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Original
 
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
[img]
{T 0/2}
1C_436/2016
Arrêt du 31 janvier 2017
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Karlen et Chaix.
Greffière : Mme Arn.
Participants à la procédure
A.________, représentée par Me Paul-Arthur Treyvaud, avocat,
recourante,
contre
B.________, représentée par Me Mathias Keller, avocat,
intimée,
Municipalité de Chavornay, rue du Collège 1, 1373 Chavornay, représentée par Me Alain Thévenaz, avocat,
Objet
Permis de construire,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 3 août 2016.
Faits :
A.
B.________ est propriétaire de la parcelle n° 513 de la Commune de Chavornay, colloquée en zone du Bourg au sens du plan de zones et du règlement communal général sur les constructions et l'aménagement du territoire (RCAT). D'une surface de 775 m 2, ce bien-fonds supporte une habitation de 192 m 2 (n° ECA 461) et un bâtiment de 32 m 2. Il est contigu, au Nord, à la parcelle n° 514, appartenant à A.________, sur laquelle est érigée une habitation. Le bâtiment n° ECA 461 est implanté parallèlement à celui de A.________, en partie sur la limite de propriété; ils sont séparés par une cour, située dans sa quasi-totalité sur la parcelle n° 514.
La parcelle n° 513 est notamment au bénéfice d'une servitude de passage à pied et pour le bétail, à la charge de la parcelle n° 514, qui passe au Nord du bâtiment n° ECA 461. Les deux parcelles précitées sont également grevées de servitudes réciproques de vues droites. En particulier, le bien-fonds n° 514 est grevé de la servitude de vues droites, constituée le 22 décembre 1989 en faveur de la parcelle n° 513; elle confère au propriétaire du fonds dominant le droit de pratiquer puis de maintenir, dans la façade Nord du bâtiment n° ECA 461, toutes ouvertures en nombre et dimensions illimités, sous réserve toutefois que la surface totale des nouvelles ouvertures ne dépasse pas 13 m 2.
Le 19 mai 2015, B.________ a déposé une demande de permis de construire portant notamment sur la c réation d'un appartement de 2.5 pièces dans la partie Nord du bâtiment, dans un espace existant non aménagé, initialement voué à une écurie ou une grange, donnant sur la parcelle voisine n° 514; trois ouvertures nouvelles (fenêtres) étaient projetées sur la façade Nord qui comportait déjà deux ouvertures (une porte et une fenêtre). Mis à l'enquête publique, le projet a suscité l'opposition de A.________ qui estimait que l'aménagement de la grange actuelle en habitation supplémentaire contrevenait à l'art. 5.4 RCAT concernant la distance aux limites de propriété et aggravait l'atteinte existante à la réglementation; elle a aussi fait valoir des griefs liés aux servitudes.
Le 16 juin 2015, la Centrale des autorisations de construire (CAMAC) a délivré sa synthèse. Par décision des 12 et 13 août 2015, la Municipalité a respectivement délivré le permis de construire et levé l'opposition de A.________.
B.
A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Après avoir procédé à une inspection locale le 21 mars 2016 en présence des parties, le Tribunal cantonal a rejeté le recours. Il a considéré en substance que les travaux projetés n'aggravaient pas l'atteinte à la réglementation en vigueur ni les inconvénients qui en résultaient pour le voisinage, au sens de l'art. 80 al. 2 de la loi vaudoise du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC, RSV 700.11).
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'admettre son recours et de renvoyer la cause à l'instance précédente pour qu'elle refuse l'autorisation de construire.
L'instance précédente, l'intimée et la Municipalité concluent au rejet du recours. La recourante réplique.
Considérant en droit :
1.
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.
La recourante a pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. Propriétaire de la parcelle contiguë à celle de la constructrice, elle est particulièrement atteinte par la décision entreprise qui confirme l'autorisation de construire et elle a un intérêt digne de protection à son annulation. Elle a donc qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité sont remplies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.
2.
Dans sa réplique, la recourante reproche à l'instance précédente d'avoir ignoré l'art. 4.4 RCAT. Dans la mesure où ce grief aurait déjà pu figurer dans l'acte de recours, il est irrecevable (ATF 132 I 42 consid. 3.3.4 p. 47 et les réf. cit.). En outre, tel qu'il est formulé, il ne remplit pas les exigences strictes de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF s'agissant de l'application arbitraire du droit cantonal ou communal.
3.
Dans la première partie de son écriture intitulée "Faits", la recourante présente son propre exposé des faits, dont certains s'écartent de ceux retenus par l'instance précédente. Or le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, la recourante ne peut critiquer la constatation de faits qui importent pour le jugement de la cause que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, ce qu'il lui appartient de démontrer par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62). En l'espèce, la recourante ne se prévaut pas du grief d'arbitraire dans l'établissement des faits et ne développe aucune argumentation remplissant les exigences de motivation précitées. Il n'y a dès lors pas lieu de prendre en considération d'autres faits que ceux retenus dans la décision entreprise.
Dans la seconde partie de son écriture consacrée aux "Moyens", la recourante invoque une constatation inexacte des faits en tant que l'instance précédente aurait à tort retenu que l'immeuble de l'intimée était d'un seul tenant; elle affirme qu'il ressortirait des plans figurant au dossier que l'immeuble serait composé de deux parties distinctes. La recourante ne démontre toutefois pas le caractère arbitraire du constat retenu par l'instance précédente, de sorte que sa critique doit être écartée. Au demeurant, au vu de ces plans, l'appréciation de l'instance précédente n'apparaît pas d'emblée manifestement inexacte ou insoutenable.
4.
La recourante fait grief au Tribunal cantonal d'avoir appliqué l'art. 80 al. 2 LATC de façon arbitraire en ignorant que le projet litigieux constituait une aggravation du caractère non règlementaire du bâtiment de l'intimée, ainsi que des désagréments qui en résultaient pour le voisinage.
4.1. A teneur de l'art. 80 al. 1 LATC, les bâtiments existants non conformes aux règles de la zone à bâtir entrées en force postérieurement, relatives aux dimensions des bâtiments, à la distance aux limites, au coefficient d'occupation ou d'utilisation du sol, ou à l'affectation de la zone, mais n'empiétant pas sur une limite des constructions, peuvent être entretenus ou réparés. L'alinéa 2 de cette disposition précise que leur transformation dans les limites des volumes existants ou leur agrandissement peuvent être autorisés, pour autant qu'il n'en résulte pas une atteinte sensible au développement, au caractère ou à la destination de la zone. Les travaux ne doivent pas aggraver l'atteinte à la réglementation en vigueur ou les inconvénients qui en résultent pour le voisinage.
4.2. Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal et communal que sous l'angle de l'arbitraire. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain, ce qu'il appartient au recourant de démontrer par une argumentation qui réponde aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF (cf. ATF 134 II 349 consid. 3 p. 351 s.; 133 II 249 consid de 1.4.2 p. 254 et les références). La recourante doit ainsi indiquer précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation. En outre, si l'interprétation défendue par la cour cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 140 I 201 consid. 6.1 p. 205; 132 I 13 consid. 5.1 p. 17).
4.3. Il n'est pas contesté que la façade nord du bâtiment de la recourante est implantée en partie sur la limite de propriété avec la parcelle n° 514, de sorte qu'elle ne respecte pas la réglementation en vigueur relative à la distance aux limites (art. 5.4 RCAT).
Le Tribunal cantonal a estimé que le projet qui prévoyait la création d'un appartement de 2.5 pièces dans les volumes existants et un accès, par la porte existante au Nord, pour ce nouveau logement ainsi que pour les deux autres déjà loués, n'aggravait pas l'atteinte à la réglementation en vigueur au sens de l'art. 80 al. 2 LATC. A cette occasion, il a relevé que l'utilisation du volume existant de la partie Nord du bâtiment à des fins d'habitation était conforme à l'affectation autorisée dans la zone du Bourg et correspondait à l'affectation actuelle de l'immeuble. Il soulignait que le bâtiment était d'un seul tenant, qu'il avait toujours été affecté, pour sa majeure partie, à de l'habitation et que la partie non aménagée au Nord - qui dispose déjà de deux ouvertures (porte et fenêtre) - était dès l'origine vouée à accueillir une activité (grange, écurie), comme le confirmait la servitude de passage constituée en 1906 lors de la construction du bâtiment.
La recourante tient cette appréciation pour arbitraire. Elle soutient que la création d'une habitation dans une grange avec un nouvel accès, donnant sur un passage étroit entre deux maisons, lequel doit en outre aussi servir aux occupants de deux autres logements, aggraverait l'atteinte à la réglementation en vigueur. Ce faisant, elle se contente de substituer sa propre appréciation à celle de l'instance précédente, sans en démontrer le caractère arbitraire. De nature appellatoire, sa critique est irrecevable. Cela étant, il n'apparaît pas insoutenable de considérer que la réalisation en zone du Bourg d'un logement de 2.5 pièces, dans les volumes existants, d'un bâtiment déjà utilisé, pour sa majeure partie, à cette fin n'occasionne pas une aggravation de l'atteinte à la réglementation en vigueur.
4.4. Quant aux inconvénients qui en résultent pour le voisinage, le Tribunal cantonal a certes retenu que le projet prévoyait trois ouvertures supplémentaires en façade Nord. Il soulignait toutefois que celles-ci donnaient sur une façade pratiquement borgne de l'immeuble de la recourante, à l'exception de l'entrée vitrée de celui-ci qui offrait une vue limitée sur l'intérieur de son logement. Les vues depuis les ouvertures projetées donneront ainsi essentiellement sur une cour servant de passage à la recourante pour garer son véhicule et d'entrée à son immeuble, de sorte qu'il ne s'agissait pas d'un véritable lieu de vie. De surcroît, la recourante a elle-même concédé une servitude de vues droites pour la création d'ouvertures en façade Nord du bâtiment litigieux, en nombre et dimension illimités pour autant que la surface totale des nouvelles ouvertures ne dépasse pas 13 m 2. Enfin, s'agissant de l'accès projeté, le Tribunal cantonal relevait que la porte litigieuse existait déjà et débouchait sur une servitude de passage à pied et pour le bétail. A ses yeux, l'accès projeté était conforme à cette servitude et les griefs de la recourante à cet égard relevaient du droit civil. Au vu du nombre limité de piétons qui l'utiliseraient, le Tribunal cantonal a nié une aggravation des inconvénients pour la voisine recourante.
La recourante affirme que ce raisonnement procéderait de l'arbitraire. Elle soutient que le projet occasionnerait des inconvénients pour le voisinage en tant qu'il prévoit la création de trois ouvertures supplémentaires en façade et l'utilisation par les locataires d'une ancienne servitude de passages à pied et pour le bétail (1906) qui n'aurait plus de raison d'être. A l'appui de sa critique, la recourante fait en particulier valoir que cette servitude n'aurait plus été utilisée pendant des décennies et n'aurait plus d'issue, la cour de la recourante étant fermée par un garage. L'intéressée se prévaut aussi du fait que la réalisation d'une fenêtre permettrait aux locataires du logement projeté d'avoir une vue plongeante et directe sur son entrée - constituée de deux portes vitrées surmontées d'une fenêtre à l'étage - et leur permettrait ainsi de voir directement dans son salon, sa cuisine et son bureau. Ce faisant, la recourante s'écarte - une nouvelle fois - des faits établis souverainement par l'instance précédente, sans en démontrer le caractère arbitraire; il convient donc de s'en tenir aux faits retenus par les juges cantonaux, fondés notamment sur l'inspection locale à laquelle ils ont procédé. En l'occurrence, l'argumentation de la recourante, de nature purement appellatoire, ne montre pas en quoi le raisonnement de l'arrêt attaqué serait insoutenable. Il apparaît au contraire, au vu des faits établis, que celui-ci n'apparaît pas déraisonnable, à tout le moins dans son résultat.
5.
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la faible mesure de sa recevabilité. La recourante, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). Elle versera en outre une indemnité à titre de dépens à l'intimée, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 2 LTF). En revanche, la Commune n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 francs, sont mis à la charge de la recourante.
3.
Une indemnité de 3'000 francs est allouée à l'intimée à titre de dépens, à la charge de la recourante.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la Municipalité de Chavornay, ainsi qu'au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public.
Lausanne, le 31 janvier 2017
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
La Greffière : Arn