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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4C.308/2003 /ech
Arrêt du 23 février 2004
Ire Cour civile
Composition
Mmes et MM. les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Nyffeler et Favre.
Greffière: Mme Aubry Girardin.
Parties
A.________ S.A.,
demanderesse et recourante, représentée par Me Michel Ducrot,
contre
X.________,
défendeur et recourant, représenté par Me Aba Neeman.
Objet
contrat d'entreprise; action récursoire; prescription; péremption
(recours en réforme contre le jugement de la Ire Cour civile du Tribunal cantonal valaisan du 8 octobre 2003).
Faits:
A.
En 1985, Y.________ a décidé de construire un bâtiment à usage commercial et d'habitation. Il a confié l'élaboration du projet, ainsi que des plans à l'architecte X.________, les travaux d'ingénieur à la société B.________ et C.________ S.A., devenue par la suite A.________ S.A. et, enfin, la direction des travaux au bureau d'architecture E.________ S.A. Aucun contrat écrit n'a été conclu.
Dans le cadre de ses tâches, A.________ S.A. a fait appel à un géologue, qui a mis en évidence la nécessité d'assurer une bonne étanchéité des locaux situés en sous-sol.
Le 30 janvier 1986, un contrat d'entreprise portant sur la réalisation de fondations spéciales a été conclu entre Y.________, en qualité de maître de l'ouvrage, représenté par E.________ S.A. et X.________, d'une part, et, d'autre part, D.________ S.A., à qui les travaux de fondation et de parois moulées dans les sous-sols ont été adjugés. Ce contrat a été contresigné par A.________ S.A.
A mi-août 1986, Y.________ a mis fin au contrat le liant à X.________ à la suite d'une divergence au sujet d'une facture d'honoraires. Le 14 août 1986, le contrat a été repris par l'administrateur de E.________ S.A.
La construction des sous-sols s'est achevée le 5 mars 1987. Lorsque l'étanchéité des murs et du sol a été testée, de nombreuses venues d'eau se sont manifestées.
Par convention du 12 mars 1987, Y.________, E.________ S.A. et A.________ S.A. ont admis que la première exécution des travaux de parois moulées n'avait pas été effectuée correctement. Relevant que la responsabilité de cette mauvaise exécution pouvait soit leur être attribuée, soit incomber à D.________ S.A ou à son sous-traitant, E.________ S.A. et A.________ S.A. se sont engagées solidairement à rembourser à Y.________ les frais d'expertise, les éventuels frais judiciaires qu'il aurait avancés et qui n'auraient pas été mis à la charge d'autres entreprises et les frais extrajudiciaires, étant précisé que celui-ci n'aurait bien entendu pas à subir les frais des corrections à apporter à la première exécution des parois moulées. E.________ S.A et A.________ S.A. s'en sont portées solidairement fort et garant.
La perte totale subie par Y.________ en raison des défauts d'étanchéité a été fixée à 990'662 fr.
Le 11 septembre 1989, Y.________ a déposé une requête de preuve à futur dirigée contre E.________ S.A., A.________ S.A., D.________ S.A. et son sous-traitant. En relation avec cette requête, l'expert Z.________ a déposé un rapport en décembre 1990, complété en janvier 1993 et en avril 1996.
Le 7 janvier 1991, Y.________ a avisé les sociétés précitées qu'il entendait se prévaloir des défauts constatés dans l'expertise Z.________.
B.
Le 22 mai 1992, Y.________ a ouvert action en paiement à l'encontre de A.________ S.A., qui a pris à titre subsidiaire des conclusions récursoires à l'encontre de D.________ S.A. et de son sous-traitant. La jonction des causes ayant été refusée, A.________ S.A. a appelé en garantie D.________ S.A. et l'entreprise sous-traitante le 16 février 1994.
Dans le cadre de cette procédure, une expertise judiciaire a été réalisée par W.________, qui a rendu un premier rapport en septembre 1996 et un rapport complémentaire en juillet 1997. Il a été retenu que ce n'est qu'à la réception du rapport d'expertise de septembre 1996 que Y.________ et A.________ S.A. ont appris que X.________ avait contribué à la survenance des problèmes d'étanchéité en établissant des plans défectueux. Auparavant, ils n'avaient pas connaissance de la responsabilité de celui-ci. Selon l'évaluation de l'expert, X.________ pouvait être tenu pour responsable de 5 % du dommage subi, par ailleurs réparti à raison de 40 % à charge de D.________ S.A., 30 % à charge de A.________ S.A., 20 % à charge de E.________ S.A. et 5 % à charge du sous-traitant.
L'action de Y.________ s'est terminée par un arrêt du Tribunal fédéral du 1er avril 1999 dans la cause 4C.380/1998 (ATF 125 III 223), qui a confirmé la responsabilité solidaire de A.________ S.A. admise par le Tribunal cantonal sur la base de la convention du 12 mars 1987. Contrairement aux juges cantonaux, la Cour de céans a considéré que, compte tenu de la nature des travaux attribués à l'architecte, ce dernier n'apparaissait pas comme l'auxiliaire du maître par rapport à l'ingénieur. A.________ S.A. a donc été tenue de supporter l'ensemble du dommage et a dû verser à Y.________ la somme totale de 1'002'964 fr. plus intérêt.
C.
L'assurance responsabilité civile de A.________ S.A. a indemnisé Y.________ en mai 1999, sous déduction d'un montant de 50'000 fr. que A.________ S.A. a dû verser elle-même au maître de l'ouvrage et qui correspondait à sa franchise.
Par convention du 24 avril 2001, l'assurance a cédé à A.________ S.A. sa créance récursoire à l'encontre de X.________ à concurrence de 5 % des montants payés.
D.
Les 14 juillet 1992, 15 juin 1993, 6 juin 1994, 1er juin 1995, 15 mai 1996, 14 mai 1997, 1er mai 1998, 30 mars 1999, 27 mars 2000 et 28 février 2001, A.________ S.A. a cité X.________ en conciliation devant le Juge de commune de Monthey.
E.
Le 21 mai 2001, A.________ S.A. a ouvert action à l'encontre de X.________ auprès du Juge de district de Monthey en demandant à ce que l'architecte lui paie le montant de 76'584 fr. 95 avec intérêt à 5 % l'an dès le 3 mai 1999.
X.________ a soulevé l'exception de prescription et a invoqué notamment la péremption de l'action en raison de l'absence de l'avis des défauts.
Le Juge de district a transmis la cause au Tribunal cantonal pour jugement préjudiciel sur le fond concernant les questions de prescription et de péremption.
Par jugement du 8 octobre 2003, la Ire Cour civile du Tribunal cantonal valaisan a constaté que l'action en paiement introduite par A.________ S.A. contre X.________ n'était ni prescrite ni périmée à concurrence de 50'000 fr. En revanche, elle a admis que la créance cédée par l'assurance à A.________ S.A. était prescrite.
F.
Contre ce jugement, tant A.________ S.A. (la demanderesse) que X.________ (le défendeur) interjettent un recours en réforme au Tribunal fédéral.
A.________ S.A. conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouveau jugement dans le sens des considérants, avec suite de frais et dépens.
Pour sa part, X.________ requiert la réforme du jugement du 8 octobre 2003 en ce sens que l'action de A.________ S.A. est rejetée; à titre subsidiaire, il demande l'annulation du jugement entrepris, avec suite de frais et dépens.
Invité à se déterminer sur le recours déposé par A.________ S.A., X.________ en propose le rejet, dans la mesure de sa recevabilité. Dans sa réponse, A.________ S.A. conclut préalablement à la jonction des causes et, à titre principal, au rejet du recours interjeté par X.________.
Parallèlement à son recours en réforme, X.________ a formé un recours de droit public, qui a été rejeté dans la mesure de sa recevabilité par arrêt du 23 février 2004.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Les recours émanant des deux parties se rapportent à la même décision et comportent des liens étroits, de sorte qu'il se justifie de les joindre pour des motifs d'économie de procédure et de les traiter dans un seul arrêt (cf. ATF 124 III 382 consid. 1a et les arrêts cités).
2.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours en réforme qui lui sont soumis (ATF 129 III 750 consid. 2).
2.1 Interjetés par les parties qui ont chacune partiellement succombé dans leurs conclusions et dirigés contre un jugement rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ), les présents recours portent sur une contestation civile (cf. ATF 129 III 415 consid. 2.1 et les arrêts cités) dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ).
2.2 Le jugement attaqué ne peut être qualifié de final au sens de l'art. 48 OJ, car il ne met pas fin à l'instance dans son ensemble. Amené à statuer de manière préjudicielle sur l'exception de prescription et la péremption soulevées par le défendeur, le tribunal cantonal a distingué en fonction de l'origine des prétentions invoquées. Il a d'une part admis l'exception de prescription s'agissant de la créance cédée par l'assurance responsabilité civile à la demanderesse. D'autre part, il a constaté que l'action n'était ni prescrite ni périmée à concurrence de 50'000 fr., correspondant à la franchise de l'assurance et au montant de l'indemnité versée par la demanderesse au maître de l'ouvrage.
Devant la Cour de céans, la demanderesse s'en prend seulement au premier volet de ce jugement, alors que le défendeur en critique avant tout le second. Il convient donc d'examiner si chacun de ces deux aspects peuvent être remis en cause dans un recours en réforme.
2.2.1 Dans la mesure où il admet l'exception de prescription du défendeur concernant la créance cédée par l'assurance à la demanderesse, le jugement entrepris revêt un caractère final, car il équivaut au rejet de l'action (ATF 118 II 447 consid. 1b p. 450). Il ne s'agit cependant que d'une décision partielle, puisqu'elle a pour résultat de statuer définitivement, mais seulement sur une partie des prétentions en cause (ATF 129 III 25 consid. 1.1). Selon la jurisprudence, les sentences partielles ne sont pas considérées comme des décisions finales au sens de l'art. 48 OJ, ni comme des décisions préjudicielles ou incidentes visées aux art. 49 s. OJ (cf. ATF 127 I 92 consid. 1b p. 94; 124 III 406 consid. 1a). Elles peuvent faire l'objet d'un recours en réforme au Tribunal fédéral sans attendre la décision finale, si leur objet aurait pu donner lieu à un procès séparé et si la décision revêt un caractère préjudiciel pour les conclusions qui subsistent (ATF 129 III 25 consid. 1.1; 124 III 406 consid. 1a et les références citées). Ces exigences sont remplies en l'espèce, dès lors qu'une action séparée se limitant aux prétentions de la demanderesse qui lui ont été cédées par son assurance responsabilité civile était concevable et que la question soulevée est de nature à influencer le montant que la demanderesse peut réclamer au défendeur sur la base de l'indemnité qu'elle a elle-même versée au maître de l'ouvrage.
2.2.2 La partie du jugement entrepris qui constate que l'action en paiement n'est ni prescrite ni périmée à concurrence de 50'000 fr. ne met pas un terme au litige et constitue une décision préjudicielle au sens de l'art. 50 OJ (ATF 118 II 447 consid. 1a). Pour qu'une telle décision puisse faire l'objet d'un recours en réforme, l'art. 50 al. 1 OJ exige en premier lieu qu'une décision finale puisse être provoquée immédiatement. En d'autres termes, il faut que la solution inverse de celle retenue dans la décision préjudicielle soit finale au sens de l'art. 48 OJ (ATF 129 III 288 consid. 2.3.3; 127 III 433 consid. 1c/aa p. 436). Cette condition est réalisée, dès lors que, s'il avait déclaré l'action périmée ou prescrite en ce qui concerne l'indemnité de 50'000 fr. versée par la demanderesse, le tribunal cantonal aurait mis fin au litige. L'application de l'art. 50 al. 1 OJ suppose, en second lieu, que le recours immédiat au Tribunal fédéral permette d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. En l'espèce, il découle de la décision attaquée que la poursuite de la procédure impliquerait l'établissement de faits de nature technique se rapportant à des événements s'étant déroulés il y a plusieurs années. Elle prendrait ainsi un temps considérable et exigerait des frais importants.
2.2.3 Par conséquent, la voie du recours en réforme est ouverte contre le jugement entrepris, aussi bien en ce qui concerne l'admission de l'exception de prescription de la créance cédée par l'assurance, qui est remise en cause par la demanderesse, qu'en ce qu'il constate que l'action n'est ni prescrite ni périmée pour le montant de 50'000 fr., ce que conteste le défendeur.
2.3 Au surplus, les deux recours en réforme, signés par des mandataires habilités (art. 29 al. 2 let. a OJ), ont été formés en temps utile (art. 32 et 54 al. 1 OJ; art. 1 de la loi fédérale du 21 juin 1963 sur la supputation des délais comprenant un samedi) et dans les formes requises (art. 55 OJ).
Certes, les conclusions de la demanderesse ne tendent qu'au renvoi de la cause à l'autorité cantonale. Elles sont cependant suffisantes au regard de l'art. 55 al. 1 let. b OJ dans la mesure où, s'il admettait le recours en considérant que les prétentions découlant de la créance cédée par l'assurance ne sont ni prescrites ni périmées, le Tribunal fédéral ne serait pas à même de statuer au fond, mais devrait renvoyer la cause à l'instance précédente pour complément d'instruction (cf. ATF 125 III 412 consid. 1b p. 414; 111 II 384 consid. 1 p. 386).
Les deux recours sont donc en principe recevables.
2.4 Le Tribunal fédéral applique le droit d'office, sans être lié par les motifs que les parties invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 128 III 22 consid. 2e/cc in fine; 127 III 248 consid. 2c). Un recours peut donc être admis pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant et il peut également être rejeté sur la base d'une autre argumentation juridique que celle retenue par l'autorité cantonale (ATF 127 III 248 consid. 2c p. 253 et la référence citée).
3.
3.1 La cour cantonale a considéré en substance que les prétentions de la demanderesse reposant sur la cession de créance de son assurance responsabilité civile étaient prescrites, car l'assurance aurait dû agir, en tant que créancière subrogée aux droits de son assurée, dans un délai d'un an à partir du paiement. Comme elle avait indemnisé le maître de l'ouvrage en mai 1999, sa créance était déjà prescrite le 24 avril 2001, au moment où elle l'avait cédée à la demanderesse. Les juges ont en revanche constaté que l'action récursoire dont disposait la demanderesse pour le montant de l'indemnité qu'elle avait elle-même versée au maître de l'ouvrage n'était pas prescrite, dès lors que celle-ci avait cité chaque année le défendeur en conciliation depuis le 14 juillet 1992. Les juges ont ensuite examiné les relations externes entre le maître de l'ouvrage et l'architecte défendeur, en se demandant si la prétention qu'aurait pu faire valoir le maître de l'ouvrage à son encontre n'était pas périmée ou prescrite. Ils ont relevé que le maître et la demanderesse n'avaient appris qu'à la réception du rapport d'expertise de septembre 1996 que les travaux effectués par l'architecte étaient à l'origine des problèmes d'étanchéité. Or, la demanderesse, qui ne pouvait se substituer au maître de l'ouvrage pour procéder à l'avis des défauts, avait, dès juillet 1992, fait citer chaque année le défendeur en conciliation. On ne pouvait donc lui reprocher d'avoir tardé à faire valoir ses droits, de sorte que le défendeur à l'action récursoire ne pouvait se prévaloir des motifs d'extinction de la créance initiale.
3.2 Dans son recours, la demanderesse s'en prend au raisonnement du tribunal cantonal l'ayant conduit à admettre la prescription de la créance cédée par son assurance responsabilité civile, alors que le défendeur critique avant tout le refus de reconnaître que l'action récursoire portant sur les 50'000 fr. versés par la demanderesse au maître de l'ouvrage était prescrite ou périmée. A ce propos, il soutient que, comme sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage n'était pas engagée en raison de l'absence de l'avis des défauts, la demanderesse ne pouvait disposer d'une créance récursoire à son encontre. Ce faisant, il soulève une question fondamentale portant sur les relations entre l'action en responsabilité de la victime envers le coresponsable et les prétentions du demandeur à l'action récursoire. Il convient donc de traiter cet aspect en premier lieu, en se demandant tout d'abord si, comme le soutient le défendeur, l'action du maître de l'ouvrage à son encontre était périmée et, le cas échéant, quelles en sont les conséquences sur les prétentions formulées par la demanderesse.
4.
4.1 Selon la jurisprudence, l'établissement à titre indépendant de plans est régi par les dispositions sur le contrat d'entreprise (ATF 114 II 53 consid. 2b p. 56; 109 II 462 consid. 3a-d). Comme les défauts reprochés au défendeur se rapportent exclusivement aux plans qu'il a élaborés, les articles 367 ss CO concernant la garantie des défauts sont applicables (Gauch, Le contrat d'entreprise, adaptation française Carron, Zurich 1999, no 2738; Nigg, Die Haftung mehrerer für einen Baumangel, in Haftung für Werkmängel, St-Gall 1998, p. 121 ss, 128).
4.2 Lorsque le défaut résulte d'un plan, la garantie de l'architecte qui l'a établi se prescrit en principe, selon l'art. 371 al. 1 CO qui renvoie à l'art. 210 al. 1 CO, par une année à compter de la livraison. Si le plan entraîne un défaut de la construction immobilière, qui apparaît comme un dommage consécutif au plan défectueux (Fellmann, Die Haftung des Architekten und des Ingenieurs für Werkmangel, in Haftung für Werkmängel, St-Gall 1998, p. 77 ss, 109; Nigg, op. cit., p. 128), il faut alors considérer que, sous réserve du cas non réalisé en l'espèce où le défaut a été intentionnellement dissimulé, la créance en garantie est soumise au délai de prescription de 5 ans de l'art. 371 al. 2 CO (Gauch, op. cit., no 2309 s.; Schumacher, Die Haftung des Architekten aus Vertrag, in Le droit de l'architecte, 3e éd. Fribourg 1995, no 667; Fellmann, op. cit., p. 113; Tschütscher, Die Verjährung der Mängelrechte bei unbeweglichen Bauwerken, thèse St-Gall 1996, p. 151). En principe, ce délai commence à courir au moment de la livraison de la partie de la construction immobilière concernée par le plan défectueux (Fellmann, op. cit., p. 118; Schumacher, op. cit., no 649). Toutefois, le dies a quo de ce délai peut être modifié, notamment lorsqu'en vertu de l'art 377 CO, le maître résilie le contrat de manière anticipée. Les relations contractuelles entre les parties prennent alors fin ex nunc (ATF 129 III 738 consid. 7.3; 117 II 273 consid. 4a). Dans cette hypothèse, l'ouvrage inachevé doit être assimilé à un ouvrage complet (cf. ATF 116 II 450 consid. 2a/aa et 2b/aa), notamment en ce qui concerne les droits découlant de la garantie (Chaix, Commentaire romand, n. 11 ad art. 377 CO; Zindel/Pulver, Commentaire bâlois, n.14 ad art. 377 CO; Gauch, op. cit., no 2434; Tercier, L'extinction prématurée du contrat, in Le droit de l'architecte, 2e éd. Fribourg 1995, p. 385). Par conséquent, le délai de prescription de l'art. 371 al. 2 CO commence à courir dès le moment de l'entrée en vigueur de la résiliation ou dès le transfert matériel de l'ouvrage inachevé au maître (Gauch, op. cit., no 2434 p. 669).
Sous l'angle de la prescription, il importe peu que le maître de l'ouvrage n'ait pas connaissance du défaut (ATF 89 II 405 consid. 2a), de sorte qu'il peut arriver que les droits de garantie du maître soient prescrits avant même que celui-ci ne découvre le défaut (Bühler, Commentaire zurichois, art. 371 CO no 29 p. 323; Zindel-Pulver, op. cit., art. 371 CO no 12 et 15; Gauch, op. cit., no 2254). Cette conséquence est certes critiquée par certains auteurs, en particulier lorsque le défaut n'apparaît qu'à la suite de l'existence d'un autre défaut. Ceux-ci souhaiteraient y remédier en appliquant l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO, selon lequel la prescription ne court point et, si elle avait commencé à courir, elle est suspendue tant qu'il est impossible de faire valoir la créance devant un tribunal suisse (Gauch, op. cit., no 2259; Zindel/Pulver, op. cit., art. 371 CO no 15). Une telle solution ne peut cependant être suivie, car, comme l'a déjà souligné le Tribunal fédéral, elle ne correspond pas à la volonté du législateur (cf. ATF 106 II 134 consid. 2c p. 138 s.) qui, à l'art. 371 al. 1 CO, a expressément renvoyé aux règles régissant la prescription des droits de l'acheteur. Or, l'art. 210 al. 1 CO prévoit que l'action en garantie pour les défauts de la chose vendue se prescrit par un an dès la livraison faite à l'acheteur, même si ce dernier n'a découvert les défauts que plus tard (en ce sens, Bühler, op. cit., art. 371 CO no 29; Chaix, op. cit., art. 371 CO no 16; Tschütscher, op. cit., p. 82 ss).
4.3 Lorsque des défauts se révèlent ultérieurement, le maître peut faire valoir ses droits de garantie (art. 368 CO), à condition qu'il ait signalé les défauts de l'ouvrage aussitôt qu'il en a eu connaissance. Cet avis n'a toutefois de sens que si le délai de prescription de l'art. 371 CO n'est pas déjà atteint au moment où le maître apprend l'existence du défaut. En effet, il y a lieu de suivre la doctrine dominante qui, renvoyant à la jurisprudence concernant les règles applicables à l'acheteur (cf. ATF 104 II 357 consid. 4a), auxquelles l'art. 371 al. 1 CO se réfère, retient que les droits de garantie pour les défauts qui n'ont pas été signalés avant l'échéance du délai de prescription sont périmés (Bühler, op. cit., art. 371 CO no 9; Pally, Mangelfolgeschaden im Werkvertragsrecht, thèse St-Gall 1995, p 30 s.; Gauch, op. cit., no 2295; Zindel/Pulver, Commentaire bâlois, art. 371 CO no 37; Tschütscher, op. cit., p. 163 s.).
4.4 Selon le jugement entrepris, le maître de l'ouvrage a décidé en 1985 de construire un bâtiment et a confié l'élaboration du projet et des plans au défendeur. A la suite d'une divergence concernant les honoraires, le maître a mis fin au contrat le liant à cet architecte à la mi-août 1986 et, le 14 août 1986, le contrat a été repris par un tiers. En mars 1987, des venues d'eau dans les fondations de l'immeuble se sont révélées. Le 22 mai 1992, le maître de l'ouvrage a ouvert une action à l'encontre de la demanderesse et celle-ci, après avoir pris des conclusions récursoires à l'encontre de l'entreprise chargée d'effectuer les fondations et de son sous-traitant, a appelé ceux-ci en garantie. A partir du 14 juillet 1992, la demanderesse a fait citer chaque année le défendeur en conciliation. Il a également été constaté, d'une manière considérée comme non arbitraire par la Cour de céans dans le cadre du recours de droit public interjeté parallèlement par le défendeur (arrêt 4P.238/2003 du 23 février 2004 consid. 3), que ce n'est qu'à la suite de l'expertise judiciaire réalisée en septembre 1996 que le maître de l'ouvrage et la demanderesse ont eu connaissance du fait que les plans établis par le défendeur étaient défectueux et que celui-ci avait contribué à la survenance des problèmes d'étanchéité constatés dans les fondations en 1987.
Il découle de ces éléments de fait, qui lient le Tribunal fédéral en instance de réforme (cf. art. 63 al. 2 OJ), que le maître a mis fin prématurément aux relations contractuelles le liant au défendeur à la mi-août 1986. Même si la date précise de la résiliation ou de la livraison de l'ouvrage inachevé ne ressort pas du jugement entrepris, il apparaît qu'en tous les cas ces événements ont dû intervenir avant le 14 août 1986, jour de la reprise du contrat du défendeur par l'administrateur de E.________ S.A. Par conséquent, le délai de prescription quinquennal de l'art. 371 al. 2 CO est arrivé à expiration le 13 août 1991 au plus tard (art. 132 CO qui renvoie à l'art. 77 al. 1 ch. 3 CO). L'action du maître de l'ouvrage envers le défendeur était ainsi déjà prescrite depuis longtemps lorsque les défauts entachant les plans ont été révélés aux intéressés dans le rapport d'expertise de septembre 1996. Le délai était du reste aussi atteint lorsque la demanderesse a fait citer pour la première fois l'architecte en conciliation, le 14 mai 1992, de sorte qu'il n'y a pas lieu de se demander si cet acte aurait pu avoir pour effet d'interrompre la prescription.
Cet enchaînement des événements révèle également que le maître de l'ouvrage était dans l'impossibilité de donner un avis des défauts à l'architecte avant l'expiration du délai de prescription, puisqu'en 1991 il ignorait que les plans étaient défectueux. Or, en l'absence d'un avis des défauts durant le délai de prescription, l'action du maître envers le défendeur était non seulement prescrite, mais également périmée (cf. supra consid. 4.3).
Le tribunal cantonal ne peut donc être suivi lorsqu'il relève que la créance du maître de l'ouvrage envers l'architecte n'était ni prescrite ni périmée au moment où ce dernier a été cité en conciliation à l'initiative de la demanderesse le 14 juillet 1992.
5.
Le Tribunal fédéral n'étant pas lié par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale (cf. supra consid. 2.4), il convient encore de se demander si la connaissance des défauts imputables au défendeur, alors que le délai de prescription de l'art. 371 CO était déjà expiré, est de nature à influencer les prétentions invoquées en justice par la demanderesse.
5.1 Lors de cet examen, il n'y a pas lieu de distinguer selon que la demanderesse fait valoir les droits que lui a cédés son assurance responsabilité civile ou ses droits propres, résultant du montant de 50'000 fr. qu'elle a elle-même versé au maître de l'ouvrage. En effet, comme l'a relevé pertinemment le tribunal cantonal, après avoir indemnisé le maître de l'ouvrage, l'assurance a été subrogée non pas aux droits du lésé, mais à ceux de son assurée, en vertu de l'art. 72 LCA (RS 221.229.1) appliqué par analogie (ATF 116 II 645 consid. 2; Graber, Commentaire bâlois, art. 72 LCA no 12; Brehm, Le contrat d'assurance RC, nouvelle édition Bâle 1997, p. 250 s; Deschenaux/Tercier, La responsabilité civile, Berne 1982, § 37 ch. 44). La subrogation de l'assurance porte ainsi sur les mêmes droits que ceux que l'assuré responsable aurait pu faire valoir contre d'éventuels coresponsables (ATF 116 II 645 consid. 2). Les prétentions cédées par l'assurance et celles que la demanderesse fait valoir directement se confondent donc.
5.2 Lorsque l'exécution défectueuse d'une construction est imputable à plusieurs responsables, ceux-ci répondent du dommage envers le maître en vertu des règles de la solidarité imparfaite (art. 51 CO par analogie; ATF 119 II 127 consid. 4b p. 131 et les références citées). L'art. 51 CO ne traite que des rapports internes, soit des rapports entre coresponsables, par opposition aux rapports externes concernant le lésé et les différents responsables. Cette disposition institue un recours fondé ex jure proprio, c'est-à-dire qui naît dans la personne de celui qui paie l'indemnité (arrêt du Tribunal fédéral non publié 4C.27/2003 du 26 mai 2003 consid. 3.4; Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd. Berne 1997, p. 568). Ainsi, la solidarité imparfaite n'entraîne pas de subrogation du responsable dans les droits du créancier au sens de l'art. 149 al. 1 CO (Nigg, op. cit., p. 137), mais seulement une action récursoire (Ausgleichsanspruch) de celui-ci contre les autres codébiteurs, qui prend naissance au moment du paiement au lésé (ATF 127 III 257 consid. 6c p. 266; 115 II 42 consid. 2a).
Ce droit de recours distinct est toutefois subordonné à la condition qu'un autre coresponsable existe. En l'absence de responsabilité plurale, il ne saurait y avoir d'action récursoire (Schenker, Der Architekt (Ingenieur) als Hilfsperson des Bauherrn im Verhältnis zum Unternehmer, in Recht der Architekten und Ingenieure, St-Gall 2002, p. 13 ss, 30; Oftinger/Stark, Schweizerisches Haftpflichtrecht, vol. I, 5e éd. Zurich 1995, p. 515; Bugnon, L'action récursoire en matière de concours de responsabilités civiles, thèse Fribourg 1982, p. 38). En effet, la raison même de cette action repose sur l'existence de la solidarité. Or, la solidarité implique une responsabilité préalable: celui qui ne répond pas d'un dommage, ne saurait en répondre solidairement (Nigg, op. cit., p. 130; cf. Brehm, Commentaire bernois, art. 50 CO no 33).
Dans la présente cause, il a été démontré que les défauts dans les plans imputables au défendeur n'avaient été révélés qu'en septembre 1996, soit à un moment où les éventuels droits du maître à l'encontre de l'architecte étaient déjà périmés. Par conséquent, en vertu du système voulu par le législateur suisse en ce qui concerne la garantie des défauts dans le contrat d'entreprise, la responsabilité du défendeur à l'égard du maître n'a jamais pu être engagée, indépendamment de la volonté ou d'une quelconque omission de ce dernier (cf. supra consid. 4.2 et 4.3). En pareilles circonstances, on ne saurait accorder à la demanderesse la possibilité de disposer d'une action récursoire découlant de la solidarité imparfaite pour rechercher une personne qui ne pouvait en aucune façon être tenue pour responsable à l'égard du lésé.
5.3 Ce cas de figure se distingue des situations plus délicates dans lesquelles les conditions permettant d'engager la responsabilité du défendeur à l'action récursoire envers la victime auraient pu être réalisées à un moment donné, mais ne le sont plus lorsque la prétention récursoire prend naissance (cf. Schenker, op. cit., p. 30). Il en va notamment ainsi lorsque les prétentions du lésé envers le coresponsable sont atteintes par la prescription (cf. à ce sujet ATF 127 III 257 consid. 6a in fine et 6c; pour la doctrine, notamment: Werro, Commentaire romand, art. 50 CO no 10 ss et 51 CO no 33 ss; Spiro, Die Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-, Verwirkungs- und Fatalfristen, vol. I, Berne 1975, p. 487 ss; Bugnon, op. cit., p. 149 s.; Corboz, La distinction entre solidarité parfaite et solidarité imparfaite, thèse Genève 1974, p. 66) ou, dans l'hypothèse d'un contrat d'entreprise, lorsque le maître de l'ouvrage a renoncé à procéder à l'avis des défauts ou y a procédé tardivement, alors que celui-ci pouvait être donné avant l'expiration du délai de prescription de l'art. 371 CO (cf. Gauch, op. cit., no 2752 ss). On peut encore évoquer le cas où le lésé a remis la dette du coresponsable (cf. ATF 107 II 226, confirmé in arrêt du 26 mai 2003 précité, consid. 3.5.2) ou a conclu avec celui-ci une convention exclusive de responsabilité (Bugnon, op. cit., p. 45 ss). Il n'y a cependant pas lieu d'examiner dans quelle mesure une action récursoire peut être exercée dans ces cas de figure, car, contrairement aux exemples qui viennent d'être décrits, la présente cause se caractérise par le fait que la responsabilité du défendeur à l'égard du maître de l'ouvrage n'a matériellement jamais pu être engagée.
5.4 Il en découle que, faute de coresponsable, la demanderesse ne peut introduire d'action récursoire à l'encontre du défendeur, que ses droits découlent de la cession de créance de son assurance responsabilité civile ou du montant qu'elle a versé directement au lésé (cf. supra consid. 5.1). Les prétentions invoquées en justice par la demanderesse doivent donc être rejetées dans leur intégralité.
Dès lors que les motifs permettant d'aboutir à cette conclusion ne correspondent pas au raisonnement juridique adopté par le tribunal cantonal, il n'y a pas lieu d'entrer plus avant sur les griefs des parties se référant aux considérants en droit du jugement entrepris (cf. supra consid. 2.4).
6.
Compte tenu des conclusions formulées, le recours du défendeur doit être admis, alors que celui de la demanderesse doit être rejeté.
Quant à la décision attaquée, elle sera partiellement réformée dans la mesure où elle constate que l'action en paiement n'était ni prescrite ni périmée à concurrence de 50'000 fr. et il sera indiqué que cette action doit être entièrement rejetée.
7.
Eu égard à l'issue du litige, la demanderesse sera condamnée aux frais et dépens relatifs aux deux recours (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
L'affaire sera par ailleurs renvoyée au tribunal cantonal pour qu'il se prononce à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale (cf. art. 157 et 159 al. 6 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours du défendeur est admis.
2.
Le recours de la demanderesse est rejeté.
3.
Le jugement attaqué est partiellement réformé en ce sens que l'action en paiement introduite par la demanderesse à l'encontre du défendeur est entièrement rejetée.
4.
Un émolument judiciaire de 4'500 fr. est mis à la charge de la demanderesse.
5.
La demanderesse versera au défendeur une indemnité de 6'500 fr. à titre de dépens.
6.
La cause est renvoyée à l'autorité inférieure pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
7.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Ire Cour civile du Tribunal cantonal valaisan.
Lausanne, le 23 février 2004
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: