BGer 1C_378/2016
 
BGer 1C_378/2016 vom 04.01.2017
{T 0/2}
1C_378/2016
 
Arrêt du 4 janvier 2017
 
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Fonjallaz et Eusebio.
Greffier : M. Kurz.
Participants à la procédure
représentées par Me Jean-Yves Hauser, avocat,
recourantes,
contre
Commune de Montagny, route des Buissons 41, 1774 Cousset, représentée par Me Bernard Loup, avocat,
Direction de l'aménagement, de l'environnement et des constructions de l'Etat de Fribourg, rue des Chanoines 17, 1700 Fribourg.
Objet
révision générale du plan d'aménagement local, déclassement,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, IIe Cour administrative, du 16 juin 2016.
 
Faits :
A. Le 3 septembre 2010, puis le 3 octobre 2011, la commune de Montagny a mis à l'enquête publique la révision générale de son plan d'aménagement local (PAL). Selon le rapport explicatif, cette révision a pour objectif d'harmoniser les anciens PAL des trois communes ayant précédemment fusionné, et d'adapter le PAL aux exigences légales en réduisant le dimensionnement excessif des zones à bâtir. En effet, dans le cadre du programme de révision établi en 2005 pour le Service cantonal des constructions et de l'aménagement (SeCA), le facteur de dimensionnement avait été fixé à 1,2 alors qu'il était effectivement de 1,89. Préavisant en septembre 2007 l'avant-projet du nouveau PAL, le SeCA avait ensuite considéré que la commune n'avait pas démontré avoir tout mis en oeuvre pour réduire la surface des zones à bâtir. Toutefois, compte tenu de la bonne desserte en transports publics, le facteur de dimensionnement a été augmenté à 1,4.
Le SeCA a préavisé favorablement au nouveau projet, le 31 mars 2010. Le nouveau plan d'affectation des zones (PAZ) prévoit, pour le secteur de Montagny-la-Ville, le déclassement en zone agricole d'une surface de 11'000 m² classée en zone résidentielle à faible densité R1, constituée pour l'essentiel de la parcelle n° 656 propriété de A.________ et B.________. Cette surface borde un quartier résidentiel situé à l'est du village (quartier de l'Etriva). Selon le rapport explicatif, ce déclassement est dû au surdimensionnement de la zone résidentielle, aux accès routiers critiques et à la situation légèrement isolée du quartier par rapport au centre du village. Le secteur est toutefois mentionné au plan directeur communal (PDCom) comme extension projetée de la zone résidentielle. La parcelle adjacente n° 657a, également propriété de A.________ et B.________, jusqu'alors en zone d'extension future de la zone résidentielle selon le PDCom, devait perdre ce statut.
B. A.________ et B.________ ont formé une opposition qui a été rejetée le 29 mai 2012 par le Conseil communal. Les opposantes ont recouru en vain successivement auprès de la Direction de l'aménagement, de l'environnement et des constructions (DAEC), puis de la Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg. Dans son arrêt, du 16 juin 2016, la Cour administrative a retenu que la modification du PDCom concernant la parcelle n° 657a n'avait pas de caractère décisionnel et ne pouvait dès lors faire l'objet d'une opposition et d'un recours. Pour remédier au surdimensionnement de ses zones à bâtir, la commune avait déclassé 76'000 m² de terrains et mis en zone à bâtir 17'500 m², parvenant à un facteur de 1,3. Cela répondait à un intérêt public important. Rien ne permettait d'affirmer que la situation de 2009 aurait évolué au point de nécessiter une nouvelle évaluation. La commune n'était pas tenue d'exploiter entièrement le facteur de développement (1,4) autorisé par le service cantonal. Le déclassement d'un terrain que les propriétaires n'avait pas mis en valeur se justifiait, dès lors qu'il n'était pas situé dans un secteur largement bâti. L'équipement du terrain et le fait qu'il ne se prêterait pas à l'agriculture n'étaient pas des éléments pertinents. Les décisions précédentes étaient suffisamment motivées. Il n'y avait pas d'inégalité de traitement avec les propriétaires de la parcelle voisine n° 878, puisque cette dernière était déjà bâtie, ni avec les autres parcelles mises en zone à bâtir puisqu'il s'agissait de régulariser des aménagements existants. Enfin, la commune n'avait fourni aucune garantie quant au maintien en zone à bâtir de la parcelle n° 656.
C. A.________ et B.________ forment un recours en matière de droit public par lequel elles demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et d'ordonner le maintien de la parcelle n° 656 en zone à bâtir, le PAD n'étant pas approuvé. Subsidiairement, elles concluent au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elles demandent l'effet suspensif, qui a été accordé par ordonnance du 16 septembre 2016.
La cour cantonale se réfère à son arrêt et conclut au rejet du recours. La DAEC et la commune de Montagny concluent également au rejet du recours. Dans leurs dernières observations, les recourantes confirment leurs conclusions et contestent les motifs développés par les intimées.
 
Considérant en droit :
1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourantes sont propriétaires de la parcelle dont le Tribunal cantonal a confirmé le déclassement en zone agricole. Elles ont qualité pour agir (art. 89 al. 1 LTF).
2. Les recourantes se plaignent de constatation manifestement inexacte des faits sur plusieurs points. Au moment de la révision du PAL, il n'y avait pas de surdimensionnement de la zone à bâtir puisque la commune disposait encore d'une réserve de 8'218 m²; les pièces produites en instance cantonale démontreraient que le terrain était suffisamment équipé; l'accès à la route principale était assuré notamment par une route aménagée par les recourantes et dont les autres propriétaires pourraient bénéficier; les infrastructures de transport public se trouveraient à proximité. Les recourantes avaient aussi tenté de mettre leur terrain en valeur en mandatant une agence, en procédant à des raccordements, en accordant des servitudes de passage gratuitement à la commune pour les canalisations (alors que cette dernière envisageait déjà de sortir la parcelle de la zone à bâtir), en constituant des cédules hypothécaires et en vendant une partie du terrain après division de la parcelle. Les recourantes relèvent aussi que la parcelle n'est pas isolée du centre du village et qu'elle s'insérerait dans la zone à bâtir existante.
S'agissant des nouvelles mises en zone à bâtir, les recourantes contestent que la régularisation des constructions et aménagements existants soit justifiée par un intérêt public suffisant.
2.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que ceux-ci n'aient été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire de l'art. 9 Cst. (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF. Si le recourant entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF; ATF 141 II 14 consid. 1.6 p. 24; 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, l'autorité tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 134 V 53 consid. 4.3; 129 I 8 consid. 2.1; 118 Ia 28 consid. 1b et les arrêts cités; pour une définition de l'arbitraire cf. ATF 134 I 263 consid. 3.1 p. 266).
2.2. La question de savoir si la "réserve théorique" de 8'218 m² - dont l'existence est admise par la cour cantonale - permettait de remettre en cause le surdimentionnement de la zone à bâtir n'est pas une question de fait mais de droit puisqu'elle dépend de l'utilisation d'un facteur de 1,4 au lieu des 1,3 finalement retenus. La cour cantonale a également considéré que l'équipement de la parcelle n'était pas déterminant, l'existence d'un équipement de base complet et d'un accès suffisant n'imposant pas le maintien de la parcelle en zone à bâtir. Il s'agit là aussi d'une question de droit. l'arrêt attaqué ne conteste pas, cela étant, l'existence de l'équipement et de l'accès dont les recourantes se prévalent. En considérant que les recourantes n'avaient pas mis en valeur leur bien-fonds affecté en zone à bâtir depuis de nombreuses années, la cour cantonale n'a fait que constater l'absence de toute construction sur la parcelle en cause, ce qui constitue un fait indéniable. Sans les remettre en cause, la cour cantonale a considéré que les démarches entreprises par les recourantes pour valoriser les terrains n'avaient pas abouti, quelles qu'en soient les raisons. Quant à la situation de la parcelle par rapport au village, elle ressort clairement du plan reproduit dans l'arrêt attaqué. La question de savoir si le quartier doit être considéré comme largement bâti au sens de l'art. 15 LAT est elle aussi une question de droit.
Les recourantes critiquent également les nouvelles mises en zone à bâtir. Les griefs soulevés à ce propos ne relèvent toutefois pas de l'établissement des faits, mais de l'application des principes du droit de l'aménagement, voire du droit à l'égalité de traitement. Les recourantes omettent également de préciser en quoi ces griefs présenteraient une pertinence pour juger du déclassement de leur propre parcelle. Les recourantes admettent d'ailleurs que le moratoire institué à l'art. 38 al. 2 LAT n'a pas d'influence directe sur le présent litige dès lors que la modification du PAD a comme but une augmentation globale de la zone à bâtir dans la commune.
Les griefs relatifs à l'établissement des faits doivent dès lors être écartés, dans la mesure où ils sont recevables.
3. Invoquant l'art. 15 LAT, les recourantes estiment que l'évaluation des besoins de zones à bâtir serait basée sur des chiffres datant de 2009 et qui n'auraient été actualisés ni en 2010 au moment de la mise à l'enquête, ni même lors de l'enquête complémentaire en octobre 2011, alors qu'une grande partie des terrains étaient déjà construits. I nvoquant également l'art. 15 LAT et les art. 1 et 3 LAT, les recourantes estiment que la zone à bâtir, finalement définie selon un facteur de 1,3 au lieu de 1,4 comme admis par le SeCA, aboutirait à un sous-dimensionnement contraire au droit fédéral. Le terrain des recourantes serait ainsi nécessaire aux besoins, compte tenu de la forte demande; depuis septembre 2010, 127 appartements auraient été réalisés et la moitié des zone à bâtir disponibles aurait déjà été utilisée. La parcelle des recourantes s'inscrirait dans le périmètre du quartier déjà largement construit et équipé.
3.1. Une mesure d'aménagement du territoire, telle le classement d'un bien-fonds dans une zone agricole, représente une restriction au droit de propriété qui n'est compatible avec l'art. 26 Cst. que pour autant qu'elle repose sur une base légale, se justifie par un intérêt public suffisant et respecte les principes de la proportionnalité et de l'égalité devant la loi (art. 36 Cst.). Le Tribunal fédéral examine en principe librement si une restriction de la propriété se justifie par un intérêt public et si cet intérêt l'emporte sur l'intérêt privé auquel il s'oppose; il jouit d'une même latitude lorsqu'il s'agit d'apprécier si une telle restriction viole le principe de la proportionnalité. Il s'impose toutefois une certaine retenue lorsqu'il s'agit de tenir compte de circonstances locales ou de trancher de pures questions d'appréciation (ATF 125 II 86 consid. 6 p. 98 et les arrêts cités). Tel est notamment le cas lorsque le litige porte sur la délimitation des zones d'affectation (ATF 113 Ia 444 consid. 4b/ba p. 448 et les arrêts cités).
3.2. La notion de "terrains déjà largement bâtis" de l'ancien art. 15 let. a LAT doit être comprise de manière étroite. Elle ne s'applique pas à n'importe quel groupe de constructions; il faut que l'on soit en présence d'un milieu bâti, qui présente les caractéristiques d'une "agglomération", avec les infrastructures habituelles. Les critères à prendre en compte sont notamment le caractère compact de l'ensemble construit, les équipements, les liaisons avec les autres zones à bâtir ou l'infrastructure publique (ATF 132 II 218 consid. 4.1 p. 223; 121 II 417 consid. 5a p. 424.). Selon la jurisprudence prévalant déjà sous l'ancien art. 15 LAT (applicable en l'occurrence), les zones à bâtir surdimensionnées sont contraires à la LAT et doivent être réduites (ATF 140 II 25 consid. 4.3 p. 31; 136 II 204 consid. 7 p. 211). La mesure de planification doit en outre être fondée sur une pesée des intérêts en présence objectivement justifiable (art. 3 OAT). Les éléments à prendre en compte dans la détermination du besoin en terrains à bâtir sont les suivants: réserve en terrains disponibles dans les zones à bâtir actuelles, utilisation passée et future des terrains à bâtir, développement démographique, développement économique, état et développement du réseau de transports publics, possibilités financières et techniques de la commune en matière d'équipement notamment (arrêt 1C_15/2013 du 9 août 2013).
3.3. Dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 avril 2014, l'art. 15 LAT prévoyait que les zones à bâtir comprennent les terrains propres à la construction qui sont déjà largement bâtis ou seront probablement nécessaires à la construction dans les quinze ans à venir et seront équipés dans ce laps de temps. Selon la jurisprudence prévalant déjà sous l'ancien art. 15 LAT, les zones à bâtir surdimensionnées étaient contraires à la LAT et devaient être réduites (ATF 140 II 25 consid. 4.3 p. 31; 136 II 204 consid. 7 p. 211). Le nouvel art. 15 LAT, entré en vigueur le 1er mai 2014, prévoit notamment que les zones à bâtir sont définies de telle manière qu'elles répondent aux besoins prévisibles pour les quinze années suivantes (al. 1) et que les zones à bâtir surdimensionnées doivent être réduites (al. 2). L'emplacement et la dimension des zones à bâtir doivent être coordonnés par-delà les frontières communales en respectant les buts et les principes de l'aménagement du territoire (al. 3). Le nouvel art. 15 al. 4 LAT précise ce qui suit:
De nouveaux terrains peuvent être classés en zone à bâtir si les conditions suivantes sont réunies:
a. ils sont propres à la construction;
b. ils seront probablement nécessaires à la construction dans les quinze prochaines années même si toutes les possibilités d'utilisation des zones à bâtir réservées ont été épuisées et ils seront équipés et construits à cette échéance;
c. les terres cultivables ne sont pas morcelées;
d. leur disponibilité est garantie sur le plan juridique;
e. ils permettent de mettre en oeuvre le plan directeur.
Avec cette révision de la LAT, le législateur a entendu durcir la législation préexistante, jugée lacunaire, en établissant de manière précise les conditions permettant de classer des nouveaux terrains en zone à bâtir, ce pour mieux dimensionner ces zones (arrêt 1C_113/2014 du 3 septembre 2014 consid. 3.1; cf. Message du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la loi sur l'aménagement du territoire, FF 2010 963 ch. 1.1). Si le nouvel art. 15 LAT a essentiellement codifié la jurisprudence et la pratique, il apporte certaines innovations telles que l'exigence de plans directeurs contenant les stratégies de répartition des zones à bâtir et le calcul supposé plus précis des surfaces en fonction des besoins (ATF 141 II 393 consid. 2 p. 395). Le Tribunal cantonal a considéré que les principes du nouveau droit devaient s'appliquer en procédure de recours, ce que les recourantes ne contestent pas. Le présent litige n'est toutefois pas concerné par le moratoire instauré à l'art. 38a al. 2 LAT.
3.4. Dans un premier temps, le SeCA a considéré que le facteur de dimensionnement de la zone à bâtir - par rapport aux quinze années précédentes - qui était alors de 1,89 pour la commune, devait être ramené à 1,2. Il a par la suite autorisé un facteur de 1,4 pour tenir compte des difficultés rencontrées par la commune dans la réduction de sa zone à bâtir et de la bonne desserte en transports publics. Dans son préavis d'examen final, le SeCA a établi que la commune disposait d'une réserve de zone à bâtir de 145'960 m², soit 8'218 m² de moins que la réserve admissible, correspondant à un facteur de 1,3 au lieu de 1,4. Cette évaluation se fonde sur les chiffres d'octobre 2011. Contrairement à ce que soutiennent les recourantes, l'autorité de planification n'est pas tenue d'actualiser constamment ces données, par nature évolutives, dans le cadre du processus de longue haleine que représente la redéfinition de la zone constructible de l'ensemble du territoire communal. Comme le relève la cour cantonale, les recourantes se contentent de simples affirmations sans démontrer que la planification adoptée serait dépassée au point de nécessiter une nouvelle adaptation en application de l'art. 21 al. 1 LAT. L'on voit d'ailleurs mal comment cela pourrait être le cas, compte tenu notamment des dispositions cantonales permettant de reconnaître à la planification en cours un effet anticipé (art. 91 de la loi fribourgeoise sur l'aménagement du territoire et les constructions - LATeC).
3.5. Contrairement à ce que soutiennent les recourantes, le facteur de 1,3 au lieu des 1,4 admis par le SeCA n'apparaît pas contraire au droit fédéral. Initialement fixé à 1,2, ce facteur a été porté à 1,4 pour tenir compte des difficultés de déclassement rencontrées par la commune et en raison des bonnes dessertes vers Fribourg et Payerne. Le facteur de dimensionnement ainsi défini constitue une limite à ne pas dépasser et n'interdit pas aux communes de demeurer en deçà pour se ménager une certaine marge de manoeuvre permettant de tenir compte des éléments imprévisibles tels la nécessité de procéder à des reclassements en fonction par exemple de décisions judiciaires (arrêt 1C_54/2015 du 2 novembre 2015 consid 4.2). Le fait que la parcelle est déjà équipée ne constitue pas non plus un élément pertinent (idem), et les démarches entreprises par les recourantes pour mettre en valeur leur bien ne changent rien au fait que le terrain est actuellement non bâti. La surface déclassée se trouve en bordure d'une zone résidentielle (quartier de l'Etriva) à faible densité, nettement séparée de la zone du village. Son déclassement crée un léger décrochement à l'intérieur de ce quartier, sans pour autant qu'il en résulte une brèche dans le tissu bâti (arrêt 1C_113/2014 du 3 septembre 2014 consid. 3.3).
3.6. Invoquant l'art. 16 LAT, les recourantes soutiennent que leur terrain serait impropre à un usage agricole; il ne serait même pas classé dans l'échelle des valeurs agricoles du plan communal des aptitudes agricoles.
Aux termes de l'art. 16 al. 1 LAT, les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole. En cas de déclassement d'une parcelle constructible pour des motifs de surdimensionnement de la zone à bâtir, la possibilité d'une exploitation effective à des fins agricoles n'est pas déterminante. On peut retenir qu'un intérêt général au classement en zone agricole est établi si, d'une part, le classement en zone à bâtir est exclu en vertu de l'art. 15 LAT, et si d'autre part un classement dans la zone à protéger au sens de l'art. 17 LAT, voire dans une autre zone inconstructible selon l'art. 18 LAT, ne s'impose pas (arrêt 1C_15 2008 du 10 juin 2008 consid. 2.2.3). Tel est le cas en l'occurrence, la parcelle des recourantes se trouvant en outre rattachée à l'ensemble du périmètre de la zone agricole, conformément aux exigences de l'art. 16 al. 2 LAT.
3.7. En définitive, la décision de déclassement repose sur des critères objectifs, conformes au but d'intérêt public recherché. La commune n'a pas abusé du pouvoir d'appréciation qui doit lui être reconnu dans ce domaine. Le grief de violation de la garantie de la propriété doit lui aussi être rejeté, les recourantes se contentant de mentionner à ce sujet leur droit à une indemnisation pour expropriation matérielle.
4. Invoquant l'art. 8 Cst., les recourantes se plaignent d'une inégalité de traitement. En 2009, elles ont divisé leur parcelle pour créer la parcelle n° 878, sur laquelle la construction d'une villa a été autorisée en 2011. Comme le rappelle la cour cantonale, la situation de la nouvelle parcelle diffère fondamentalement de celle des recourantes puisqu'un immeuble y a été construit. Les recourantes relèvent que cette construction n'existait pas au moment de la décision de déclassement. Il n'en demeure pas moins que le projet était à tout le moins en voie de réalisation lors de la seconde mise à l'enquête, de sorte que les circonstances étaient objectivement différentes.
5. Invoquant enfin l'art. 9 Cst., les recourantes relèvent que la commune aurait toujours soutenu le développement du quartier. Elle aurait encouragé les recourantes à mettre en valeur leur parcelle et en aurait profité pour faire passer le réseau d'eaux usées et obtenir gratuitement des servitudes de la part des recourantes. Or, depuis le mois de mars 2009 en tout cas, elle projetait de sortir la parcelle de la zone à bâtir.
5.1. Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration. Selon la jurisprudence, un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (cf. ATF 141 V 530 consid. 6.2 p. 538; ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636 s.)
5.2. L'arrêt attaqué retient que les recourantes ont été informées par la commune, dès 2009 de son intention de sortir la parcelle de la zone à bâtir et de préaviser négativement à tout projet de construction qui serait désormais présenté. La cour cantonale ajoute que dès le 12 janvier 2006, la commune aurait informé les recourantes des risques que le surdimensionnement de la zone à bâtir faisait courir aux propriétaires. Dès lors, les démarches entreprises par la commune pour équiper le quartier ne pouvaient être interprétées comme une assurance concrète quant au maintien de la parcelle en zone à bâtir. Le grief doit lui aussi être écarté.
6. Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge des recourantes qui succombent. Il n'est pas alloué de dépens à la commune, celle-ci agissant dans le cadre de ses attributions officielles (art. 68 al. 3 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté.
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourantes.
3. Il n'est pas alloué de dépens.
4. Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourantes, à la Commune de Montagny, à la Direction de l'aménagement, de l'environnement et des constructions de l'Etat de Fribourg, et au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, IIe Cour administrative.
Lausanne, le 4 janvier 2017
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Merkli
Le Greffier : Kurz