occasionnera inévitablement des difficultés dans le maintien des relations avec sa compagne et son enfant en bas âge (difficultés inhérentes à toute mesure d'incarcération), mais la situation n'est pas comparable avec celle qui est décrite ci-dessus. L'arrêt de la Cour des plaintes est sur ce point également conforme à la jurisprudence constante.
1.3. S'agissant enfin de l'exécution en Suisse de la peine prononcée à l'étranger (art. 37 al. 1 EIMP), l'arrêt attaqué rappelle également la jurisprudence constante selon laquelle cette possibilité n'est pas ouverte lorsque l'Etat requérant est comme en l'espèce partie à la CEExtr., cette convention ne consacrant pas un tel motif de refus d'extradition (ATF 129 II 100 consid. 3.1 p. 102). L'autorité requérante a d'ailleurs choisi de requérir formellement l'extradition de l'intéressé, et non la délégation de la poursuite ou de l'exécution. Le recourant évoque le dépôt d'une demande dans ce sens déposée auprès de l'autorité étrangère, mais cette démarche n'a apparemment connu aucune suite et l'autorité suisse d'extradition, saisie d'une demande valable à la forme et au fond, n'avait pas à interpeller l'autorité requérante sur ce point.
2. Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. Cette issue s'imposait d'emblée, de sorte que l'assistance judiciaire ne peut être accordée au recourant. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à sa charge. Toutefois, compte tenu de la situation financière alléguée à l'appui de la demande d'assistance judiciaire, les frais seront réduits.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est irrecevable.
2. la demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Office fédéral de la justice, Unité Extraditions, et au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes.
Lausanne, le 4 juillet 2018
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
Le Greffier : Kurz