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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
2A.599/2004 /fzc
Arrêt du 7 juin 2005
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Hungerbühler, Wurzburger, Müller et Yersin.
Greffier: M. Vianin.
Parties
Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA),
3003 Berne, recourante,
contre
Société X.________ SA,
intimée,
représentée par Me Michael Hank, avocat,
Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue Tissot 8, 1006 Lausanne.
Objet
taxe sur la valeur ajoutée (mise à disposition d'appareils automatiques),
recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédérale de recours en matière de contributions du 16 septembre 2004.
Faits:
A.
La Société X._______ SA (ci-après: la Société ou l'intimée), société anonyme de siège à A.________, est immatriculée dans le registre des assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: TVA) depuis le 1er janvier 1995. Selon l'inscription au registre du commerce, elle a pour but l'exploitation, la location, l'achat, la vente et la production de jeux et d'automates en tout genre.
Par arrêté du 26 janvier 1988, le Gouvernement du canton Z.________ a autorisé la société en formation Y.________ SA, à B.________, à exploiter le jeu de la boule.
Le 29 juillet 1992, la Société a conclu avec Y.________ SA une convention intitulée « Avenant no 10133 », qui lui conférait le droit d'installer et d'exploiter, à titre exclusif, toutes les machines à sous mises à la disposition du public à titre onéreux dans la salle de jeux du Casino du C.________. Les parties se partageaient la recette brute à raison de 42,5% chacune, le solde revenant au canton (12%) et à la commune (3%).
B.
A la suite d'un contrôle fiscal portant sur la période allant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1999 (du 1er trimestre 1995 au 4ème trimestre 1999), l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: l'Administration fédérale ou la recourante) a établi, le 11 septembre 2000, le décompte complémentaire no 139'441 d'un montant de xxx fr., qui correspondait à la TVA sur des recettes provenant de l'exploitation de machines à sous, lesquelles n'avaient indûment pas été imposées. Selon l'Administration fédérale, l'attribution de ces recettes à la Société constituait la contre-prestation de la location des machines à sous, soit de prestations imposables. L'impôt préalable afférent à ces prestations a été crédité à la Société ultérieurement (avis de crédit no 139'204 du 15 novembre 2001, d'un montant de xxx fr.).
Pour les mêmes motifs, l'Administration fédérale a établi le 15 novembre 2001 le décompte complémentaire no 139'505, d'un montant de xxx fr., qui se rapportait à la période fiscale allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2000 (du 1er au 4ème trimestre 2000). Le montant précité correspondait à la TVA sur les recettes provenant de l'exploitation des machines à sous, sous déduction de l'impôt préalable.
Les décomptes complémentaires précités ont été confirmés par décisions respectivement du 7 janvier et du 22 avril 2002, puis, sur réclamation, le 29 et le 30 avril 2003.
La Société a interjeté recours contre ces décisions devant la Commission fédérale de recours en matière de contributions (ci-après: la Commission de recours).
Par décision du 16 septembre 2004, la Commission de recours a admis les recours, après avoir joint les causes. Elle a estimé que la recourante ne se limitait pas à louer des machines à sous à Y.________ SA, mais exploitait elle-même - le cas échéant illégalement - les machines en question, de sorte qu'elle pouvait se prévaloir du motif d'exonération de l'art. 14 ch. 19 de l'ordonnance du 22 juin 1994 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA; RO 1994 II 1464 et les modifications ultérieures).
C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Administration fédérale demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la décision attaquée et de rétablir les décisions sur réclamation du 29 et du 30 avril 2003. Elle dénonce une violation de l'art. 14 ch. 19 OTVA.
La Commission de recours a renoncé à déposer des observations. L'intimée conclut en substance au rejet du recours.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Dirigé contre une décision finale qui a été prise par une commission fédérale de recours (art. 98 lettre e OJ) et qui est fondée sur le droit public fédéral, le présent recours, qui a été déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi, est en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ ainsi que des art. 54 al. 1 de l'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée et 66 al. 1 de la loi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (loi sur la TVA, LTVA; RS 641.20).
En vertu des art. 54 al. 2 OTVA et 66 al. 2 LTVA, l'Administration fédérale a qualité pour recourir (art. 103 lettre b OJ).
2.
L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée, entrée en vigueur le 1er janvier 1995, a été remplacée par la loi fédérale du même nom, du 2 septembre 1999, entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Selon l'art. 93 al. 1 LTVA, les dispositions abrogées et leurs dispositions d'exécution restent applicables, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, à tous les faits et rapports juridiques ayant pris naissance au cours de leur durée de validité. L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée s'applique dès lors au présent litige, qui porte sur des périodes fiscales allant du 1er trimestre 1995 au 4ème trimestre 2000.
3.
3.1 En vertu de l'art. 4 lettres a et b OTVA, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux sur territoire suisse par des assujettis sont soumises à l'impôt, pour autant qu'elles ne soient pas expressément exclues du champ de l'impôt.
L'art. 8 al. 2 lettre b disp. trans. aCst. exclut du champ de l'impôt « les paris, loteries et autres jeux de hasard » (ch. 9). Selon l'art. 14 OTVA, sont exclues du champ de l'impôt « les opérations dans le domaine des paris, loteries et autres jeux de hasard avec mise d'argent » (ch. 19). L'art. 18 LTVA précise que ce régime vaut pour les opérations en question, « pour autant qu'elles soient soumises à un impôt spécial ou à d'autres taxes » (ch. 23).
Les Instructions 1997 à l'usage des assujettis TVA (ci-après: les Instructions 1997), éditées par l'Administration fédérale, prévoient que « sont exclues du champ de la TVA les contre-prestations que l'organisateur des paris, loteries et autres jeux de hasard encaisse auprès des participants (mises de fonds et d'argent, prix d'achat des billets) » (ch. marginal 666). Les commissions que les organisateurs versent aux intermédiaires de telles prestations (p. ex. aux services chargés de collecter les coupons du loto, les vendeurs de billets de loterie, etc.) sont par contre imposables (ch. marginal 677; cf. aussi 2A.558/1997, Archives 69 p. 658).
Les Instructions 2001 à l'usage des assujettis TVA précisent que l'organisateur des paris, loteries et autres jeux de hasard est le détenteur de l'autorisation ou de la concession (ch. marginal 677). Les commissions que l'exploitant d'automates verse par exemple à un restaurateur pour la mise à disposition d'emplacements où sont installés les automates de jeux d'adresse et/ou d'argent sont également soumises à la TVA (ch. marginal 678).
3.2 Les exonérations de l'art. 14 OTVA sont des exonérations improprement dites, car la déduction de l'impôt préalable est exclue (art. 13 OTVA). De telles exonérations sont généralement considérées comme contraires au système. Elles interviennent en principe au stade de la consommation finale, afin d'éviter qu'elles ne génèrent une taxe occulte pouvant se révéler en fin de compte plus coûteuse qu'une imposition. Les dispositions de l'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée relatives aux exonérations doivent donc être interprétées plutôt restrictivement qu'extensivement (ATF 124 II 193 consid. 5e p. 202, 124 II 372 consid. 6a p. 377). Ainsi, les opérations effectuées préalablement à celles qui sont destinées au consommateur final - et qui sont exonérées - sont en principe imposables (2A.558/1997, précité, consid. 6a).
4.
4.1 Dans sa teneur du 2 décembre 1928 (RO 45 p. 73), l'art. 35 de la Constitution fédérale du 29 mai 1874 interdisait d'ouvrir et d'exploiter des maisons de jeu (al. 1). Toutefois, en vertu de l'alinéa 2, les gouvernements des cantons pouvaient, « à certaines conditions dictées par l'intérêt public, autoriser les jeux d'agrément en usage dans les kursaals jusqu'au printemps 1925, en tant que l'autorité compétente estime ces jeux nécessaires au maintien ou au développement du tourisme et que leur organisation est assurée par une entreprise exploitant à cette fin un kursaal ». Les autorisations cantonales étaient soumises à l'approbation du Conseil fédéral (al. 4). Le quart des recettes brutes des jeux revenait à la Confédération (al. 5). Les conditions dictées par l'intérêt public devaient être précisées dans une ordonnance du Conseil fédéral (al. 3). L'art. 5 de la loi fédérale du 5 octobre 1929 sur les maisons de jeu (RS 10 p. 270 ss) prévoyait de même que l'exploitation des jeux dans les kursaals était soumise à une ordonnance du Conseil fédéral.
L'art. 1er de l'ordonnance du Conseil fédéral du 1er mars 1929 concernant l'exploitation des jeux dans les kursaals (RS 10 p. 273 ss et les modifications subséquentes) disposait que « les gouvernements cantonaux peuvent autoriser l'exploitation du jeu de la boule par des sociétés qui exploitent un kursaal et offrent toute garantie pour une exploitation correcte des jeux, si cette mesure paraît nécessaire au maintien ou au développement du tourisme » (al. 1). Un kursaal était « une entreprise exploitée par une société défendant, d'une manière autorisée, dans la station même ou dans un rayon plus ou moins étendu, les intérêts généraux liés au tourisme, et qui a pour but d'offrir aux touristes des distractions et un lieu de réunion » (al. 2). Parmi les jeux de hasard, définis comme « jeux qui offrent, moyennant une mise, la chance de réaliser un gain en argent, cette chance dépendant, uniquement ou essentiellement, du hasard », seul celui de la boule était toléré dans les kursaals; tous les autres étaient interdits (al. 5). Les sociétés exploitant un kursaal étaient tenues d'exploiter les jeux « sous leur propre nom, à leur propre compte et sous leur propre responsabilité »; il leur était interdit « de les affermer sous aucune forme » (art. 2).
En pratique, les autorités fédérales ont défini de manière très restrictive la notion de jeu de hasard, par opposition à celle de jeu d'adresse: « une phase d'adresse insignifiante pour le déroulement du jeu suffisait pour qu'un appareil à sous soit considéré comme un appareil servant aux jeux d'adresse, donc homologué et ainsi soustrait à l'interdiction des jeux de hasard prévue par la constitution » (Message du Conseil fédéral du 26 février 1997 relatif à la loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu [ci-après: Message], FF 1997 III 137 ss, 141-142).
La réglementation sur les appareils servant aux jeux d'adresse était de la compétence des cantons, qui pouvaient les interdire de manière générale ou en autoriser l'exploitation, soit en la limitant aux kursaals, soit en l'étendant aux restaurants et salons de jeux (cf. Message, p. 158 et 160).
Pour sa part, le canton Z.________ a soumis à autorisation l'exploitation des appareils de jeu à l'argent et l'a limitée aux kursaals: l'art. 1er de l'ordonnance du 6 décembre 1978 concernant les appareils de jeu à l'argent et les totalisateurs dispose que « le Département de l'Economie publique peut, dans l'intérêt du tourisme, accorder aux casinos et établissements similaires l'autorisation d'établir des appareils de jeu de divertissement n'ayant pas le caractère de purs jeux de hasard et qui ne sont pas prohibés par l'article 35 de la Constitution fédérale ».
4.2 La modification de l'art. 35 aCst. (FF 1992 VI 55), acceptée en votation populaire du 7 mars 1993, a levé l'interdiction des maisons de jeu, mais les a soumises à une concession de la Confédération (al. 2). Selon l'alinéa 1er du texte adopté, « la législation concernant l'ouverture et l'exploitation des maisons de jeu, y compris les appareils à sous servant aux jeux de hasard, est du domaine de la Confédération ». Les cantons sont en revanche compétents pour autoriser les appareils à sous servant aux jeux d'adresse (al. 4). Un impôt correspondant à 80% au plus des recettes brutes provenant de l'exploitation des maisons de jeu revient à la Confédération (al. 5). Il s'agit d'un impôt spécial, venant s'ajouter aux impôts ordinaires sur le bénéfice des entreprises (Message, p. 141).
L'art. 35 aCst., dans sa nouvelle teneur du 7 mars 1993, puis la disposition correspondante de la nouvelle Constitution fédérale du 18 décembre 1999, l'art. 106, devaient entrer en vigueur en même temps que la législation d'application. L'entrée en vigueur de la loi fédérale du 18 décembre 1998 sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (loi sur les maisons de jeu, LMJ; RS 935.52) ayant été fixée au 1er avril 2000, une disposition transitoire de la nouvelle Constitution, l'art. 196 ch. 8, a prorogé l'art. 35 aCst. dans sa version antérieure à la modification du 7 mars 1993 pour la période allant du 1er janvier au 31 mars 2000.
Pour la période allant jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur les maisons de jeu, le Conseil fédéral a promulgué l'ordonnance du 22 avril 1998 concernant les appareils automatiques servant aux jeux d'argent (ordonnance sur les automates de jeu d'argent, OAJA; RO 1998 p. 1518 ss), qui est entrée en vigueur le même jour. Ce texte distinguait, parmi les appareils automatiques servant aux jeux d'argent, entre les appareils de jeu de hasard et ceux de jeux d'adresse (art. 2). Seuls les appareils automatiques servant aux jeux d'argent homologués par le Département fédéral de justice et police pouvaient être installés et exploités (art. 4 al. 1). Les appareils qui étaient déjà en exploitation avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance pouvaient continuer à être exploités (art. 10).
Le 1er avril 2000 sont entrés en vigueur, d'une part, l'art. 106 Cst., dont la teneur est, en substance, identique à celle de l'art. 35 aCst. dans sa version du 7 mars 1993, et, d'autre part, la loi fédérale sur les maisons de jeu. Celle-ci prévoit que « seules les maisons de jeu qui bénéficient d'une concession peuvent proposer des jeux de hasard » (art. 4 al. 1), au sens de « jeux qui offrent, moyennant une mise, la chance de réaliser un gain en argent ou d'obtenir un autre avantage matériel, cette chance dépendant uniquement ou essentiellement du hasard » (art. 3 al. 1). Elle distingue, parmi les appareils à sous, entre ceux qui servent aux jeux de hasard et ceux qui sont destinés aux jeux d'adresse (art. 3 al. 2 et 3), un de ses buts étant d'établir une nouvelle délimitation entre les deux catégories, en limitant la seconde « aux appareils à sous pour lesquels l'adresse d'un joueur moyen est réellement décisive pour le gain ou la perte » (Message, p. 144). Ce changement de définition ressort des dispositions finales: aux termes de l'art. 60 al. 1 LMJ, « les appareils à sous servant à des jeux d'adresse homologués d'après la pratique en vigueur qui sont considérés comme des appareils servant à des jeux de hasard au sens de la nouvelle législation ne pourront désormais plus être exploités que dans les grands casinos et les casinos ». L'art. 60 al. 2 LMJ prévoit cependant une période transitoire: pendant un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi, les cantons peuvent autoriser la continuation de l'exploitation dans les restaurants et autres locaux - c'est-à-dire en dehors des casinos et grands casinos - d'un maximum de cinq appareils dont la qualification a changé, pour autant que ceux-ci aient été mis en exploitation avant le 1er novembre 1997. Après l'expiration de ce délai, seuls les appareils à sous servant aux jeux d'adresse peuvent encore être exploités dans les restaurants et autres locaux (art. 60 al. 3 LMJ).
La loi définit une maison de jeu comme « une entreprise qui offre, à titre professionnel, la possibilité de se livrer à des jeux de hasard » (art. 7). Il existe deux catégories de maisons de jeu: d'une part, les « grands casinos » (concession A), qui proposent des jeux de table en nombre illimité ainsi que des appareils à sous servant aux jeux de hasard; d'autre part, les « casinos » (concession B), qui peuvent proposer au plus trois jeux de table ainsi que des appareils à sous servant aux jeux de hasard présentant un potentiel de perte ou de gain moindre (art. 8 LMJ). S'agissant des concessions, la loi distingue entre celle qui est nécessaire à l'implantation d'une maison de jeu et celle qui est requise par son exploitation (art. 10 LMJ). Les titulaires peuvent être différents (cf. art. 13 al. 3 LMJ). Les conditions d'octroi des concessions sont définies aux articles 11 et suivants LMJ. La décision est prise par le Conseil fédéral, qui statue définitivement (art. 16 al. 1 LMJ). La concession n'est pas transmissible; tout acte juridique contraire à cette interdiction ou qui vise à la contourner est frappé de nullité (art. 17 al. 3 LMJ).
S'agissant du droit cantonal, le canton Z.________ a adopté une loi d'application de la loi fédérale sur les jeux de hasard et les maisons de jeu, du 20 mars 2002, qui est entrée en vigueur le 1er juin 2002. L'ordonnance citée plus haut, qui limitait l'exploitation des appareils de jeu à l'argent aux « casinos et établissements similaires » déjà sous l'empire de l'ancien droit fédéral, n'a pas été modifiée à la suite de l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les maisons de jeu.
5.
Sous l'angle du droit privé, il convient de distinguer deux relations: celle qui existe entre la personne qui dispose des locaux et la société qui installe les automates et celle qui se noue avec les joueurs.
5.1 La première relation consiste en un contrat portant sur l'installation d'appareils automatiques. Selon la jurisprudence et la doctrine, ce genre de contrat, qui n'est pas réglé spécialement par la loi, se présente sous deux formes. Dans le premier cas, la partie qui dispose des locaux se limite à mettre un emplacement à disposition de l'exploitant des machines. Il s'agit alors d'un contrat de bail ordinaire portant sur un emplacement. Dans le second cas, la partie concernée ne se limite pas à mettre à disposition un emplacement, mais s'engage en plus à veiller à ce que l'exploitation des appareils automatiques se déroule normalement, l'autre partie devant seulement assurer leur bon fonctionnement. Chaque partie a un intérêt propre à obtenir l'usage, respectivement, de l'emplacement ou de l'appareil et doit de ce fait à l'autre partie une contre-prestation en espèces consistant généralement en une quote-part des recettes; on est alors en présence d'un contrat mixte qui présente les caractéristiques de deux contrats de bail réciproques portant l'un sur une partie d'immeuble et l'autre sur une chose mobilière, ainsi que d'une convention partiaire. Un tel contrat ne constitue pas un contrat de société simple, car l'élément personnel et le but commun ne sont pas suffisamment importants (ATF 110 II 474 consid. 3a p. 475-476; Schluep/Werder, Der Automatenaufstellungsvertrag, SPR VII/2, Bâle/Stuttgart 1979, p. 871 ss).
5.2 Une seconde relation se noue entre le joueur - qui est aussi le consommateur final, du point de vue de la TVA - et l'exploitant de l'automate. Le fait de mettre des automates à disposition du public constitue en effet une offre (cf. art. 7 al. 3 CO). Celle-ci est acceptée par acte concluant lorsqu'un joueur effectue la mise dans l'appareil. A ce moment, le contrat est donc valablement conclu entre l'utilisateur et l'exploitant de l'automate - que celui-ci en soit le propriétaire ou le locataire -, même si l'identité de ce dernier n'apparaît guère et que lui-même ignore l'identité de l'utilisateur (Othmar Bürke, Der Warenautomat im schweizerischen Recht, th. St-Gall 1967, p. 30 ss, spéc. p. 33).
6.
Le présent litige porte sur la question de savoir si l'intimée peut bénéficier de l'exonération de l'art. 14 ch. 19 OTVA. Cette question dépend du point de savoir si elle effectue des opérations dans le domaine des jeux de hasard avec mise d'argent ou, en d'autres termes, si, sous l'angle du droit de la TVA, elle est l'exploitante des machines à sous.
6.1 La Commission de recours a estimé que l'intimée était l'exploitante des machines à sous. Cette conclusion s'imposait au regard du droit privé, sur la base de la convention intitulée « Avenant no 10133 »: il s'agissait d'un contrat de bail par lequel Y.________ SA s'engageait à mettre des locaux à disposition de l'intimée, qui était l'exploitante des machines à sous, et d'un contrat de mandat par lequel celle-ci chargeait celle-là notamment de maintenir ses machines à sous en état de propreté. La conclusion précitée était confortée par le fait que, selon le Service des contributions du canton Z.________, l'exploitation des jeux à B.________ constituait un établissement stable de l'intimée. De plus et surtout, d'un point de vue économique, l'intimée était la destinataire de la contre-prestation du consommateur final, puisque les joueurs effectuaient leur mise dans ses machines à sous, sur lesquelles figurait sa raison sociale. Par ailleurs, la Commission de recours a estimé que l'intimée avait exploité les machines à sous de manière illicite, puisqu'elle n'était pas titulaire de l'autorisation, mais que cela ne faisait pas obstacle à l'exonération.
La recourante soutient que l'exploitante des machines à sous est Y.________ SA. Elle relève que les autorisations officielles d'exploiter les machines à sous ont été délivrées à cette société et qu'elles sont personnelles et incessibles. Dans ces conditions, la forme juridique adoptée dans la convention intitulée « Avenant no 10133 » apparaît insolite et les termes qui y sont utilisés ne sont pas déterminants. La recourante qualifie les rapports juridiques en cause de contrat de bail par lequel l'intimée s'engage à louer des machines à sous à Y.________ SA, et de contrat de mandat par lequel cette dernière charge l'intimée d'installer les machines. Par ailleurs, le casino où sont installées les machines est exploité par Y.________ SA, sous sa propre raison sociale, avec son personnel et selon son organisation. Par conséquent, c'est bien cette société qui apparaît comme l'exploitant aux yeux des joueurs, c'est-à-dire des consommateurs finaux. Du reste, à supposer que l'intimée puisse être considérée comme l'exploitante, elle le serait sans droit, puisque les autorisations accordées à Y.________ SA sont incessibles, et elle ne pourrait ainsi bénéficier de l'exonération.
7.
L'exonération devant intervenir au stade de la consommation finale, elle doit profiter à l'assujetti qui effectue les opérations destinées aux consommateurs finaux, soit, en l'espèce, aux joueurs. La question de savoir qui effectue ces opérations dans le cas particulier dépend de la nature des relations entre l'intimée et Y.________ SA.
Il ressort de la convention intitulée « Avenant no 10133 » que la société Y.________ SA ne se limite pas à mettre un emplacement à disposition, mais s'engage à veiller à ce que l'exploitation des machines à sous se déroule normalement: ses tâches consistent notamment à enclencher les automates lors de l'ouverture de l'établissement et à les déclencher lors de la fermeture, à les maintenir en état de propreté et à interdire toute manipulation aux personnes non autorisées. De son côté, l'intimée s'engage à installer les machines à sous - elle a à cet égard un droit exclusif -, à les réparer au besoin et à procéder régulièrement à l'encaissement des recettes. Dans ces conditions, on est en présence d'un contrat mixte: l'intimée loue les machines à sous à Y.________ SA, qui à son tour lui loue les emplacements. Les parties se partagent par moitié les recettes - après déduction des impôts -, ce qui donne à penser que les prestations sont équivalentes. Comme les parties ne forment cependant pas une société, il convient de déterminer laquelle se trouve en relations contractuelles avec les joueurs et effectue ainsi les opérations exonérées.
Le fait que les machines à sous appartiennent à l'intimée ne signifie pas encore que c'est elle qui noue des relations contractuelles avec les joueurs: il est concevable que la société Y.________ SA effectue une offre en mettant à disposition du public des machines à sous qu'elle loue à une tierce personne. A cet égard, il convient de tenir compte non seulement des rapports de droit privé entre les parties, mais également de la réglementation de droit public pour apprécier la situation.
Sous l'ancien droit fédéral, en vigueur jusqu'au 31 mars 2000, le casino de B.________ constituait un kursaal au sens de l'ordonnance du 1er mars 1929 concernant l'exploitation des jeux dans les kursaals. Par arrêté du Gouvernement du canton Z.________ du 26 janvier 1998, la société exploitante, Y.________ SA, a été autorisée à y pratiquer le jeu de la boule. Par arrêtés successifs du Ministère de l'Economie et de la Coopération du canton Z.________ du 3 juillet 1995, du 5 février 1996, du 1er décembre 1997 et du 21 décembre 1999, elle a été également autorisée à y exploiter des appareils de jeu à l'argent. Sous le nouveau droit fédéral, le casino de B.________ constitue un casino de type B, dont l'exploitation est soumise à une concession fédérale correspondante. L'ancien et le nouveau droits exigent du titulaire de l'autorisation ou de la concession qu'il en fasse usage lui-même. L'autorisation ou la concession est assortie de conditions et de charges qui obligent son titulaire à prendre une part active dans l'exploitation des machines à sous.
Les arrêtés précités autorisent Y.________ SA à exploiter des appareils de jeu à l'argent « dans la salle réservée au jeu de la boule exclusivement » (art. 1er). Cette société offre le jeu en question sous son propre nom, dans ses locaux et avec son personnel. Les personnes qui jouent aux machines à sous sont donc amenées à penser que celles-ci sont mises à leur disposition par cette même société. Le fait que le nom de l'intimée figure sur les automates ne les mène pas nécessairement à une autre conclusion, car il est concevable que cette indication désigne seulement le fabriquant. De plus, il est dans l'intérêt des joueurs d'établir des relations contractuelles avec la société Y.________ SA plutôt qu'avec l'intimée: en cas de problème avec la machine, il leur est plus facile de s'adresser à la première, dont le personnel est présent sur place, qu'à la seconde.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que les opérations destinées aux joueurs, qui bénéficient de l'exonération de l'art. 14 ch. 19 OTVA, sont effectuées par Y.________ SA. La location des appareils à sous par l'intimée constitue une opération préalable soumise à l'impôt. Ces conclusions s'imposent à la lumière tant de l'ancien que du nouveau droit; le changement de législation n'implique pas de rupture à cet égard.
Pour le cas où les appareils sont installés dans un café-restaurant, les Instructions 2001 prévoient que les commissions que l'exploitant des machines verse au restaurateur pour la mise à disposition des emplacements sont soumises à la TVA (ch. marginal 678), ce qui présuppose que les opérations exonérées sont effectuées par l'entreprise qui installe les appareils. Cette solution, qui diffère de celle retenue dans le cas d'espèce, peut se justifier si le restaurateur se limite à fournir un emplacement, sans se charger des tâches que la société exploitant le casino assume dans le cas particulier.
Enfin, à supposer que l'intimée ait effectué les opérations destinées aux joueurs, et ce de manière illégale, car sans autorisation, elle ne pourrait bénéficier de l'exonération. On ne peut en effet concevoir que le législateur ait voulu ainsi favoriser ce genre de situations. Peu importe qu'à l'inverse le caractère illégal n'empêche pas l'imposition. Par ailleurs, même lorsqu'il s'agit d'une appréciation préjudicielle, la qualification d'un comportement d'illégal, au vu des conséquences qu'elle entraîne pour les intéressés, ne doit intervenir qu'avec précaution, soit lorsque cela paraît incontestable.
8.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours.
Succombant, l'intimée doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est admis et la décision de la Commission fédérale de recours en matière de contributions du 16 septembre 2004 est annulée. Les décisions sur réclamation de l'Administration fédérale des contributions du 29 et du 30 avril 2003 sont confirmées.
2.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge de l'intimée.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Commission fédérale de recours en matière de contributions.
Lausanne, le 7 juin 2005
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: