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Original
 
«AZA»
U 313/98 Mh
IIIe Chambre
composée des Juges fédéraux Schön et Spira, Ribaux, suppléant; Berthoud, Greffier
Arrêt du 10 avril 2000
dans la cause
C.________, recourant, représenté par J.________, avocat,
contre
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée,
et
Tribunal cantonal jurassien, Porrentruy
A.- C.________ travaillait comme opérateur sur machines au sein de l'entreprise S.________ SA depuis 1960. Il était assuré contre les conséquences des accidents et des maladies professionnelles auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).
Le 9 novembre 1994, il a rempli une déclaration d'accidents LAA à la suite de douleurs ressenties quelque temps auparavant au talon gauche. Son médecin traitant, le docteur M.________, a diagnostiqué une aponévrite plantaire gauche (rapport du 18 novembre 1994). Il a mis cette affection en relation avec l'activité professionnelle de son patient, ce dernier ayant effectué les mêmes mouvements du pied (appui sur une pédale) plusieurs centaines de fois par jour durant les 36 années qu'il a passées au service de son employeur.
Se fondant sur l'avis du docteur P.________, médecin d'arrondissement, qui estimait que l'affection n'était pas due au travail (rapports des 10 et 17 octobre 1995), la CNA a nié tout droit aux prestations d'assurance, par décision du 17 janvier 1996.
A la suite de l'opposition formée par son assuré, la CNA a soumis le dossier à sa division médicale. Le docteur K.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a confirmé et étayé l'avis de son confrère P.________ (rapport du 5 juillet 1996). En conséquence, la CNA a rejeté l'opposition, par décision du 19 juillet 1996.
B.- C.________ a recouru contre cette décision sur opposition devant la Chambre des assurances du Tribunal cantonal jurassien, qui l'a débouté par jugement du 4 octobre 1998.
C.- L'assuré interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, avec suite de dépens. Il conclut au renvoi de la cause aux premiers juges, afin que ceux-ci mettent en oeuvre une expertise permettant de déterminer si l'aponévrite plantaire dont il souffre est bien d'origine professionnelle, comme le docteur M.________ l'affirme.
L'intimée conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.
Considérant en droit :
1.- Il s'agit de déterminer si l'aponévrite plantaire gauche dont souffre le recourant a été causée de façon prépondérante (75 % au moins) par l'exercice de son activité professionnelle (art. 9 al. 2 LAA; ATF 116 V 142 consid. 5a et les références).
2.- Dans la procédure de recours concernant l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral des assurances n'est pas limité à la violation du droit fédéral - y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation - mais s'étend également à l'opportunité de la décision attaquée. Le tribunal n'est alors pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction inférieure, et il peut s'écarter des conclusions des parties à l'avantage ou au détriment de celles-ci (art. 132 OJ).
3.- Pour l'intimée et les premiers juges, l'avis du docteur K.________ emporte la conviction : selon ce praticien, l'aponévrite plantaire est essentiellement due au vieillissement et, en tous les cas, le seul facteur professionnel ne peut être considéré comme nettement prépondérant au sens de la loi.
En revanche, pour le recourant, l'opinion de ce spécialiste, qui ne l'a pas examiné, est purement théorique et ne tient pas compte des particularités de son cas : l'atteinte s'est manifestée après 36 ans d'un travail pénible et répétitif ayant mis à forte contribution le talon.
4.- a) En l'espèce, le rapport d'expertise du docteur K.________ du 5 juillet 1996 remplit toutes les conditions auxquelles la jurisprudence précitée soumet la valeur probante d'un tel document (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références).
Il sied à cet égard de constater que l'appréciation médicale du docteur K.________, dans un domaine où des contradictions subsistent entre spécialistes, est particulièrement documentée. Ses recherches lui permettent d'affirmer, d'une manière crédible, que le facteur étiologique essentiel de l'affection, chez une personne âgée, est l'atrophie du tissu adipeux. Ce point n'est d'ailleurs pas contesté en tant que tel par le recourant. Contrairement à ce qu'affirme celui-ci, le docteur K.________ a pris en compte son activité professionnelle particulière : après avoir rappelé que l'affection, chez des personnes plus jeunes, pouvait être due, notamment, à une activité sportive spécifique (course à pied ou saut), responsable de micro-traumatismes répétitifs, il a nié un rôle comparable à l'appui sans cesse répété de l'avant-pied sur une pédale.
b) Il est vrai que le membre touché est précisément celui qui était soumis à des contraintes particulières. Cela ne suffit pourtant pas à rendre vraisemblable que le facteur de l'activité professionnelle est responsable de l'atteinte constatée, à hauteur de 75 % au moins.
A titre d'exemple, depuis la fixation du seuil à 75 % (ATF 114 V 109), le TFA a notamment examiné, sous l'angle de l'art. 9 al. 2 LAA, le cas d'un aide en salle opératoire victime d'un syndrome vertébral dorsal (ATF 116 V 136) et celui d'une altiste atteinte d'épicondylite (RAMA 1999 n° U 326 p. 106), niant dans les deux cas l'existence d'une maladie professionnelle. De son côté, Maurer relève que les conditions d'application de l'art. 9 al. 2 LAA ne sont susceptibles d'être remplies qu'en de rares situations, compte tenu des exigences posées (Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, p. 222).
c) Dans ces conditions, l'avis du docteur M.________, selon lequel son patient est probablement victime d'une maladie professionnelle, ne suffit pas à créer un doute. En particulier, le médecin traitant n'a pas pris position sur les autres facteurs possibles (notamment l'âge).
5.- Cela étant, en l'absence d'éléments importants dont il n'aurait pas été tenu compte ou qui mettraient en doute les conclusions des spécialistes de la CNA, tout examen supplémentaire se révèle superflu.
En conclusion, c'est à bon droit que la CNA a rejeté la demande de prestations du recourant.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
p r o n o n c e :
I. Le recours est rejeté.
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal cantonal jurassien, Chambre des assurances, et à
l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 10 avril 2000
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :
Le Greffier :