BGer 2A.383/2004
 
BGer 2A.383/2004 vom 12.01.2005
Tribunale federale
2A.383/2004/DAC/elo
{T 0/2}
Arrêt du 12 janvier 2005
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Wurzburger, Juge présidant,
Yersin et Zappelli, Juge suppléant.
Greffière: Mme Dupraz.
Parties
A.X.________, ainsi que B.________, C.________ et D.________, recourantes,
toutes les quatre représentées par Me Jacques-H. Meylan, avocat,
contre
Service de la population du canton de Vaud,
avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud,
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne.
Objet
Regroupement familial,
recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 1er juin 2004.
Faits:
A.
Ressortissante de la République démocratique du Congo née en 1964, A.Y.________ est arrivée en Suisse le 12 juin 1990 et y a déposé une demande d'asile qui a été rejetée le 19 mars 1992, un délai échéant le 15 juin 1992 lui étant fixé pour quitter la Suisse. Le 27 mars 1992, elle a épousé un ressortissant suisse, X.________. Elle s'est alors vu octroyer une autorisation de séjour à l'année, puis une autorisation d'établissement. Elle a acquis la nationalité suisse en 2002.
A.X.________ a trois filles de père inconnu: B.________ née le 25 septembre 1985, C.________ née le 24 avril 1987 et D.________ née le 29 novembre 1988. En novembre 2001, D.________ est entrée en Suisse, sans passeport ni visa, pour vivre auprès de sa mère. Au début du mois d'août 2002, C.________ et B.________ sont également entrées en Suisse, sans passeport ni visa, pour y rejoindre leur mère ainsi que leur soeur D.________.
B.
Le 9 octobre 2002, A.X.________ a demandé la régularisation des conditions de séjour de ses trois filles au titre du regroupement familial. Elle a produit à cette fin trois extraits d'actes de naissance.
Le 29 août 2003, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) a refusé de délivrer les autorisations de séjour sollicitées et imparti aux intéressées un délai d'un mois dès la notification de cette décision pour quitter le territoire vaudois. Il a retenu que A.X.________ n'avait jamais déclaré l'existence de ses enfants, durant son séjour en Suisse, et que l'art. 8 al. 4 du règlement d'exécution du 1er mars 1949 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (RSEE; RS 142.201) lui était donc opposable. En outre, l'identité des enfants et, par conséquent, le lien de filiation n'étaient pas établis en l'absence d'une pièce d'identité valable. Enfin, les intéressées avaient commis des infractions à la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20) en entrant en Suisse sans visa et en y séjournant sans autorisation.
C.
A.X.________ et ses trois filles ont alors porté leur cause devant le Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif) qui a tenu, le 27 avril 2004, une audience au cours de laquelle il a entendu les intéressées. Par arrêt du 1er juin 2004, le Tribunal administratif a rejeté le recours, confirmé la décision du Service cantonal du 29 août 2003 et imparti à B.________, C.________ et D.________ un délai échéant le 1er juillet 2004 pour quitter le territoire vaudois. Le Tribunal administratif a considéré en substance que C.________ et D.________ avaient vécu toute leur enfance et une partie de leur adolescence dans leur pays d'origine où elles avaient dès lors leurs attaches affectives, sociales ainsi que culturelles et qu'elles n'avaient pas fait preuve d'une quelconque intégration en Suisse. En outre, A.X.________ n'avait entretenu aucun contact avec ses filles depuis son arrivée en Suisse. En fin de compte, le dépôt de la demande de regroupement familial semblait avoir été déterminé essentiellement par des motifs de convenance personnelle et matérielle; cela ne suffisait pas pour admettre un tel regroupement dans le cadre des art. 17 al. 2 LSEE et 8 CEDH. En ce qui concernait la fille aînée, B.________, majeure au moment où le Tribunal administratif statuait, elle était soumise à l'art. 3 al. 1 lettre c de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21), tel que précisé par l'art. 3 al. 1bis lettre a OLE. Pour le surplus, on pouvait lui opposer les mêmes arguments qu'à ses deux soeurs quant à ses attaches. Le Tribunal administratif a relevé qu'au demeurant, le fait que A.X.________ ait dissimulé aux autorités l'existence de ses filles enlevait à ces dernières le droit à une autorisation de séjour selon l'art. 8 al. 4 RSEE.
D.
A.X.________, ainsi que B.________, C.________ et D.________ ont formé un recours de droit administratif au Tribunal fédéral contre l'arrêt du Tribunal administratif du 1er juin 2004. Elles demandent principalement, sous suite de dépens, que l'arrêt attaqué soit réformé en ce sens que B.________, C.________ et D.________ se voient reconnaître le droit au regroupement familial avec A.X.________, les "autorités cantonales vaudoises" étant invitées à leur délivrer une autorisation de séjour à ce titre. Subsidiairement, les recourantes demandent, sous suite de dépens, que l'arrêt entrepris soit annulé et que la cause soit renvoyée aux "autorités cantonales vaudoises" pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Les recourantes reprochent au Tribunal administratif d'avoir établi les faits de façon manifestement inexacte ou incomplète, voire au mépris de règles essentielles de procédure (cf. art. 105 al. 2 OJ). Elles invoquent l'art. 17 al. 2 LSEE ainsi que, pour ce qui est de C.________ et D.________, les art. 13 Cst. et 8 CEDH. Elles soutiennent que le décès subit de leur grand-mère a laissé B.________, C.________ et D.________ sans famille dans leur patrie, alors qu'elles ne pouvaient pas encore être autonomes.
Le Tribunal administratif se réfère à l'arrêt attaqué. Le Service cantonal s'en remet aux déterminations de l'autorité intimée.
L'Office fédéral de l'immigration, de l'intégration et de l'émigration, actuellement l'Office fédéral des migrations, propose le rejet du recours.
E.
Par ordonnance du 26 août 2004, le Président de la IIe Cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif présentée par les recourantes.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 II 388 consid.1).
1.1 Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours de droit administratif n'est pas recevable en matière de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autorisations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit. D'après l'art. 4 LSEE, les autorités compétentes statuent librement, dans le cadre des prescriptions légales et des traités avec l'étranger, sur l'octroi ou le refus d'autorisations de séjour ou d'établissement. En principe, l'étranger n'a pas de droit à l'octroi d'une autorisation de séjour. Ainsi, le recours de droit administratif est irrecevable, à moins que ne puisse être invoquée une disposition particulière du droit fédéral ou d'un traité, accordant le droit à la délivrance d'une telle autorisation (ATF 130 II 388 consid. 1.1 p. 389 et la jurisprudence citée).
Aux termes de l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE, qui s'applique par analogie aux enfants étrangers de ressortissants suisses (ATF 130 II 137 consid. 2.1 p. 141 et la jurisprudence citée), les enfants célibataires de moins de dix-huit ans ont le droit d'être inclus dans l'autorisation d'établissement de leurs parents aussi longtemps qu'ils vivent auprès d'eux. Pour déterminer si l'enfant a moins de dix-huit ans, il faut se placer au moment de la demande de regroupement familial (ATF 130 II 137 consid. 2.1 p. 141 et la jurisprudence citée). En l'espèce, les trois filles de A.X.________ avaient moins de dix-huit ans, le 9 octobre 2002, au moment de la demande de regroupement familial et leur mère est suisse. Le recours de droit administratif est donc recevable sous cet angle.
1.2 Au surplus, déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi, le présent recours est en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ.
2.
D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre a) ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ, (lettre b). Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels des citoyens (ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188) ainsi que les traités internationaux (ATF 126 II 506 consid. 1b p. 508), sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans cette décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ).
3.
Le but du regroupement familial au sens de l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE est de permettre aux enfants et aux parents de vivre les uns avec les autres. Lorsque les parents sont séparés ou divorcés et que l'un d'entre eux a rejoint la Suisse, tandis que l'autre est demeuré à l'étranger, la venue de leur enfant en Suisse ne peut conduire à regrouper l'ensemble de la famille. Par conséquent, un droit inconditionnel à cette venue ne correspond pas à la ratio legis de l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE, de sorte que cette disposition doit alors être appliquée de manière plus restrictive dans une telle situation familiale (ATF 129 II 11 consid. 3.1 p. 14/15, 249 consid. 2.1 p. 252/253; 126 II 329 consid. 2b p. 331 et la jurisprudence citée). Les restrictions dont fait l'objet l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE lorsqu'il concerne des parents séparés ou divorcés, s'appliquent également par analogie à l'art. 8 CEDH (ou à l'art. 13 al. 1 Cst.). En effet, si cette disposition peut faire obstacle, dans certaines circonstances, à une mesure d'éloignement qui empêche ou rend très difficile le maintien de la vie familiale, elle n'octroie en revanche pas de droit absolu à l'entrée ou au séjour en Suisse de membres de la famille (ATF 125 II 633 consid. 3a p. 640 et la jurisprudence citée; voir aussi ATF 129 II 249 consid. 2.4 p. 256; arrêt 2A.238/2003 du 26 août 2003, consid. 3).
3.1 Ainsi, quand les parents sont séparés ou divorcés, celui d'entre eux qui a librement décidé de s'installer en Suisse ne peut se prévaloir du droit d'y faire venir ultérieurement son enfant que lorsqu'il a maintenu avec lui une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation (consid. 3.1.1, ci-dessous), ou que des changements sérieux de circonstances, par exemple une modification des possi- bilités de prise en charge éducative, rendent nécessaire la venue de l'enfant (consid. 3.1.2, ci-dessous; ATF 129 II 11 consid. 3.1.3 p. 14/15, 249 consid. 2.1 p. 252/253 et la jurisprudence citée).
3.1.1 On peut reconnaître qu'il y a une relation familiale prépondé- rante entre l'enfant et le parent vivant en Suisse lorsque ce dernier a, entre autres éléments, assumé de manière effective pendant toute la période de son absence la responsabilité principale de l'éducation de l'enfant, en intervenant à distance de manière décisive pour régler l'existence de celui-ci dans les grandes lignes, au point de reléguer l'autre parent à l'arrière-plan. Cela étant, le maintien d'une telle relation familiale prépondérante ne signifie pas encore que le parent établi en Suisse puisse faire venir son enfant à tout moment et dans n'importe quelles circonstances. En particulier, il ne saurait abuser du droit conféré par l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE (cf. également ATF 129 II 11 consid. 3.2 p. 15).
3.1.2 Lorsque le parent à l'étranger qui s'occupait de l'enfant décède - voire disparaît ou se désintéresse de l'enfant -, un tel événement peut constituer un changement sérieux de circonstances permettant au parent établi en Suisse de prétendre à un regroupement familial ultérieur. Encore faut-il toutefois examiner s'il existe dans le pays d'origine d'autres possibilités de prendre en charge l'enfant, qui correspondent mieux à ses besoins spécifiques. A cet égard, il sied notamment de tenir compte du fait qu'une émigration vers la Suisse peut aller à l'encontre du bien-être d'un enfant proche de l'adolescence ou qui y est déjà entré, dès lors qu'un tel déplacement pourra constituer pour lui un véritable déracinement ou, du moins, comporter des difficultés prévisibles d'intégration, augmentant avec l'âge (ATF 129 II 11 consid. 3.3.2 p. 16, 249 consid. 2.1 p. 253; 118 Ib 153 consid. 2b p. 159/160).
3.1.3 Enfin, l'importance et la preuve des motifs visant à justifier le regroupement familial ultérieur d'un enfant de parents séparés doivent être soumises à des exigences élevées, et ce d'autant plus que l'enfant sera âgé (ATF 124 II 361 consid. 4c p. 370/371; voir aussi ATF 129 II 249 consid. 2.1 p. 253). En particulier, lorsqu'un parent ayant vécu de nombreuses années séparé de son enfant établi à l'étranger requiert sa venue peu de temps avant les dix-huit ans de celui-ci, on doit soupçonner que le but visé n'est pas d'assurer la vie familiale commune, conformément à l'objectif poursuivi par l'art. 17 al. 2 3ème phrase LSEE, mais bien d'obtenir de manière plus simple une autorisation d'établissement, ce qui constituerait un abus de droit. Dans ces circonstances, une autorisation d'établissement ne peut être exceptionnellement octroyée que lorsque de bonnes raisons expliquent que le parent et l'enfant ne se retrouvent en Suisse qu'après des années de séparation, de tels motifs devant en outre résulter des circonstances de l'espèce (ATF 129 II 249 consid. 2.1 p. 253; 115 Ib 97 consid. 3a p. 101).
3.2 Les principes exposés ci-dessus (en particulier au consid. 3.1.2) doivent être appliqués par analogie lorsque l'enfant vivant à l'étranger n'a pas été laissé à la charge de son parent proprement dit, mais à celle de membres de sa proche famille (grands-parents, frères et soeurs plus âgés, etc.) (ATF 129 II 11 consid. 3.1.4 p.15). Dans une telle situation, le parent établi en Suisse dispose d'un droit à faire venir son enfant, sous réserve d'un abus, lorsqu'il a déjà vécu en communauté familiale avec lui, qu'il assume de manière effective le rôle éducatif en principe joué par les deux parents - en dépit de la prise en charge temporaire de l'enfant par des tiers - et qu'il entend vivre avec l'enfant ou qu'il a manifestement aménagé sa vie de manière à se réserver cette possibilité (ATF 129 II 11 consid. 3.3.1 p. 16).
Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, le parent ne peut demander ultérieurement le regroupement familial - à l'instar d'un parent séparé ou divorcé - que si des motifs sérieux commandent de modifier la prise en charge éducative de l'enfant (ATF 129 II 11 consid. 3.3 p. 16). Sous cet angle, il sied certes de reconnaître que l'avancée en âge des grands-parents auxquels l'enfant a été confié peut les empêcher dans nombre de cas de poursuivre cette tâche. Toutefois, ces difficultés n'ont pu qu'être envisagées et acceptées par le parent qui a décidé - malgré les limites temporelles prévisibles d'une telle solution - de laisser son enfant à la garde des grands-parents. Celui qui entend s'installer dans un autre pays doit en principe assumer les conséquences qui en résultent sur les liens familiaux (ATF 129 II 11 consid. 3.4 p. 17; arrêt précité 2A.238/2003 du 26 août 2003, consid. 3.2).
4.
Les recourantes s'en prennent d'abord à la façon dont le Tribunal administratif a établi les faits pertinents. Celui-ci aurait, d'une part, omis de retenir des faits pertinents dûment allégués en procédure - le cas échéant, en violation de règles essentielles de procédure -, l'état de fait étant ainsi incomplet; d'autre part, il aurait établi certains faits de façon manifestement inexacte. Ainsi, l'autorité de céans ne serait pas liée par les faits constatés dans l'arrêt attaqué, selon l'art. 105 al. 2 OJ.
4.1 Les recourantes relèvent en premier lieu que, tout au long de la procédure cantonale, elles ont exposé que ce qui avait déterminé A.X.________ à faire venir ses filles en Suisse en 2001 était le décès de la grand-mère qui s'occupait de celles-ci, l'absence dans leur pays d'origine d'une autre famille en mesure d'assumer cette charge et le caractère provisoire de l'accueil des enfants par un prêtre; elles rappellent qu'elles ont expliqué les motifs qui avaient conduit à faire venir d'abord la benjamine, puis ses deux soeurs. Elles reprochent au Tribunal administratif de n'avoir mentionné ces faits, essentiels à leurs yeux, que comme des allégués, sans dire s'il les tenait pour établis. S'il devait être considéré que tel n'a pas été le cas, ajoutent les recourantes, l'état de fait serait alors incomplet et il appartiendrait au Tribunal fédéral de suppléer lui-même à cette carence ou de renvoyer la cause à l'autorité intimée pour complément d'instruction. Le cas échéant, il faudrait au demeurant considérer que le Tribunal administratif aurait violé le droit d'être entendues des recourantes.
L'arrêt attaqué n'a pas ignoré les circonstances alléguées par les recourantes, puisqu'il les cite en substance dans l'état de fait (arrêt entrepris, lettres D et E, p. 2/3) et ne les met pas en doute. En revanche, hormis le rappel du fait que les filles de A.X.________ ont vécu avec leur grand-mère dans leur pays d'origine (arrêt attaqué, consid. 6, p. 6), le Tribunal administratif n'a pas discuté desdites circonstances au moment de se prononcer sur le bien-fondé du recours cantonal, les considérant vraisemblablement comme dépourvues de pertinence. Il s'agit là non pas de la constatation des faits, mais de leur appréciation. C'est une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement.
4.2 Les recourantes se plaignent également que le Tribunal administratif ait omis de mentionner les déclarations manuscrites de B.________ et C.________ ainsi que le résultat de leur audition par lui, moyens de preuve invoqués à l'appui des allégations susmentionnées (consid. 4.1, ci-dessus). Si le silence de l'autorité intimée devait être interprété comme l'indice qu'elle a considéré lesdites allégations comme non prouvées, elle aurait établi les faits contrairement aux moyen de preuve précités et, par conséquent, de manière manifestement inexacte.
Ce reproche n'est pas fondé. Certes, le Tribunal administratif n'a pas mentionné expressément les déclarations écrites de B.________ et C.________. Toutefois, au vu de ces déclarations et sur requête des recourantes qui en soulignaient elles-mêmes le peu de clarté (cf. la lettre du conseil des recourantes au Tribunal administratif du 9 février 2004), il les a entendues lors de l'audience précitée du 27 avril 2004, ce qui est rappelé dans l'état de fait de l'arrêt attaqué où leurs déclarations sont résumées (arrêt entrepris, lettre F, p. 3). Au demeurant, la portée qu'il convient d'accorder à ces déclarations est une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement.
4.3 Les recourantes font aussi grief au Tribunal administratif de n'avoir pas relevé certains passages de la déclaration écrite de B.________ faisant état de ses mésaventures dans sa patrie ni mentionné que B.________ et C.________ étaient en pleurs au moment de leur audition par lui.
L'autorité intimée n'était tenue de citer que les faits pertinents pour juger la cause. On ne saurait considérer comme tels les pleurs que B.________ et C.________ ont versés durant l'audience précitée du 27 avril 2004. Le grief des recourantes n'est donc pas fondé à cet égard. En revanche, les passages de la déclaration de B.________ relatifs à sa disparition n'apparaissent pas dépourvus de pertinence, de sorte que le Tribunal administratif - qui a simplement évoqué la disparition de B.________ - a établi les faits de façon manifestement incomplète sur ce point. Cependant, comme la déclaration écrite de B.________ fait partie du dossier, le Tribunal fédéral peut en tenir compte pour juger le présent recours.
4.4 Pour les intéressées, la constatation du Tribunal administratif selon laquelle la requête de regroupement familial aurait été inspirée essentiellement par des motifs de convenance personnelle et matérielle ne serait fondée sur aucun élément de preuve et contredirait même des éléments de fait rapportés par elles.
Ce que les recourantes critiquent ici, ce n'est pas la façon dont le Tribunal administratif a constaté les faits, mais celle dont il les a appréciés à la lumière des dispositions légales et de la jurisprudence sur le regroupement familial. Il s'agit là d'une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement.
4.5 Les recourantes reprochent en outre au Tribunal administratif d'avoir constaté, de façon manifestement inexacte, que les filles de A.X.________ n'avaient pas pris le chemin de l'intégration en Suisse. Elles s'appuient à ce sujet sur les démarches concrètes qu'elles ont entreprises, en vue de leur formation professionnelle et donc de leur intégration, et dont la preuve figure au dossier.
L'autorité intimée n'a pas ignoré ces faits, puisqu'elle a mentionnés les études poursuivies par les intéressées (arrêt attaqué, lettre F, p. 3). Elle paraît en revanche ne pas les avoir considérées comme déterminantes, ce qui relève de l'appréciation des faits que le Tribunal fédéral revoit librement.
5.
5.1 Se fondant sur l'état de fait qu'elles estiment conforme au dossier, les recourantes soutiennent que les conditions auxquelles est soumis un regroupement familial sont remplies en l'espèce. Le décès de la grand-mère de B.________, C.________ et D.________ aurait été un événement à la fois grave et imprévisible qui aurait anéanti le dispositif mis en place par A.X.________ et nécessité le transfert en Suisse des enfants précitées. De plus, la prise en charge de ces enfants par un prêtre, après le décès de leur grand-mère, ne pouvait, par la force des choses, être que provisoire. La venue en Suisse des deux cadettes, encore très jeunes, se serait dès lors imposée. Quant à l'aînée, B.________, qui avait disparu depuis 1997, elle aurait été traumatisée par des expériences catastrophiques subies durant cette disparition. La constatation, à son retour, de la mort de sa grand-mère
et du départ de ses deux soeurs aurait donc justifié qu'elle aussi rejoigne sa famille en Suisse.
5.2 Il est admis que les recourantes ont violé la législation en matière de police des étrangers, puisque A.X.________ n'a pas déclaré l'existence de ses filles lorsqu'elle est arrivée en Suisse ni par la suite et que ses filles sont entrées en Suisse sans passeport ni visa. En outre, lorsque A.X.________ a quitté sa patrie en juin 1990, elle a confié à sa mère ses trois filles qui avaient respectivement un an et demi, un peu plus de trois ans et un peu moins de cinq ans. Elle a gardé quelques contacts avec sa mère, mais n'a entretenu aucune relation avec ses enfants. C'est donc la grand-mère des enfants qui a assumé la relation prépondérante, si ce n'est exclusive, avec B.________, C.________ et D.________. Ce point n'est pas contesté. C'est notamment sur la base de ces éléments que le Tribunal administratif a estimé que le regroupement familial litigieux visait en réalité à faire bénéficier B.________, C.________ et D.________ de conditions de vie plus favorables et à leur assurer une formation et un avenir professionnel meilleurs que dans leur pays d'origine, ce qui ne correspond pas au but de l'art. 17 al. 2 LSEE. En l'état du dossier, on ne saurait toutefois exclure que A.X.________ ait vraiment voulu reconstituer une cellule familiale avec ses trois filles, alors âgées de quatorze à dix-sept ans environ, qui se retrouvaient absolument seules dans leur patrie après avoir vécu des événements pénibles, voire traumatisants pour l'aînée. La version des recourantes laisse cependant subsister bien des questions sur lesquelles l'autorité intimée aurait dû faire porter son instruction avant de statuer. Avant de se prononcer sur le bien-fondé du regroupement familial en cause ici, il conviendra donc de compléter le dossier sur différents points, dont les plus importants figurent ci-dessous.
L'instruction complémentaire devra permettre d'établir avec certitude la filiation de B.________, C.________ et D.________. Le fait que A.X.________ n'ait pas révélé l'existence de ses trois filles non seulement aux autorités suisse, mais encore à son propre mari qui n'en aurait été informé que peu avant l'arrivée des intéressées en Suisse inspire des doutes quant au rapport de parenté existant entre les recourantes. Dans sa décision du 29 août 2003 le Service cantonal avait d'ailleurs retenu que le lien de filiation des trois enfants précitées demeurait incertain.
Un complément d'instruction s'impose aussi pour vérifier si les recourantes n'ont vraiment plus aucune famille en République démocratique du Congo. On ne sait pas notamment ce qu'est devenue la seconde soeur de A.X.________. En effet, le 14 juin 1990, dans le cadre d'une procédure d'asile, A.X.________ a déclaré avoir deux soeurs et deux frères dans sa patrie. En revanche, dans la demande de regroupement familial, elle n'a mentionné que deux frères et une soeur. En outre, on ne sait rien de la famille un peu plus éloignée (oncles, tantes, cousins, etc.). Des recherches pourraient être entreprises avec l'aide des représentations suisses en République démocratique du Congo.
Il faudra aussi procéder à une instruction complémentaire sur la situation familiale et matérielle (par exemple, le logement) des recourantes en Suisse (ATF 119 Ib 81 consid. 2c p. 86/87).
6.
Vu ce qui précède, le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé. La cause doit être renvoyée à l'autorité intimée pour complément d'instruction et nouvelle décision.
Bien qu'il succombe, le canton de Vaud n'a pas à supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ).
Les recourantes ont droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est admis et l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 1er juin 2004 est annulé.
2.
La cause est renvoyée au Tribunal administratif du canton de Vaud pour complément d'instruction et nouvelle décision.
3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
4.
Le canton de Vaud versera aux recourantes une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourantes, au Service de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 12 janvier 2005
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le juge présidant: La greffière: