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Original
 
[AZA 0/2]
8G.66/2000/ROD
CHAMBRE D'ACCUSATION
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5 décembre 2000
Composition de la Chambre: MM. les Juges Nay, Vice-président,
Raselli et Kolly. Greffier: M. Fink.
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Statuant sur le recours
formé par
X.________, représenté par Me François Micheli, avocat à Genève,
contre
la décision incidente rendue le 9 novembre 2000 par l'Office fédéral de la justice (Section extraditions), à Berne, rejetant les demandes du recourant tendant à sa libération immédiate;
(mise en liberté provisoire; art. 47 et 50 al. 3 EIMP)
Considérant en fait et en droit:
1.- X.________, de nationalité néerlandaise, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international (du 2 mai 2000) émis par le Juge d'instruction no 1 de Torremolinos-Malaga, en Espagne, pour enlèvement d'enfants. Il a été arrêté le 21 septembre 2000 dans le canton de Genève. Le 22 septembre 2000, l'Office fédéral de la justice à Berne (abrégé OFJ) a décerné un mandat d'arrêt en vue d'extradition contre le détenu.
2.- Par un arrêt du 20 octobre 2000 (no 8G.53/2000), la Chambre de céans a rejeté le recours du détenu qui proposait que l'OFJ renonce à la détention extraditionnelle moyennant d'autres garanties (caution ou garantie bancaire - dont le montant n'était pas précisé, contrôle régulier par la police, dépôt du passeport, port d'un bracelet électronique). Le risque de fuite en cas de libération a été jugé non négligeable vu la résidence du recourant à Monaco et sa nationalité néerlandaise qui lui permettraient de trouver refuge ou de se déplacer discrètement à l'étranger; de plus, le seul lien déclaré avec la Suisse était la propriété d'un chalet à Gstaad.
3.- Le 2 octobre 2000, le détenu avait demandé à l'OFJ d'être mis en liberté (art. 50 al. 3 EIMP). L'OFJ n'est pas entré en matière sur cette requête en raison de la procédure alors pendante devant la Chambre de céans.
Le 2 novembre 2000, le détenu a déposé une demande de mise en liberté provisoire en main de l'OFJ. Le même jour, il avait été entendu par le Juge d'instruction en charge du dossier dans le canton de Genève; lors de cette audience il avait indiqué prendre connaissance pour la première fois du jugement espagnol attribuant la garde de ses deux filles en bas âge à leur mère. Il s'était derechef opposé à l'extradition.
Le même jour (2 novembre 2000) encore, le détenu a adressé à l'OFJ une "demande d'élargissement sur la base de l'art. 50 al. 1 EIMP" où il invoque des irrégularités de la procédure d'extradition.
4.- A la demande de l'OFJ, le requérant a versé une avance de frais de 500 fr.
5.- Par une décision incidente du 9 novembre 2000, l'OFJ a rejeté les demandes du requérant tendant à sa libération immédiate.
En premier lieu, l'OFJ se réfère à la Convention européenne d'extradition (CEExtr. , RS 0.351. 1), dont l'art. 16 al. 4 n'exige pas des raisons particulières, à la différence de l'art. 50 al. 1 EIMP, pour porter à 40 jours le délai de remise de la demande d'extradition; de plus, les exigences de l'art. 50 al. 1 EIMP seraient également satisfaites dans le cas du requérant.
Quant au risque de fuite, il ne serait pas exclu malgré les nouveaux éléments invoqués (nationalité suisse de deux enfants adultes nés d'un premier mariage, siège bâlois de la société où le requérant exerçait une fonction dirigeante, chalet à Gstaad, offre d'une caution de 1 million de francs suisses et du dépôt des documents d'identité).
Ainsi, la relaxe demandée ne saurait être ordonnée d'autant plus que l'extradition ne serait pas manifestement inadmissible.
Au sujet de l'avance de frais dont le principe est critiqué par le requérant, l'OFJ se réfère à la Loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales (RS 611. 010).
6.- En temps utile, le détenu saisit la Chambre de céans d'un recours contre la décision incidente de l'OFJ du 9 novembre 2000. Principalement, il demande son élargissement immédiat au motif d'une inobservation de l'art. 50 al. 1 EIMP. Subsidiairement, il conclut à sa mise en liberté provisoire, le cas échéant subordonnée à la fourniture de sûretés, le tout sans frais de justice par analogie avec l'art. 219 PPF. Plus subsidiairement, il offre de prouver les faits allégués.
Sur le plan formel, le recourant soutient qu'il a déposé le 2 novembre 2000 une demande de mise en liberté provisoire complémentaire à celle du 2 octobre 2000 et une demande d'élargissement sur la base de l'art. 50 al. 3 EIMP.
En bref, la mise en liberté provisoire se justifierait au regard des art. 47 al. 1 let. a et 47 al. 2 EIMP car le recourant affirme qu'il ne se soustraira pas à l'extradition et n'entravera pas l'action pénale. Il fait valoir ses attaches avec la Suisse (notamment le fait que sa fille de 28 ans, de nationalité suisse, est propriétaire d'un bien immobilier dans le canton de Genève), son casier judiciaire vierge et son âge de 65 ans. Il s'en prend au raisonnement de l'OFJ pour qui la caution favoriserait par trop les personnes disposant de hauts revenus; il souligne que le montant de 1 million de francs équivaut à ses revenus bruts d'une année.
Quant à l'élargissement sur la base de l'art. 50 al. 1 EIMP, il estime que l'Etat requérant n'a pas fait valoir de raisons particulières pour obtenir un délai de40 jours et que la demande déposée dans ce délai était incomplète, donc tardive.
Le recourant s'en prend enfin au principe de l'avance de frais exigée par l'OFJ. Il en conteste la base légale et renvoie à l'art. 50 al. 4 EIMP en liaison avec les art. 53 à 60 PPF; cette pratique défavoriserait les personnes dépourvues de moyens suffisants.
7.- Invité à présenter des observations, l'OFJ conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable, sous suite de frais.
Au sujet de la caution, l'OFP considère notamment que le type de délit reproché au recourant serait de nature à lui apporter une charge émotionnelle importante le poussant à se réfugier avec ses enfants dans un pays où il serait à l'abri d'une nouvelle poursuite et demande d'extradition.
En réponse au grief relatif à l'avance de frais, l'OFP précise qu'une personne disposant de peu de ressources bénéficie de l'assistance judiciaire.
8.- Dans sa réplique, le recourant rejette l'argument de la charge émotionnelle car il a vécu sereinement avec ses enfants en bas âge durant plus de deux ans. Selon lui, le montant de la caution proposée est propre à le dissuader de se soustraire à la procédure d'extradition et représente une lourde charge au regard de ses ressources. Il conteste la légalité de l'avance de frais et persiste dans ses conclusions.
9.- a) Le problème de la légalité de l'avance de frais ne saurait être examiné puisque le recourant a versé le montant demandé. De plus il ne conteste pas la mise à sa charge des frais de la décision attaquée (ch. 2 du dispositif). Il n'a donc plus d'intérêt juridique actuel sur ce point.
b) Le moyen tiré de la tardiveté alléguée de la demande d'extradition se rapporte pour l'essentiel à la procédure d'extradition elle-même; il échappe à la compétence de la Chambre de céans (ATF 117 IV 359 consid. 1b).
Au demeurant, le recourant ne discute pas l'argumentation présentée par l'OFJ à cet égard (respect des obligations découlant de l'art. 50 al. 1 EIMP et de la CEExtr.); il se limite à l'affirmation qu'il n'est pas convaincu. Cela est insuffisant pour faire apparaître la demande comme manifestement inadmissible (art. 51 al. 1 EIMP).
Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
c) Dans l'arrêt du 20 octobre 2000 précité, la Chambre de céans a considéré que le risque de fuite du recourant était suffisamment important pour refuser l'élargissement. On ignorait alors quel montant serait offert à titre de caution et quelles attaches familiales et professionnelles liaient le détenu à la Suisse.
Certes, avec l'OFJ, on peut considérer que le siège de l'ancien employeur du recourant en Suisse ne constitue pas un véritable lien avec notre territoire.
De même, faute de précisions sur le domicile actuel des enfants adultes (de nationalité suisse) du détenu et sur les rapports familiaux avec eux, on ne saurait admettre que ces liens aient pour effet d'exclure le risque de fuite constaté.
En revanche, le montant de la caution de 1 million de francs suisses, allié au dépôt des documents d'identité et à un contrôle de la police paraissent de nature à réduire considérablement le risque de fuite. En effet, il n'est pas contesté que ce montant correspond aux revenus bruts du recourant durant une année et qu'il devra vraisemblablement faire appel à d'autres personnes pour s'en acquitter; compte tenu de l'infraction pénale reprochée, qui touche au droit de la famille et qui n'implique généralement pas une volonté criminelle caractérisée, vu l'âge du détenu, le dépôt d'une caution de cette importance (avec les autres mesures de sûreté) paraît propre à garantir que celui-ci ne se soustraira pas à ses obligations dans la procédure d'extradition. Il est d'ailleurs rappelé qu'une garantie absolue n'est pas exigée.
10.- Le recours est admis en ce sens que l'OFJ est invité à mettre le recourant en liberté dès que celui-ci aura versé une caution de 1 million de francs suisses, déposé ses documents d'identité et se sera engagé à se soumettre au contrôle de sa présence par la police. Les modalités de ces mesures de sûreté (art. 47 al. 2 EIMP) doivent être fixées par l'OFJ, sans délai.
La libération doit intervenir au plus vite.
11.- Il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.
Par ces motifs,
la Chambre d'accusation,
1. Admet le recours et ordonne à l'Office fédéral de la justice de libérer X.________, moyennant le versement par celui-ci d'une caution de un million de francs suisses, le dépôt de ses documents d'identité et l'obligation de se soumettre à un contrôle de présence.
2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.
3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant et à l'Office fédéral de la justice.
__________
Lausanne, le 5 décembre 2000
Au nom de la Chambre d'accusation
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Vice-président,
Le Greffier,