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Original
 
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4P.285/2001 /viz
Arrêt du 29 août 2002
Ire Cour civile
Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Corboz et Favre,
greffière Godat Zimmermann.
Fondation de l'Ecole X.________,
recourante, représentée par Me Teresa Giovannini, avocate, Lalive & Associés, rue de l'Athénée 6, case postale 393, 1211Genève 12,
contre
A.________,
représentée par Me François Bellanger, avocat, Bonnant Warluzel & Associés, rue de Saint-Victor 12, case postale 473, 1211 Genève 12,
Caisse de chômage Y.________
intimées,
Cour d'appel des prud'hommes du canton de Genève, rue des Chaudronniers 7, case postale 3688, 1211 Genève 3.
arbitraire; revision
(recours de droit public contre les arrêts de la Cour d'appel des prud'hommes du canton de Genève du 17 mars 1999 et du 8 octobre 2001)
Faits:
A.
En 1964, Fondation de l'Ecole X.________ (ci-après: la Fondation ou l'Ecole) a engagé A.________, née en 1941, en qualité de secrétaire. La Fondation a édicté un règlement concernant le personnel administratif. Selon l'art. 7 ch. 5 de ce règlement, l'employé peut, après huit ans et sur sa demande, être titularisé dans sa fonction pour une durée indéterminée qui prend fin, sous réserve de l'application de l'art. 8, à l'âge limite fixé par la Caisse de prévoyance et de retraite de l'Ecole. L'art. 8 ch. 2 stipule que les contrats conclus conformément à l'art. 7 peuvent être résiliés pour les raisons suivantes:
a) événement échappant au contrôle de l'Ecole et entraînant soit sa fermeture totale ou partielle, soit une réduction sensible du nombre des élèves;
b) suppression de l'emploi résultant d'une modification des programmes;
c) inaptitude survenant au cours du contrat ou travail devenant insuffisant;
d) révocation disciplinaire (des infractions répétées peuvent constituer un motif de révocation disciplinaire ainsi qu'une conduite contraire aux dispositions préliminaires du règlement);
e) délits ou fautes graves ou justes motifs;
f) absence de plus de douze mois consécutifs sans l'accord préalable du conseil de direction.
La titularisation procure une garantie d'emploi, mais non un poste déterminé; un employé titularisé peut ainsi être muté à un autre poste.
A.________ a toujours accompli son travail à l'entière satisfaction de son employeur. Par lettre du 2 février 1971, B.________, alors directeur général, a annoncé à sa collaboratrice qu'elle serait titularisée dans ses fonctions de secrétaire de la direction générale.
Le 1er septembre 1988, A.________ et la Fondation, représentée par son directeur général C.________, ont signé un contrat de travail. L'employée a été engagée en qualité d'attachée de direction. Son salaire annuel brut de 84'000 fr. hors échelle devait faire l'objet d'une nouvelle négociation à la fin de chaque année scolaire. Le contrat était conclu pour cinq ans, soit jusqu'à fin août 1993; à son expiration, il devait être renouvelé pour une durée indéterminée. Le règlement concernant le personnel administratif en faisait partie intégrante. En application d'un avenant en vigueur depuis le 1er septembre 1990, le salaire brut de A.________ a été fixé à 108'420 fr. pour l'année scolaire 1990-1991.
Les relations étaient tendues entre le conseil de fondation et la direction générale. En janvier 1991, C.________ a appris que son contrat ne serait pas renouvelé. Par ailleurs, certaines personnes souhaitaient le départ de A.________, qui savait trop de choses et incarnait la continuité. Sur instructions de D.________, président du conseil de fondation, C.________ a, par lettre du 27 mai 1991, résilié le contrat de A.________ pour le 31 août 1991. Il lui a indiqué qu'une indemnité pour longs rapports de travail, correspondant à huit mois de salaire, lui serait versée, ajoutant qu'il n'était pas opportun qu'elle continuât à occuper son poste. Le 14 juin 1991, A.________ a accepté l'indemnité de départ de 73'333 fr. et réservé ses droits dans l'hypothèse où elle n'obtiendrait pas l'emploi qu'elle avait en vue pour septembre 1991. Le poste en question n'ayant pas été opérationnel, A.________ en a informé la Fondation le 24 juillet 1991 et l'a invitée à continuer de lui verser son salaire en septembre. Le 10 septembre 1991, la Fondation a constaté que les accords relatifs à la fin du contrat au 31 août 1991 étaient remis en cause et a annoncé à A.________ qu'elle lui verserait son salaire jusqu'en août 1993 pour autant qu'elle n'exerçât aucune activité lucrative durant ce laps de temps; une indemnité pour longs rapports de travail serait également versée à A.________ en août 1993 ou au moment de la fin de ceux-ci si l'intéressée trouvait un emploi dans l'intervalle. Dans un courrier du 30 septembre 1991, A.________ constatait l'existence d'un accord sur une indemnité correspondant à huit mois de salaire et faisait état de la cessation des rapports contractuels en août 1993. Par la suite, les parties ont poursuivi leur échange de correspondance; celui-ci portait notamment sur l'augmentation de salaire réclamée par A.________, qui se référait à la hausse générale décidée par le conseil de fondation. Par lettre du 2 juillet 1993, l'avocat qui défendait alors les intérêts de A.________ a fait savoir à la Fondation que le contrat de travail était à tout le moins renouvelé jusqu'au 31 août 1998; il a relevé que sa cliente avait été titularisée par décision du 2 février 1971 et qu'aucune résiliation n'était dès lors possible en dehors des exceptions prévues par l'art. 8 du règlement concernant le personnel administratif. La Fondation a campé sur ses positions.
A.________ a été au chômage de septembre 1993 à avril 1995. Souffrant ensuite d'une dépression, elle s'est retrouvée en incapacité de travail totale jusqu'à la fin 1998, puis partielle. Dès octobre 1999, elle a cherché en vain un emploi.
B.
B.a Le 2 octobre 1993, A.________ a ouvert action contre la Fondation afin de faire constater judiciairement qu'elle était au bénéfice d'un contrat de travail de durée indéterminée en tant que membre du personnel administratif titularisé et qu'aucune résiliation valable dudit contrat n'était intervenue à ce jour. Elle demandait qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle persistait à offrir ses services à la défenderesse. La demanderesse concluait, en outre, à la condamnation de la Fondation au paiement de 6'798 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er mars 1993 à titre d'augmentation salariale du 1er septembre 1992 au 31 août 1993, de 10'297 fr.15 avec intérêts à 5% dès le 30 septembre 1993 à titre de salaire pour le mois de septembre 1993 et d'un montant complémentaire de 10'297 fr.15 par mois dès octobre 1993, avec intérêts à 5% dès le dernier jour du mois, et ce, jusqu'à la date du jugement. Enfin, elle concluait à ce qu'il soit dit qu'elle aurait droit au versement de son salaire jusqu'à l'âge limite fixé par la Caisse de prévoyance et de retraite de la Fondation, sous réserve d'une résiliation selon l'art. 8 du règlement concernant le personnel administratif. La défenderesse s'est opposée aux prétentions de la demanderesse. Reconventionnellement, elle a conclu à ce qu'il soit constaté que l'employée avait décidé, en avril 1991, de quitter son emploi le 31 août 1991, qu'un accord des parties était intervenu quant à la résiliation des rapports de travail pour cette date et qu'elle-même avait continué à verser le salaire parce que la demanderesse s'était engagée formellement à chercher un emploi. La défenderesse entendait également faire constater que la demanderesse n'avait pas respecté cet engagement et obtenir la condamnation de cette dernière au paiement de 192'025 fr. à titre de remboursement du salaire perçu sans droit du 1er septembre 1991 au 31 août 1993, l'indemnité de départ de 73'613 fr. 20 convenue en mai 1991 devant être imputée sur ce montant. Elle invitait enfin le juge à constater que la question de l'indexation du salaire à partir du 1er septembre 1991 ne se posait pas. Subsidiairement, la défenderesse concluait encore à ce que soient constatées la résiliation du contrat de travail par la Fondation, le 27 mai 1991, l'absence de reprise des relations de travail et la non-reconduction du contrat à son échéance du 31 août 1993, une prétention à une reconduction constituant un abus de droit.
La Caisse de chômage Y.________ est intervenue dans la procédure.
Par jugement du 12 avril 1994, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a constaté que le contrat de travail avait été valablement résilié le 27 mai 1991 pour le 31 août 1993, que les parties étaient libérées, dès le 1er septembre 1993, de toutes obligations en paiement ou restitution du salaire en relation avec le contrat de travail du 1er septembre 1988 et que la défenderesse était fondée à refuser l'indexation du salaire. En conséquence, il a débouté les parties de toutes autres conclusions.
Statuant le 11 décembre 1995, sur appel principal de la demanderesse et appel incident de la défenderesse, la Chambre d'appel des prud'hommes du canton de Genève a rejeté, dans la mesure où elles étaient recevables, les conclusions prises devant elle et confirmé le jugement de première instance. La cour cantonale a considéré en particulier que A.________ devait supporter les conséquences de l'absence d'une preuve suffisante de sa titularisation.
Par arrêt du 2 avril 1997, la cour de céans a rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours de droit public déposé par A.________ contre l'arrêt de la Chambre d'appel. A la même date, l'employée a également vu son recours en réforme rejeté dans la mesure où il était recevable, le Tribunal fédéral confirmant l'arrêt attaqué.
B.b Par pli du 21 juillet 1997 reçu trois jours plus tard, C.________ a adressé à A.________ la copie d'une lettre manuscrite qu'il avait envoyée à D.________ le 27 juin 1991 et qui contient le passage suivant:
«Tu sais que c'est à votre demande (toi et le comité exécutif) que j'ai licencié A.________ sous le prétexte de faire "place nette" pour le prochain D.G. [directeur général] et sous la pression des doyens anglophones, soucieux de se débarrasser de la "mémoire de l'école". Je lui ai dit que c'était à prendre ou à laisser et qu'elle ferait mieux d'accepter l'indemnité proposée. Néanmoins suite à une récente discussion avec elle je pressens que cela ne va pas aller tout seul et que des problèmes vont certainement surgir.
Je te rappelle qu'elle est l'une des rares personnes de l'administration à être titularisée, et qu'à ce titre nous lui devons un emploi jusqu'à l'âge de la retraite (!!) même si nous feignons toujours d'ignorer les statuts et le règlement du personnel qui sont pourtant bel et bien en vigueur.»
Se prévalant de deux pièces nouvelles, dont la lettre retranscrite ci-dessus, A.________ a présenté au Tribunal fédéral, le 16 septembre 1997, une demande de révision de l'arrêt rendu le 2 avril 1997 sur recours en réforme. Sur le rescisoire, ses conclusions étaient les suivantes:
- dire qu'elle a été titularisée par la Fondation le 1er septembre 1972;
- dire que la Fondation doit lui garantir un emploi jusqu'à l'âge limite fixé par la Caisse de prévoyance;
- dire que le contrat de travail du 1er septembre 1988 n'a pas été valablement résilié et qu'il s'est renouvelé pour une durée indéterminée;
- condamner la Fondation à lui payer le salaire correspondant à la période du 1er septembre 1993 à la date du jugement, calculé sur la base du salaire annuel brut fixé 108'420 fr. par l'avenant au contrat du 1er septembre 1990, adapté à l'augmentation salariale de 4,5% accordée en septembre 1991, allocation d'ancienneté y compris, soit 115'303 fr.80, ainsi qu'une contribution à l'assurance-maladie et au fonds de prévoyance, avec intérêts à 5% dès le 30 septembre 1993;
- dire et constater qu'elle aura droit au versement de son salaire de la part de la Fondation jusqu'à l'âge limite fixé par la Caisse de prévoyance et de retraite de la Fondation, sous réserve d'une résiliation selon l'art. 8 du règlement concernant le personnel administratif.
Le 20 novembre 1997, la demande d'assistance judiciaire déposée par la requérante a été rejetée, faute de chances de succès de la demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral. Par lettre de son conseil datée du 8 janvier 1998, la requérante, qui a payé l'avance de frais par la suite, a demandé au Tribunal fédéral de transmettre son mémoire à l'autorité cantonale de dernière instance au cas où il déclarerait sa demande de révision irrecevable. Par arrêt du 7 avril 1998, la cour de céans a effectivement déclaré la demande de révision irrecevable. Elle a considéré que la révision demandée par A.________ concernait le grief portant sur la validité de la résiliation du contrat de travail; or, ce moyen ayant été déclaré irrecevable à l'époque, l'arrêt du Tribunal fédéral du 2 avril 1997 ne s'était pas substitué, sur ce point, à l'arrêt cantonal du 11 décembre 1995 et ne pouvait, contrairement à ce dernier, être sujet à révision en raison des preuves nouvelles alléguées. Au surplus, le Tribunal fédéral a estimé que, dans ces conditions, rien ne s'opposait à donner une suite favorable à la requête tendant à la transmission de la demande de révision à l'autorité cantonale de dernière instance.
Par arrêt sur rescindant du 17 mars 1999, la Chambre d'appel des prud'hommes du canton de Genève a reçu la demande en revision, rétracté les dispositions au fond de son arrêt du 11 décembre 1995 et ordonné un échange d'écritures sur rescisoire.
Le 30 juin 1999, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevables le recours de droit public et le recours en réforme interjetés par la Fondation contre l'arrêt sur rescindant.
L'autorité cantonale, qui s'intitule désormais Cour d'appel des prud'hommes, a rendu son arrêt sur rescisoire le 8 octobre 2001. Dans le dispositif de sa décision, elle a:
- constaté que A.________ est au bénéfice d'un contrat de travail de durée indéterminée auprès de la Fondation, en tant que membre du personnel administratif titularisé;
- donné acte à A.________ de ce qu'elle persiste à offrir ses services à la Fondation;
- condamné la Fondation à verser à A.________ la somme brute de 914'681 fr.10 avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 1997 à titre de salaires pour la période écoulée de septembre 1993 à juin 2001 sous déduction de la somme nette de 99'836 fr.20;
- condamné la Fondation à payer à la Caisse de chômage Y.________ la somme nette de 99'836 fr.20;
- constaté que A.________ a droit au versement de son salaire de la part de la Fondation jusqu'à l'âge limite fixé par la Caisse de prévoyance et de retraite de la Fondation, sous réserve d'une résiliation selon l'art. 8 du règlement concernant le personnel administratif;
- invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles.
C.
La Fondation interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt sur rescindant et de l'arrêt sur rescisoire.
Parallèlement, la Fondation a déposé une demande en revision cantonale, ainsi qu'un recours en réforme au Tribunal fédéral. Par ordonnance du 7 mars 2002, le Président de la cour de céans a suspendu les procédures fédérales jusqu'à droit connu sur la revision cantonale. Par arrêt du 30 avril 2002, la Cour d'appel des prud'hommes a débouté la Fondation de sa demande en revision dans la mesure où celle-ci était recevable. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.
A.________ propose de déclarer le recours de droit public irrecevable, subsidiairement mal fondé.
La Caisse de chômage Y.________ n' a pas pris de conclusions.
Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux arrêts qu'elle a rendus.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Les griefs soulevés par la recourante concernent tous l'arrêt sur rescindant, qui est une décision incidente (ATF 87 I 371 consid. 2). Conformément à l'art. 87 al. 3 OJ, le recours de droit public permet d'attaquer une telle décision avec la décision finale, soit, en l'occurrence, l'arrêt sur rescisoire.
2.
La phase du rescindant constituant la condition préalable à la phase du rescisoire, il n'y a pas lieu de déroger en l'espèce à l'ordre de priorité prescrit par l'art. 57 al. 5 OJ. Le recours de droit public sera donc traité avant le recours en réforme.
3.
Invoquant l'art. 9 Cst. prohibant l'arbitraire, la recourante est d'avis que l'arrêt sur rescindant est manifestement insoutenable en tant qu'il consacre plusieurs violations graves de règles claires et strictes en matière de recevabilité du recours en revision.
Une décision est arbitraire si elle est manifestement insoutenable, si elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou si elle contredit de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 126 I 168 consid. 3b p. 170; 125 I 166 consid. 2a p. 168). Par ailleurs, il ne suffit pas que la motivation critiquée soit insoutenable; encore faut-il que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56; 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166 consid. 2a; 125 II 10 consid. 3a p. 15, 129 consid. 5b p. 134; 124 I 247 consid. 5 p. 250; 124 V 137 consid. 2b). Arbitraire et violation de la loi ne sauraient être confondus; une violation doit être manifeste et reconnue d'emblée pour être considérée comme arbitraire. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également concevable, voire même préférable (ATF 127 I 60 consid. 5a p. 70; 124 I 247 consid. 5 p. 250/251; 123 I 1 consid. 4a p. 5; 122 III 130 consid. 2a; 121 I 113 consid. 3a).
4.
4.1 Selon la recourante, la Chambre d'appel a violé de manière flagrante l'art. 163 de la loi de procédure civile genevoise (ci-après: LPC/GE), qui institue un délai de deux mois dès la découverte de la pièce nouvelle pour se pourvoir en revision. D'une part, elle ne pouvait entrer en matière sur une demande en revision d'une décision qu'elle n'avait pas rendue, car le recours en revision ne serait recevable que s'il est formé devant l'autorité compétente. D'autre part, l'intimée aurait demandé la revision de l'arrêt cantonal pour la première fois le 5 juin 1998, soit bien plus de deux mois après avoir pris connaissance de la lettre de C.________ à D.________; la transmission du Tribunal fédéral demeurerait sans portée à cet égard. Par ailleurs, l'application par analogie de l'art. 448 LPC/GE serait insoutenable en l'occurrence. Il s'agirait là d'une règle spécifique aux juridictions des baux et loyers. Au surplus, cette disposition ne s'appliquerait qu'à la transmission d'un acte mal adressé, et non à la transformation d'un recours dirigé contre un arrêt fédéral en un recours formé contre un arrêt cantonal.
4.2 La demande de révision du 16 septembre 1997 était dirigée contre l'arrêt du Tribunal fédéral; or, cette autorité est compétente pour se prononcer sur la révision de ses propres arrêts (cf. art. 136 ss OJ). En remettant son mémoire au Tribunal fédéral, l'intimée n'a donc pas commis une simple erreur d'adresse, comme cela aurait été le cas, par exemple, si elle avait sollicité expressément et exclusivement la révision de l'arrêt cantonal. La cour de céans a dès lors rendu un arrêt en bonne et due forme, dans lequel elle a refusé d'entrer en matière sur la demande; en effet, les nouvelles pièces invoquées avaient trait à la validité de la résiliation du contrat de travail et le grief en rapport avec cette question avait été déclaré irrecevable dans l'arrêt du 2 avril 1997 de sorte que, sur ce point, l'arrêt cantonal était demeuré en force. Sur requête, le Tribunal fédéral a transmis la demande de révision à la Chambre d'appel des prud'hommes.
Cette autorité devait alors examiner, sur la base du droit cantonal, si elle pouvait traiter le mémoire transmis comme une demande en revision de son propre arrêt; en d'autres termes, il lui appartenait de déterminer si cet acte pouvait être converti. La cour cantonale n'a pas procédé de cette manière, mais elle est arrivée à la conclusion que le dépôt de la demande de révision au Tribunal fédéral avait emporté simultanément la saisine de la juridiction prud'homale. Ce faisant, elle a admis implicitement la conversion de cet acte en une demande en revision contre son arrêt du 11 décembre 1995. Une telle interprétation est-elle arbitraire? Invoquant l'art. 163 LPC/GE, la recourante soutient que cette dispo- sition exige le dépôt de la demande en revision devant l'autorité compétente. En réalité, c'est l'art. 166 al. 2 LPC/GE, non cité dans le recours, qui prévoit que la demande en revision est portée devant le tribunal qui a rendu le jugement. On ne voit toutefois pas en quoi l'interprétation retenue implicitement par la cour cantonale violerait manifestement cette norme. En effet, c'est bien la Chambre d'appel qui se trouve finalement saisie, après transmission par le Tribunal fédéral, d'une demande en revision qui concernait en réalité l'arrêt cantonal.
Au surplus, s'il peut paraître audacieux de considérer que la demande de révision adressée au Tribunal fédéral s'en prenait également à la décision cantonale précédente, une telle conversion n'apparaît pas contraire à un principe juridique clair et ne contredit pas de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le résultat auquel la Chambre d'appel est parvenue sur ce point n'est dès lors pas arbitraire.
4.3 En ce qui concerne le respect du délai pour se pourvoir en revision, la cour cantonale s'est fondée sur l'art. 448 LPC/GE, appliqué par analogie. Cette disposition se trouve dans le chapitre consacré à la procédure applicable devant le Tribunal des baux et loyers; elle prévoit que les requêtes et recours adressés à une autorité incompétente sont transmis d'office à la juridiction compétente, l'acte étant alors réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité.
Aux termes de l'art. 32 al. 4 let. b OJ, un délai est considéré comme observé lorsqu'un mémoire qui devait être adressé à une autorité cantonale l'est en temps utile au Tribunal fédéral ou à une autre autorité fédérale; l'acte est alors transmis sans délai à l'autorité compétente (art. 32 al. 5 OJ). Même si la transmission de la demande en revision a eu lieu entre le Tribunal fédéral et une autorité cantonale, ces dispositions ne s'appliquent pas en l'occurrence, en tous les cas pas directement. En effet, elles ne concernent que les mémoires destinés au Tribunal fédéral, comme par exemple le recours en réforme qui, conformément à l'art. 54 al. 1 OJ, doit être adressé à l'autorité qui a statué (Poudret, COJ I, n. 5.5 ad art. 32). La question de savoir si une transmission opérée après l'expiration du délai de recours assure néanmoins la sauvegarde de celui-ci relève ainsi du droit cantonal (Poudret, op. cit., ibid.).
Il n'en demeure pas moins que l'art. 32 al. 4 OJ consacre un principe général valable pour tout l'ordre juridique, et qui s'impose en tout cas aux procédures cantonales lorsque la législation ne contient aucune disposition contraire (ATF 118 Ia 241 consid. 3c p. 244; dans ce sens déjà, Poudret, op. cit., n. 5.8 ad art. 32). En pareille hypothèse, une autorité cantonale ferait preuve de formalisme excessif si elle déclarait irrecevable l'acte déposé auprès d'une autorité incompétente et transmis par cette dernière après l'expiration du délai (cf. ATF 128 IV 137 consid. 3b p. 144).
En l'espèce, aucune disposition de la LPC/GE ou de la loi genevoise sur la juridiction des prud'hommes du 21 juin 1990 en vigueur lors du prononcé de l'arrêt sur rescindant n'interdit expressément de considérer comme intervenu en temps utile le mémoire déposé dans les délais devant une autorité incompétente et transmis ensuite à l'autorité compétente. Dans ces conditions et indépendamment de la référence à l'art. 448 LPC/GE, la Chambre d'appel pouvait sans arbitraire juger comme déterminante pour le respect du délai la date du 16 septembre 1997, jour d'envoi de la demande de révision au Tribunal fédéral.
5.
5.1 En dernier lieu, la recourante reproche à la cour cantonale d'être tombée dans l'arbitraire en qualifiant de «pièce décisive» la lettre de C.________ du 27 juin 1991. En effet, le contenu de ce document serait identique aux déclarations faites par le témoin C.________ lors de la procédure devant le Tribunal des prud'hommes, si bien que la lettre en question ne serait absolument pas propre à modifier l'arrêt attaqué. De plus, dans son arrêt du 11 décembre 1995, la Chambre d'appel aurait, en tout état de cause, écarté le témoignage C.________, car elle aurait tenu pour établi que l'intimée avait renoncé au privilège de la titularisation en signant un contrat de durée déterminée en 1988.
5.2 Selon l'art. 157 let. a LPC/GE, il y a lieu à revision d'un jugement «si, depuis sa prononciation, il a été recouvré des pièces décisives, retenues par une circonstance de force majeure ou par le fait de la partie qui a obtenu le jugement». Dans le cadre d'un examen limité à la causalité abstraite, une pièce sera qualifiée de décisive lorsqu'elle est de nature à modifier le jugement attaqué et à déterminer chez le juge une conviction différente (Bertossa/Gaillard/Guyet, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, tome II, n. 10 ad art. 157; Philippe Schweizer, Le recours en revision spécialement en procédure civile neuchâteloise, thèse Neuchâtel 1985, p. 221).
L'arrêt de la Chambre d'appel du 11 décembre 1995 contient le passage suivant (consid. 2):
«Si lors de son audition du 18 octobre 1995, C.________ a déclaré savoir que A.________ était titularisée sur le vu des éléments de son dossier, il a expliqué qu'il y avait une lettre disant qu'elle était titularisée, tout en ajoutant être relativement formel dans cette affirmation. Une telle nuance apportée aux déclarations du témoin ne permet pas à la Chambre d'appel de considérer que le témoignage de C.________ aurait fourni la preuve de la titularisation de l'appelante.»
Alors que, dans sa déclaration, il avait émis une réserve à propos de la titularisation de A.________, C.________ se montre au contraire catégorique à ce sujet dans la lettre du 27 juin 1991, présentée comme pièce nouvelle. Ce document apporte dès lors un élément nouveau par rapport au témoignage recueilli à l'époque, dont il ne constitue pas une simple répétition.
En ce qui concerne le caractère décisif de la lettre du 27 juin 1991, il est inexact de prétendre, à l'instar de la recourante, que la cour cantonale, dans son arrêt du 11 décembre 1995, aurait admis que l'intimée avait, en tout état de cause, renoncé au privilège de la titularisation en signant le contrat à durée déterminée du 1er septembre 1988. S'il a bien été tenu par le Tribunal des prud'hommes dans son jugement du 12 avril 1994, ce raisonnement a été expressément écarté par la Chambre d'appel; en effet, cette autorité a constaté, au considérant 2 de son arrêt, que la conclusion de contrats de durée déterminée avec des employés titularisés permettait un changement d'affectation à la fin du contrat, sans remettre en cause la titularisation. Le moyen tiré de l'arbitraire se révèle, là aussi, mal fondé.
6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. La recourante prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) et versera à l'intimée A.________ une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ). En revanche, la Caisse de chômage Y.________ ne se verra allouer aucune indemnité puisqu'elle n'a pas procédé devant le Tribunal fédéral.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 10'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires de la recourante et de l'intimée A.________, à l'intimée Caisse de chômage Y.________ ainsi qu'à la Cour d'appel des prud'hommes du canton de Genève.
Lausanne, le 29 août 2002
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: