BGer 1B_94/2018
 
BGer 1B_94/2018 vom 09.03.2018
 
1B_94/2018
 
Arrêt du 9 mars 2018
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Fonjallaz et Eusebio.
Greffier : M. Parmelin.
Participants à la procédure
A.________,
recourant,
contre
Ministère public de la République et canton de Genève.
Objet
procédure pénale; refus de nomination d'avocat d'office,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 9 février 2018 (ACPR/81/2018 P/14620/2017).
 
Considérant en fait et en droit :
1. Par jugement du 15 mars 2013, le Juge aux Affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Bourg-en-Bresse a prononcé le divorce de A.________ et B.________. Il a condamné celui-ci à verser à son ex-épouse la somme de 1'000 euros par mois pour l'entretien et l'éducation de leurs deux enfants ainsi qu'une prestation compensatoire de 38'400 euros payable en 12 mensualités par an de 400 euros pendant 8 ans.
Donnant suite à une plainte pénale déposée par B.________ le 15 mai 2015, le Ministère public de la République et canton de Genève a, par ordonnance pénale du 17 août 2016, déclaré A.________ coupable de violation d'une obligation d'entretien et l'a condamné à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant trois ans, pour ne pas avoir versé à son ex-épouse les montants qu'il lui devait entre les mois d'avril 2013 et de mai 2015. A cette même date, il a refusé d'entrer en matière sur la plainte pénale déposée par A.________ contre B.________ pour dénonciation calomnieuse au motif qu'il ne pouvait être reproché à cette dernière, au vu des rapports conflictuels qu'entretenaient les parties sur les aspects financiers de leur divorce, de l'avoir dénoncé comme auteur d'une infraction en rapport avec ses avoirs LPP alors qu'elle le savait innocent.
Le 17 février 2017, B.________ a déposé une plainte pénale à l'encontre de A.________ pour violation d'une obligation d'entretien. Elle exposait en substance que son ex-mari avait cessé de lui verser la prestation complémentaire de 400 euros et la pension alimentaire de 1'000 euros par mois depuis le 23 août 2016 alors qu'il était en mesure de le faire dès lors qu'il exerçait une activité lucrative en tant qu'indépendant dans le domaine de la vente de véhicules automobiles en Suisse, en France ainsi qu'en Allemagne.
Entendu par la police le 13 juillet 2017, A.________ a déclaré ne pas avoir payé la prestation complémentaire due à son ex-épouse car il n'en avait pas les moyens, dépendant de l'aide financière fournie par l'Hospice général. Il a produit un jugement du Tribunal de Grande Instance de Bourg-en-Bresse du 30 mai 2017 qui supprime avec effet immédiat la pension alimentaire due pour l'entretien et l'éducation de ses enfants.
Le 18 juillet 2017, le Ministère public de la République et canton de Genève a informé A.________ qu'il ouvrait une procédure préliminaire à son encontre.
Le 21 juillet 2017, A.________ a porté plainte contre son ex-épouse pour dénonciation calomnieuse en raison de l'allégation mensongère faite dans sa plainte pénale du 7 février 2017 selon laquelle il exerçait une activité lucrative indépendante.
Le 7 décembre 2017, le Ministère public a convoqué les parties à une audience fixée le 23 janvier 2018.
Le 19 décembre 2017, A.________ a sollicité le report de l'audience et déposé une requête de nomination d'un défenseur d'office que le Ministère public a rejetée, par ordonnance du 22 décembre 2017, aux motifs que la cause ne présentait pas de difficultés particulières juridiques ou de fait et que le prévenu était ainsi à même de se défendre efficacement seul.
La Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision par arrêt du 9 février 2018 que l'intéressé a déféré auprès du Tribunal fédéral le 14 février 2018.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. La Chambre pénale de recours a produit son dossier.
2. L'arrêt attaqué qui confirme en dernière instance cantonale le refus de désigner un avocat d'office à A.________ pour l'assister dans la procédure pénale ouverte contre lui pour violation d'une obligation d'entretien peut être déféré auprès du Tribunal fédéral par la voie du recours en matière pénale au sens des art. 80 ss de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) dès lors qu'il est susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 140 IV 202 consid. 2.2 p. 205).
Aux termes de l'art. 42 al. 1 LTF, le mémoire de recours doit contenir les conclusions et les motifs à l'appui de celles-ci. Les conclusions doivent indiquer sur quels points la décision est attaquée et quelles sont les modifications demandées (ATF 133 III 489 consid. 3.1). Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit (art. 42 al. 2 LTF). Pour satisfaire à cette exigence, il appartient au recourant de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse et d'expliquer en quoi ceux-si seraient contraires au droit (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 91). En outre, les éventuels griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF), le recourant devant alors citer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 142 II 369 consid. 2.1 p. 372; 141 I 36 consid. 1.3 p. 41). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368).
Le recourant n'a pris aucune conclusion même si l'on comprend à la lecture du mémoire de recours qu'il entend obtenir l'annulation de la décision attaquée et l'octroi d'un défenseur d'office pour l'assister dans la procédure pénale ouverte à son encontre pour violation d'une obligation d'entretien. La portée de cette omission sur la recevabilité du recours peut rester indécise vu l'issue du litige.
La Chambre pénale de recours a jugé que A.________ ne saurait prétendre à une défense obligatoire au vu de la sanction encourue, inférieure à celle de l'art. 130 let. b CPP. Elle a considéré que les conditions d'une défense d'office n'étaient pas davantage réunies. En effet, il est reproché au recourant d'avoir, dès le 23 août 2016, omis de verser la contribution alimentaire due pour l'entretien de sa famille, fixée par le jugement de divorce du 15 mars 2013. Il lui suffit ainsi d'exposer les raisons pour lesquelles il n'a pas satisfait à ce jugement en fournissant les pièces justificatives nécessaires, ce qu'il a du reste parfaitement compris en produisant le jugement de modification de la pension alimentaire due aux enfants du 30 mai 2017. L'instruction de la procédure consiste à déterminer la situation financière du prévenu durant la période en cause. A ce stade, l'infraction pour laquelle il est poursuivi ne présente pas de difficultés particulières, tant du point de vue de l'établissement des faits que des questions juridiques, qu'il ne serait pas en mesure de surmonter seul, sans l'aide d'un avocat. Par ailleurs, il ne prétend pas que le déroulement d'une procédure pénale et ses enjeux ne lui seraient pas familiers car il a déjà dû comparaître et se défendre de semblables accusations. La peine envisageable n'excédera en outre vraisemblablement pas la durée des peines prévues par l'art. 132 al. 3 CPP, malgré une précédente condamnation avec sursis, le recourant apparaissant dorénavant dispensé de verser une contribution d'entretien à ses enfants. Enfin, que son ex-épouse soit assistée d'un conseil qu'elle rémunère ne pose pas de problème au niveau de l'égalité des armes puisque la cause ne présente pas de complexité juridique, seuls les faits étant importants, sur lesquels le recourant peut se prononcer seul. Ce dernier ne se trouve donc pas en net désavantage vis-à-vis de son adversaire.
Le recourant conteste les arguments exposés et estime ne pas être à égalité de chances avec la partie adverse car, malgré son indigence, il a déjà été condamné une première fois pour violation d'une obligation d'entretien. Le fait qu'il a été condamné, selon lui à tort, pour une infraction semblable à celle qui lui est actuellement reprochée ou que le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur une précédente plainte déposée contre son ex-épouse pour dénonciation calomnieuse ne permet pas de retenir que la procédure ne serait pas équitable et que l'assistance d'un avocat s'imposerait pour ce motif. La requête présentée en ce sens devait au surplus être examinée à l'aune des critères définis aux art. 130 ss CPP.
Le recourant ne prétend pas avec raison que les conditions d'une défense obligatoire selon l'art. 130 CPP étaient réunies. Il s'en prend à l'argumentation de la cour cantonale retenue pour conclure que la cause ne présente pas de difficultés insurmontables au sens de l'art. 132 al. 2 CPP selon laquelle il lui suffirait d'exposer les raisons pour lesquelles il n'a pas versé les contributions dues en vertu du jugement de divorce en produisant les pièces justificatives. Il affirme avoir fourni à la police tous les éléments de fortune pour la période incriminée et ne comprend pas que, malgré tout, il doit se présenter devant le Ministère public. Cette argumentation, peu compréhensible, ne répond pas aux exigences de motivation requises et ne permet pas de conclure à une violation de l'art. 132 al. 2 CPP.
Le recourant estime que la motivation de la cour cantonale suivant laquelle la peine envisageable n'excédera vraisemblablement pas la durée des peines prévues par l'art. 132 al. 3 CPP violerait la présomption d'innocence dont tout prévenu bénéficie en tant qu'elle laisserait entrevoir qu'il sera condamné. Cette disposition impose à la direction de la procédure d'évaluer la peine encourue par le prévenu en cas de condamnation pour les faits qui lui sont reprochés afin de savoir si l'on se trouve en présence d'un cas grave imposant de lui désigner un avocat d'office. Un tel pronostic n'est pas en soi contraire à la présomption d'innocence. En parlant de peine envisageable, la cour cantonale ne s'est pas définitivement prononcée sur la culpabilité du recourant. La considération selon laquelle le recourant s'expose au prononcé d'une peine privative de liberté, dont la durée paraît ne pas devoir dépasser celles fixées à l'art. 132 al. 3 CPP, compte tenu des circonstances, est suffisamment prudente et nuancée; elle ne permet pas d'y voir une déclaration prématurée de culpabilité susceptible d'influer sur la suite de la procédure en mains du Ministère public. Au demeurant un tel constat n'aurait aucune incidence sur la question de savoir si l'assistance d'un avocat d'office se justifie.
3. Le recours, tel que motivé, doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable, selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 109 al. 2 let. a LTF. Vu les circonstances, le présent arrêt sera rendu sans frais (art. 66 al. 1, 2ème phrase, LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3. Le présent arrêt est communiqué au recourant, ainsi qu'au Ministère public et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 9 mars 2018
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
Le Greffier : Parmelin