BGer 5A_370/2010
 
BGer 5A_370/2010 vom 22.09.2010
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
{T 0/2}
5A_370/2010
Arrêt du 22 septembre 2010
IIe Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente,
Marazzi et Herrmann.
Greffier: M. Braconi.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Tarkan Göksu, avocat,
recourant,
contre
1. B.________,
2. dame B.________,
tous deux représentés par Me Pierre-Henri Gapany, avocat,
3. Office des poursuites de la Sarine, avenue de Beauregard 13, 1701 Fribourg,
intimés.
Objet
reprise d'une procédure de poursuite,
recours contre l'arrêt de la Chambre des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg
du 29 avril 2010.
Faits:
A.
Les époux B.________ étaient associés de la société C.________ Sàrl, qui a été déclarée en faillite. Le 13 janvier 2009, A.________ a acquis de la masse en faillite deux créances d'un montant total de 118'823 fr. 30 à l'encontre des prénommés; ces créances avaient fait l'objet de deux poursuites (nos 1 et 2) ayant débouché sur la notification de deux comminations de faillite. Sur réquisitions de A.________ et de la Banque Cantonale de Fribourg, la faillite des époux B.________ a été prononcée le 8 juin 2009; la liquidation de ces faillites a été suspendue faute d'actifs le 3 juillet 2009.
B.
Se fondant sur l'art. 230 al. 4 LP, A.________ a requis le 24 février 2010 l'Office des poursuites de la Sarine de reprendre les deux procédures de poursuite et d'exécuter la saisie.
Par décision du 2 mars 2010 - confirmée le 5 mars suivant -, l'Office a refusé de donner suite à la requête et renvoyé l'intéressé à introduire de nouvelles poursuites contre les débiteurs. Statuant le 29 avril 2010, la Chambres des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg a rejeté la plainte du requérant.
C.
Par acte du 12 mai 2010, A.________ forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral; il conclut principalement à ce que l'arrêt attaqué soit annulé et à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision, subsidiairement à ce que l'office des poursuites soit invité (par l'autorité précédente ou le Tribunal fédéral) à reprendre les poursuites dirigées contre les intimés et à procéder à la saisie.
L'autorité précédente renonce à présenter des observations; l'Office se réfère aux déterminations produites en instance cantonale; les intimés proposent le rejet du recours.
Considérant en droit:
1.
1.1 Déposé en temps utile (art. 100 al. 2 let. a LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF; ATF 133 III 350 consid. 1.2 p. 351) rendue par une autorité de surveillance en matière de poursuite pour dettes statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF), le présent recours est recevable, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF).
1.2 Le chef de conclusions principal tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision est irrecevable, le Tribunal fédéral étant lui-même en mesure de statuer au fond (art. 107 al. 2 LTF; arrêt 5A_239/2010 du 23 juillet 2010 consid. 1 et les arrêts cités).
1.3 L'arrêt est, en règle générale, rédigé dans la langue de la décision attaquée (art. 54 al. 1 LTF), en l'occurrence le français. Il n'y a pas lieu de déroger à ce principe en l'espèce, d'autant que les intimés affirment ne pas parler l'allemand (cf. FRÉSARD, in: Commentaire de la LTF, 2009, n° 18; Übersax, in: Basler Kommentar, BGG, 2008, nos 18/19 ad art. 54 et les références citées par ces auteurs).
Comme le recourant est autorisé à procéder devant le Tribunal fédéral en allemand (art. 42 al. 1 LTF), le renvoi de l'acte à son auteur aux fins de traduction en français (cf. art. 42 al. 6 LTF) - comme le demande l'intéressé «der guten Ordnung halber» - est superflu.
2.
Le recourant dénonce d'abord la violation de son droit à une décision motivée, découlant du droit d'être entendu.
2.1 Le Tribunal fédéral a déduit du droit d'être entendu, consacré par l'art. 29 al. 2 Cst., le devoir pour le juge de motiver sa décision afin que le justiciable puisse en saisir la portée et, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause; pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision; il n'est cependant pas tenu de discuter tous les moyens soulevés par les parties, mais peut se limiter à ceux qui lui apparaissent pertinents (ATF 136 I 184 consid. 2.2.1 p. 188).
2.2 Après avoir rappelé l'interprétation de l'art. 230 al. 4 LP - dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 1997 - par le Tribunal fédéral, la juridiction précédente a retenu que les poursuites dont le plaignant demandait la reprise étaient celles sur la base desquelles il avait requis et obtenu l'ouverture de la faillite; vu la jurisprudence fédérale, lesdites poursuites n'étaient pas éteintes au moment de la déclaration de faillite et avaient été menées à terme, de sorte qu'elles ne pouvaient revivre en application de la norme susmentionnée.
Cette motivation satisfait aux exigences découlant de l'art. 29 al. 2 Cst., qui n'imposent pas au juge d'indiquer les motifs pour lesquels il refuse de suivre un avis (approuvé par le recourant) qui contredit un arrêt de principe du Tribunal fédéral (cf. infra, consid. 3), dont la solution est par ailleurs exposée en bonne et due forme dans sa décision; c'est plutôt l'adoption d'une opinion contraire à celle du Tribunal fédéral qui se doit d'être dûment motivée (cf. STEINAUER, Le Titre préliminaire du Code civil, in: TDPS, II/1, n° 456, avec les citations). De surcroît, il ressort de son mémoire que le recourant a parfaitement saisi la portée de la décision querellée, qu'il a ainsi pu attaquer en connaissance de cause.
3.
Sur le fond, le recourant remet expressément en question l'arrêt publié aux ATF 124 III 123; il s'appuie sur les critiques émises à l'encontre de cette décision et sur une pratique cantonale divergente.
Selon l'arrêt précité, l'art. 230 al. 4 LP, qui constitue une dérogation à l'art. 206 al. 1 LP, ne s'applique qu'aux poursuites encore susceptibles d'être continuées au moment de l'ouverture de la faillite; la poursuite qui a été menée à son terme par la réquisition de continuer la poursuite et le prononcé de faillite ne peut dès lors renaître après la suspension de la faillite faute d'actif (consid. 2 p. 124/125, qui confirme un arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 15 décembre 1997, in: BlSchK 62/1998 p. 77 ss). Certes, comme le souligne le recourant, cette jurisprudence a été critiquée par plusieurs auteurs (AMONN/GASSER, RJB 135/1999 p. 253; BIANCHI, BlSchK 65/2001 p. 165; BREITENSTEIN, AJP 1998 p. 846 let. B; VOUILLOZ, in: Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 12 ad art. 230 LP); mais elle est expressément approuvée par d'autres (GILLIÉRON, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 4e éd., 2005, n° 1851; PETER, RSJ 95/1999 p. 350; IDEM, Edition annotée de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 2010, p. 967; SCHOBER, in: Kurzkommentar SchKG, 2009, n° 26 ad art. 230 LP). Quant aux arrêts bernois (BlSchK 62/1998 p. 72 ss) et zurichois (AJP 1998 p. 845/846) - qui sont, par ailleurs, antérieurs à la jurisprudence fédérale contestée -, ils ne commandent pas une autre interprétation de l'art. 230 al. 4 LP. En définitive, le recourant n'avance aucun argument décisif qui justifierait de modifier la jurisprudence.
4.
Vu l'issue du recours, il y a lieu de mettre à la charge du recourant les frais judiciaires ainsi qu'une indemnité de dépens à verser aux intimés nos 1 et 2 (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 700 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Une indemnité de 1'500 fr., à verser solidairement aux intimés nos 1 et 2 à titre de dépens, est mise à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Lausanne, le 22 septembre 2010
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente: Le Greffier:
Hohl Braconi