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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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1C_588/2016
Arrêt du 26 octobre 2017
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Karlen et Fonjallaz.
Greffier: M. Kurz.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
4. D.________,
5. E.________,
6. F.________,
7. G.________,
8. H.________,
9. Hoirie de feu I.________, soit:,
10. J.________,
11. K.________,
12. L.________,
13. M.________,
14. N.________,
15. O.________,
tous représentés par Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat,
recourants,
contre
Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie de la République et canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8.
Objet
autorisation de construire,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice
de la République et canton de Genève,
Chambre administrative, 3ème section,
du 8 novembre 2016.
Faits :
A.
En 1999, A.________ et d'autres propriétaires ont formé une demande préalable d'autorisation en vue de construire un ensemble immobilier de 37 logements sur les parcelles n° 2936 à 2943 de la commune de Vernier, dans un secteur situé entre la route de Peney et le chemin de la Petite-Garenne, en zone 5 de villas à proximité de l'Aéroport International de Genève. Un premier refus prononcé en 2000 par le département cantonal (actuellement le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, ci-après: le département) a été annulé sur recours en 2001 et 2002 par les instances cantonales, celles-ci considérant en substance que le bruit du trafic aérien ne constituait pas un motif de refus en l'absence d'un cadastre de bruit. L'Etat de Genève a contesté en vain cette décision auprès du Tribunal fédéral, lequel a déclaré son recours irrecevable (arrêt 1A.228/2002 du 25 février 2003).
Le 11 février 2004, le département a rendu une nouvelle décision de refus fondée sur un préavis défavorable du service cantonal de protection contre le bruit (actuellement: service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants - SABRA), lequel faisait état de dépassements des valeurs limite d'immissions (VLI), voire des valeurs d'alarmes. Par décision du 27 février 2006, l'autorité de recours de première instance a ordonné la délivrance de l'autorisation, considérant que l'objection tirée des nuisances sonores avait été définitivement écartée dans les décisions précédentes. Le département ne conservait de liberté d'appréciation qu'en ce qui concernait les mesures constructives prévues par l'art. 31 al. 1 let. b OPB. L'autorisation préalable a finalement été délivrée le 15 septembre 2006.
B.
Le 9 juillet 2008, les propriétaires ont déposé une demande d'autorisation de construire définitive pour la construction de 54 logements répartis dans douze bâtiments d'au maximum deux étages sur rez. S'agissant de la protection contre le bruit, le projet prévoyait une isolation phonique renforcée ainsi qu'une ventilation double flux sur tout le projet.
Le 22 juin 2009, le département a refusé l'autorisation; les valeurs limites correspondant au degré de sensibilité II applicable à la zone étaient largement dépassées de jour comme de nuit, et les valeurs d'alarme étaient dépassées de jour sur une partie du périmètre. Vu l'ampleur des ces dépassements, les solutions techniques proposées ne permettaient pas de satisfaire aux exigences légales. Par ailleurs, un déclassement des parcelles en zone industrielle et artisanale était prévu.
Cette décision a été confirmée le 19 juillet 2010 par la Commission de recours en matière de constructions, mais ce prononcé a été déclaré nul par le Tribunal administratif genevois, le 16 décembre 2014, en raison du décès d'une partie durant la procédure. Statuant à nouveau, le Tribunal administratif de première instances (TAPI, qui avait succédé à la commission de recours) a derechef rejeté le recours, par jugement du 8 septembre 2015.
C.
Par arrêt du 8 novembre 2016, la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours formé par les propriétaires. L'autorisation préalable portait sur le principe de la construction, sans examen des caractéristiques des bâtiments et en particulier des mesures de protection contre le bruit, expressément réservées. En outre, la situation juridique avait évolué puisque le cadastre de bruit avait été établi en mars 2009 par l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC). Selon le service spécialité (le SABRA), aucune mesure constructive ne permettait de respecter les VLI au sens de l'art. 31 al. 1 let. b OPB. L'arrêt cantonal invoqué par les propriétaires concernait une situation différente; aucune assurance n'avait été donnée en l'espèce quant aux possibilités de construire. La construction de 54 logements répondait certes à un intérêt public important, mais celui-ci était contrebalancé par l'intérêt à la protection de la santé des futurs habitants. L'art. 31a OPB, entré en vigueur le 1er février 2015, ne concernait que les dépassements de valeurs limites nocturnes, sans dépassement des valeurs d'alarme. L'argument relatif à l'égalité de traitement a lui aussi été écarté.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________, B.________, C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.________ et les six membres de l'hoirie de I.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et la décision du 22 juin 2009, de donner acte aux recourants qu'ils s'engagent à réaliser les recommandations figurant dans le rapport acoustique, de dire que l'autorisation définitive de construire est accordée et de renvoyer le dossier au département afin qu'il délivre l'autorisation dans les dix jours. Ils demandent aussi qu'il soit constaté que la Chambre administrative a violé l'art. 29 Cst. en ne statuant pas dans un délai raisonnable. Les recourants ont ensuite fourni des explications et offres de preuve s'agissant du dépôt du recours dans le délai utile.
La Chambre administrative a renoncé à présenter des observations. Le département conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Invité à se déterminer, l'Office fédéral de environnement (OFEV) considère que les mesures d'insonorisation des bâtiments ne permettent pas de respecter les valeurs limites d'immission. Dans leurs dernières observations, du 11 mai 2017, les recourants persistent dans leurs griefs et conclusions.
Considérant en droit :
1.
Dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale rendue dans le domaine du droit public des constructions, le recours est recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant l'autorité cantonale et sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué qui confirme le refus de leur accorder une autorisation définitive de construire. Ils ont donc la qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit public étant remplies (notamment le respect du délai de recours et les conclusions présentées), il convient d'entrer en matière.
2.
Invoquant la garantie de la propriété (art. 26 Cst. et 34 Cst./GE, en rapport avec l'exigence de base légale et de proportionnalité, art. 36 al. 1 et 3 Cst.) ainsi que l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), les recourants estiment que le refus de l'autorisation de construire définitive porterait atteinte aux droits acquis découlant de l'octroi de l'autorisation préalable accordée le 15 septembre 2006. Selon le droit cantonal (art. 5 al. 1 et 5, art. 146 de la loi genevoise sur les constructions et installations diverses - LCI), les éléments faisant l'objet de l'autorisation préalable porteraient sur le droit de construire dans son principe et ne pourraient plus être revus par la suite. Le jugement du 27 février 2006 avait ainsi retenu que les objections liées au bruit du trafic aérien avaient été définitivement écartée et que le département ne pouvait y revenir. Seules les mesures de construction destinées à protéger contre le bruit (art. 32-35 OPB) pouvaient encore faire l'objet de l'autorisation définitive. Les arguments retenus dans l'arrêt cantonal ne seraient pas suffisants pour justifier l'atteinte grave portée à la garantie de la propriété, dès lors que l'arrêt attaqué rendrait le bien-fonds définitivement inconstructible: aucune modification de la situation de fait (niveaux de bruit, écoulement du temps entre les deux décisions) ou de droit (art. 37 OPB) ne permettrait de revenir sur l'autorisation préalable et de refuser l'autorisation définitive.
2.1. Selon l'art. 26 al. 1 Cst., la propriété est garantie. L'art. 26 al. 2 Cst. pose le principe de la pleine indemnisation en cas d'expropriation ou de mesure équivalente. Dans sa fonction individuelle, la garantie de la propriété protège les droits patrimoniaux concrets du propriétaire: celui de conserver sa propriété, d'en jouir et de l'aliéner (ATF 131 I 333 consid.3.1 p. 338). Cette garantie n'est pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale, être justifiée par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité. Ce dernier principe exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 137 I 167 consid. 3.6 p. 175).
Le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, dans le contrôle de la base légale, dépend de la gravité des restrictions du droit de propriété de la partie recourante. Si la restriction est grave, le Tribunal fédéral examine librement la légalité de la mesure de protection. Si la restriction n'est pas grave, il se borne à examiner si la juridiction cantonale a interprété de manière arbitraire la norme invoquée comme base légale (cf. ATF 130 I 360 consid. 1.2 p. 362; 126 I 213 consid. 3a p. 218, 219 consid. 2c p. 221 et les arrêts cités). Une restriction grave au droit de propriété a également pour conséquence qu'elle doit être prévue par une loi au sens formel, claire et précise (ATF 140 I 168 consid. 4 p. 170). L'atteinte au droit de propriété est tenue pour particulièrement grave lorsque la propriété foncière est enlevée de force ou lorsque des interdictions ou des prescriptions positives rendent impossible ou beaucoup plus difficile une utilisation du sol actuelle ou future conforme à sa destination (ATF 140 I 168 consid. 4 p. 170). Ne constitue en revanche pas une atteinte grave la simple réduction des possibilités de construire (ATF 115 Ia 363 consid. 2a p. 365; arrêt 1C_292/2016 du 26 février 2017 consid. 4.1).
2.2. En l'occurrence, le refus du permis de construire est exclusivement fondé sur l'application des dispositions du droit fédéral de protection contre le bruit (art. 22 LPE et 31 OPB), dispositions dont le Tribunal fédéral revoit d'office librement l'application (art. 95 let. a et 106 LTF) sans qu'il soit nécessaire de déterminer si l'on se trouve en présence d'une atteinte grave au droit de propriété, comme le soutiennent les recourants. En revanche, l'application du droit cantonal, en particulier les dispositions de la LCI relative aux autorisations préalables et définitives, n'est examinée que sous l'angle de l'arbitraire, dans la mesure où il s'agit de dispositions procédurales dont l'application ne porte pas en soi atteinte au droit de propriété (ATF 131 I 333 consid. 4 p. 339; 130 I 360 consid. 14.2 p. 362).
Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Par conséquent, si celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 141 I 49 consid. 3.4 et les arrêts cités). Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 141 I 172 consid. 4.3.1 p. 177).
2.3. Relatif à l'autorisation préalable de construire, l'art. 5 LCI a la teneur suivante:
Art. 5 Demande préalable
Objet
1 La demande préalable tend à obtenir du département une réponse sur l'implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet présenté.
Conversion
2 Le département peut traiter une demande définitive comme une demande préalable si la nature ou l'importance du projet justifient cette mesure. Le requérant en est avisé par écrit.
Procédure ordinaire
3 L'article 2, alinéas 1, 2 et 3, l'article 3, alinéas 1 à 5, ainsi que l'article 4, alinéas 1, 2 et 3, sont applicables, par analogie, à la demande préalable.
4...
Effets
5 La réponse à la demande préalable régulièrement publiée vaut décision et déploie les effets prévus aux articles 3, 5, alinéa 1, et 146 de la loi.
Caducité
6 L'autorisation préalable est caduque si la demande définitive n'est pas présentée dans le délai de 2 ans à compter de sa publication dans la Feuille d'avis officielle. L'article 4, alinéas 7, 8 et 9, est applicable par analogie.
L'art. 146 LCI, qui s'applique à la procédure devant le TAPI, est ainsi rédigé:
Art. 146 Moyens
1 Le recours dirigé contre une autorisation définitive, précédée d'une autorisation préalable en force au sens de l'article 5, alinéa 1, ou d'un plan localisé de quartier en force, ne peut porter sur les objets tels qu'agréés par ceux-ci.
2 Lorsqu'il est dirigé contre une autorisation définitive précédée d'une autorisation préalable ou d'un plan localisé de quartier en force, le recours n'a pas d'effet suspensif à moins qu'il ne soit restitué sur requête du recourant.
En déposant une demande d'autorisation préalable d'implantation, le constructeur cherche à obtenir une décision de principe sur l'implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet. Il s'agit d'éviter d'engager des frais considérables liés à un projet d'envergure, compliqué ou potentiellement controversé, sans obtenir certaines assurances quant au caractère réalisable du projet (JUNOD, Le contentieux des autorisations préalables de construire en droit genevois, note de jurisprudence, RDAF 1988 p. 160 ss, 162). Si cette autorisation préalable est accordée, l'autorité ne peut en principe plus ensuite, lors de l'examen de la demande de permis de construire (autorisation définitive), remettre en cause les éléments déjà qualifiés de conformes au plan d'affectation ou à la réglementation de police des constructions. Il ressort clairement de l'art. 146 LCI que l'autorisation préalable est revêtue de l'autorité de chose jugée en ce qui concerne les points expressément tranchés. Il s'agit d'une décision constatatoire et formatrice sur les aspects fondamentaux du projet (ZIMMERMANN, Le Tribunal fédéral et l'autorisation préalable de construire, RDAF 1996 p. 281 ss, 282).
Si l'autorisation préalable confère certaines expectatives au constructeur, il n'est pas pour autant exclu qu'elle puisse être remise en cause par la suite, à l'instar de tout acte administratif unilatéral tel qu'une autorisation de construire ordinaire. La révocation d'une telle décision est en effet possible, même en l'absence de base légale spécifique (MOOR/POLTIER, Droit administratif, volume II, 3e éd. 2011, p. 382 s.), en cas de changement dans la situation de fait ou dans la réglementation, pour autant que l'intérêt à une application correcte de la législation l'emporte sur les principes de sécurité du droit et de la bonne foi. Ce dernier doit en principe prévaloir lorsque la décision en cause a créé un droit subjectif, lorsque le justiciable a déjà fait usage de l'autorisation ou lorsque celle-ci a été délivrée à l'issue d'une procédure au cours de laquelle l'ensemble des intérêts en présence a fait l'objet d'un examen approfondi. Cette règle n'est cependant pas absolue; la révocation peut ainsi être ordonnée même dans ces cas lorsqu'elle est commandée par un intérêt public particulièrement important (ATF 137 I 69 consid. 2.3 p. 71 s.). Dans certains cas, une indemnité peut être due (arrêt 1P.93/1990 du 22 mai 1990 consid. 5a et les arrêts cités).
Les recourants ne sauraient par conséquent être suivis lorsqu'ils soutiennent que l'autorisation préalable serait absolument contraignante pour la suite de la procédure.
2.4. La question des nuisances de bruit a été examinée dans différentes décisions prises successivement en instance cantonale au stade de l'autorisation provisoire. Dans sa décision du 18 octobre 2001, la Commission cantonale de recours a considéré qu'en l'absence d'un cadastre de bruit, un refus d'autorisation fondé sur le dépassement des valeurs limites d'immissions n'était pas possible. En outre, vu l'autorisation accordée sur une parcelle voisine, les constructeurs pouvaient se prévaloir du principe d'égalité de traitement. Sur recours du département, le Tribunal administratif cantonal a confirmé ces considérations. L'Etat de Genève a recouru en vain auprès du Tribunal fédéral, lequel a déclaré son recours irrecevable. Le 11 février 2004, le Département a prononcé un nouveau refus, se fondant sur le calcul des immissions du bruit du trafic aérien de l'EMPA, considéré comme déterminantes en l'absence de cadastre de bruit. Dans sa décision du 27 février 2006, la commission a considéré que le motif relatif aux nuisances sonores avait été définitivement écarté, le département n'ayant plus qu'à examiner les mesures concrètes de protection contre le bruit. L'autorisation préalable, finalement délivrée le 15 septembre 2006 par le Département, prend acte de ces injonctions et réserve les dispositions de l'OPB, notamment de son art. 31 al. 1, lors du dépôt de la demande définitive.
Il apparaît ainsi que si la question générale des valeurs limites d'immissions a bien été évoquée lors de l'octroi de l'autorisation préalable, cette décision n'a pas pour autant épuisé la question puisque les mesures de construction et d'aménagement au sens de l'art. 31 OPB étaient réservées, ce qui suppose un dépassement des valeurs limites. Les incidences d'un tel dépassement n'ont d'ailleurs pas été examinées sur le fond puisque la décision de la commission repose simplement sur la considération qu'un refus n'était pas possible en l'absence d'un cadastre de bruit. C'est dès lors sans arbitraire que les instances précédentes ont retenu qu'un nouveau refus fondé sur les prescriptions de l'OPB était encore possible au stade de l'autorisation définitive. Au demeurant, les circonstances avaient évolué de manière déterminante entre la décision d'octobre 2001 qui fonde l'octroi de l'autorisation préalable et le moment où le département a statué sur la demande définitive, en juin 2009. Entretemps en effet, le cadastre de bruit de l'Aéroport de Genève a été adopté par l'OFAC le 17 mars 2009. Quelle que soit la portée de ce cadastre de bruit (depuis, le 1er octobre 2004, l'art. 37 al. 3 OPB ne lui attribue plus d'effet directement contraignant pour l'octroi des autorisations de construire), l'objection retenue à l'époque pour faire abstraction des valeurs limites d'immissions a désormais disparu. Le département pouvait dès lors revenir sur cette question au stade de l'autorisation définitive, quand bien même les niveaux de bruits n'auraient pas évolué.
2.5. Sur le vu de ce qui précède, l'interprétation et l'application par les instances précédentes des dispositions cantonales relatives à l'autorisation de construire préalable et définitive ne souffre d'aucun arbitraire dans sa motivation. Il n'y a pas non plus d'arbitraire dans le résultat puisque la solution confirmée en dernière instance cantonale est motivée par le respect des exigences du droit fédéral en matière de protection contre le bruit. Compte tenu de l'interprétation soutenable du droit cantonal sur ce point, les recourants ne sauraient soutenir (ils s'en défendent dans leurs dernières écritures) que l'octroi d'une autorisation préalable leur conférait des droits acquis. Le grief de violation de la garantie de la propriété, soulevé sous le même angle, doit lui aussi être écarté. L'atteinte au droit de propriété est en effet fondée sur les dispositions claires de la LPE (art. 22) et de l'OPB (art. 31), dont l'application correcte est confirmée par l'OFEV et qui correspondent à un intérêt public évident (arrêt 1C_196/2008 du 13 janvier 2009 consid. 2.6).
3.
Les recourants invoquent ensuite le principe d'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst. et 15 Cst./GE). Ils relèvent que dans un arrêt du 30 juillet 2013, la Chambre administrative a annulé une décision de refus d'une autorisation de construire (non précédée d'une autorisation préalable) pour des parcelles immédiatement voisines des leurs et soumises à un niveau de bruit identique, appliquant l'art. 31 al. 2 OPB. Or, les recourants se trouveraient dans une situation identique (voire plus favorables puisqu'ils bénéficiaient d'une autorisation préalable) et les motifs retenus pour accorder une dérogation (isolation, intérêt à la création de logements, enclave bâtie, promesse de l'autorité) seraient transposables dans le cas particulier.
3.1. Il y a inégalité de traitement lorsque, sans motifs sérieux, deux décisions soumettent deux situations de fait semblables à des règles juridiques différentes; les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (ATF 123 I 19 consid. 3b p. 23, 112 consid. 10b p. 141).
3.2. L'arrêt cantonal invoqué par les recourants (ATA/448/2013 du 30 juillet 2013) porte sur la construction de trois villas jumelles sur des parcelles voisines. Il diffère de la présente espèce dans la mesure où il laisse indécise la question de savoir si une autorisation pouvait être accordée conformément à l'art. 31 al. 1 OPB alors que dans la présente cause, cette question a été tranchée par la négative. L'arrêt invoqué considère ensuite qu'une dérogation au sens de l'art. 31 al. 2 OPB devait être accordée en application du principe de la bonne foi, sur le vu d'assurances précises données par le chef du département compétent. Or en l'espèce, les recourants ne peuvent pas se prévaloir d'assurances de ce genre: comme cela est relevé ci-dessus, l'autorisation préalable ne pouvait de bonne foi être assimilée à une promesse de délivrance d'une autorisation définitive. Le grief tiré du principe d'égalité de traitement doit dès lors être écarté.
4.
Invoquant le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), les recourants estiment que le strict respect des valeurs d'immissions devrait être relativisé depuis l'adoption de l'art. 31a OPB, cette disposition prévoyant des allègements pour les valeurs limites d'immissions de nuit et autorisant des mesures d'isolation et de climatisation. Il ne serait pas contesté que le projet prévoit des mesures de protection suffisantes et il y aurait lieu de tenir compte de la durée considérable de la procédure d'autorisation.
4.1. Conformément à l'art. 36 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit reposer sur une base légale qui doit être de rang législatif en cas de restriction grave (al. 1); elle doit en outre être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (al. 2) et, selon le principe de la proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire et adéquat à la réalisation des buts d'intérêt public poursuivis (al. 3). Les dispositions de l'art. 31 al. 2 OPB viennent concrétiser ce principe en prévoyant que si les mesures fixées à l'art. 31 al. 1 let. a et b OPB ne permettent pas de respecter les valeurs limites d'immissions, le permis de construire ne sera délivré qu'avec l'assentiment de l'autorité cantonale et pour autant que l'édification du bâtiment présente un intérêt prépondérant. La délivrance d'une autorisation dérogatoire au sens de cette disposition appelle une pesée des intérêts; l'intérêt à la réalisation du bâtiment doit être confronté aux exigences en matière de réduction des nuisances sonores. Au regard du but poursuivi par l'art. 22 LPE, il faut qu'il existe un intérêt public à construire un bâtiment destiné au séjour prolongé de personnes, dans une zone exposée au bruit. Le seul intérêt privé du propriétaire d'assurer une meilleure utilisation de son bien-fonds est à cet égard insuffisant. Dans le cadre de cette pesée d'intérêts, il convient en particulier de prendre en considération l'utilisation projetée, l'ampleur du dépassement des valeurs limites d'immissions et la possibilité d'élever le degré de sensibilité de la zone (art. 43 al. 2 OPB). Des exigences liées à l'aménagement du territoire - à l'instar de la possibilité de combler une brèche dans le territoire bâti, de la densification des surfaces destinées à l'habitat ou encore du développement de l'urbanisation vers l'intérieur du milieu bâti (art. 8a al. 1 let. c et e LAT) - peuvent également entrer en considération, tout particulièrement lorsqu'une application stricte de l'art. 22 LPE serait susceptible de conduire à un résultat disproportionné eu égard à l'ensemble des circonstances (ATF 142 II 100 consid. 4.6 p. 111; arrêt 1C_429/2016 du 16 août 2016 consid. 5.1.3 et les références citées).
4.2. Il ressort de la procédure que les valeurs limites d'immissions sont dépassées d'au moins 4 dB (A) et jusqu'à 6 dB (A) entre 6 heures et 22 heures, et que les valeurs d'alarme le sont également, de jour, sur la partie nord-ouest du périmètre. L'art. 31a OPB n'est d'aucun secours aux recourants puisqu'il ne s'applique qu'en cas de dépassement des valeurs nocturnes (22h-24h) et que les valeurs d'alarme doivent dans tous les cas être respectées. Comme le rappellent la cour cantonale et l'OFEV, les mesures constructives destinées à protéger le bâtiment contre le bruit au sens de l'art. 31 al. 1 let. b OPB ne sont pas de simples mesures d'isolation, mais doivent constituer des obstacles entre la source du bruit et les bâtiments, de manière à permettre le respect des valeurs limites pour les locaux à usage sensible, fenêtre ouverte (art. 39 al. 1 OPB). Or, la nature du bruit aérien ne permet généralement pas de parvenir à un tel résultat (1C_196/2008 du 16 janvier 2009 consid. 2.4).
En définitive, la réalisation de logements, qui correspond à un intérêt public évident, doit être mise en balance avec l'importance du dépassement des valeurs limites d'immissions et l'intérêt de la population à ne pas être exposée à un bruit dépassant les normes. Une telle pesée d'intérêts est conforme à l'art. 31 al. 2 OPB. La durée de la procédure d'autorisation de construire ne constitue pas un élément susceptible d'influer sur cette pesée d'intérêts. Au demeurant, on ne saurait affirmer comme le font les recourants que le refus confirmé en instance cantonale consacrerait une impossibilité définitive de construire sur le bien-fonds. Il n'est pas exclu qu'un projet présentant des caractéristiques différentes puisse satisfaire aux exigences de l'OPB. Le département lui-même paraît l'envisager. En outre, un classement du secteur en zone plus adaptée aux nuisances existantes (le département évoque une zone de développement industriel et artisanal) pourrait permettre de maintenir les possibilités de construire. Le principe de la proportionnalité est partant respecté.
5.
Se plaignant d'arbitraire et d'une violation du droit à un jugement dans un délai raisonnable, les recourants relèvent que leur recours cantonal avait été déposé au mois d'octobre 2010. Après instruction, la cause avait été gardée à juger en juin 2011, puis la Chambre administrative avait demandé au département de confirmer que les valeurs d'exposition au bruit étaient toujours d'actualité avant de garder à nouveau la cause à juger au mois de juillet 2012. Après avoir été relancée par les recourants, la cour cantonale a ordonné une comparution personnelle en juillet 2014 et, dans un premier arrêt de décembre 2014, avait constaté la nullité du jugement de première instance. Le 8 septembre 2015, le TAPI avait rendu un nouveau jugement. En définitive, le recours du mois d'octobre 2010 n'avait été tranché sur le fond par la Chambre administrative que six ans plus tard. Les recourants ne demandent pas l'annulation de l'arrêt attaqué pour ce motif, mais une simple constatation.
5.1. A l'instar de l'art. 6 par. 1 CEDH, l'art. 29 al. 1 Cst. garantit à toute personne, dans une procédure judiciaire ou administrative, le droit d'obtenir un jugement raisonnable et consacre le principe de la célérité. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans le délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (cf. ATF 130 I 312 consid. 5.1 p. 331 s.). Le caractère raisonnable du délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes (ATF 135 I 265 consid. 4.4 p. 277; CourEDH, arrêt Müller c/ Suisse du 5 novembre 2002). A cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre ce qui est en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié (ATF 130 I 312 consid. 5.2 p. 332). Enfin, on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3 p. 56; 130 I 312 consid. 5.2 p. 332).
5.2. En l'espèce, le recours cantonal a été déposé le 23 octobre 2010. Le Département a répondu au recours le 7 janvier 2011 et le Service cantonal de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants a déposé ses observations le 21 mars 2011. Les recourants ont déposé une nouvelle écriture le 26 mai 2011 et les parties ont été informées, le 21 juin 2011, que la cause était gardée à juger. Il s'en est suivi une année (entre les mois de juin 2011 et juin 2012) sans activité de la part du Tribunal. L'Office cantonal de l'urbanisme a ensuite été invité, le 4 juin 2012, à se déterminer sur l'existence de modifications dans les valeurs d'exposition, ce qu'il a fait le 29 juin 2012. Les recourants se sont à nouveau déterminés le 10 juillet 2012, partant de l'idée que la cause était gardée à juger. Ils sont ensuite intervenus plus d'une année plus tard, le 23 août 2013, pour se prévaloir d'un arrêt de la cour cantonale rendu peu auparavant. L'Office de l'urbanisme s'est déterminé le 9 septembre 2013 et les recourants ont renoncé à répliquer le 26 septembre suivant, la cause étant à nouveau gardée à juger. Le 11 avril 2014, les recourants ont invité la cour cantonale à statuer en relevant que la cause avait été gardée à juger depuis trois ans et que l'autorisation préalable avait été délivrée treize ans auparavant. Les parties ont ensuite été convoquées à une comparution personnelle le 29 juillet 2014, et la cause a été gardée à juger une nouvelle fois le 8 septembre 2014, après le dépôt d'observations finales des recourants. La Chambre administrative a statué dans un premier arrêt le 16 décembre 2014. Elle a constaté la nullité de la décision de la Commission de recours et l'irrecevabilité du recours, renvoyant la cause au TAPI: le jugement de première instance avait été rendu après le décès d'une partie, ce dont la commission n'avait pas été informée. Le nouveau jugement du TAPI a été rendu le 8 septembre 2015 et l'arrêt attaqué a été rendu le 8 novembre 2016.
En définitive, la procédure de recours contre le refus de l'autorisation définitive de construire aura duré six ans. Pour être compatible avec l'exigence de célérité, une telle durée devrait être justifiée par des circonstances particulières qui font en l'occurrence défaut. Plus de quatre ans ont été nécessaires pour un simple arrêt d'irrecevabilité. En outre, la première procédure devant la cour cantonale a connu deux périodes d'inactivité d'une année, sans justification apparente. Dans ces circonstances, il doit être constaté, que la procédure cantonale n'a pas respecté les exigences déduites de l'art. 29 Cst. Cette constatation a pour conséquence que la question des frais et dépens pour l'ensemble de la procédure de recours devra être réexaminée par la cour cantonale.
6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis en ce sens qu'il est constaté que la Chambre administrative de la Cour de justice a violé l'art. 29 Cst. en ne statuant pas dans un délai raisonnable. La cause est renvoyée à la Chambre administrative pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. Le recours est rejeté pour le surplus. Les recourants, qui obtiennent gain de cause sur un point accessoire, ont droit à une réduction des frais mis à leur charge, ainsi qu'à une indemnité de dépens réduite, à la charge du canton de Genève.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis partiellement en ce sens qu'il est constaté que la Chambre administrative de la Cour de justice a violé l'art. 29 Cst. en ne statuant pas dans un délai raisonnable. La cause est renvoyée à la Chambre administrative pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. Le recours est rejeté pour le surplus.
2.
Une indemnité de dépens de 1'000 fr. est allouée aux recourants, à la charge du canton de Genève.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge des recourants.
4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 3 ème section, ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement.
Lausanne, le 26 octobre 2017
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
Le Greffier : Kurz