BGer 6S.80/2004
 
BGer 6S.80/2004 vom 16.03.2004
Tribunale federale
{T 0/2}
6S.80/2004 /pai
Arrêt du 16 mars 2004
Cour de cassation pénale
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Wiprächtiger et Kolly.
Greffière: Mme Angéloz.
Parties
R. X.________,
recourant, représenté par Me Jean-Charles Bornet,
contre
Juge d'instruction pénale du Bas-Valais,
maison de la Pierre, 1890 St-Maurice.
Objet
Refus de levée du secret téléphonique,
pourvoi en nullité contre la décision du Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais du 23 février 2004.
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:
1.
Dans le contexte du conflit matrimonial opposant les époux R. X.________ et D. X.________, le juge compétent a pris acte de leur séparation et a notamment retiré au père l'autorité parentale sur leurs trois enfants.
Le 17 novembre 2003, R. X.________ a déposé plainte pénale contre son épouse et contre inconnu, notamment pour abus de téléphone au sens de l'art. 179septies CP, alléguant en substance ce qui suit. Le dimanche 31 août 2003, son épouse et leurs trois enfants étaient invités au domicile des parents de l'ami de celle-ci, A. B.________, lorsqu'un tiers a téléphoné dans la matinée, se présentant comme le frère de R. X.________ et demandant à parler à l'un des enfants, K.________, né en 1994. C. B.________, qui avait répondu à l'appel, a alors appelé K.________ au téléphone, lequel a entendu son interlocuteur lui dire "c'est papa". Cette phrase a été suivie d'éclats de rire, après lesquels l'interlocuteur de K.________ a immédiatement mis un terme à l'appel. Selon la plainte, K.________ a été très perturbé par cet appel téléphonique, qu'il aurait compris en ce sens que son père "se payait sa tête" et qui aurait eu pour but de perturber, voire de détruire, la chance de R. X.________ de rétablir des relations personnelles avec son fils.
Dans le cadre de la procédure pénale initiée par sa plainte, R. X.________, qui soupçonnait un membre de la famille de son épouse d'être l'auteur de l'appel téléphonique, a sollicité, le 30 janvier 2004, du juge d'instruction qu'il ordonne l'édition par Swisscom de la liste des appels effectués le jour des faits, soit le 31 août 2003, sur le numéro de téléphone de C. B.________.
Le 20 février 2004, le Juge d'instruction pénale du Bas-Valais a finalement donné suite à cette requête et ordonné au Secrétariat général ETEC, à Berne, l'édition de la liste des appels intervenus le 31 août 2003 de 8 heures à 12 heures sur le numéro de téléphone de C. B.________. Il a par ailleurs transmis son ordonnance pour approbation au Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais.
Par décision du 23 février 2004, ce dernier magistrat a refusé d'approuver la mesure de surveillance téléphonique et invité le juge d'instruction à y mettre fin immédiatement ou, le cas échéant, à retirer du dossier les résultats qui auraient déjà été obtenus. Il a considéré, en bref, que les conditions de l'art. 3 al. 1 let. a à c en relation avec l'art. 3 al. 2 let. f de la loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication du 6 octobre 2000 (LSCPT; RS 780.1) n'étaient pas remplies.
Agissant par l'entremise de son mandataire, R. X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cette décision, en concluant à son annulation pour violation des art. 3 al. 1 LSCPT et 179septies CP. Simultanément, il sollicite l'effet suspensif ainsi que des mesures provisionnelles tendant à ce que les données relatives à l'édition de la liste des appels effectués sur le numéro de téléphone de C. B.________ ne soit pas détruites et à ce qu'il soit procédé immédiatement à l'édition de cette liste pour le 31 août 2003 de 8 heures à 12 heures.
2.
Il apparaît d'emblée que se pose la question de la recevabilité du pourvoi formé à l'encontre de la décision attaquée.
2.1 Le pourvoi en nullité est ouvert contre les décisions mentionnées à l'art. 268 PPF, à savoir contre les jugements pénaux rendus en dernière instance cantonale, à l'exception de ceux rendus par des tribunaux inférieurs statuant en instance cantonale unique (art. 268 ch. 1 PPF), contre les ordonnances de non-lieu rendues en dernière instance cantonale (art. 268 ch. 2 PPF) et contre les prononcés pénaux des autorités administratives ne pouvant donner lieu à un recours aux tribunaux (art. 268 ch. 3 PPF).
Par jugement au sens de l'art. 268 ch. 1 PPF, il faut entendre une décision rendue par une autorité judiciaire cantonale qui statue sur le sort même de la cause, et non sur la marche de la procédure ou sur une simple question d'exécution (ATF 84 IV 84 consid. 2 et les arrêts cités). Ainsi, constitue notamment un jugement l'acquittement ou le verdict de culpabilité, le prononcé d'une peine ou d'une mesure prévue par la loi pénale et la décision par laquelle l'autorité met un terme à la procédure en constatant que l'action pénale est prescrite ou encore la décision en matière d'exécution des peines et mesures que le droit fédéral réserve au juge, telle que la révocation du sursis (cf. ATF 122 IV 156 consid. 3c p. 161; 118 IV 330). Il peut s'agir non seulement d'une décision finale, qui met un terme à l'action pénale, mais d'une décision préjudicielle ou incidente, si elle tranche définitivement, sur le plan cantonal, une question de droit fédéral (ATF 123 IV 252 consid. 1; 122 IV 45 consid. 1c p. 46 s.; 119 IV 168 consid. 2a; 111 IV 188 consid. 2).
Quant à l'ordonnance de non-lieu au sens de l'art. 268 ch. 2 PPF, elle désigne toute décision qui met fin à l'action pénale, au moins sur un chef d'accusation, et qui est rendue par une autre autorité que la juridiction de jugement (ATF 122 IV 45 consid. 1c p. 46 et les arrêts cités). Il s'agit d'une notion qui doit être interprétée de manière large. Elle comprend, indépendamment de la dénomination de la décision selon le droit cantonal, toutes les décisions par lesquelles il est décidé de ne pas ouvrir ou de ne pas poursuivre une procédure pénale; ainsi, il importe peu que la décision attaquée soit qualifiée par le droit cantonal de non-lieu, de classement ou de refus de suivre (ATF 123 IV 252 consid. 1; 122 IV 45 consid. 1c p. 46; 120 IV 78 consid. 1b, 107 consid. 1a p. 108; 119 IV 92 consid. 1b et les références). En revanche, ne constitue notamment pas une ordonnance de non-lieu une décision incidente sur le déroulement de la procédure d'enquête, telle qu'une décision statuant sur l'admissibilité d'une mesure d'investigation ordonnée par l'autorité d'instruction, dès lors qu'elle ne met en aucune manière fin à l'action pénale.
2.2 La décision attaquée n'émane pas d'une autorité de jugement appelée à statuer sur le sort même de la cause, mais d'une autorité d'instruction, amenée à se prononcer, au stade de l'enquête ouverte sur plainte du recourant, sur l'admissibilité d'une mesure probatoire requise par ce dernier. Il ne s'agit donc pas d'un jugement au sens de l'art. 268 ch. 1 PPF.
La décision attaquée ne constitue pas non plus une ordonnance de non-lieu au sens de l'art. 268 ch. 2 PPF, dès lors qu'elle ne met pas un terme à l'action pénale, fût-ce sur un chef d'accusation. En particulier, elle ne tranche pas définitivement la question de savoir si les conditions de l'art. 179septies CP sont ou non réalisées en refusant de suivre à la plainte et en classant la procédure en ce qui concerne ce chef d'accusation. Si aucune décision de classement ou de refus de suivre n'intervient jusqu'au terme de l'enquête, c'est au juge de répression qu'il appartiendra de statuer sur le point de savoir si les conditions de l'infraction en cause sont ou non réalisées.
Comme, au reste, on ne se trouve manifestement pas en présence d'un prononcé pénal d'une autorité administrative au sens de l'art. 268 ch. 3 PPF, la décision attaquée n'est pas susceptible d'être attaquée par un pourvoi en nullité, qui est dès lors irrecevable à son encontre, sans qu'il y ait lieu de s'interroger plus avant sur d'éventuelles autres questions de recevabilité.
3.
Le pourvoi doit ainsi être déclaré irrecevable. Par voie de conséquence, les requêtes d'effet suspensif et de mesures provisionnelles deviennent sans objet.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF).
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le pourvoi est déclaré irrecevable.
2.
Un émolument judiciaire de 1'000 francs est mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction pénale du Bas-Valais et au Président de la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais.
Lausanne, le 16 mars 2004
Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: