BGer 6B_757/2014
 
BGer 6B_757/2014 vom 17.12.2014
{T 0/2}
6B_757/2014
 
Arrêt du 17 décembre 2014
 
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer.
Greffière : Mme Boëton.
Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Kathrin Gruber, avocate,
recourant,
contre
Ministère public central du canton de Vaud,
intimé.
Objet
Refus de la libération conditionnelle,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 30 juin 2014.
 
Faits :
A. Par jugement du 3 juin 2010, confirmé par arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois du 6 août 2010, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________ pour lésions corporelles simples, dommage à la propriété, injure, menaces, contrainte sexuelle et viol à une peine privative de liberté d'ensemble de quatre ans et demi, comprenant sa réintégration pour un mois et 29 jours issus d'un solde de peine de libération conditionnelle, a révoqué le sursis accordé le 28 septembre 2007 par la Cour de cassation pénale et a ordonné l'exécution de la peine d'un an de privation de liberté.
B. Par arrêt du 30 juin 2014 la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X.________ contre l'ordonnance du 26 mai 2014, prononcée par le Juge d'application des peines du canton de Vaud, qui a refusé de lui accorder la libération conditionnelle. En bref, elle a motivé son refus au vu du déni total du recourant par rapport à ses crimes sexuels, du défaut d'amendement, du risque de récidive qualifié de moyen en matière de violence sexuelle et d'absence de projets concrets pour l'avenir.
C. X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 30 juin 2014 dont il demande la réforme en ce sens que la libération conditionnelle lui soit accordée avec effet immédiat. Subsidiairement, il requiert sa mise en liberté à compter du moment où son renvoi dans son pays d'origine sera exécuté et que le délai d'épreuve soit fixé à la durée équivalente au solde de la peine. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.
 
Considérant en droit :
1. Le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions relatives à l'exécution de peines et de mesures (art. 78 al. 2 let. b LTF).
2. Le recourant invoque la violation de l'art. 86 al. 1 CP ainsi que l'arbitraire dans l'appréciation des preuves. Il considère que l'autorité cantonale s'est écartée sans motifs valables des préavis favorables de la Commission Interdisciplinaire Consultative concernant les délinquants nécessitant une prise en charge psychiatrique (ci-après: CIC), de l'Office d'exécution des peines (ci-après: OEP), de la Direction de l'établissement pénitentiaire A.________ et du Ministère public pour lui refuser la libération.
2.1. Dans le recours en matière pénale, les constatations de fait de la décision entreprise lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF). Il n'en va différemment que si les faits ont été établis en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire (cf. ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; sur la notion d'arbitraire, voir notamment ATF 140 III 16 consid. 2.1 p. 18 s.; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379 s.). S'agissant plus précisément de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 136 III 552 consid. 4.2 p. 560). L'invocation de ce moyen ainsi que, de manière générale, de ceux déduits du droit constitutionnel et conventionnel (art. 106 al. 2 LTF), suppose une argumentation claire, détaillée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287) et circonstanciée (ATF 136 II 101 consid. 3 p. 105). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356 et les références citées).
Il ne sera pas entré en matière sur les critiques du recourant relatives à la suppression par l'OEP de congés, décisions qui ne sont pas l'objet de la procédure.
2.2. Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits.
2.3. En l'espèce, le recourant a subi les deux tiers de sa peine et son comportement en détention est qualifié de bon. Les deux premières conditions de la libération conditionnelle sont donc réalisées. Reste seul litigieux le pronostic relatif à son comportement futur.
2.4. Sur cette question, la cour cantonale a retenu que le recourant, âgé de 32 ans, était un multirécidiviste qui avait manifesté une nette progression dans la perpétration de ses infractions jusqu'à sa condamnation du 3 juin 2010. Il avait en effet été condamné à trois reprises entre 1997 et 2002 pour vol, extorsion, homicide par négligence et lésions corporelles simples en défaveur d'une personne sans défense. En 2005, il avait été condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis pour complicité de brigandage, complicité d'extorsion et chantage, ivresse au volant et infraction grave à la Loi sur la circulation routière. En 2007, il avait été condamné à deux ans de privation de liberté pour mise en danger de la vie d'autrui et contrainte.
3. En substance, le recourant considère que le pronostic défavorable repose sur des critères qu'il estime faux, mal appréciés, surévalués ou non pertinents. Ces critiques seront donc examinées sous l'angle de l'appréciation arbitraire des preuves ou de la violation du droit fédéral selon leur articulation.
3.1. C'est à tort que le recourant suggère que son bon comportement en détention et l'obtention de ses nombreux congés donneraient automatiquement droit à sa libération conditionnelle. En effet, le premier critère ne suffit pas à l'obtention de la libération conditionnelle (cf. ATF 119 IV 5 consid. 1a p. 7; arrêt 6B_915/2013 du 18 novembre 2013 consid. 4.1). Quant aux congés, ils ne sont pas seuls déterminants pour le pronostic (cf. arrêt 6B_521/2011 du 12 septembre 2011 consid. 2.4). Pour le surplus, la critique du recourant, qui se limite à contester l'appréciation selon laquelle son évolution paraît dictée par un plan stratégique, sans autre démonstration relative à l'appréciation arbitraire des preuves qui ont conduit la cour cantonale à ce constat, en particulier les nombreux avis convergents dans ce sens des différents intervenants, est purement appellatoire, et partant irrecevable.
3.2. Le recourant échoue à démontrer l'arbitraire dans la constatation qu'il avait volontairement interrompu son suivi thérapeutique dès lors qu'il ressort de ses propres déclarations qu'il avait décidé d'arrêter le traitement (PV audience n. 78-81). Le motif pour lequel il a interrompu ce traitement, à savoir un changement de psychologue n'y change rien. Au demeurant, le détenu doit participer activement aux efforts de resocialisation mis en oeuvre et à la préparation de sa libération (art. 75 al. 4 CP). Le travail thérapeutique lors de l'exécution de la peine n'est donc pas une affaire privée, mais une obligation du détenu vis-à-vis de la société (arrêt 6B_842/2013 du 31 mars 2014 consid. 3). L'autorité cantonale était ainsi fondée à retenir la suspension du traitement en défaveur du recourant dans l'établissement du pronostic.
3.3. Les préavis favorables auxquels le recourant se réfère subordonnent la libération du recourant à la condition qu'il quitte le territoire suisse pour retourner dans son pays d'origine, le Pérou, afin d'y réaliser ses projets tant sur le plan professionnel que familial.
Or, sur ces points, la cour cantonale a relevé, en se fondant sur l'expertise psychiatrique du 27 août 2012, que l'aspect de réinsertion sociale par le travail ne paraissait pas devoir être à considérer comme un élément spécifique de grande importance dans le pronostic. Aussi, son départ ne constituait pas un facteur de protection susceptible de contrebalancer le risque de récidive. Le recourant ne discute en réalité pas cette constatation tirée de l'expertise psychiatrique, mais se borne à opposer que le dernier préavis de la CIC de janvier 2014 lui est favorable en exposant les motifs pour lesquels cette commission souscrit à une proposition de reprise des congés s'orientant vers une libération conditionnelle. Or, ce préavis ne contredit nullement l'appréciation cantonale selon laquelle une prise d'emploi ne suffit pas à neutraliser le risque de récidive.
3.4. C'est à tort que le recourant soutient que la cour cantonale ne pouvait pas formuler son pronostic défavorable en tenant compte notamment de son refus d'admettre des infractions pour lesquelles il avait été condamné. En effet, si la libération conditionnelle n'est pas subordonnée à une reconnaissance des actes ou de l'illicéité des actes ayant conduit à la condamnation, il s'agit toutefois d'un indice qui peut permettre de poser un pronostic sur le comportement futur du condamné en liberté (ATF 124 IV 193 consid. 5b/ee p. 204 s.; arrêt 6B_259/2014 du 5 juin 2014 consid. 2.5). La cour cantonale pouvait ainsi sans violer le droit fédéral prendre en considération ce critère. Pour le surplus, le recourant ne discute pas plus avant sous l'angle de l'arbitraire les constatations cantonales selon lesquelles il vivait dans un déni massif de ses délits à caractère sexuel et qu'il minimisait ses autres actes de violence, ce qui établissait une absence d'amendement et de prise de conscience, comme retenu par l'OEP et le Ministère public dans leurs préavis respectifs. Le grief est infondé.
3.5. En tant que le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir jugé le risque de récidive " comme pour la libération d'une mesure ", sans autre explication relative à ce critère, il ne satisfait pas aux exigences de motivation prévues à l'art. 42 al. 2 LTF. En particulier, il ne discute pas les conclusions convergentes de l'expertise et de l'évaluation criminologique conduite sous la direction de l'établissement pénitentiaire A.________ qui retiennent un risque de récidive en matière de violence sexuelle de moyen. Partant, sa critique est irrecevable. Il en va de même lorsqu'il conteste le fait que l'exécution complète de la peine est encore susceptible d'entraîner une amélioration sans discuter la motivation qui a conduit la cour cantonale à émettre cette constatation.
3.6. En conséquence, l'approche de la Chambre des recours, qui s'est livrée à une appréciation globale des chances de réinsertion sociale du recourant en prenant en considération tous les éléments nécessaires et pertinents pour fonder sa décision aboutissant à un pronostic défavorable, ne viole pas le droit fédéral.
4. Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme les conclusions étaient vouées à l'échec, l'assistance judiciaire ne peut lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, devra donc supporter les frais (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1. Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2. La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'600 fr., sont mis à la charge du recourant.
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
Lausanne, le 17 décembre 2014
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge Présidant : Denys
La Greffière : Boëton