BGer 2C_173/2017
 
BGer 2C_173/2017 vom 19.06.2017
2C_173/2017
 
Arrêt du 19 juin 2017
 
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Seiler, Président,
Donzallaz et Haag.
Greffier: M. Tissot-Daguette.
Participants à la procédure
1. A.X.________,
2. B.X.________,
recourants,
contre
Service de la population du canton de Vaud.
Objet
Refus de prolongation d'une autorisation de séjour et renvoi de Suisse,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 27 janvier 2017.
 
Faits :
A. A.________, ressortissante britannique née en 1968, est entrée en Suisse le 5 août 2008. Elle a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour avec activité lucrative. Depuis le mois de juin 2012, elle est sans activité et bénéficie de l'aide sociale vaudoise.
B. Par décision du 2 mai 2016, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) a refusé à A.________ le renouvellement de son autorisation de séjour UE/AELE avec activité lucrative, respectivement l'octroi d'une autorisation d'établissement que celle-ci avait demandée précédemment. Il a en outre prononcé le renvoi de Suisse de l'intéressée. Cette dernière a contesté cette décision auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) par acte du 13 juin 2016. Le 26 septembre 2016, durant la procédure devant le Tribunal cantonal, l'intéressée a informé celui-ci qu'elle s'était mariée avec B.X.________, ressortissant suisse, le 22 septembre 2016. Par arrêt du 27 janvier 2017, le Tribunal cantonal a rejeté le recours de A.X.________.
C. Par acte daté du 10 février 2017, A.X.________ et B.X.________ demandent en substance au Tribunal fédéral, outre l'assistance judiciaire, d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 27 janvier 2017 et de renouveler l'autorisation de séjour UE/AELE de l'intéressée. Ils se plaignent de violation du droit fédéral et international.
Le Service de la population renonce à se déterminer. Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de son arrêt.
 
Considérant en droit :
1. L'absence de dénomination du recours ne saurait nuire aux recourants si leur acte répond aux exigences de la voie de droit à disposition (cf. quant à la désignation erronée de la voie de droit: ATF 138 I 367 consid. 1.1 p. 369 s.).
1.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Selon la jurisprudence, il suffit, sous l'angle de la recevabilité, qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et que, partant, la voie du recours en matière de droit public soit ouverte (cf. ATF 137 I 305 consid. 2.5 p. 315 s.; arrêt 2C_634/2016 du 4 mai 2017 consid. 1.1.1).
Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est accordé aux ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne conformément à l'ALCP (RS 0.142.112.681), dont les dispositions sont directement applicables (cf. ATF 134 II 10 consid. 2 p. 13; arrêt 2C_1061/2013 du 14 juillet 2015 consid. 1.2). Dans cette mesure, le motif d'irrecevabilité prévu à l'art. 83 let. c ch. 2 LTF ne leur est en principe pas opposable s'ils recourent contre une décision leur refusant le droit de séjourner en Suisse, sans toutefois que cela ne préjuge de l'issue du litige au fond (cf. ATF 131 II 339 consid. 1.2 p. 343 s.; arrêt 2C_587/2013 du 30 octobre 2013 consid. 1.2).
En l'occurrence, du moment que la recourante 1 est mariée à un ressortissant suisse, les art. 42 al. 1 LEtr (RS 142.20) et 8 CEDH sont potentiellement de nature à lui conférer un droit à une autorisation de séjour (cf. ATF 127 II 60 consid. 1d/aa p. 64 s.; arrêt 2C_317/2016 du 14 septembre 2016 consid. 1.1). En outre, en sa qualité de ressortissante britannique, elle peut en principe également prétendre à un titre de séjour en Suisse en vertu de l'ALCP, de sorte que le présent recours n'entre pas dans les motifs d'exclusion de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF et que la voie du recours en matière de droit public est ouverte.
1.2. Aux termes de l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a); est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b); et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). En l'occurrence, si la recourante 1, destinataire de l'arrêt attaqué ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, a la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral, il n'en va toutefois pas de même du recourant 2. Celui-ci n'a en effet pas pris part à la procédure devant l'autorité précédente et n'a en l'espèce aucunement expliqué en quoi il aurait été privé de la possibilité de le faire (cf. ATF 134 II 45 consid. 2.2.3 p. 48; cf. FLORENCE AUBRY GIRARDIN, in Commentaire de la LTF, Corboz et al. [éd.], 2e éd. 2014, n. 21 s. ad art. 89 LTF). Par conséquent, le recours est irrecevable en tant qu'il concerne le recourant 2.
1.3. Au surplus, s'agissant de la recourante 1, le présent recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF). Il est en outre dirigé contre une décision rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), raisons pour lesquelles il est recevable.
2. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral (cf. art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF). Il statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 313 s.), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 137 III 226 consid. 4.2 p. 233 s.). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal de céans (art. 99 al. 1 LTF).
Par conséquent, en tant que la recourante avance des éléments de fait ne ressortant pas de l'arrêt attaqué sans exposer en quoi les conditions qui viennent d'être rappelées seraient réunies, il n'en sera pas tenu compte. Il en va de même des deux courriers des 31 mai et 3 juin 2017, postérieurs à l'arrêt entrepris, produits spontanément par la recourante (cf. art. 99 al. 1 LTF).
3. Même si la recourante ne le conteste pas expressément, se pose en premier lieu la question de savoir si celle-ci peut invoquer l'ALCP pour demeurer en Suisse.
A ce propos, le Tribunal cantonal a dûment présenté les dispositions légales applicables (cf. art. 6 et 24 annexe I ALCP), raison pour laquelle il peut y être renvoyé (cf. également arrêt 2C_1061/2013 du 14 juillet 2015 consid. 4 et les références citées).
En l'occurrence, la recourante a bénéficié d'une autorisation de séjour pour exercer une activité lucrative en Suisse. Or, après moins de quatre ans, elle s'est retrouvée sans travail et a été mise au bénéfice de l'aide sociale. Au 2 mai 2016, elle avait ainsi déjà perçu un montant de 83'000 fr. de prestations sociales. Le 22 septembre 2016, elle s'est mariée avec un ressortissant suisse travaillant à 40% et percevant l'aide sociale en complément. Fort de ces constatations, et au vu des dispositions précitées, c'est à juste titre que l'autorité précédente a nié à la recourante la qualité de travailleur. C'est également sans violer le droit que le Tribunal cantonal a jugé que la recourante ne pouvait pas invoquer l'art. 24 annexe I ALCP pour demeurer en Suisse sans activité lucrative.
4. La recourante s'étant mariée avec un ressortissant suisse le 22 septembre 2006, il convient ensuite d'examiner dans quelle mesure elle peut invoquer le droit interne pour prétendre à un titre de séjour.
4.1. Aux termes de l'art. 42 al. 1 LEtr, le conjoint d'un ressortissant suisse ainsi que ses enfants célibataires de moins de 18 ans ont droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui. Toutefois, à teneur de l'art. 51 al. 1 let. b LEtr, les droits prévus à l'art. 42 LEtr s'éteignent s'il existe des motifs de révocation au sens de l'art. 63 LEtr. Pour autant que l'étranger ne séjourne pas en Suisse légalement et sans interruption depuis plus de quinze ans (cf. art. 63 al. 2 LEtr), un tel motif existe notamment lorsque celui-ci ou une personne dont il a la charge dépend durablement et dans une large mesure de l'aide sociale (art. 63 al. 1 let. c LEtr). Pour apprécier cette condition, il faut tenir compte du montant total des prestations déjà versées à ce titre et examiner la situation financière de l'intéressé à long terme. Il convient en particulier d'estimer, en se fondant entre autres sur la situation financière actuelle de l'intéressé et sur son évolution probable, s'il existe des risques que, par la suite, il se trouve à la charge de l'assistance publique (cf. arrêts 2C_1122/2015 du 12 janvier 2016 consid. 4.1; 2C_47/2014 du 5 mars 2014 consid. 2.1).
4.2. En l'espèce, la recourante est assistée par les services sociaux depuis le mois de juin 2012; sa dette sociale se monte à 83'000 fr. au 2 mai 2016. L'arrêt attaqué constate qu'aucun indice ne permet d'admettre que cette dépendance durable serait sur le point de cesser, la recourante n'ayant en particulier entrepris aucune recherche d'emploi. En outre, son époux ne travaille qu'à 40% et perçoit également des prestations de l'assistance sociale en complément depuis le 1er mars 2007. Dans ces circonstances, c'est à juste titre que les autorités cantonales ont retenu que la recourante, qui est en Suisse depuis moins de quinze ans, remplissait les conditions de l'art. 63 al. 1 let. c LEtr, de sorte que son autorisation de séjour pouvait être révoquée pour ce motif.
5. Se pose en définitive la question de savoir si la recourante peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH, et en particulier si le refus de prolongation de l'autorisation de séjour de celle-ci constitue une mesure qui prend en compte les différents intérêts en présence.
5.1. L'art. 8 CEDH ne confère en principe pas un droit à séjourner dans un Etat déterminé. Le fait de refuser un droit de séjour à un étranger dont la famille se trouve en Suisse peut toutefois entraver sa vie familiale et porter ainsi atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par cette disposition (ATF 140 I 145 consid. 3.1 p. 146 s. et les références citées). Il n'y a toutefois pas atteinte à la vie familiale si l'on peut attendre des membres de la famille qu'ils réalisent leur vie de famille à l'étranger; l'art. 8 CEDH n'est a priori pas violé si le membre de la famille jouissant d'un droit de présence en Suisse peut quitter ce pays sans difficultés avec l'étranger auquel a été refusée une autorisation de séjour (ATF 140 I 145 consid. 3.1 p. 146 s. et les références citées). En revanche, si le départ du membre de la famille pouvant rester en Suisse ne peut d'emblée être exigé sans autres difficultés, il convient de procéder à la pesée des intérêts prévue par l'art. 8 par. 2 CEDH (cf. consid. 5.2 ci-dessous).
En l'occurrence, il n'est pas contesté que la recourante, dont le mari, de nationalité helvétique, se trouve en Suisse et avec qui elle entretient des relations étroites, peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH, et en particulier d'un droit au respect de sa vie familiale.
5.2. Le droit prévu à l'art. 8 par. 1 CEDH n'est toutefois pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible selon l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le refus d'octroyer ou de prolonger une autorisation de séjour ou d'établissement fondé sur l'art. 8 par. 2 CEDH suppose de tenir compte de l'ensemble des circonstances et de mettre en balance l'intérêt privé à l'obtention d'un titre de séjour et l'intérêt public à son refus (ATF 140 I 145 consid. 3.1 p. 146 s. et les références citées).
La recourante est en Suisse depuis moins de dix ans. Elle a vécu l'entier de son enfance et de son adolescence dans son pays d'origine. Elle y a également passé une grande partie de sa vie d'adulte puisqu'elle n'est arrivée en Suisse qu'à 40 ans, pour y retrouver sa soeur et les enfants de celle-ci. Ces éléments parlent en faveur d'un retour et d'une intégration aisés au Royaume-Uni. Certes, depuis 2010, la recourante est en couple avec l'homme qui, le 22 septembre 2016, est devenu son époux, ainsi qu'avec l'enfant de ce dernier. Toutefois, cette situation ne saurait contrebalancer l'intérêt public à éloigner de Suisse une personne durablement dépendante de l'aide sociale. La recourante n'a aucun travail et n'a aucunement démontré en chercher un. De plus, au moment de se marier en 2016, les époux savaient pertinemment que la situation en Suisse de la recourante était précaire. Celle-ci n'a pas non plus fait valoir une intégration spécialement réussie, sans travail, ni relations sociales particulières. En outre, s'il faut reconnaître que la situation familiale de la recourante risque de souffrir de son renvoi au Royaume-Uni, il sera cependant toujours possible à son époux, qui ne travaille qu'à 40%, de lui rendre visite régulièrement, éventuellement avec son enfant. La recourante pourra également revenir en Suisse pour des vacances ou même des fins de semaines, les vols entre la Suisse et le Royaume-Uni étant particulièrement fréquents.
Sur le vu de l'ensemble de ces circonstances, c'est à juste titre que l'autorité précédente a retenu que l'intérêt public à l'éloignement de la recourante primait sur son intérêt privé à demeurer en Suisse. Le résultat de la pesée des intérêts ne traduit aucune violation des dispositions légales applicables.
6. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Le recours étant d'emblée manifestement dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire est rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Les recourants doivent supporter les frais judiciaires, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux.
4. Le présent arrêt est communiqué aux recourants, au Service de la population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat aux migrations.
Lausanne, le 19 juin 2017
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Seiler
Le Greffier : Tissot-Daguette